Rosa Moussaoui
Jeudi, 20 Juillet, 2017
L'Humanité
La
mémoire du héros de la guerre du Rif imprègne le mouvement populaire
qui secoue le nord du Maroc. Les activistes s’y réclament de son
éphémère République.
Au
sommet de la colline, au milieu des oliviers, une ruine n’en finit plus
de semer ses petites briques rouges dans les broussailles qui la
dévorent. Ces quelques murs rongés par le temps et la brise marine,
c’est tout ce qui reste de l’« oficina » d’Abdelkrim El Khattabi, le
héros de la guerre livrée par les insurgés du Rif aux colonisateurs
espagnols et français entre 1920 et 1926 (voir notre édition du 22
juin). C’est là, dans une bâtisse prise à l’administration coloniale,
que le chef militaire établit, à l’orée de son village natal d’Ajdir,
son quartier général et, à partir de 1922, le siège de son éphémère
République, premier embryon d’État né d’une lutte anticoloniale.
Ces
vestiges ont bien failli disparaître, en 2015, lorsque, sous prétexte
d’étendre le réseau d’adduction d’eau, les autorités ont fait
entreprendre des travaux de creusage qui ont encore fragilisé ce qui
reste de l’« oficina ». « Sabotage ! » avait alors dénoncé l’association
Mémoire du Rif, qui soupçonne les autorités de vouloir « encercler le
lieu en prévision de sa destruction totale ». Jamais inscrit au
programme des monuments à rénover, l’édifice est sciemment livré à
l’abandon.
« Nous sommes toujours dans les mains des banques françaises »
Rien, pas une plaque, pas un panneau n’évoque l’histoire
du lieu. Maladroitement peint à la main, sur un mur, seul un étendard
rouge, frappé d’un losange blanc, d’une lune et d’une étoile vertes,
témoigne d’une mémoire toujours vive. C’est le drapeau de la République
du Rif, celui qui flotte au-dessus des manifestations à Al Hoceïma, à
Imzouren, à Nador, comme un défi au pouvoir monarchique. Sa fabrication,
sa vente sont interdites au Maroc et la bannière ne circule que sous le
manteau.
Lire l'article
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire