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dimanche 30 novembre 2025

Didier Folléas : “Jusqu’à sa disparition, Abderrahim Berrada a maintenu ses convictions”

Figure majeure des droits humains au Maroc, Abderrahim Berrada a laissé une parole riche et profonde pour comprendre les années de plomb et les combats démocratiques. À l’approche de la parution, le 10 décembre, de Paroles libres pour l’Histoire, Didier Folléas, auteur de l’ouvrage et interlocuteur privilégié de Me Berrada durant près de vingt ans, revient sur l’itinéraire d’un avocat resté fidèle à ses convictions et à sa conception exigeante de la justice et de la liberté.

 Jade Abanouas, Maroc-Hebdo, 28/11/2025

Parmi les militants de sa génération, beaucoup se sont battus pour les libertés et la justice. Pourquoi Abderrahim Berrada se distinguait-il si nettement dans ce combat pour les droits humains et l’État de droit, et qu’est-ce que cet homme vous inspire, à vous, personnellement ?


Je commencerai par la fin de votre question. J’ai rencontré Abderrahim Berrada peu de temps après mon arrivée à Casablanca, en 1987. Je connaissais peu de choses sur le Maroc, ce pays m’a fasciné et j’ai éprouvé le besoin d’en apprendre beaucoup plus. Le hasard m’a d’abord fait connaître Adil Hajji, brillant intellectuel qui m’a mis en contact avec Me Berrada. J’ai été très impressionné par sa culture, son parcours personnel, son courage en tant qu’avocat, par son sens de la dignité de l’être humain et son exigence de justice. De ces rencontres est née l’idée d’un livre d’entretiens. Je tiens d’ailleurs à préciser que feu Abderrahim Berrada en est l’auteur principal. Je n’ai fait que recueillir ses propos avec toute sa confiance et sans renoncer à mon recul critique. Quant à la première partie de votre question, je risque d’oublier beaucoup de noms. Alors, spontanément, je citerai plusieurs avocats tels Me Abderrahim Bouabid, Me Abderrahman Benameur ou Me Abelaaziz Bennani. J’ai aussi une pensée pour Omar Benjelloun, en tant que militant et qui fut son ami. J’évoquerai encore Me Abderrahim Jamaï avec lequel il a longtemps travaillé. Il faut aussi mentionner les militants de l’Association marocaine des droits humains. Alors, en quoi Abderrahim Berrada s’est-il distingué par rapport à d’autres ? Il aurait été gêné par cette question car il ne se sentait supérieur à personne. Je dirais qu’au-delà de sa rigueur, et de sa grande technicité en tant que juriste, il a su maintenir ses convictions des années 1960 jusqu’au début des années 2020. Il l’a payé cher, d’ailleurs.

Que révèle la trajectoire de sa vie sur l’histoire politique du Maroc ? Son parcours permet-il de bien comprendre les années de plomb, le fonctionnement réel de la justice en ce temps ?


La mémoire d’Abderrahim Berrada est très utile dans la mesure où elle rend compte, par le récit de ses expériences vécues, des attentes démocratiques d’une grande partie des Marocaines et des Marocains depuis la résistance à la colonisation jusqu’au règne de Hassan II. Ses souvenirs témoignent encore de manière circonstanciée des méthodes de répression qui ont brisé ces attentes. Au fil de ses mots, on revit ses rencontres avec Ben Barka, Omar Benjelloun, Bouabid, Assidon, Serfaty et bien d’autres. Dans ce livre, on le voit en action comme avocat plongé au coeur des grands procès des années 70 et 80. Avec lui, on ressent la dureté avec laquelle les prévenus politiques ont été traités. Ajoutons qu’Abderrahim Berrada apporte plusieurs informations peu connues sur tel ou tel événement important. À ce titre, le récit qu’il fait de son contact téléphonique avec le ministre de l’Intérieur Driss Basri, la veille de l’expulsion de Serfaty, est assez hallucinant. Enfin, son point de vue sur les reniements de certaines personnalités est aussi intéressant. Par ailleurs, en tant que juriste confronté à la pratique judiciaire des « années de plomb », il expose les dysfonctionnements d’une justice soumise au pouvoir politique. De plus, orateur hors pair et technicien aguerri du droit, l’avocat Berrada révèle les stratégies de défense auxquelles il a recouru. Par exemple, le récit qu’il fait des actions pour obtenir le retour d’Abraham Serfaty est édifiant. Un dernier mot : Abderrahim Berrada nous donne encore à réfléchir en proposant ses analyses du passé et ses espoirs pour demain.

