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samedi 27 mars 2021

La bataille diplomatique pour le Sahara occidental en Europe : le Maroc perd des positions


Néstor Prieto

Le conflit du Sahara occidental a de multiples facettes : la guerre qui a suivi l'occupation marocaine (1975-1991) s'est développée parallèlement à une bataille diplomatique constante, parfois plus dure et aux conséquences plus dommageables que sur le terrain militaire.


Cette bagarre diplomatique, à la différence du conflit armé, n'a connu ni trêve ni cessez-le-feu. Durant ces plus de 40 ans de conflit, les structures diplomatiques marocaines et sahraouies, bien huilées, ont lutté sans discontinuer dans toutes les sphères internationales, soit directement, soit indirectement par l'intermédiaire de leurs alliés respectifs.

L'Union européenne est un élément clé du conflit : le siège de la France au Conseil de sécurité des Nations unies, le rôle de l'Espagne en tant que puissance administrante de jure et l'influence mondiale du club communautaire ont fait de cet espace l'un des champs de bataille diplomatique prioritaires pour les deux parties.

L'UE, entre lobbies et intergroupes

Le Maroc, conscient des avantages du maintien du statut actuel, puisqu'il contrôle de facto le territoire et exploite ses richesses, fonde sa stratégie diplomatique sur le torpillage de toute tentative de référendum et l'érosion de la projection internationale de la République arabe sahraouie démocratique (RASD). Ce deuxième aspect complète le premier, car faire taire la pression de la communauté internationale sur son occupation laisse un horizon dégagé à Mohammed VI.

La monarchie alaouite a toujours bénéficié du soutien total de la France, qui a fait du Maroc son principal centre d'influence en Afrique, ce qui a entraîné une complicité mutuelle dans la politique internationale. La France, que ce soit avec des gouvernements sociaux-démocrates, républicains ou libéraux, a opposé son veto au Conseil de sécurité de l'ONU à toutes les initiatives contraires aux intérêts de son partenaire, notamment par le veto qui, en 2013, a interdit à la MINURSO de surveiller les violations des droits de l'homme sur le territoire.

L'autre acteur européen clé, l'Espagne, évite d'assumer ses responsabilités internationales envers son ancienne colonie et affronte le conflit du Sahara comme s'il s'agissait d'un État tiers. Les relations conflictuelles avec le Maroc voisin, qui contrôle le flux de migrants et le trafic de drogue vers la péninsule ibérique et les îles Canaries comme moyen de pression, sont largement à l'origine de cette position tiède.

Cependant, le reste des pays européens ne s'est pas montré clairement aligné sur Rabat, et le fait est que la majorité du club communautaire prône « une solution juste, durable et mutuellement acceptable », un euphémisme utilisé par ces pays pour justifier leur profil bas dans le conflit. Il ne fait aucun doute que le non-alignement avec le Maroc ne profite pas pour autant à la RASD, qui n'est toujours reconnue comme un État par aucun État membre de l'UE.

Dans l'UE, le Maroc a combiné la diplomatie ordinaire avec des méthodes nouvelles et sophistiquées de pression et d'influence. Le Sahara occidental est « la priorité » de la politique étrangère du pays et de son corps diplomatique, qui exerce une pression politique sur les administrations tout en offrant d'excellents contrats économiques pour l'exploitation des ressources naturelles dans les territoires occupés. En outre, l'UE profite du faible coût de la main-d'œuvre et des prix bas pour l’achat de matières premières au Maroc, qui est l'un des principaux exportateurs de fruits, de légumes et de poisson.
Le Maroc menace et fait pression sur les pays de l'UE de diverses manières. En 2016, il a refusé l'autorisation à Ikea d'ouvrir un magasin à Casablanca et a déclaré un boycott général des produits suédois en raison de la décision du Parlement scandinave de reconnaître la RASD, ce qui ne s'est finalement pas produit. En 2016, le gouvernement marocain a officiellement suspendu toutes ses relations avec l'UE à la suite de la décision de la Cour européenne de justice annulant l'accord agricole entre les deux parties incluant l'exploitation des terres du Sahara occupé. Peu de temps après, les relations ont été rétablies.

Le cas le plus médiatisé est sans aucun doute la suspension de « tout contact » avec l'ambassade d'Allemagne à Rabat, une décision prise et communiquée par le ministre marocain des Affaires étrangères en personne, Nasser Bourita, qui concerne « tous les ministères et organismes ». La note a été divulguée à la presse et a déclenché une vive controverse en Allemagne, qui a convoqué l'ambassadeur alaouite dans le pays pour des consultations. Par ce geste diplomatique, posé en mars 2021, le Maroc entendait sanctionner « l'hostilité inhabituelle de l'Allemagne sur des questions fondamentales pour le Royaume », selon les propres termes de Bourita. Ces divergences ne seraient autres que le refus allemand d'ouvrir un consulat dans les territoires occupés et le maintien d’une position en faveur d'une « solution mutuellement acceptable qui tienne compte du droit à l'autodétermination reconnu par l'ONU », comme le rapporte la presse allemande.

