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Pétition du jour

jeudi 24 juillet 2025

Le Front Polisario et le cynisme des crétins du PSOE

Luis Portillo Pasqual del Riquelme, El Independiente, 7/6/2025
Traduit par Tafsut Aït Baâmrane

Dire que le Front Polisario (FP) est « une entité privée non reconnue »* est une absurdité absolue, indigne de ceux qui se prétendent à l’avant-garde du « progressisme » national et international. Ceux d’entre nous qui lisent ces stupidités n’en croient pas leurs yeux, tant le niveau de dégradation atteint par le parti PSOE est affligeant : je n’ose même plus dire « Parti socialiste ». Ils ne savent plus quoi dire ou faire pour nier l’évidence, enfonçant toujours davantage leur chute du mauvais côté – le côté obscur – de l’Histoire, aux côtés des forces les plus réactionnaires de la société.


Et ce n’est pas seulement que le PSOE « joue à désinformer », comme le disent les plus indulgents envers cette bande. « C’est bien plus grave que ça », affirment d’autres, « car ce sont des forces organisées qui excluent toute idée de progrès véritablement démocratique – surtout quand il s’agit de Moros ou de musulmans ». « Ces types-là n’ont aucune limite, soumission totale au Sultan ». « C’est répugnant ». « Ils y vont à fond, guerre totale à tous les niveaux »... Voilà les commentaires qui me parviennent, tandis que j’écris moi-même ces lignes comme je peux.

Dire que le Front Polisario est « une entité privée », comme s’il s’agissait d’une pharmacie, d’un concessionnaire automobile ou d’un club de football, ne rehausse en rien le prestige des ‘intellectuels’ (vraiment ?) organiques ni celui des commissaires politiques du parti autrefois socialiste, devenu repaire de filous, d’opportunistes et de sans-vergogne.

Après 50 ans de lutte héroïque et de résistance du peuple sahraoui, voilà que ces petits malins de troisième zone osent sortir de telles énormités.

Le Front Polisario a été créé en 1973. Et même à cette époque lointaine, il n’était en rien « une entité privée non reconnue ». Il a bel et bien été connu et reconnu ! Même le gouvernement de l’UCD, celui d’Adolfo Suárez, a négocié avec le FP les conditions de retrait des militaires espagnols ! À propos, l’armée espagnole était-elle aussi une « entité privée » ? Voilà le genre de stupidités auquel mène la ‘logique’ du PSOE.

Oui, l’Espagne était alors la puissance coloniale, la « mère patrie », la métropole, une « entité publique reconnue » qui a signé son arrêt de mort en tant que telle lors des honteux et sanglants événements de Zemla, avec le massacre de Sahraouis, la « disparition » et l’assassinat du dirigeant sahraoui Bassiri… pour lesquels, encore aujourd’hui, l’« entité publique reconnue » (aux glorieuses « valeurs patriotiques ») qu’est l’Espagne n’a fourni aucune explication, ni déclassifié les documents secrets (bel exemple d’« État transparent et de droit »), malgré son appartenance à l’ONU, à l’OTAN, à l’UE, au FMI et à toute cette panoplie de sigles d’« entités reconnues » censées conférer à ce pays passeport, prestige et « garanties de sérieux ».

Le FP, messieurs du PSOE, a été RECONNU par les Nations Unies comme représentant légitime du peuple sahraoui et maintient depuis un Représentant permanent à l’ONU à New York : notre regretté Ahmed Bujari jusqu’à son décès il y a quelques années, puis son successeur Sidi Omar depuis avril 2018. La représentation légale et reconnue du peuple sahraoui n’est pas, messieurs du PSOE, « une entité privée non reconnue », comme pourrait l’être une épicerie ou un club de football.

Le Front Polisario, en tant qu’avant-garde du peuple sahraoui, a livré trop de batailles, douloureuses et acharnées, sur les plans politique, diplomatique et militaire, pour qu’on vienne aujourd’hui le qualifier de « simple entité privée », à l’image de ce que ses ennemis du camp alaouite du PSOE, à coups de propagande et de désinformation, s’emploient à faire : tenter de le faire passer pour une « organisation terroriste » (reconnue ? privée ?).

Bien au contraire, le FP est l’avant-garde organisée du peuple sahraoui héroïque, expulsé de sa terre – à l’instar des Palestiniens –, abandonné par le gouvernement espagnol (tant franquiste que « socialiste »), livré à ses ennemis, et bombardé par ceux-là mêmes – ceux des « accolades fraternelles » et des propositions d’autonomie – à coups de napalm et de phosphore blanc, tous deux interdits – tout comme l’invasion et l’occupation – par le droit international, ce droit si scrupuleusement respecté par les Trump, Netanyahou et autres acolytes.

Le peuple sahraoui (une « entité privée non reconnue » ?) a proclamé, avec le FP à sa tête, son indépendance, sa Constitution et son propre État : la République Arabe Sahraouie Démocratique (RASD), reconnue comme État par au moins 84 pays. Même si, par la suite, les manœuvres financières, pressions et chantages du Maroc ont entrepris le sale – que dis-je, le répugnant – travail de tenter d’effacer la RASD, le peuple sahraoui et les principes du droit international fondé sur des règles.

L’ONU a reconnu le Front Polisario. L’Union africaine (comptant 55 États) a reconnu la RASD. Le FP dispose d’ambassades dans de nombreux pays, même sans disposer du chéquier du Maroc, grossi par les largesses de l’Espagne, de l’UE et des pétromonarchies du Golfe – celles-là mêmes qui financent des Murs de la honte, tuent et font disparaître les Khashoggi en toute impunité, et abritent des monarques en fuite.

Durant plusieurs années, par une série de jugements successifs, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a donné raison au Front Polisario en tant que représentant légitime du peuple sahraoui – tout comme l’avaient déjà fait l’ONU et la CIJ en 1975 – et lui a reconnu sa capacité juridique. Le FP a gagné face au Maroc, à l’Espagne, à la Commission et au Conseil de l’UE. Face à tous.

Et voilà que les illuminés du PSOE débarquent en déclarant que le Front Polisario est « une entité privée ». Il ne manquait plus qu’ils ajoutent « à but non lucratif ». Comme un club de foot de troisième division, en somme. Ce qui montre bien que, dans ce parti, les diplômes sont superflus et que le cap est perdu. Ou quelque chose de bien pire, si tant est qu’ils en aient jamais eu : la conscience et l’éthique.