Pourquoi a-t-il refusé le poste de ministre de la Justice ? Que cherchait-il à préserver en disant non : son indépendance, la cohérence de son engagement, ou une conception exigeante du métier d’avocat ?


Effectivement, après la tentative de putsch de 1971, les partis de la Koutla ont proposé à Abderrahim Berrada d’être sur la liste des ministrables, bien qu’il ne fût encarté nulle part. Les partis négociaient alors avec Hassan II en vue d’un gouvernement de transition. Il raconte cet épisode de manière drôle et vivante. Comme il a refusé de candidater au poste ministériel, chacun s’y est mis pour tenter de le convaincre : l’avocat Ali Benjelloun, proche de Guédira, puis Mahjoub Ben Seddik, secrétaire général de l’UMT, puis Abderrahim Bouabid, haut cadre de l’UNFP… Mais, Me Berrada est resté ferme sur sa position. Alors, pourquoi? Sans doute pour les trois raisons que vous avancez vous-même. En fait, il préférait le positionnement d’avocat militant de base. De plus, il était convaincu que Hassan II ne lui laisserait aucune liberté d’action. Enfin, je pense qu’il ne croyait pas dans la longévité de ce gouvernement de transition. La suite lui a donné raison.

Dans «Plaidoirie pour un Maroc laïque», Me Berrada fait de la séparation entre religion et pouvoir un enjeu central de la démocratie. En quoi considérait-il la laïcité comme une condition indispensable pour garantir les libertés au Maroc ?


Abderrahim Berrada estimait que seule la laïcité permet de respecter la liberté de conscience, constitutive des droits humains fondamentaux. Dans la mesure où il pensait que la démocratie ne peut advenir sans la consolidation de ces mêmes droits et libertés, il faisait donc de la laïcité l’une des conditions nécessaires de l’approfondissement de celle-ci. Dans la préface du livre que vous citez, la journaliste Hinde Taarji rappelle que l’intention d’Abderrahim a été d’ouvrir un débat utile à ses yeux, avec vigueur, précision juridique et respect.


À paraître le 10 décembre chez




samedi 29 novembre 2025

Economía del genocidio Économie du génocide Economics of the genocide اقتصاد الإبادة

 


Les pensions d’un Norvégien ou d’une Canadienne peuvent-elles contribuer au génocide à Gaza ?

Voici un nouvel épisode de l’économie du génocide, une série destinée à résumer le rapport de la rapporteuse des Nations unies, Francesca Albanese. Le génocide ne s’exécute pas seulement : il se finance. Et sans cet argent public et privé, la machine d’occupation ne pourrait pas se maintenir un seul jour.
Ces entreprises financent la dette israélienne, permettant son niveau exorbitant de dépenses en armement.
L’Union européenne ne peut pas continuer d’en être complice à travers ses banques, ses investissements ou son inaction politique.
Partagez cette vidéo pour que ne soit pas dissimulé le cheminement de l’argent qui alimente l’occupation.

Des banques comme BNP ou Barclays, des fonds d’investissement comme BlackRock, ainsi que d’autres entreprises internationales comme Vanguard ou Allianz, canalisent du capital vers des projets directement liés à des violations des droits humains, à la construction de colonies, à l’infrastructure militaire, à la surveillance de masse ou à l’exploitation de ressources volées.

Mais il n’y a pas que le secteur privé. Les fonds de pension du gouvernement norvégien ou du Québec investissaient dans certaines entreprises mentionnées dans le rapport — même si, bonne nouvelle, le Fonds norvégien a rectifié.

Albanese explique également comment la diaspora ultra-orthodoxe et des organisations de colons reçoivent des dons de plusieurs millions provenant des États-Unis et d’Europe, déductibles des impôts et destinés à maintenir et étendre les colonies illégales.

Quand nous parlons de génocide, nous parlons aussi de ceux qui le financent.