Récemment encore, au début de l'année 2020, Mohamed VI a émis une forte protestation diplomatique après une rencontre entre la ministre des Affaires sociales et de la Femme de la RASD, Suelma Beiruk, et le secrétaire d'État espagnol aux Droits sociaux, Nacho Álvarez. Cette réunion « technique » pour discuter de coopération dans le domaine du handicap a provoqué une grave crise diplomatique, selon des sources du ministère espagnol des Affaires étrangères, qui se sont empressées de rassurer le Maroc.

À cela s'ajoutent la migration et le trafic de drogue, deux éléments que le Maroc contrôle d'une main de fer et dont le flux vers l'Europe oscille en fonction du scénario politique : la géographie le permet. Ainsi, à certains moments, le royaume alaouite facilite le trafic comme moyen de pression envers les pays européens. Une tactique terriblement efficace que la Turquie a également utilisée après la crise des migrants de 2016, lorsqu'elle est devenue un État tampon capable de menacer l'UE en ouvrant ou fermant ses frontières surpeuplées. Depuis le retour de la guerre au Sahara occidental, l'arrivée de migrants sur les côtes canariennes (au départ des villes du Sahara occidental occupé) s'est multipliée de près de 700% par rapport à 2019 selon le ministère de l'Intérieur espagnol : c’est devenu la route la plus meurtrière de toutes les routes existantes pour tenter d'entrer dans l'UE, près de 3 000 personnes tuées en moins de six mois.

En outre, le Maroc est le plus grand producteur de résine de cannabis au monde et occupe la première place en tant qu'exportateur de cette drogue vers l'UE. En 2017, un rapport de la New Frontier Data Foundation indiquait que « l'Espagne reçoit d'énormes quantités de résine de cannabis du Maroc, représentant 72 % du total saisi dans l'UE en 2017 ». Ces données ont été confirmées par le dernier rapport sur les marchés de la drogue dans l'UE, réalisé par EUROPOL et l'Observatoire européen des drogues, qui a indiqué que le flux en provenance du Maroc était le plus important, la substance arrivant du pays jusque sous les latitudes les plus éloignées : Europe centrale, républiques baltes et même pays scandinaves.

À ce facteur s'ajoute la politique économique intelligente du Maroc, qui, par l'intermédiaire de son corps diplomatique, offre également des contrats économiques avantageux aux gouvernements, aux entreprises et aux multinationales européennes pour faire des affaires dans les territoires occupés. À titre d'exemple, Siemens, Gamesa, Abengoa, Deutsche Bank, Enel Green Power et jusqu'à 30 grandes entreprises européennes bénéficient des facilités accordées par le Maroc.

L'exploitation du secteur énergétique - construction de parcs éoliens et photovoltaïques -, du phosphate - extraction et distribution -, du BTP - en raison des immenses besoins logistiques du territoire - et de la pêche sont extrêmement rentables et constituent l'un des principaux arguments avancés par le Maroc pour que l'Europe reconnaisse sa souveraineté sur le Sahara occidental.

Dans le cas de la pêche, il ne fait aucun doute que les riches zones de pêche sahraouies constituent l'option la moins chère et la plus proche pour exporter du poisson vers l'Europe. Les différents accords de pêche signés entre l'UE et le Maroc ont été déclarés illégaux par la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) pour avoir exploité les ressources naturelles d'un territoire en attente de décolonisation, ce qui n'a pas semblé importer à l'Europe, qui a fait appel dans toutes les instances possibles, avec le Maroc, pour continuer à pêcher dans la zone.

Parallèlement à ce travail politique et économique, effectué par les ambassades et consulats, le Maroc alloue des sommes importantes à la création de groupes de réflexion et de lobbies. Une pratique qu’il exerce dans le monde entier. Aux USA, il est le 17ème plus grand donateur de think tanks dans le pays, selon le rapport de janvier 2020 de Foreign Funding of Think Tanks in America, devant la France, d'autres pays européens et plusieurs multinationales. En Europe, ce travail de lobbying est devenu plus visible depuis la reprise de la guerre : présence dans les médias, rencontres avec d’anciennes autorités ou cadeaux à des gouvernements à différents niveaux.

Cependant, les multiples canaux de pression et de travail des Marocains n'ont pas donné les résultats escomptés. Leur principal lobby en Europe, la Fondation EuroMedA, avec laquelle elle était active au Parlement européen, ne figure plus dans le registre européen des représentants d'intérêt particulier, comme le révèle le site français Africa Intelligence. L'organisation comptait des politiciens européens influents qui étaient complétés par un groupe d'amitié informel UE-Maroc présidé par l'eurodéputé français Gilles Pargneaux, qui a perdu son siège aux européennes en 2019.

Cette structure avait pour but de contrebalancer le puissant intergroupe « Paix pour le peuple sahraoui », composé de plus de 100 députés européens et dont la présidence vient d'être renouvelée à Andreas Schieder du SPÖ autrichien. Une personnalité politique influente au sein de la famille social-démocrate européenne et dans son pays, où il a été secrétaire d'État aux Finances. Au cours de ses premières semaines à la tête de l’intergroupe, ses déclarations ont tendu les relations entre l'UE et le Maroc, qui traversent un moment compliqué après le clash avec l'Allemagne et avec l'arrêt imminent de la Cour de justice européenne, qui devrait de nouveau déclarer illégal l'accord de pêche en vigueur entre les parties.