*Dans le débat parlementaire sur la proposition de loi du groupe Sumar d'accorder la nationalité espagnole aux personnes nées au Sahara "espagnol" avant le 26/2/1976, le PSOE a rejeté la clause incluant des documents administratifs espagnols validés par le POLISARIO, qualifié d'"entité privée non reconnue" (...par le Maroc).[NdlT]



mercredi 23 juillet 2025

Appel sur les violations commises contre les habitants de la province de Soueïda par le pouvoir de fait à Damas

نداء حول الانتهاكات بحق أهالي محافظة السويداء من قبل سلطة الأمر الواقع في دمشق  (١١ لغات)

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mardi 22 juillet 2025

Midelt : Un comité «vérité et responsabilité» voit le jour après la mort de Mohammed Bouslikhen

 Sebbane Fatima Zahra, Yabiladi, 21/7/2025

Les sections locales de l'Association marocaine des droits humains (AMDH) à Khénifra, Béni Mellal et Drâa-Tafilalet ont annoncé la création d'un «Comité vérité et responsabilité», suite au décès du jeune berger Mohamed Bouslikhen à Agbalou (province de Midelt), dans des circonstances mystérieuses. Le comité est composé de militants associatifs et d'un groupe de défenseurs des droits humains de Midelt, ainsi que de la région de Drâa-Tafilalet. L'objectif est de faire connaître la vérité et tenir tous les impliqués responsables.

Dans un communiqué, l'association a déclaré que cette initiative vient en réponse à ce qu'elle a qualifié d'«hypothèses de suicide qui ne répondent pas aux normes légales» et au milieu de ce qu'elle a appelé des campagnes médiatiques non documentées, promues via des pages Facebook locales. Elle a considéré ces contenus comme des tentatives d'influencer l'opinion publique et le détourner de la vérité.

Le comité a annoncé l'organisation d'un convoi de solidarité vers la région d'Agbalou, mercredi 23 juillet 2025, afin de rencontrer la population locale et présenter ses condoléances à la famille du défunt, dans le cadre d'un programme de plaidoyer visant à faire respecter la responsabilité légale.

Le procureur général près la Cour d'appel d'Errachidia a confirmé, le 9 juillet, que les résultats de l'autopsie initiale du corps de Mohamed Bouslikhen, un jeune berger de 15 ans retrouvé pendu dans la région de Boumia, province de Midelt, le lundi 16 juin, ont montré que la mort était due à une strangulation par corde, sans aucune preuve d'agression sexuelle ou physique sur le corps, contrairement à ce qui avait été diffusé sur certaines plateformes.

Malgré le démenti de tout signe de violence, la source a souligné que les enquêtes judiciaires sont toujours en cours.

Les sections locales de l'Association marocaine des droits humains (AMDH) à Khénifra, Béni Mellal et Drâa-Tafilalet ont annoncé la création d'un «Comité vérité et responsabilité», suite au décès du jeune berger Mohamed Bouslikhen à Agbalou (province de Midelt), dans des circonstances mystérieuses. Le comité est composé de militants associatifs et d'un groupe de défenseurs des droits humains de Midelt, ainsi que de la région de Drâa-Tafilalet. L'objectif est de faire connaître la vérité et tenir tous les impliqués responsables.

Dans un communiqué, l'association a déclaré que cette initiative vient en réponse à ce qu'elle a qualifié d'«hypothèses de suicide qui ne répondent pas aux normes légales» et au milieu de ce qu'elle a appelé des campagnes médiatiques non documentées, promues via des pages Facebook locales. Elle a considéré ces contenus comme des tentatives d'influencer l'opinion publique et le détourner de la vérité.

Le comité a annoncé l'organisation d'un convoi de solidarité vers la région d'Agbalou, mercredi 23 juillet 2025, afin de rencontrer la population locale et présenter ses condoléances à la famille du défunt, dans le cadre d'un programme de plaidoyer visant à faire respecter la responsabilité légale.

Le procureur général près la Cour d'appel d'Errachidia a confirmé, le 9 juillet, que les résultats de l'autopsie initiale du corps de Mohamed Bouslikhen, un jeune berger de 15 ans retrouvé pendu dans la région de Boumia, province de Midelt, le lundi 16 juin, ont montré que la mort était due à une strangulation par corde, sans aucune preuve d'agression sexuelle ou physique sur le corps, contrairement à ce qui avait été diffusé sur certaines plateformes.

Malgré le démenti de tout signe de violence, la source a souligné que les enquêtes judiciaires sont toujours en cours.



dimanche 20 juillet 2025

Soueïda assiégée : le nettoyage ethnique des Druzes de Syrie
Appel urgent – Juillet 2025

عربية English Español

Traduit par Tlaxcala

Cette déclaration est émise par une coalition d'étudiants, de chercheurs et d'activistes druzes d’Amérique du Nord (Canada, USA et Mexique).
Nous nous exprimons en tant que membres de la diaspora ayant des liens familiaux et culturels directs avec Soueïda, et nous refusons de rester silencieux face à cette campagne de nettoyage ethnique contre notre peuple. Contact

Le 15 juillet 2025, les forces du gouvernement intérimaire syrien dirigées par Ahmed al-Charaa, connu des Syriens sous le nom d’Abou Mohammad al-Jolani — ancien commandant de la branche syrienne d’Al Qaïda et ancien affilié de l’État islamique — ont lancé une offensive de grande ampleur contre la ville à majorité druze de Soueïda.

Cette opération, présentée comme une mission visant à « rétablir l’ordre » et à faire respecter « la sécurité dans la province », fut en réalité le début d’un massacre sectaire minutieusement planifié. En l’espace de quatre jours, ce qui s’est déroulé fut un nettoyage ethnique orchestré de la population druze, mené par des forces djihadistes alignées sur l’État et soutenues par les mêmes individus qui avaient déjà dirigé des escadrons de la mort sous des bannières extrémistes.

Massacres et assassinats ciblés de civils

De nombreux rapports crédibles et témoignages directs confirment que les forces gouvernementales syriennes et les milices alliées ont exécuté des civils druzes chez eux et dans les rues. L’un des épisodes les plus atroces fut le meurtre de 12 à 15 civils druzes non armés, rassemblés dans la maison d’hôtes de la famille Radwan, tués à bout portant. Dans un autre cas, six hommes druzes ont été sommairement exécutés devant chez eux.