هل يمكن لمعاش تقاعدي يخصّ نرويجياً أو كندية أن يساهم في الإبادة الجماعية في غزة؟
هذه حلقة من سلسلة اقتصاد الإبادة الجماعية التي تلخّص تقرير مقررة الأمم المتحدة الخاصة، فرانشيسكا ألبانيزي. فالإبادة لا تُنفَّذ فحسب، بل تُموَّل أيضاً. ومن دون هذا المال العام والخاص، ما كانت آلة الاحتلال لتصمد يوماً واحداً.

بنوك مثل BNP وBarclays، وصناديق استثمارية مثل BlackRock، وشركات دولية أخرى مثل Vanguard وAllianz، توجّه رؤوس أموال نحو مشاريع مرتبطة مباشرة بانتهاكات حقوق الإنسان، وبناء المستوطنات، والبنية التحتية العسكرية، والمراقبة الشاملة، واستغلال الموارد المنهوبة.
هذه الشركات تموّل الدين الإسرائيلي وتتيح له مستوى إنفاق عسكرياً هائلاً.

وليس القطاع الخاص وحده المعني. فصناديق التقاعد التابعة لحكومتي النرويج وكيبك كانت تستثمر في شركات ورد ذكرها في التقرير — مع الإشارة إلى خبر جيّد: الصندوق النرويجي تراجع عن ذلك.

كما تشرح ألبانيزي كيف تتلقى الجاليات اليهودية المتشددة ومنظمات المستوطنين تبرعات بملايين الدولارات من الولايات المتحدة وأوروبا، تُخصم من الضرائب وتُخصَّص لدعم المستوطنات غير القانونية وتوسيعها.

عندما نتحدث عن الإبادة الجماعية، فإننا نتحدث أيضاً عن الذين يموّلونها.
ولا يمكن للاتحاد الأوروبي أن يستمر في التواطؤ عبر مصارفه واستثماراته أو عبر تقاعسه السياسي.
انشروا هذا الفيديو حتى لا يُخفى مسار الأموال التي تغذّي الاحتلال.

Can the pensions of a Norwegian man or a Canadian woman contribute to the genocide in Gaza?

This is an installment of the economics of genocide, a series summarizing the report of the UN Special Rapporteur, Francesca Albanese. Genocide is not only carried out — it is also financed. And without this public and private money, the machinery of occupation could not last a single day.
Banks such as BNP and Barclays, investment funds like BlackRock, and other international companies such as Vanguard or Allianz channel capital into projects directly linked to human rights violations, settlement construction, military infrastructure, mass surveillance, or the exploitation of stolen resources.
These companies are financing Israeli debt, enabling its exorbitant military spending.
When we speak of genocide, we are also speaking of those who finance it.
The European Union cannot continue to be complicit through its banks, its investments, or its political inaction.
Share this video so that the flow of money feeding the occupation is not hidden.

But it is not only the private sector. The pension funds of the Norwegian and Quebec governments were investing in companies mentioned in the report — though, good news, the Norwegian Fund has now reversed course.

Albanese also explains how the ultra-Orthodox diaspora and settler organizations receive multimillion-dollar donations from the United States and Europe, tax-deductible and aimed at sustaining and expanding illegal settlements.

vendredi 28 novembre 2025

Paris, 28-29 novembre 2025 : 49ème Conférence européenne de coordination du soutien au peuple saharoui



Programme prévisionnel de la 49e EUCOCO

28 novembre 2025 : Rencontre interparlementaire

Horaires :

  • 14h15-14h45 Inscriptions et distribution des casques
  • 14h45-15h00 Introduction P. Galand – Front Polisario
  • 15h00-15h45 Panel 1 – La spoliation des ressources naturelles
  • 16h15-17h00 Panel 2 – La responsabilité de l’ONU, de l’UE, de la France et de l’Espagne en particulier
  • 19h Diner

29 novembre 2025 : Plénière EUCOCO

Bourse du Travail – 29 boulevard du Temple – 75003 Paris

Horaires :