« Le conflit au Sahara occidental dure depuis plus de 40 ans et la population sahraouie a vécu tout ce temps sous l'occupation marocaine et dans des conditions humanitaires intolérables. L'ONU et l'UE ne doivent plus oublier le peuple du Sahara Occidental. En tant que président de l'Intergroupe, je m'efforcerai de faire en sorte que l'UE prenne la tête des efforts internationaux visant à résoudre le conflit », a affirmé M. Schieder.

À cela s'ajoute le vaste réseau de délégations que le Front Polisario possède sur le vieux continent et dans l'UE elle-même - dirigé par le diplomate Ubbi Bouchraya - et au harcèlement juridique incessant que la RASD mène contre les pays et les entreprises qui exploitent les ressources naturelles du Sahara occidental. Ces victoires juridiques ont considérablement découragé l'implication économique des multinationales sur le territoire.

La marocanité du Sahara, une tentative ratée

La reconnaissance par Donald Trump de la « marocanité » du Sahara occidental est peut-être le plus grand succès diplomatique pour les Alaouites depuis la signature des accords de paix en 1991. Si la déclaration usaméricaine n'implique pas un changement du statut international du territoire, qui, selon les Nations unies et la grande majorité de la communauté internationale, reste un « territoire non autonome » en attente de décolonisation, elle renforce et enhardit les aspirations alaouites. Surtout, elle rend difficile le déblocage de la paralysie dans laquelle le conflit s'est enlisé depuis que le Maroc a refusé toute possibilité d'organiser un référendum dans les années 2000, car les USA, par action ou par omission, sont un acteur capable de ralentir ou d'encourager les tièdes efforts internationaux qui étaient sur la table avant la reconnaissance.

Cette décision a ouvert la voie à une poignée d'États pour suivre l'exemple des USA, ce que nous avons déjà vu dans le conflit palestinien avec la reconnaissance de Jérusalem comme capitale d'Israël et le transfert des ambassades dans la ville. Une déclaration tout aussi unilatérale, loin du droit international, mais qui a réussi à entraîner plusieurs pays dans sa sphère d'influence : le Honduras, le Paraguay, le Guatemala, Nauru ou l'Australie, tous sous le parapluie géopolitique des USA et avec à la clé de juteux accords commerciaux signés avec Israël.

Les USA ayant ouvert la porte, le Maroc et sa diplomatie ont utilisé la même formule, en faisant pression sur les États partageant les mêmes idées pour qu'ils suivent les traces de Trump. Mais cette fois, il n' a pas eu de chance, aucun pays n'a reconnu le Sahara occidental comme marocain, en grande partie parce que la décision est intervenue dans la dernière ligne droite de son mandat et parce que le statut juridique du Sahara occidental est encore plus fort que celui de la Palestine.

Les efforts diplomatiques alaouites se sont ensuite concentrés sur la tentative d’obtenir de l'Europe d'emboîter le pas et d'ouvrir au moins des consulats dans les territoires occupés - une reconnaissance indirecte de la souveraineté - en faisant pression sur plusieurs États et en offrant en échange une compensation financière substantielle. M. Bourita a déclaré que l'Europe devait « sortir de sa zone de confort ». Le rejet unanime de l'Europe a été l'une des raisons de la rupture des relations avec l'Allemagne, qui maintient une position plus ferme au milieu de la tiédeur qui caractérise la politique étrangère européenne.

Le Maroc n’a pas eu non plus la chance d'obtenir un soutien pour le "Plan d'autonomie" qu’il offre au Sahara, un cadre que Mohammed VI présente comme une alternative au référendum approuvé par l'ONU. Lors d'une conférence convoquée en janvier 2021, profitant de la confusion du départ de Donald Trump, il n'a réussi qu'à faire participer la France à la réunion.

Au vu des derniers mouvements, la diplomatie marocaine enhardie semble avoir mal calculé sa stratégie en Europe, qui rejette le rapprochement avec Rabat et sanctionne sa politique étrangère « insolente » sans la condamner ouvertement. Ce scénario ne profite pas non plus de manière significative au peuple sahraoui, qui continue de considérer l'UE comme un acteur passif qui refuse d'assumer son rôle potentiel dans le déblocage du conflit.
Tlaxcala, 23 mars 2021


mardi 23 mars 2021

L’historien Maati Monjib libéré





Image d'archive. DR.

L’historien a bénéficié aujourd’hui d’un placement en liberté provisoire ordonné par le juge d’instruction. 

Placé en détention préventive le 30 décembre dernier à la prison El Arjat de Salé, l’historien et militant Maati Monjib a été libéré provisoirement, ce mardi 23 mars, rapporte des sources concordantes.

« Le juge d’instruction a décidé de le remettre en liberté provisoire, les mesures sont en cours pour l’extraire de prison », a déclaré son avocat Me Mohamed Messaoudi à l’AFP, précisant que la santé de son client était « bonne même s’il a perdu 12 kilos ».