Selon Sky News, Reuters et The Guardian, les exécutions sur le terrain furent généralisées et les victimes incluaient des femmes, des enfants et du personnel médical. Dès le premier jour du massacre, le Réseau syrien pour les droits de l’homme (SNHR) confirmait au moins 321 morts civils, dont des enfants de seulement 18 mois, tués devant leurs familles. Certains furent mutilés, violés ou décapités. Des hommes druzes furent humiliés, des religieux tournés en dérision, et des captifs forcés de renier leur foi avant d’être exécutés. Dans une vidéo authentifiée, des hommes druzes sont jetés d’un balcon puis abattus en plein vol — un crime de guerre filmé.

Alors que les premiers rapports évoquaient des centaines de morts entre le 13 et le 18 juillet 2025, le bilan réel dépasserait désormais les 1 000 victimes, et continue d’augmenter. De nombreux corps restent introuvables, enterrés dans des fosses communes ou méconnaissables du fait des destructions et du ciblage systématique des familles.

Ville coupée du monde

Le régime intérimaire syrien a coupé l’électricité, l’eau et les communications, transformant Soueïda en une prison à ciel ouvert. Le HCR et d’autres organisations humanitaires ont indiqué ne pas pouvoir accéder à la ville, bloquées qu’elles étaient par les tirs et les barrages. Les hôpitaux étaient submergés, avec plus de 200 corps entassés dans les morgues et les couloirs. L’hôpital national de Soueïda a été pris d’assaut par des combattants armés, qui y ont ouvert le feu, détruit les équipements et tué le personnel. À ce jour, seuls quelques centres de santé locaux restent fonctionnels, les principaux hôpitaux ayant été bombardés.

La nourriture s’est épuisée. Les nourrissons n’avaient plus de lait. Les magasins ont été vidés et pillés par des milices tribales alliées au régime. Des quartiers entiers ont été réduits en cendres. Au 18 juillet, on estimait entre 25 000 et 60 000 personnes déplacées, beaucoup sans abri ni vivres. Les efforts de secours ont été délibérément entravés.

Des preuves documentées

Les médias internationaux Reuters, The Guardian, Associated Press, Sky News, et le Times of Israel ont confirmé les atrocités à l’aide de reportages sur le terrain, de vidéos, et de témoignages de survivants.

Le Réseau syrien pour les droits de l’homme (SNHR) et l’Observatoire syrien des droits de l’homme (SOHR) ont tous deux qualifié cette opération de campagne de nettoyage sectaire, le SNHR la décrivant comme « l’un des massacres les plus marquants de nettoyage ethnique et religieux de l’histoire récente de la Syrie ».

Même Ahmed al-Charaa, président autoproclamé du gouvernement intérimaire syrien, a reconnu que des crimes avaient eu lieu, mais a rejeté la faute sur des “groupes hors-la-loi” non identifiés, malgré les preuves accablantes impliquant ses propres combattants, issus pour beaucoup d’anciens réseaux djihadistes et déjà connus pour leurs crimes de guerre.

Le monde ne peut détourner le regard. Nous exigeons :

● Une enquête internationale formelle sur le massacre de Soueïda et des poursuites contre les responsables, y compris Ahmed al-Charaa (Jolani) et les membres de son commandement militaire.

● Un corridor humanitaire d’urgence via la Jordanie pour acheminer nourriture, eau et soins médicaux.

● La reconnaissance immédiate par l’ONU et les instances internationales que ce qui s’est produit à Soueïda constitue des crimes contre l’humanité et un acte de nettoyage ethnique.

Les Druzes de Soueïda ont déjà été menacés de génocide — ce n’est pas la première fois que leur sang est jugé dispensable. Mais aujourd’hui, leur massacre est filmé, documenté, et indéniable.

Si la communauté internationale reste passive, elle est complice.

 Emad Hajjaj

samedi 19 juillet 2025

Des voix marocaines s’élèvent à Torre Pacheco contre le discours extrémiste : “Nous méritons tous de vivre en paix”


Le même lieu, la place de la mairie, où depuis vendredi dernier se sont rassemblés pour la première fois des groupes d’ultras afin d’encourager la « chasse » aux migrants, a été utilisé symboliquement par un couple marocain pour lire un manifeste appelant à la paix, à la cohabitation et à la dénonciation du racisme.

Osama Alalo, un joven marroquí que reside en Torre Pacheco, lee este viernes un manifiesto en la plaza del Ayuntamiento en denuncia de los disturbios racistas ocurridos en la localidad.
Osama Alalo, un jeune Marocain résidant à Torre Pacheco, lit ce vendredi un manifeste sur la place de la mairie pour dénoncer les émeutes racistes qui ont eu lieu dans la localité. Ags

Álvaro García Sánchez, Torre Pacheco,elDiario.es, 18-7-2025
Traduit par Tafsut Aït Baâmrane

La normalité et la vie tranquille et paisible règnent à nouveau à Torre Pacheco. La semaine a été très longue, marquée par la peur, la tension, la présence de nombreux groupes d’ultras et de nazis venus de l’extérieur pour mener une violente persécution contre les habitants marocains. Ce vendredi, la place de la mairie, qui avait été utilisée par l’extrême droite pour propager minutieusement la haine, est devenue le théâtre d’une scène tout à fait opposée. Vendredi dernier, et surtout samedi, ces mêmes dalles ont vu se rassembler des jeunes hommes tatoués de croix gammées et le visage dévoré par la rage. Aujourd’hui, d’un pas tranquille, tout juste sortis de chez eux, un dossier sous le bras, le couple formé par Osama Alalo, résident de la commune, et sa compagne, Kenza Midoun, s’est rendu sur la place vers dix heures du matin pour lire un manifeste et une lettre au nom de la communauté immigrée de Torre Pacheco.

Lorsque le couple est arrivé, Mari, une dame qui passait par là pour aller acheter un pot de mayonnaise au supermarché afin de préparer une salade russe, a déclaré, visiblement calmée : « Nous ne méritons pas toute cette barbarie. ça fait 53 ans que je vis ici. Nous avons toujours été ouverts à tout le monde. C’est un soulagement que cette absurdité soit terminée ».

