Blog du Réseau de solidarité avec les peuples du Maroc, du Sahara occidental, de Palestine et du monde, créé en février 2009 à l'initiative de Solidarité Maroc 05, AZLS et Tlaxcala
Mohammed Fizazi | Ayoub Mouhyiddine, SNRT News, 5/12/2025
Le documentaire "Fatna, une femme nommée Rachid", réalisé et écrit par Hélène Harder, retrace le parcours de Fatna El Bouih, ancienne détenue politique marocaine des années 1970, aujourd’hui figure engagée du militantisme pour les droits humains. Projeté lors de la 22ᵉ édition du Festival international du film de Marrakech, le film explore le lien entre passé et présent à travers l’expérience de cette militante, survivante de la détention arbitraire et de la torture.
Le titre du film s’inspire directement du livre-témoignage de Fatna El Bouih, dans lequel elle raconte comment ses tortionnaires lui avaient attribué un nom masculin, "Rachid". Pour Fatna El Bouih, cette assignation révèle l’incapacité des bourreaux à reconnaître une femme comme acteur politique. L’arrestation touchait le corps d’une femme, mais refusait de lui reconnaître sa présence en tant que telle. Cette pratique, relevée dans le contexte marocain, illustre une représentation qui considérait les femmes comme fragiles, faibles, et largement exclues des combats démocratiques d’alors.
Hélène Harder souligne, dans un entretien avec SNRTnews la portée historique de la génération de Fatna, première à revendiquer publiquement une prise de position politique féminine. Si les femmes ont toujours participé aux luttes, leur engagement n’était que rarement reconnu comme tel. Le film met ainsi en lumière une génération qui affirmait sa volonté de contribuer pleinement au rêve de changement.
Pour articuler cette mémoire avec le présent, Hélène Harder s’appuie notamment sur Casablanca, en mêlant images du cinéma marocain des années 1970 et scènes contemporaines suivant Fatna dans ses activités militantes. Cette double narration permet de donner à voir la continuité de son parcours : un chemin qui, malgré un traumatisme profond, s’oriente vers l’avenir, la lumière et la transformation sociale.
Le film s’attarde en particulier sur l’implication de Fatna au sein de l’association Relais Prisons-Société. La réalisatrice explique avoir choisi de filmer les séances de cinéma organisées en milieu carcéral, perçues comme une métaphore de son combat: des portes fermées, l’obscurité, puis la lumière qui surgit. Pour Fatna, ces espaces donnent aux jeunes détenus une possibilité d’expression différente, à travers l’image et la vidéo, des outils ayant un impact fort sur leur vie et leur trajectoire.
Les activités menées dans les prisons visent à offrir aux jeunes un lieu d’échange et de parole, complémentaire des ateliers de formation et de scolarisation existants. La démarche cherche à valoriser leur capacité à raconter leur vécu et à devenir "de bons héros", selon Fatna, plutôt que de rester associés à l’exclusion sociale qui les entoure.
La projection à Marrakech a été marquée par une forte émotion et une connexion palpable entre Fatna et le public. Des jeunes filles ont particulièrement exprimé leur gratitude pour ce travail de transmission. Pour la réalisatrice, cet accueil au Maroc constitue un moment essentiel, porteur de sens pour une œuvre destinée à faire entendre la voix des femmes et des jeunes, et à valoriser l’action de la société civile.
Fatna, une femme nommée Rachid offre ainsi un regard sensible sur un parcours individuel devenu un symbole : celui d’un engagement persistant, reliant la mémoire des années 1970 à la transmission d’un rêve de changement toujours vivant.
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