La Dépêche 4 septembre 2017
Par Amine Derkaoui
Arrêté le 9 août suite à la marche contestataire à Al Hoceima qui a suivi les funérailles de Imad Laâtabi, Abderrahman A., à 14 ans, est le plus jeune détenu du Hirak. Le 30 août, le juge d’instruction du tribunal d’Al Hoceima a refusé la requête de sa mise en liberté.
La requête avait été déposée par sa
défense pour lui “permettre de passer la fête de l’Aid avec sa famille”,
nous a confié l’avocat Abdessadak Elbouchattaoui, qui se dit “étonné de
ce refus sans motifs par le juge”.
Accusé d’avoir participé à une
manifestation non autorisée et d’avoir caillassé les forces de l’ordre,
Abderrahman A. se trouve aujourd’hui à la prison des mineurs à Nador
(120 km d’Al Hoceima).
Le jeune de 14 ans est un élève en
première année du collège, et se trouvait au cimetière le jour des
funérailles de Imad Laâtabi, décédé le 8 août suite à une blessure
durant la marche du 20 juillet à Al Hoceima. Sa famille et celle de
Laâtabi sont voisines, et résident au quartier populaire Bni Boujibar à
Al Hoceima. Après l’enterrement du défunt, le collégien a participé à la
manifestation qui s’en est suivie et qui a connu des affrontements
entre police et manifestants. Le soir même, la police l’a arrêté près de
chez lui.
Selon l’avocat Elbouchattaoui, la
police avance qu’elle détient une photo du petit, avec une pierre à la
main, le jour de la manifestation. Et c’est sur la base de cette photo
que le juge d’instruction aurait refusé la liberté provisoire pour
l’accusé, “pour les besoins de l’enquête”, explique l’avocat.
“Je l’ai vu moi-même en train de pleurer au cimetière”, assure Me. Elbouchattaoui, poursuivant que le jeune garçon s’était laissé emporter par ses émotions en participant à la marche.
“S’il avait une pierre dans les
mains, c’est parce qu’il est victime de la détérioration de la situation
à Al Hoceima”, argue l’avocat, qui propose une solution alternative à
son emprisonnement: “le remettre à ses parents et leur imposer des
mesures comme interdire à l’enfant de sortir le soir”. L’avocat de
Abderrahman A. n’en démord pas: “un enfant ne peut être coupable de ses
actes, il faut le remettre à ses parents comme l’indique la loi”.
Que dit la loi?
Le code pénal marocain définit un
cadre juridique spécifique aux mineurs délinquants, comme il les fait
bénéficier d'une justice spéciale, différente de celle applicable aux
délinquants majeurs.
Le "mineur délinquant " est, selon le
code pénal marocain, celui qui, au jour de la commission de
l'infraction, n'a pas encore atteint l'âge de la majorité pénale, fixé à
18 ans révolus.
Selon l'article 138 du code pénal, “les mineurs de moins de 12 ans sont irresponsables”, pour “défaut de discernement”, et de ce fait, ils échappent à toute condamnation pénale et bénéficient “d’une excuse de minorité”.
Mais les choses ne sont pas si
simples pour le cas d’Abderrahman A., âgé de 14 ans. Car si la loi
dispose effectivement que les mineurs bénéficient d’un traitement
judiciaire particulier, un mineur qui a entre 12 et 18 ans est considéré
comme “partiellement responsable”.
Il peut donc faire l’objet d’une condamnation pénale, selon l’appréciation par le juge de l’acte commis.
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