  • 8h45- 9h30 Inscriptions et accès à la salle ;
  • 9h30-10h00 Introduction du Front Polisario et de la Task Force EUCOCO
  • 10h00-11h00 Panel 1 – Respect des droits fondamentaux du peuple sahraoui : responsabilité de la communauté internationale et de la France
  • 11h00-12h00 Panel 2 – Rapport des propositions de programme d’action par les 4 ateliers : politique et information, droits de l’homme, construction de l’État sahraoui et ressources naturelles
  • 12h00-13h00 Panel 3 – mobilisation citoyenne en Europe : l’exemple de la Marche pour la libération des prisonniers politiques sahraouis
  • 13h00-14h00 Pause sandwichs
  • 14h00-15h30 débat stratégique :
    • 1ére partie – la résistance multiforme du peuple sahraoui
    • 2e partie – les réponses du mouvement de solidarité aux 50 ans d’occupation
    • L’application des arrêts de la Cour de justice de l’UE
  • 15h30 -16h00 Pause-café
  • 16h00 -17h00 Conclusions par le Front Polisario et par la Task Force
  • 17h Départ pour la manifestation de soutien au peuple sahraoui.

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jeudi 27 novembre 2025

Les preuves s’accumulent contre le ministre Berrada

 Jalil Nouri, actu-maroc, 27/11/2025

Une nouvelle tournure vient d’être prise dans les derniers développements de l’affaire de conflit d’intérêts visant le ministre de l’Éducation nationale, Saad Berrada, qui avait nié toute intervention ou lien avec l’attribution d’un marché public. Mais le chef du groupe parlementaire du PJD, Abdellah Bouanou, à l’origine de l’éclatement du scandale, est revenu à la charge, bien décidé à ne rien lâcher.

Preuves à l’appui, et contrairement aux déclarations du ministre, ce dernier figure toujours au registre du tribunal de commerce en tant que PDG et administrateur du laboratoire Pharmaprom, dans lequel il est devenu actionnaire. Cette situation intervient au moment même où l’entreprise a obtenu d’importants marchés publics, dont le dernier — à l’origine de la polémique — concerne l’achat de chlorure de potassium par le ministère de la Santé. Des révélations qui ont mis Saad Berrada et le gouvernement dans l’embarras. Certes, le ministre a fait remplacer son nom par celui de son frère, mais cela ne change rien au fond : la contradiction entre ses déclarations et sa position réelle ne fait qu’aggraver son cas, d’autant que le chiffre d’affaires de l’entreprise a récemment explosé.

Parallèlement, l’affaire relance le débat sur l’obligation pour les membres du gouvernement, y compris le chef de l’exécutif, de respecter les lois les obligeant à déclarer leurs biens en toute transparence lors de leur prise de fonction et à signaler de bonne foi tout transfert effectué à des proches ou à des tiers.

L’attribution de marchés publics par le ministre de la Santé à son collègue du même parti, le RNI, continue ainsi d’empoisonner les débats au Parlement. Au lieu de se concentrer sur les réformes et les projets de loi, c’est désormais l’affaire Berrada qui monopolise toutes les discussions.

mercredi 26 novembre 2025

Contrats taillés sur mesure : 13 établissements publics dans le collimateur de l’Inspection générale des finances

actu-maroc, 25/11/2025

Le système des marchés publics est de nouveau dans le viseur. Des équipes de l’Inspection générale des finances (IGF) ont, au détour de missions de contrôle de routine, mis au jour des indices sérieux de favoritisme et de quasi-monopole dans l’attribution de contrats au sein de plusieurs établissements et entreprises publics. Treize institutions et leurs annexes seraient concernées, avec, à la clé, une concentration suspecte de marchés de services, de fournitures, de maintenance et de travaux renouvelables entre les mains d’un nombre restreint de sociétés.

En épluchant les comptes et les services des achats, les inspecteurs ont constaté la récurrence des mêmes noms d’entreprises sur les listes des bénéficiaires. Certaines sont liées, selon les premières vérifications, à des proches de ministres, de hauts responsables ou d’élus influents. La plupart de ces contrats ont été passés via des bons de commande, un mécanisme moins encadré que les appels d’offres classiques, ce qui renforce les soupçons de contournement des règles.

Des audits internes de deux grandes institutions publiques, consultés par l’IGF, pointent, eux, des cahiers des charges rédigés avec des critères « sur mesure », défavorisant délibérément des concurrents. Plusieurs d’entre eux ont d’ailleurs déposé plainte auprès du ministère de l’Économie et des finances, de la Commission nationale des marchés publics et du Médiateur du Royaume.

Dans certains cas, une seule société a raflé des contrats dans des domaines aussi variés que la maintenance technique, la fourniture de transformateurs électriques, le nettoyage ou encore le marketing digital, et ce malgré des rapports défavorables sur la qualité de ses prestations et des retards répétés.