Son passeport lui a été confisqué et il ne pourra pas quitter le Maroc en attendant la tenue de son procès, indique nos confrères de Hespress.

 L’historien était à son dix-neuvième jour de grève de la faim et son état de santé était en continuelle détérioration, affirmait son comité de soutien.

Visé par une enquête judiciaire pour blanchiment de capitaux, l’historien avait été placé en détention préventive par le procureur du roi près du Tribunal de première instance de Rabat afin de poursuivre l’enquête au sujet de sa présumée implication dans des actes pouvant constituer des éléments de crime de blanchiment d’argent.

Demande au secrétariat d’État au Commerce d’Espagne de stopper la vente d'une corvette Navantia au Maroc

Tlaxcala via 57231hpv112065.ikoula.com 

19 mars 2021
Danilo Albin, Fausto Giudice Фаусто Джудиче فاوستو جيوديشي

Url: http://www.tlaxcala-int.org/article.asp?reference=31080

Plusieurs organisations de défense des droits humains présentent un appel pour tenter d'arrêter l'accord conclu avec le Maroc pour la construction d'un navire de guerre, dont le coût atteindrait 150 millions d'euros.

 

L'avocat Sidi Talebbuia devant le ministère des Affaires économiques, avec le recours déposé le 18 mars

Le secrétaire d'État au Commerce est une nouvelle fois interpellé sur la politique d'exportation d'armes menée par l'Espagne. Dans un document de 30 pages, un certain nombre d'organisations de défense des droits du peuple sahraoui ainsi que des groupes antimilitaristes et pacifistes demandent que l'accord entre Navantia et le Royaume du Maroc pour la construction d'une corvette soit arrêté, alléguant que cette opération impliquerait diverses violations du droit national et international.

Cette initiative, promue par une douzaine de groupes, parmi lesquels l'Observatoire aragonais pour le Sahara occidental, l'Association des journalistes sahraouis en Espagne ou le Centre Delàs d'études pour la paix, intervient après la diffusion de l’information en janvier dernier. On avait alors appris que le chantier naval espagnol avait remporté un contrat avec la Marine royale du Maroc pour « concevoir et construire un patrouilleur de haute mer qui représentera un million d'heures de travail pour les chantiers navals de la baie de Cadix », ce qui se traduira par « environ 250 emplois au cours des trois prochaines années et demie », selon un communiqué de Navantia.

Le contrat a été annoncé par la ministre des Finances, María Jesús Montero, lors d'une visite au chantier naval de San Fernando - où sont également construites les corvettes commandées par l'Arabie saoudite - au cours de laquelle elle était accompagnée de la présidente de Navantia, Belén Gualda. « Le projet a reçu le soutien institutionnel du gouvernement et son succès ouvre la porte à la passation de contrats pour d'autres unités similaires, ce qui impliquerait plus d'heures de travail et plus d'emplois pour l'industrie navale », a déclaré l’entreprise dans un communiqué. Selon ce qui a été rapporté par différents médias, le prix serait d'environ 150 millions d'euros.

Dans la lettre envoyée au Secrétaire d'Etat au Commerce, les ONG soulignent que le Maroc « occupe militairement la majeure partie du territoire non autonome du Sahara Occidental depuis novembre 1975 », après quoi elles soulignent « la situation actuelle de guerre ouverte dans le territoire », qui a repris « après un cessez-le-feu ou une cessation des hostilités entre le Front Polisario et le Royaume du Maroc qui a duré du 6 septembre 1991 au 13 novembre 2020 ».

« La nouvelle situation du territoire suite à la reprise des hostilités entre le Royaume du Maroc et le Front Polisario, après les événements de Guerguerat depuis novembre 2020 dern

lire : Url: http://www.tlaxcala-int.org/article.asp?reference=31080

Agression politique près de Taroudant

Par Amal Lahoucine, Taroudant

Le 8 mars 2021 dans mon village natal Taguergouste à Taliouine, à l' est de Taroudant, il y a eu une  tentative d'assassinat politique.

Les pauvres paysannes, qui venaient du centre-ville se sont arrêtées devant la scène suspecte, dénonçant l'attaque. L'un des jeunes hommes nous a dit que les agresseurs sont des professionnels du vol, nous avons tous marché jusqu'au centre du quartier, pour montrer notre désapprovation  et notre colère.

C’est la deuxième fois que j’avais senti l'odeur de la mort, la première fois était le 15 avril 2016, en embrassant  le front du martyr Brahim Saika. Dans la salle des morts de l'hôpital d'Agadir, après quinze jours d'arrestations, de torture et de réanimation de blessés, la mort du militant a été annoncée. Le Syndicat Paysan a été le théâtre de notre lutte pour la vérité sur cet assassinat, poursuivie encore aujourd'hui par Mey Aicha, mère du martyr, qui a assisté à l'inauguration du siège du syndicat le 07 janvier 2017 à Taguergouste.

Quatre ans se sont écoulés, avec  des batailles internes et externes, le mouvement paysan continue d'inclure les pauvres nomades.