Le manifeste lu par Alalo et Midoun est signé par un total de 51 organisations de la région de Murcie, parmi lesquelles des partis politiques, des syndicats et des collectifs sociaux et antiracistes. Il est également signé par un grand nombre d’associations nationales. « Aujourd’hui, la région de Murcie a le cœur serré par les derniers événements qui font la une de tous les médias du pays. Ce que l’on a appelé les « chasses » à Torre Pacheco sont la conséquence de la criminalisation gratuite de la communauté maghrébine par des partis tels que Vox, qui ont été légitimés par les institutions. À cela s’ajoute l’absence totale de politique sociale de la région de Murcie et de la mairie de Torre Pacheco visant à accueillir et à normaliser la réalité sociale », a déclaré Osama Alalo.

C’est à partir de ce postulat qu’il a construit le reste de son manifeste. « Les messages de haine, d’intolérance, de racisme s’infiltrent dans la population, semant une tension sociale dénaturée, éloignée du désir de vivre en paix ». Alalo a souligné que ceux qui « sèment la terreur dans les rues de Torre Pacheco » sont « une minorité violente qui ne représente pas notre région ». « Un outil politique », a-t-il ajouté, « au service des partis d’extrême droite qui mettent en danger notre démocratie ».

Le jeune Marocain a également mis l’accent sur toutes les « fausses informations » qui ont été propagées par les groupes ultras sur les réseaux sociaux, « aussi fausses », a-t-il souligné, « que celles qui établissent un lien entre migration et délinquance ». « Rien ne justifie le racisme, ni que nous voyions des hommes armés dans les rues du village, attaquant des commerces, insultant et intimidant toute la population. C’est inadmissible ».

Alalo a sévèrement critiqué Vox, estimant que ces émeutes racistes à Torre Pacheco ne sont que « la partie émergée de l’iceberg ». « Un magma s’est formé, alimenté par l’absence de politiques publiques, la précarité de l’emploi et un discours permanent de rejet de l’autre ». « Monsieur Antelo », a-t-il poursuivi en s’adressant directement au leader de la formation d’extrême droite dans la région, « les seuls qui sèment la terreur sont ceux que vous représentez et encouragez ».

« Ce manifeste est une réponse pacifique des communautés racialisées et de la société antiraciste. Nous exigeons une plus grande efficacité de la police lors des affrontements. Ce que nous vivons n’est pas du vandalisme, c’est une organisation terroriste et il faut la traiter comme telle », a-t-il déclaré juste avant de terminer la lecture du texte. Osama Alalo a demandé au PP de « rompre son pacte avec Vox pour approuver le budget », ce dernier étant un parti « qui incite à la violence et est directement responsable du cauchemar que nous vivons actuellement ». « Dehors les racistes de nos rues et de nos institutions », a conclu Alalo.

Lettre de plainte écrite par une femme marocaine

Kenza Midoun a ensuite lu le témoignage, sous forme de lettre, « d’une femme » marocaine « qui ne se sent pas en sécurité pour le faire elle-même ». Midoun a axé son discours exclusivement sur la population migrante de Torre Pacheco, en particulier les femmes. Elle a parlé des personnes qui ont pu « se former, étudier et obtenir des emplois qualifiés », mais aussi de celles qui « doivent abandonner leurs études en cours et trouver des emplois précaires dans différents secteurs, comme l’agriculture ». Midoun a également souligné qu’« il y a ceux qui entreprennent, ceux qui fondent une famille, ceux qui ont des enfants ». « C’est l’histoire de centaines de familles de Torre Pacheco, qui s’étend au reste de la région de Murcie. Il y a une coexistence par nécessité. Certains arrivent à la recherche d’emplois qui ne leur demandent pas de maîtriser la langue, qui ne nécessitent pas de formation qualifiée. Ils se contentent de ce qu’ils ont et sont obligés de subvenir aux besoins de leur famille du mieux qu’ils peuvent ».

Midoun a évoqué des cas concrets de « professeures » arrivées du Maroc qui, ici en Espagne, « doivent accepter des emplois journaliers, de femmes de ménage ou d’aides-soignantes, car la reconnaissance de leurs diplômes est un véritable parcours du combattant ».

La joven Kenza Midoun durante el relato de la carta escrita por una mujer marroquí.
La jeune Kenza Midoun pendant la lecture de la lettre écrite par une femme marocaine. Ags

C’est dans ce contexte, a poursuivi Kenza Midoun, que se créent les groupes « eux et nous ». « Et commencent les étiquettes, le sentiment de ne faire partie de rien », comme « les enfants » qui, parfois, « sont montrés du doigt à l’école et stigmatisés dans la rue ». « Je me rappelle que nous sommes en 2025 », a insisté Midoun, en référence aux événements qui se sont déroulés dans le village la semaine dernière, « car parfois, j’ai tendance à l’oublier avec tout ce que je vois et ce que nous avons entendu ».

« D’autres n’ont pas eu la chance de naître dans le bon quartier ni dans une famille structurée et unie. Ce sont des âmes perdues qui n’ont reçu que haine et stigmatisation, et tout ce qu’elles ont à offrir, c’est cela », a déclaré Midoun. « On nous a demandé de condamner un acte commis par un Maghrébin sans même attendre que la justice fasse son travail et arrête le délinquant. Personne n’a condamné la chasse aux Moros. Nous méritons tous de vivre en paix et en tranquillité, et nous méritons de vivre là où nous sommes aimés, sans nous sentir comme des criminels sous le regard de ceux qui nous stigmatisent. »


vendredi 18 juillet 2025

18 juillet 2025 : “Mein Kampf” a 100 ans


Le 18 juillet 1925 paraissait à Munich le premier tome du livre d’Adolf Hitler intitulé « Mein Kampf » (Mon combat) et sous-titré « eine Abrechnung » (un règlement de comptes). Cette première édition, tirée à 10 000 exemplaires, sera suivie d’une deuxième édition en décembre 1925, elle aussi à 10 000 exemplaires. Le deuxième tome de l’œuvre du futur Führer paraîtra en décembre 1926. Les éditions du parti nazi en vendirent 287 000 exemplaires jusqu’en janvier 1933. Cette année-là, après la prise de pouvoir nazie, il s’en vendit plus d’un million d’exemplaires. Jusqu’en 1944, il y eut 22 éditions du livre, vendues à 12,5 millions d’exemplaires. Mein Kampf remplaça la Bible comme cadeau offert à tout couple de jeunes mariés par les mairies. Combien de followers Hitler aurait-il eu s’il avait pu utiliser des « réseaux sociaux » ? Sans doute au moins autant que Donald Trump ou Elon Musk, deux de ses plus célèbres émules.