Les inspecteurs se penchent aussi sur des pratiques plus sophistiquées : spécifications techniques irréalistes ou références introuvables sur le marché, permettant d’annuler ensuite le marché et de le relancer au bénéfice de prestataires ciblés. À terme, ces constats pourraient déboucher sur des mesures correctives, des sanctions administratives et des poursuites judiciaires, dans un dossier qui remet au premier plan l’exigence de transparence et de probité dans la commande publique.

mardi 25 novembre 2025

Das Rätsel Mohammed VI.
Eine sechsteilige Serie von Christophe Ayad und Frédéric Bobin

Sechsundzwanzig Jahre nach seiner Machtübernahme bleibt der marokkanische Herrscher eine komplexe Persönlichkeit, deren Verhältnis zur Macht immer wieder Fragen aufwirft. Während sich allmählich die Frage nach seiner Nachfolge stellt, zeichnet „Le Monde“ in einer Artikelserie seinen Werdegang nach.

Inhaltsverzeichnis

1.         In Marokko herrscht eine Atmosphäre des Endes der Herrschaft Mohammeds VI. 

2.        Mohammed VI., eine Jugend im Schatten von Hassan II. 

3.        Mohammed VI., der Monarch der unvollendeten Reformen 

4.        Mohammed VI., König der großen diplomatischen Manöver  

5.        Mohammed VI., der Makhzen und die Kunst der Palastgeheimnisse

6.         Mohammed VI., der Islam und die Islamisten 




 

lundi 24 novembre 2025

La médiation tripartite de la Mauritanie, de la Tunisie et de la Libye pour relancer le dialogue entre l’Algérie et le Maroc

  Forum maghrébin pour le dialogue, 20/11/2025

الوساطة الثلاثية لموريتانيا وتونس وليبيا في تفعيل الحوار بين الجزائر والمغرب  

The Tripartite Mediation of Mauritania, Tunisia, and Libya in Activating Dialogue Between Algeria and Morocco 

La stabilité dans la région maghrébine constitue aujourd’hui l’un des défis les plus importants auxquels sont confrontés les peuples et les gouvernements, dans un contexte de tensions persistantes entre l’Algérie et le Maroc et d’effets politiques, économiques et sécuritaires qui affaiblissent les perspectives d’intégration commune. Dans cette optique, la médiation maghrébine devient une nécessité urgente plutôt qu’un choix de confort, car l’avenir de la région dépend désormais directement de sa capacité à gérer ses différends internes avec un esprit collectif capable de dépasser les calculs étroits. C’est dans ce cadre que se dessine le rôle que peuvent jouer les trois pays du Maghreb—la Mauritanie, la Tunisie et la Libye—en tant qu’acteurs relativement neutres, dotés de spécificités qui en font un pont naturel entre l’Algérie et le Maroc.

La Mauritanie occupe aujourd’hui une position centrale dans toute vision de médiation régionale, notamment grâce à sa stabilité politique relative dans un environnement régional agité. Malgré les défis économiques et de développement, Nouakchott continue d’entretenir des relations équilibrées et apaisées avec l’Algérie et le Maroc, sans hériter des tensions accumulées qui pourraient la placer dans le camp de l’un ou l’autre. Cet équilibre, soutenu par une diplomatie discrète et pragmatique, confère à la Mauritanie une capacité singulière à agir sans provoquer de sensibilités. Sa position prudente et mesurée concernant la question du Sahara occidental renforce davantage son image d’acteur neutre cherchant la stabilité plutôt que l’alignement, ouvrant la voie à l’acceptation de ses initiatives comme relevant d’un intérêt maghrébin partagé. Par ailleurs, la géographie mauritanienne joue un rôle majeur : située au carrefour de l’Algérie, du Maroc et du Sahel, sa sécurité interne est étroitement liée à la stabilité de ses voisins, lui offrant ainsi une motivation objective pour réduire les tensions et rapprocher les points de vue dans une vision plus large de stabilité régionale.