 Le 08 mars 2021, en arrivant d'Agadir, j'ai rencontré mon camarde Mimoun au siège du syndicat. Nous sommes allés ensemble vers le domicile du combattant Rayss qui avait subi une agression. Sur notre chemin nous avons rencontré deux hommes arrêtés à coté d’un 4x4 noir. L’un d’eux, le propriétaire d’un nouveau bâtiment et de la voiture noire, a tenté de m'attaquer, il m'a arrêté et m'a empêché de passer en mettant ses mains sur ma poitrine. Après l’intervention de mon camarade il m’a laissé passer, ce n’était pas le bon moment pour m'agresser.

Nous poursuivons notre chemin, ils nous ont dépassé dans la voiture noire et se sont arrêtés devant la poste. Nous avons reconnu tous ces visages de la mafia immobilière, y compris  l’homme au visage blanc, acteur de toutes les machinations contre les paysannes pauvres. Un mouvement inhabituel agitait la ville, ils attendaient impatiemment en échangeant des appels téléphoniques.

C’était au cours de l'état d'urgence dans la ville. Avec notre camarade Rayss, nous avons parlé de son agression et d'autres sujets de la mafia immobilière. À 7h45 il m'a dit:  va chez toi, fais attention, ils ont décidé de t'attaquer. Je les ai alors vus s'agiter dans la ville, en communiquant entre eux.

J’ai marché tranquillement avec mon camarade vers l'ancien quartier, vieux de plus de cinq siècles. Son nom amazigh indique « lieu de résidence tranquille », situé au côté nord de la vallée, en face des champs d’Afra. Les tribus Souktana de Taliouine, région du Safran, c'est un endroit calme, Taguergoust  signifié en Tamazight « endroit décent pour descendre » qui durant son histoire a accueille des étrangers et des opprimés, de toutes les régions du pays, il le fait de même aujourd’hui.

Non loin de l'école où j' ai passé mon enfance, nous avons marché près de la route n° 10, le boulevard principal de la ville Taliouine. Une personne masquée, en costume noir que j'ai reconnue, qui marchait vite en direction opposée, nous a sauté dessus,  m’a attaqué et a bloqué mes jambes avec ses mains.

C'était le dernier moment que mon cerveau a enregistré, jusqu'à ce que je me réveille de ce cauchemar inquiétant. En essayant de me lever, je suis  tombé sur le sol, j'ai essayé à nouveau de me tenir debout. Mon camarde m'a demandé de m'asseoir à la recherche de mes affaires éparpillées sur le sol, mes lunettes cassées, j'avais du sang sur le visage, ma tête tournait.

Je suis entré au poste de la gendarmerie,  la figure en sang mais plein de courage comme d’habitude. Ils m'ont fourni un certificat médical, j’ai déposé ma déclaration. Je suivrai la situation de ma santé avec mon médecin neurologue, après deux mois j’aurai une autre visite pour un bilan de la situation de mon cerveau.

 

La bataille diplomatique pour le Sahara occidental en Europe : le Maroc perd des positions Néstor Prieto

Tlaxcala via 57231hpv112065.ikoula.com 

12:32 (il y a 7 heures)


Fausto Giudice Фаусто Джудиче فاوستو جيوديشي


Url: http://www.tlaxcala-int.org/article.asp?reference=31131

Le conflit du Sahara occidental a de multiples facettes : la guerre qui a suivi l'occupation marocaine (1975-1991) s'est développée parallèlement à une bataille diplomatique constante, parfois plus dure et aux conséquences plus dommageables que sur le terrain militaire.



Illustration d'Irene Blanco (@IreneWCKD)

Cette bagarre diplomatique, à la différence du conflit armé, n'a connu ni trêve ni cessez-le-feu. Durant ces plus de 40 ans de conflit, les structures diplomatiques marocaines et sahraouies, bien huilées, ont lutté sans discontinuer dans toutes les sphères internationales, soit directement, soit indirectement par l'intermédiaire de leurs alliés respectifs.

L'Union européenne est un élément clé du conflit : le siège de la France au Conseil de sécurité des Nations unies, le rôle de l'Espagne en tant que puissance administrante de jure et l'influence mondiale du club communautaire ont fait de cet espace l'un des champs de bataille diplomatique prioritaires pour les deux parties.

L'UE, entre lobbies et intergroupes

Le Maroc, conscient des avantages du maintien du statut actuel, puisqu'il contrôle de facto le territoire et exploite ses richesses, fonde sa stratégie diplomatique sur le torpillage de toute tentative de référendum et l'érosion de la projection internationale de la République arabe sahraouie démocratique (RASD). Ce deuxième aspect complète le premier, car faire taire la pression de la communauté internationale sur son occupation laisse un horizon dégagé à Mohammed VI.

La monarchie alaouite a toujours bénéficié du soutien total de la France, qui a fait du Maroc son principal centre d'influence en Afrique, ce qui a entraîné une complicité mutuelle dans la politique internationale. La France, que ce soit avec des gouvernements sociaux-démocrates, républicains ou libéraux, a opposé son veto au Conseil de sécurité de l'ONU à toutes les initiatives contraires aux intérêts de son partenaire, notamment par le veto qui, en 2013, a interdit à la MINURSO de surveiller les violations des droits de l'homme sur le territoire.