Olivier Mannoni a consacré une dizaine d’années à réaliser une nouvelle traduction de Mein Kampf, éditée par Fayard en 2021 sous le titre Historiciser le mal. Traduction, annotation critique et analyse de Mein Kampf d'Adolf Hitler*. Il a ensuite publié deux livres, Traduire Hitler (2022) et Coulée brune. Comment le fascisme inonde notre langage (2024). On les trouvera ci-dessous, ainsi que deux interviews de Mannoni. Les personnes pressées peuvent écouter un résumé audio de ce dossier.-FG, Tlaxcala


 



*On ne peut que regretter que le livre soit vendu pour 100€ [les bénéfices allant à la Fondation Auschwitz-Birkenau,] et non mis en accès libre, comme l'avaient proposé 4 historiens en 2015 : "Publier une édition critique en ligne, gratuitement, nous semble être la meilleure solution, adaptée qui plus est aux modalités nouvelles du travail de recherche et d’enseignement.[...] À nos yeux, les éditions Fayard s’honoreraient d’un tel choix" [lire ici]

 

jeudi 17 juillet 2025

L’agression israélienne contre la Syrie fait avancer un plan vieux d’un siècle visant à embrigader les Druzes

L’article ci-dessous du chercheur palestino-usaméricain Joseph Massad, datant du mois de mai dernier, met en lumière la logique historique derrière la nouvelle attaque israélienne contre la Syrie

Joseph Massad, Midle East Eye, 6/5/2025
Traduit par Fausto GiudiceTlaxcala 

De la Palestine de l’époque du mandat britannique à la Syrie post-Assad d’aujourd’hui, les dirigeants sionistes ont ciblé les communautés druzes pour fragmenter la société arabe et enraciner un ordre colonial de peuplement.


Des soldats israéliens empêchent une famille druze syrienne de s’approcher de la frontière près de Majdal Shams, sur le plateau du Golan occupé par Israël, le 3 mai 2025 (Jalaa Marey/AFP)

La semaine dernière (fin avril 2025), l’ armée israélienne a pris du temps sur son programme chargé d’extermination des Palestiniens de Gaza , de bombardement et de tirs sur les Palestiniens à travers la Cisjordanie, de bombardement du Liban et de lancement d’une série de bombardements sur le territoire syrien - dont la capitale Damas - pour lancer une série de bombardements très spéciaux .

Le dernier raid aérien visait ce qu’Israël a présenté comme « un groupe extrémiste » qui avait attaqué des membres de la communauté druze syrienne, qu’Israël avait « promis » de défendre en Syrie même.

Après la chute du régime de l’ancien président Bachar al-Assad provoquée en décembre dernier par Hay’at Tahrir al-Cham (HTS), ancienne branche d’Al-Qaïda, des violences sectaires liées à l’État ont éclaté contre  les Alaouites et les Druzes syriens . Les minorités religieuses se sentent assiégées et craignent de plus en plus l’avenir.

Malgré les assurances du président syrien  autoproclamé par intérim  et ancien commandant d’Al-Qaïda , Ahmed al-Charaa, selon lesquelles les minorités religieuses seraient protégées, le régime a déjà commencé à imposer des restrictions « islamistes sunnites » sur de nombreux aspects de la société, y compris  les programmes scolaires  et la ségrégation des sexes dans  les transports publics .

Pendant ce temps, la violence sectaire perpétrée par des groupes liés à l’État et des milices non étatiques persiste . 

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C’est dans le contexte de cette violence sectaire qu’Israël a vu une opportunité de poursuivre un programme que le mouvement sioniste poursuivait depuis les années 1920 : créer de nouveaux schismes, ou exploiter les schismes existants, entre les groupes religieux en Palestine et dans les pays arabes environnants, dans une stratégie classique de diviser pour mieux régner.

Cette politique israélienne continue vise à donner une plus grande légitimité à la prétendue raison d’être d’Israël – non pas en tant que colonie sioniste européenne servant les intérêts impériaux européens et usaméricains, mais en tant qu’État sectaire religieux dont le modèle devrait être reproduit dans tout le Moyen-Orient, en divisant les groupes religieux autochtones en petits États distincts pour « protéger » les minorités.

Plan sectaire

Israël estime que la normalisation des relations dans la région ne peut se faire que si de tels États sectaires sont créés, notamment au Liban et en Syrie.

Dès les années 1930, les dirigeants israéliens s’allièrent aux sectaires maronites libanais et, en 1946, ils signèrent un accord politique avec l’Église maronite sectaire.

Leur soutien ultérieur à des groupes chrétiens fascistes libanais, comme les Phalangistes – qui cherchaient à établir un État maronite au Liban – s’inscrivait dans les plans sionistes pour la communauté druze palestinienne. Cette stratégie a débuté dans les années 1920, lorsque les colons sionistes ont commencé à cibler la population druze palestinienne.

Au lendemain de la Première Guerre mondiale et suite au soutien britannique au colonialisme de peuplement sioniste en Palestine, les dirigeants sionistes ont lancé des efforts pour créer des divisions sectaires entre chrétiens et musulmans palestiniens.

Les Palestiniens, cependant, étaient unis dans leur opposition au sionisme et à l’occupation britannique à travers les « Associations musulmanes-chrétiennes », établies en 1918 comme instruments institutionnels d’unité nationale et de résistance au régime colonial.

Un projet sioniste connexe visait à isoler la petite communauté religieuse druze palestinienne afin de la cultiver comme un allié potentiel.

Au début du mandat britannique en 1922, les Druzes palestiniens étaient au nombre de 7 000 , vivant dans 18 villages à travers la Palestine et représentant moins d’un pour cent des 750 000 habitants du pays.

Mythologie coloniale

Les puissances coloniales s’appuyaient souvent sur des mythologies raciales pour diviser les populations autochtones. Alors que les Français affirmaient que les Berbères algériens descendaient des Gaulois pour les distinguer de leurs compatriotes arabes, les Britanniques présentaient les Druzes comme des descendants des Croisés, les décrivant comme une « race blanche plus ancienne » non arabe et « une race beaucoup plus propre et plus belle » que les autres Palestiniens, en raison de la prédominance de la peau claire et des yeux bleus parmi eux.

Bien que les Druzes aient été initialement considérés comme trop marginaux pour être embrigadés, à la fin des années 1920 et au début des années 1930, les dirigeants sionistes ont mené une campagne concertée pour les intégrer.