La Tunisie, quant à elle, demeure un atout important dans tout effort de médiation maghrébine, malgré les circonstances politiques et économiques actuelles. La diplomatie tunisienne conserve un long héritage de modération et de recherche du consensus, un héritage qui lui confère une capacité morale à servir de facilitateur entre des positions divergentes. La société tunisienne, avec son dynamisme civil et culturel, continue d’exprimer des valeurs de dialogue et d’ouverture, indispensables à toute démarche visant à créer un terrain commun entre l’Algérie et le Maroc. La simple participation de la Tunisie à un processus de médiation lui donne une portée symbolique particulière, car elle a toujours été l’une des principales défenseures de l’espace maghrébin commun et constitue un pont culturel et politique entre le Maghreb et le Machrek. Sa présence rassure les deux parties et confirme que le dialogue n’est pas une concession mais un retour à l’esprit de coopération qui a fondé le projet de l’Union du Maghreb arabe.

La Libye, malgré les divisions institutionnelles et les défis sécuritaires qu’elle traverse, apporte elle aussi une importance stratégique et symbolique indéniable lorsqu’elle est associée à un effort de médiation. Elle reste une composante essentielle du système maghrébin, et sa participation—même minimale—traduit la volonté d’élaborer une approche globale qui n’exclut aucune partie mais implique l’ensemble des acteurs maghrébins dans la construction d’un nouveau cadre de dialogue. Par sa position géographique et l’imbrication de ses dossiers sécuritaires avec ceux de ses voisins, la stabilité de la Libye est indissociable de celle de toute la région. L’intégration de la Libye dans un processus de rapprochement entre l’Algérie et le Maroc élargit le cercle du consensus et confère à l’initiative une dimension collective, permettant à chacun de se sentir partie prenante de la solution et non simple observateur du différend entre deux États centraux.

La convergence des rôles de la Mauritanie, de la Tunisie et de la Libye peut constituer un levier réel pour lancer un nouveau processus fondé sur la construction progressive de la confiance entre l’Algérie et le Maroc, à travers des mesures simples et graduelles, sans s’attaquer d’emblée aux dossiers complexes. L’objectif prioritaire n’est pas de résoudre toutes les questions, mais de créer un climat propice à la réouverture des canaux de communication et à l’apaisement des tensions politiques et médiatiques, en préparation d’un dialogue plus large inscrit dans une vision commune de relance du projet maghrébin. Les expériences internationales ont montré que les médiations régionales—lorsqu’elles sont multilatérales et adaptées aux spécificités locales—sont plus durables et mieux acceptées que les initiatives individuelles ou les pressions externes.

Le Forum maghrébin pour le dialogue, en tant qu’espace dédié au rapprochement des points de vue et à la promotion de la culture du dialogue, estime que le rôle pivot que peuvent jouer les trois pays du Maghreb—la Mauritanie, la Tunisie et la Libye—dans une médiation collective repose sur une neutralité relative et un équilibre responsable. Il s’appuie sur un capital diplomatique et une expérience régionale qui leur permettent de créer les conditions favorables à la réouverture des canaux de communication entre l’Algérie et le Maroc. Le succès de cette initiative n’est pas uniquement symbolique : il constitue une entrée concrète vers la reconstruction de la confiance entre les deux pays, la relance de coopérations paralysées depuis des années et l’élaboration d’une vision commune capable de renforcer la cohésion de la région et d’en préserver la stabilité. Dans le contexte actuel, l’apaisement et la reprise des relations entre l’Algérie et le Maroc deviennent la pierre angulaire de la réorganisation de l’espace maghrébin, et une condition nécessaire pour permettre aux peuples de la région d’aspirer à un avenir plus stable, équilibré et harmonieux.

dimanche 23 novembre 2025

Le ministre de la Santé dans la tourmente après le drame du tramway à Rabat
Polémique sur un possible conflit d'intérêts

 actu-maroc, 22/11/2025

Son dernier cauchemar vient de se matérialiser : la mort d’un bébé dans un tramway de Rabat, suite à un accouchement imprévu qui a viré au drame. Un choc terrible pour le ministre de la Santé, Amine Tahraoui, arrivé au gouvernement à l’occasion du dernier remaniement. Sa nomination, largement attribuée à sa proximité avec la femme du chef du gouvernement, Aziz Akhannouch, dont il fut cadre et collaborateur dans le secteur des cosmétiques, continue d’alimenter les interrogations.