L'autre acteur européen clé, l'Espagne, évite d'assumer ses responsabilités internationales envers son ancienne colonie et affronte le conflit du Sahara comme s'il s'agissait d'un État tiers. Les relations conflictuelles avec le Maroc voisin, qui contrôle le flux de migrants et le trafic de drogue vers la péninsule ibérique et les îles Canaries comme moyen de pression, sont largement à l'origine de cette position tiède.

Cependant, le reste des pays européens ne s'est pas montré clairement aligné sur Rabat, et le fait est que la majorité du club communautaire prône « une solution juste, durable et mutuellement acceptable », un euphémisme utilisé par ces pays pour justifier leur profil bas dans le conflit. Il ne fait aucun doute que le non-alignement...
Lire : Url: http://www.tlaxcala-int.org/article.asp?reference=31131

 

 

lundi 22 mars 2021

*L’Etat veut acheter 170.000 nouvelles munitions de LBD

16 mars 2021 
 
 Le ministère de l’Intérieur a publié un appel d’offres pour «la fourniture de munitions cinétiques de défense unique (MDU) de calibre 40 [millimètres (mm)] au profit des forces de la sécurité intérieure», vendredi 12 mars 2021. Son «appel à la concurrence», ouvert jusqu’au 22 avril, concerne 160.000 munitions de défense unique, et 10.000 «munitions de défense marquante visible».Les munitions de calibre 40 mm sont utilisées pour les lanceurs de balles de défense (LBD). Généralisé pour le maintien de l’ordre en France dans les années 2000, ce lanceur est pourtant classé comme «arme de guerre» dans la réglementation internationale
 
Le Conseil de l’Europe a demandé à la France d’en suspendre l’usage Plusieurs des précédents appels d’offres pour des munitions de LBD avaient été remportés par la société française Alsetex, leader européen des produits de maintien de l’ordre installé à Précigné dans la Sarthe. Les LBD, eux, sont traditionnellement fabriqués par la société suisse Brügger & Thomet. Entre 2018 et 2019, durant le mouvement social des Gilets jaunes, une soixantaine de personnes ont été grièvement blessées par ces lanceurs, dont les munitions peuvent atteindre 360 km/h. Plus de dix d’entre elles ont perdu un œil.Les dégâts infligés par ces lanceurs sont régulièrement pointés du doigt par des professionnels de santé. En 2019, Laurent Thines, neurochirurgien au CHU de Besançon, avait lancé une pétition qui avait recueilli plus de 180.000 signatures .
 
Commentaire :
 
Acheter 170 000 munitions de LBD ?!... Euh... Pour quoi faire ??? 😳😳😳
Et pourquoi pas mettre cet argent dans les services de réanimation pour ouvrir des lits et soigner les gens ?... 🤔🙄
Ben non !... Depuis 4 ans, nous avons bien compris, que ce gouvernement et leur petit chef préfèrent mater, nasser, réprimer, blesser, éborgner et éliminer toute opposition... ☠😈☠
SOIGNER, SAUVER pour DÉCONFINER ?!.. Pi quoi encore ?!... C'est le p'tit macron qui est à l'Élysée, pas Jésus !!…j. LameryL’État veut acheter 170.000 nouvelles munitions de LBD
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artage

 

Devant l’ambassade du Maroc à Paris, RSF demande la libération du journaliste Maâti Monjib

Devant l’ambassade du Maroc à Paris, l’ONG Reporters Sans Frontières (RSF) a exigé ce vendredi 19 mars 2021, la libération “urgente” du journaliste et historien d’origine marocaine Maâti Monjib. En détention au Maroc depuis trois mois, il a entamé une grève de la faim le 4 mars dernier.

Lors de cette journée de mobilisation devant l’ambassade du Maroc à Paris, une dizaine de protestataires se sont rassemblés vers la mi-journée dans le quartier du XVIe arrondissement de Paris. Munis de 16 pancartes en référence au “16e jour de la grève de la faim” qu’a entamée le journaliste franco-marocain, et ce, afin de dénoncer une “arrestation abusive” qui dure depuis 2020.

Son épouse Christiane Dardé-Monjib, confie aux médias “être très fatiguée” et “inquiète pour sa santé”, d’autant plus que le mis en cause est “diabétique” et souffre d”une arythmie cardiaque“.

De son côté, le secrétaire général de RSF Christophe Deloire, dénonce une “incarcération arbitraire au terme d’une procédure inique“.

Notons que Maâti Monjib, 59 ans militant des droits humains, a été interpellé le 29 décembre 2020 pour une enquête préliminaire relative au “blanchiment de capitaux“.

Parallèlement à la date du 27 janvier dernier, celui-ci se voit condamné à un an de prison ferme pour “fraude” et “atteinte à la sécurité de l’Etat” au terme d’un procès ouvert en 2015 en rapport avec la gestion d’un centre qu’il avait créé pour promouvoir, entres autres, le “journalisme d’investigation“.