Tout comme ils avaient exploité les rivalités entre les familles palestiniennes importantes de Jérusalem – les Husayni et les Nashashibi – les sionistes ont cherché à faire de même avec les Druzes, en encourageant le factionnalisme entre les Tarifet les Khayr , et en promouvant une identité sectaire particulariste.

Dans les années 1920, les autorités d’occupation britanniques ont instauré un système sectaire en Palestine pour servir la colonisation juive européenne – un système qui séparait la communauté druze palestinienne du reste du peuple palestinien. 

Aux côtés des sionistes, les Britanniques ont encouragé le factionnalisme et le communautarisme religieux – des efforts qui ont abouti à la fondation de la Druze Union Society sectaire en 1932, aux côtés de nouvelles sociétés musulmanes et chrétiennes orthodoxes formées à la même période dans le sillage de la politique britannique.

La même année, les efforts sionistes pour coopter les dirigeants druzes s’intensifient, se concentrant sur une faction en particulier et encourageant son sectarisme.

Cela provoqua des affrontements entre les différentes factions druzes en 1933, mais la famille nationaliste Tarif conserva son leadership et vainquit la faction collaborant avec les sionistes. Ces derniers espéraient que la cooptation des Druzes palestiniens ouvrirait la voie à des alliances avec les populations druzes plus importantes de Syrie et du Liban.

Tactiques anti-révolte

Dans la seconde moitié des années 1930, pendant la Grande Révolte palestinienne contre l’occupation britannique et la colonisation sioniste européenne (1936-1939), les sionistes et les Britanniques ont intensifié leur campagne sectaire pour empêcher les Palestiniens druzes de rejoindre le soulèvement anticolonial.

À cette fin, ils enrôlèrent Cheikh Hassan Abou Rukun , chef de faction druze du village palestinien d’Isfiya, à une époque où des Druzes de Palestine, de Syrie et du Liban avaient rejoint la révolte . En novembre 1938, Abou Rukun fut tué par les révolutionnaires palestiniens en tant que collaborateur, et son village fut attaqué pour expulser d’autres collaborateurs.

Les sionistes ont exploité son assassinat dans leur campagne sectaire visant à embrigader la communauté druze, affirmant qu’il était ciblé parce qu’il était druze plutôt que parce qu’il était un collaborateur.

En fait, pendant la révolte palestinienne, les révolutionnaires ont tué environ 1 000 collaborateurs palestiniens – la plupart d’entre eux étaient des musulmans sunnites, dont beaucoup étaient issus de familles importantes.

Alors même que les sionistes travaillaient assidûment à répandre le sectarisme parmi les communautés druzes de Palestine, de Syrie et du Liban, à la fin de 1937, ils prévoyaient simultanément d’expulser toute la population druze - alors au nombre de 10 000 personnes - de l’État juif projeté par la Commission Peel britannique , puisque tous les villages druzes se trouvaient à l’intérieur des frontières que celle-ci recommandait.

Pendant ce temps, les autorités d’occupation britanniques ont fait avancer leur projet sectaire en payant certains dirigeants druzes pour qu’ils s’abstiennent de participer à la révolte.

Schémas de transfert

En 1938, les sionistes établirent des relations avec le chef anticolonial druze syrien Sultan al-Attrache , dont la révolte de 1925-1927 contre le régime français avait été réprimée dix ans plus tôt. Ils proposèrent à al-Attrache le « plan de transfert » – l’expulsion de la communauté druze palestinienne, présentée comme un moyen de la protéger des attaques des révolutionnaires palestiniens.

Al-Attrache n’acceptait que la migration volontaire de ceux qui cherchaient refuge, mais refusait tout accord d’amitié avec les sionistes.

Pour atteindre al-Attrache, les sionistes ont fait appel à l’un de leurs contacts, Yusuf al-’Aysami , un ancien assistant druze syrien qui avait été en exil en Transjordanie dans les années 1930. Pendant son exil, il a rendu visite aux Druzes palestiniens et a établi des liens avec les sionistes.

En 1939, Haïm Weizmann, chef de l’Organisation sioniste, était favorable à l’idée d’expulser les Druzes. L’émigration « volontaire » de 10 000 Palestiniens – qui, selon lui, « seraient sans doute suivis dautres » – offrait une précieuse opportunité de faire progresser la colonisation européenne juive en Galilée, région du nord de la Palestine.

Le financement de l’achat de terres druzes ne se matérialisa cependant jamais. En 1940, la réconciliation entre certaines familles druzes et les révolutionnaires palestiniens allégea la pression sur les dirigeants druzes et ébranla le pari initial des sionistes sur la communauté.

En 1944, l’organisation de renseignement sioniste (alors connue sous le nom de « Shai ») et le syrien al-’Aysami ont élaboré un plan visant à transférer les Druzes en Transjordanie et à financer l’établissement de villages là-bas en échange de toutes les terres druzes en Palestine.

Les sionistes envoyèrent même une expédition d’exploration à l’est de Mafraq, en Transjordanie, pour mettre en œuvre le projet. Cependant, face à l’opposition des Druzes et des Britanniques, le projet échoua fin 1945. Néanmoins, en 1946, les sionistes réussirent à acquérir des terres appartenant aux Druzes en Palestine par l’intermédiaire de collaborateurs locaux.

Embrigadement

En décembre 1947, davantage de Druzes palestiniens rejoignirent la résistance, alors même que les sionistes et les collaborateurs druzes s’efforçaient de maintenir la neutralité de la communauté ou de la recruter du côté sioniste.

En fait, les Druzes de Syrie et du Liban ont rejoint la résistance palestinienne à la conquête sioniste en 1948.

En avril 1948, les combattants de la résistance druze palestinienne ont riposté contre la colonie juive de Ramat Yohanan en réponse à l’attaque d’un colon contre une patrouille druze et ont subi de lourdes pertes .

Cependant, malgré les victoires sionistes, la désertion et le désespoir parmi les combattants druzes ont donné aux agents de renseignement sionistes – parmi lesquels le leader sioniste ukrainien Moshe Dayan - et aux collaborateurs druzes l’occasion de recruter des transfuges druzes .

Lorsque la colonie israélienne fut établie en 1948, l’un de ses premiers actes fut d’institutionnaliser les divisions au sein du peuple palestinien en inventant des identités ethniques fictives, dessinées selon des lignes religieuses et sectaires.

À ce stade, l’État israélien a reconnu les Druzes palestiniens – alors au nombre de 15 000 – comme une secte religieuse « distincte » des autres musulmans et a établi des tribunaux religieux distincts pour eux.