Tahraoui

Depuis sa prise de fonctions, Tahraoui a passé plus de temps à éteindre des incendies, gérer des crises et négocier avec des syndicats exaspérés qu’à engager une véritable restructuration d’un système de santé déjà en déliquescence. Un secteur qui a cristallisé la colère de la Génération Z ces derniers mois, au point d’ébranler sérieusement la majorité et de mettre en péril la stabilité du gouvernement qu’il venait d’intégrer.

Après le scandale de l’hôpital d’Agadir marqué par des décès inexpliqués, souvent attribués à l’incompétence et au laisser-aller administratif , voilà désormais le jeune ministre rattrapé par une affaire autrement plus explosive : un possible conflit d’intérêts lié à l’attribution d’un marché public. Une affaire portée au grand jour par le PJD, soucieux de fragiliser la fin de mandat d’Akhannouch et d’alimenter sa propre base militante à l’approche des élections.

Berrada

Mais le dossier dépasse Tahraoui. Un autre ministre, Saad Berrada, en charge de l’Éducation nationale et lui aussi proche d’Akhannouch, serait indirectement bénéficiaire du marché controversé. Déjà sous le feu des critiques des syndicats pour sa gestion du secteur éducatif, le ministre voit à son tour son nom mêlé à ce scandale, ajoutant de la tension dans un exécutif déjà malmené.

Deux ministres, deux secteurs vitaux, et un même constat : les scandales éclipsent les réalisations. Il faut toutefois reconnaître à Tahraoui un début de nettoyage dans certains hôpitaux et une volonté affichée de s’attaquer prochainement aux abus des cliniques privées. Reste une question brûlante : sera-t-il encore en poste pour mener ces réformes, ou bien la tempête du marché du chlorure de potassium finira-t-elle par l’emporter ?

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samedi 22 novembre 2025

Propagande d'État marocaine à Paris : la Belleviloise doit rendre des comptes

MISE À JOUR
Suite à de nombreuses protestations, la Bellevilloise a finalement décidé de ne pas organiser l’événement. Dont acte

Centre d’analyse du Sahara Occidental, 11/11/2025
Le Centre d’analyse du Sahara Occidental (CASO) alerte sur la tenue, le 23 novembre 2025 à La Bellevilloise (Paris 20ᵉ), d’un événement organisé par Al Qantara @Alqantara_ et Mystic Diapo, présenté comme une célébration du cinquantenaire de la Marche verte.

Sous couvert de culture, d’art et de gastronomie, cette manifestation constitue une opération de propagande politique orchestrée par des relais du régime marocain en France, visant à légitimer l’occupation militaire du Sahara Occidental, en violation du droit international et des décisions des Nations unies et de la Cour de justice de l’Union européenne. Un détournement du droit international La « Marche verte » de 1975, présentée ici comme un « devoir patriotique », fut en réalité une opération de conquête coloniale déclenchée alors que la Cour internationale de Justice venait de confirmer l’absence de tout lien de souveraineté entre le Maroc et le Sahara Occidental (Avis du 16 octobre 1975). Cinquante ans plus tard, cette instrumentalisation mémorielle cherche à normaliser une situation illégale et à influencer les diasporas maghrébines sous couvert de folklore culturel. La responsabilité de la Ville de Paris

Le CASO rappelle que La Bellevilloise, exploitée par la société ORIZA, a bénéficié en 2024 d’une subvention municipale de 10 000 € accordée par la Ville de Paris (délibération 2024 DAC 75). Il est inacceptable qu’un lieu soutenu par des fonds publics serve de tribune à une propagande d’État contraire aux principes de la Charte des Nations unies et au droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. Le CASO interpelle Madame la Maire de Paris et son adjointe à la culture pour :

  • clarifier les conditions d’octroi et d’usage de cette subvention ;
  • rappeler la neutralité politique exigée des structures culturelles subventionnées ;
  • condamner publiquement l’utilisation d’un espace parisien pour une célébration d’occupation coloniale.

Nos rappels de droit

  • Le Sahara Occidental demeure un territoire non autonome selon l’ONU ;
  • L’arrêt CJUE du 4 octobre 2024 a confirmé que le Maroc n’a aucune souveraineté ni mandat d’administration sur ce territoire ;
  • L’exploitation économique, culturelle ou symbolique du Sahara Occidental par le Maroc constitue une violation du droit international.
  • La lutte pour la vérité historique et le respect du droit international ne sauraient être dévoyées par la diplomatie de la désinformation.