Par ailleurs, selon le classement de RSF sur la liberté de la presse, le Maroc détient la 133e place sur 180 pays , “cinq journalistes” y ont été détenus “pour des motifs abusifs”, souligne, M. Deloire

 

samedi 20 mars 2021

La France fournit au Sénégal les armes de la répression et s'en sert aussi contre ses manifestants

17/03/2021

La French touch

Par Maxime Reynié

Début mars, au Senegal, l’arrestation d’un opposant a déclenché des protestations violemment réprimées. On compte au moins dix morts. La majorité des armes et du matériel utilisé par les forces de l’ordre sénégalaises vient de France.

« J’ai du mal à expliquer tout ce qu’il s’est passé là-bas, c’était horrible », témoigne Samba, après qu’une grenade ait explosé contre son pied lors d’une manifestation au Sénégal. Elle vient d’Alsetex, une entreprise française. Depuis des années, les forces de l’ordre sénégalaises possèdent un arsenal made in France qui a en partie servi à réprimer les protestations dans le pays début mars. StreetPress a identifié quatre entreprises tricolores en cause : Alsetex, Nobel Sport Sécurité, SAPL et Arquus. 

Ces sociétés fournissent grenades lacrymogènes, lanceurs, balles en caoutchouc et blindés.

Au total, au moins dix personnes seraient mortes durant les manifestations et près de 600 ont été blessées. Tout est parti de l’arrestation de l’opposant politique Ousmane Sonko par le GIGN local. Pressenti comme un concurrent potentiel au président Macky Sall – en poste depuis neuf ans – pour les élections de 2024, son interpellation a déclenché une vague de contestations dans tout le pays, alors que la dégradation des conditions de vie s’accentue depuis, au moins, le début de la pandémie. Face à cette situation et la violence des manifestations, l’ONG Amnesty International se dit très préoccupée.

Des grenades lacrymogènes

Depuis plusieurs années déjà, le Sénégal possède un arsenal complet de grenades lacrymogènes made in France. Deux marques, qui équipent aussi les forces de l’ordre tricolores, se partagent le marché. D’un côté, l’entreprise Alsetex du groupe Etienne-Lacroix fournit des grenades CM6, bien connues des manifestants français depuis plus d’une vingtaine d’années. Une fois lancée, l’arme libère six palets en plastique noir contenant l’agent actif lacrymal qui vont rouler aléatoirement dans la foule et dégage une fumée sur une grande surface, environ 800 mètres carrés. Les forces de l’ordre sénégalaises utilisent même des modèles fabriqués en 2020, preuve que des livraisons récentes ont eu lieu. En plus des CM6, les polices locales manient également ses cousines que sont les CM3 et CM4, des grenades plus petites qui libèrent respectivement trois et quatre palets.

Alsetex partage le marché des lacrymos avec Nobel Sport Sécurité. Cette entreprise, dont le siège social est basé dans le 8ème arrondissement de Paris, fournit les policiers sénégalais avec des grenades MP7, PLMP 7B et 7C utilisées aussi en France depuis de longues années – notamment lors des opérations d’évacuation de Notre-Dame-des-Landes.

Visibles lors des affrontements, des grenades GM2L de Alsetex ont été également tirées sur la population. Celle-ci est bien connue en France pour avoir remplacé la GLI-F4, l’arme qui avait blessé 33 personnes durant le mouvement des Gilets jaunes – dont 5 mains arrachées. 

Sa successeuse est tout aussi dangereuse : avec 165 décibels à cinq mètres, elle surpasse le bruit d’un avion au décollage et dépasse le seuil de douleur sonore. Si elle est ramassée ou qu’elle explose contre un manifestant, elle peut provoquer de graves mutilations sur des membres du corps. La GM2L est classée en France comme arme de catégorie A2 qui correspond à du « matériel de guerre ».

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Samba a été gravement blessé au pied par une grenade dont les caractéristiques correspondent à une GM2L de l'entreprise Alsetex. / Crédits : DR

Depuis le début des manifestations, au moins deux hommes ont perdu une main à cause de grenades, dont un membre du GIGN sénégalais lors d’affrontements le vendredi 5 mars 2021. Samba a lui été gravement blessé au pied par une grenade le même jour à Dakar. Après être sorti de l’hôpital, il est encore traumatisé par les faits :

« On avait des accrochages avec la gendarmerie et la police. Il y a eu presque quatre heures de combat. À un moment, ils ont commencé à tirer avec des balles réelles ou des grenades lacrymogènes qui ont explosé. Et leurs voitures blindées ont foncé sur nous, les manifestants. »

lire : https://www.streetpress.com/sujet/1615980861-france-fournit-senegal-armes-repression-maintien-ordre-grenades-lacrymos

De nombreuses autres vidéos et photographies de blessures que StreetPress a pu récolter correspondent à des blessures et éclats de grenades GM2L. Certaines, comme la photo ci-dessous que nous avons flouté, peuvent causer d’énormes trous dans la peau.

Les lance-grenades

Ces grenades sont jetées directement à la main ou à l’aide d’un lanceur. Pour ces derniers, la police sénégalaise utilise des modèles hexagonaux dont des lanceurs Cougar et Cougar Multilight, également produits par l’entreprise Alsetex. Ils permettent le tir à 50, 100 ou 200 mètres. Si elle est utilisée en tir tendu, en visant directement une personne, cette arme peut provoquer de graves blessures. Le 16 novembre 2019, un gilet jaune a perdu son oeil de cette façon Place d’Italie à Paris.