Peu après, Israël a commencé à qualifier la population druze de « Druze » plutôt que d’« Arabe », tant sur le plan ethnique que national. Pourtant, à l’époque comme aujourd’hui, celle-ci a continué à subir la même discrimination raciale et l’oppression de type suprémaciste juif que tous les Palestiniens d’Israël, y compris l’ appropriation de leurs terres.

À ce moment-là, avec le soutien de l’État israélien, les collaborateurs druzes avaient pris le dessus au sein de la communauté. Certains de leurs dirigeants ont même appelé le gouvernement à enrôler des Druzes dans l’armée israélienne – une offre qu’Israël a dûment acceptée, même si les soldats druzes restent interdits de rejoindre les unités « sensibles ».

Résistance druze

Malgré la cooptation par l’État israélien de nombreux membres de la communauté druze, la résistance à la colonisation s’est poursuivie à un rythme soutenu.

Le poète druze palestinien Samih al-Qasim (1939-2014) demeure l’une des trois figures les plus célèbres du panthéon palestinien des poètes connus pour leur résistance au sionisme (les deux autres étant Tawfiq Zayyad et Mahmoud Darwish). Son œuvre est non seulement largement récitée dans la société palestinienne, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de la Palestine, mais nombre de ses poèmes ont été mis en musique par des chanteuses telles que Kamilya Jubran et Rim al-Banna .

Parmi les autres figures littéraires et universitaires druzes palestiniennes de premier plan à l’avant-garde de la résistance au sionisme et au colonialisme israélien figurent le romancier Salman Natour (1949-2016) ; le poète contemporain Sami Muhanna, qu’Israël a emprisonné à plusieurs reprises pour ses opinions politiques ; le regretté érudit Sulayman Bashir (1947-1991) qui a écrit sur l’histoire des relations de l’URSS avec le nationalisme palestinien et les « communistes » juifs sionistes ; et l’historien Kais Firro (1944-2019), connu pour ses histoires de la communauté druze.

La tentative actuelle d’Israël de coopter les dirigeants druzes syriens vise à reproduire ce qu’il a déjà réussi avec les collaborateurs druzes palestiniens.

Cependant, les dirigeants druzes syriens résistent à cette offensive israélienne en affirmant faire partie intégrante du peuple syrien, tout en condamnant la politique du nouveau régime « islamiste » et sectaire. 

Pourtant, la volonté d’Israël de détruire l’unité arabe reste intacte.

Lire aussi

La manipulation d’une minorité : l’intervention d’Israël dans l’identité druze, par Amos Barshad

mercredi 16 juillet 2025

Des cagoules, des rois et des messages cachés : la triade qui a fait exploser Torre Pacheco sous les yeux de l’Espagne


Pour comprendre ce qui s’est passé à Torre Pacheco, il faut souligner deux points : la myopie volontaire à l’égard du Maroc et le paternalisme progressiste qui transforme le migrant en être de lumière abstrait.

Héctor Bujari Santorum, Nueva Revolución, 16/7/2025  

Traduit par Tafsut Aït Baâmrane

La victime, identifiée uniquement comme Domingo, âgé de 68 ans, se rendait comme chaque matin au cimetière lorsqu’il a croisé trois jeunes. Non seulement ils lui ont fracturé le septum nasal, mais cette agression a brisé le fragile pacte de cohabitation d’une commune d’environ 40 000 habitants, où près de 30 % de la population est d’origine étrangère.

Ce qui a suivi, à savoir des attaques contre des commerces et une intervention policière controversée, n’était pas « justice pour Domingo ». C’était un scénario écrit par les nazis dans la rue, abandonné par l’État depuis ses bureaux et exploité sans vergogne par le Maroc.

Il est certain qu’avant cet incident, des mouvements importants étaient déjà en cours dans le contexte politique :

1.                  5 juillet : Le PP reçoit officiellement le délégué du Front Polisario lors de son congrès national.

2.                 8 juillet : Réponse marocaine : le Maroc ferme les postes-frontières de Ceuta et Melilla.

3.                 9 juillet : Des émeutes éclatent à Torre Pacheco après l’agression d’un homme âgé.

4.                10 juillet : Lettre adressée à Alberto Nuñéz Feijóo par Nizar Baraka, secrétaire général de l’Istiqlal et ministre du Développement du Maroc.

5.                 12 juillet : Le Maroc réactive le Comité pour la libération de Ceuta et Melilla après 11 ans d’inactivité.

Sur les 13 personnes arrêtées, seules 3 sont poursuivies pour l’agression de l’homme âgé qui a déclenché les émeutes. En outre, la Garde civile a identifié 120 personnes, dont beaucoup se sont vu retirer des objets pouvant être utilisés comme armes, selon les informations fournies par le colonel Francisco Pulido, chef de la Garde civile dans la région de Murcie.

Ce même soir, à Torre Pacheco, alors que des nazis et des voyous détruisaient des kebabs et transformaient les rues en terrain de jeu, les forces de sécurité qui, quelques semaines auparavant, avaient semé la terreur parmi les ouvriers de Cadix à coups de matraques et de balles en caoutchouc, faisaient marche arrière avec leurs véhicules. Silence complice pour un gouvernement qui a besoin des spectres de l’extrême droite... tout en finançant le monstre par sa lâcheté passive.

Au milieu du chaos, des commerces comme celui de Hassan, propriétaire d’un kebab, ont été touchés. « Ce furent cinq minutes très difficiles », a-t-il raconté. Ils étaient « cagoulés, armés de pierres et de machettes. Certains clients se sont réfugiés dans les toilettes ; nous nous sommes échappés par l’arrière, mais d’autres personnes nous attendaient ». Son témoignage reflète la peur ressentie par les commerçants qui n’avaient rien à voir avec le conflit.

Derrière les cagoules néonazies, il n’y a pas d’idéologues, seulement des mercenaires de la violence qui filment leurs exploits pour se cacher ensuite. Alors que ces voyous ne sont jamais qualifiés de lumpen (terme jalousement réservé à la population maghrébine), beaucoup passent sous silence leur double jeu. Je parle de cette génération de Marocains qui, en Espagne, feignent la rébellion antisystème, mais qui, en privé, sont les lèche-bottes du roi Mohammed VI, scandant les slogans de la DGED (services secrets marocains) entre les prières dirigées par des imams-espions. Et qui paie les pots cassés ? Les seuls innocents : la femme qui cueille des fraises à Huelva et les travailleurs dignes, ceux qui ont traversé le détroit pour se construire une vie digne.