La compagnie Alsetex a un second modèle de Cougar : le Cougar 12. Il s’agit de 12 lanceurs Cougar montés sur un seul véhicule, capable de tirer 12 grenades simultanément. Selon nos informations, le Cougar 12 est présent au Sénégal depuis au moins 2018. Il a notamment été utilisé le 8 mars à Dakar, une des grosses journées de mobilisation.

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Le Cougar 12 est équipé de 12 lanceurs Cougar montés sur un seul véhicule, capable de tirer 12 grenades simultanément. / Crédits : Capture d'écran YouTube de Dakarbuzz

Des balles en caoutchouc de calibre 12

Alors que la police et la gendarmerie ont tiré à balles réelles durant ces manifestations, des Sénégalais ont aussi été blessés via des armes en théorie non-létales. StreetPress a découvert que les forces de l’ordre locales ont utilisé des balles en caoutchouc à calibre 12. Des munitions françaises. Les douilles ressemblent à celles que l’on trouve dans nos forêts, tirées par les chasseurs. Aucune autre douille de ce calibre n’a été observée au Sénégal. Des images transmises par le photographe Thibaut Piel et le journaliste Tom Becques confirment cette utilisation.

La première de ces balles est produite par l’entreprise normande SAPL, spécialisée dans le maintien de l’ordre – elle a inventé les « gommes-cognes » (sorte de mini-flashball) et le bouclier des policiers en manif’. Elle ne sert pas à tirer directement mais à projeter des grenades via un tromblon accroché au bout du fusil. Bien que ce soit une balle à blanc, la société SAPL précise que ce genre de munitions peut « infliger de graves blessures », notamment à bout portant à cause de « la projection de poudre incandescente ».

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Une douille de balle SAPL. Les photos ont été transmises par sentv.info via WhatsApp. / Crédits : DR

La seconde balle est différente. C’est la Spartan 12/70, qui fait partie de la gamme de produits de Nobel Sport Sécurité. Cette dernière libère une bille en caoutchouc de 18mm. Avec une vitesse de 200 mètres par seconde, cette munition est mortelle à moins de cinq mètres et reste très dangereuse en dessous de 15 mètres. Sur plusieurs vidéos diffusées via l’application Telegram on peut voir des manifestants gravement blessés par ce type de munitions.

Selon nos sources, cette Spartan 12/70 a été utilisée par des gendarmes le 8 mars. Une vidéo montre la scène. On voit des pandores entrer dans une habitation et tirer à plusieurs reprises. « Une des balles m’a atteint au niveau de ma jambe et j’ai hurlé en disant que j’étais blessée », indique en wolof une jeune fille de 14 ans, au média sénégalais Sans Limite. Deux autres personnes ont été blessées dont une gravement à la tête. Cette dernière est actuellement en réanimation.

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Grâce à des photos envoyées par un contact sur place, StreetPress a pu observer qu’il s’agit de balles en caoutchouc de Nobel Sport Sécurité, la Spartan 12/70. / Crédits : DR

Des blindés

La vidéo dure une trentaine de secondes. Datée du 4 mars, elle montre un véhicule blindé de la gendarmerie qui fuit les manifestants dans la ville de Bignona, au sud-ouest du pays. Il s’agit d’un véhicule Bastion fabriqué par la société Arquus, anciennement Renault Truck Defense. D’autres modèles de ce blindé étaient également présents dans les rangs de l’armée sénégalaise pour le dispositif de la manifestation à Dakar le 5 mars. Le Sénégal a fait acquisition de ces véhicules en 2017, d’après un rapport de l’ONG Amnesty International.

Ce n’est pas le seul type de blindé français dans le pays. En avril 2018, un véhicule Dagger, aussi fabriqué par Arquus, est aperçu durant des heurts à Dakar. Ce petit véhicule blindé, qu’on appelle « PVP » dans le jargon militaire, est produit depuis 2008. Ils ont également été aperçus lors des manifestations le 8 mars à Dakar.

Un maintien de l’ordre post-colonial

Les entreprises françaises citées font un lobbying permanent depuis des années en Afrique en participant entre autres aux salons de l’armement Shield Africa). Comme toutes les anciennes colonies qui ont vu une exportation du fonctionnement français en maintien de l’ordre, le Sénégal garde une relation proche avec la France pour former et équiper ses forces régaliennes. En 2009, la formation des polices et des gendarmeries africaines coûtait environ 18 millions d’euros par an à l’Hexagone.

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S’il n’y a pas eu de nouveaux mouvements depuis le 8 mars – une « manifestation pacifique » était prévue le 13 mais a été reportée sine die –, les observateurs internationaux sont inquiets face à ces violences. Amnesty International a demandé au gouvernement sénégalais d’ouvrir « des enquêtes impartiales sur les victimes des dernières manifestations ».

Contactés, les entreprises françaises comme Alsetex et Nobel Sport Sécurité n’ont pas donné suite à nos sollicitations. Tout comme le ministère de l’Intérieur sénégalais.

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