L’Espagne et l’Europe les utilisent comme une armée de réserve, tout comme la France utilise nos jeunes dans ses vignobles ou la Suisse dans ses hôtels. Ils sont la chair à canon du capital transnational : aujourd’hui dans les serres de Torre Pacheco, demain dans les entrepôts d’Amazon. Brisés par la machine, utilisés comme boucs émissaires et abandonnés par un État qui ne se souvient de leur existence que lorsqu’il transforme leurs quartiers en champs de bataille.

Pour comprendre le drame de Torre Pacheco, il faut démanteler deux mensonges fondamentaux. Premièrement, la myopie volontaire sur le Maroc. Beaucoup émettent des opinions sur le royaume alaouite à partir de leur ignorance, voire de leur imagination. Ils ignorent que rien n’y est ce qu’il semble être, pas même ce que le cynisme le plus extrême pourrait imaginer. Sous la façade d’une monarchie modérée se cache un État hybride où les services secrets (DGED), les imams et les narcotrafiquants dansent au rythme du même scénariste : le palais royal. Ceux qui ne comprennent pas cette machine à triple fond ne parviendront jamais à déchiffrer ce qui s’est passé en Murcie.

Le Maroc n’est pas un pays ami de l’Espagne, mais son principal adversaire. Il s’enhardit face à l’absence de réponse et à la faiblesse du gouvernement espagnol, et sait en outre qu’il bénéficie du soutien des USA et d’Israël. Telle est la réalité.

Ensuite, le paternalisme progressiste qui transforme le migrant en être de lumière abstrait. Ce racisme complexé, aussi néfaste que celui de l’extrême droite, cache une vérité dérangeante : il existe bel et bien des délinquants marocains, comme dans toute communauté de 5 000 personnes. Mais réduire tout le monde à cette étiquette est aussi stupide que de nier leur existence.

Le véritable crime, c’est l’analyse paresseuse : soit on sanctifie, soit on diabolise.

Ils arrivent toujours en retard. Ceux-là mêmes qui instrumentalisent aujourd’hui la cause sahraouie – en annonçant des soutiens théâtraux ou des retraits stratégiques selon que ça convient à leur discours – brillent par leur absence dans les tranchées quotidiennes de la résistance. Leur activisme de salon se réduit à pointer du doigt les positions des Sahraouis eux-mêmes, alors que la réalité crie haut et fort : ils se fichent complètement de la lutte réelle. Tout n’est que pure instrumentalisation politique, un marché aux puces où la dignité d’un peuple devient une monnaie d’échange.

Comme le dénonce un militant antiraciste bien connu : « Commencer la journée en écoutant le maire de Torre Pacheco établir un lien entre immigration et délinquance sans données — seulement « sa perception » —, puis voir Marlaska pontifier sur les droits humains... le même Marlaska du massacre de Melilla ». Ici, une correction s’impose : c’était à Nador, pas à Melilla. Qu’un militant « oublie » le lieu n’est pas une négligence : c’est une stratégie. Car cela permet de diluer les responsabilités. Le massacre a été perpétré par des bourreaux bien précis : la police marocaine sous les ordres de son régime, sous les applaudissements de la bourgeoisie locale et avec la complicité nécessaire du gouvernement espagnol. Manipuler le nom du lieu est la première étape pour blanchir le sang.

Quand une personne issue de l’immigration commet un délit, la loi s’applique exactement comme pour n’importe qui d’autre. Ce sont des gens qui vivent et travaillent ici, un point c’est tout. Ici, les fascistes sont peu nombreux, mais leurs complices sont trop nombreux. Donc, si nous voulons vraiment viser plus haut, regardons qui a intérêt à ce que tout cela se passe. Si la « révolte » de Torre Pacheco avait été dirigée contre les patrons exploiteurs qui s’y trouvent, on aurait déjà envoyé les tanks.

Les quartiers ouvriers sont devenus des banlieues marginalisées, confrontées à des problèmes économiques, culturels et de cohabitation. Un discours pro-immigration vide, sans plan social ni urbanistique, n’offre pas des conditions dignes à la classe ouvrière, migrants inclus, qui voit ses quartiers se détériorer. C’est ainsi que le fascisme s’installe : par l’abandon d’une social-démocratie qui prétend les défendre mais qui fait partie des élites autoproclamées.

Le Maroc promeut l’islam malékite, contrôlé par le roi MohamedVI en tant que «Commandeur des croyants». Par l’intermédiaire de l’Institut MohammedVI, il forme des imams pour l’Europe comme alternative au salafisme, gagnant ainsi un soutien institutionnel. En Espagne, environ 40% des imams ont été formés là-bas. Beaucoup ne se contentent pas de diriger des mosquées, mais exercent également un contrôle social sur la communauté maghrébine et diffusent la ligne officielle de Rabat. Ainsi, le Maroc surveille sa diaspora, contrôle le discours religieux et évite les critiques à l’égard du régime. Certaines fédérations islamiques en Espagne ont des liens directs avec le gouvernement marocain, comme le Conseil supérieur des oulémas, dont les membres sont élus par le roi et agissent depuis l’intérieur du pays.

Selon des sources du ministère marocain de l’Intérieur, Rabat a financé des pressions politiques par le trafic de drogue, renforçant ainsi sa position diplomatique : un véritable « narco-État diplomatique ».

Les réseaux criminels combinent immigration clandestine et trafic de haschisch. Par exemple, un réseau opérant entre Ceuta et Ibiza a utilisé des mineurs comme passeurs pour transporter des immigrants et 22kg de haschisch, pour un chiffre d’affaires de 2,5 millions d’euros.

En outre, le Maroc a utilisé les crises migratoires comme moyen de pression, assouplissant ses frontières en période de tensions diplomatiques. Un exemple flagrant : la crise de mai 2021 à Ceuta, avec 8 000 migrants en 48 heures, qui a contraint l’Espagne à adopter une position plus favorable à Rabat.

Certains frappent les immigrés, applaudissent ceux qui le font et votent pour ceux qui encouragent ces pratiques : des pions du capital qui nous maintiennent dans l’opposition tandis que l’accumulation s’accélère. D’autres réclament l’ouverture des frontières pour avoir davantage de pauvres à leur service. C’est tout.