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lundi 10 juillet 2017

Le Président Macron « taliban » de l’économie du marché, cherche sa voie : « Laisser faire laisser passer ».



Moha Oukziz, le 5/07/2017. France

L’intervention du Président français devant le Parlement à Versailles à la veille du discours de son premier ministre est une première dans l’histoire de la Ve République non pas parce qu’il est intervenu devant les élus -ces prédécesseurs ont usé de leur droit constitutionnel de s’exprimer devant les députés-, mais parce que c’est la première fois que le Président de la République définit et prononce en place et en lieu du Premier ministre le discours général de la politique du gouvernement. Le lendemain, le Premier ministre quant à lui en tant que collaborateur prononce le discours de la mise en place de la politique présidentielle. 

Le discours du Président qui vaut discours de la politique générale du gouvernement est une première, néanmoins, la rationalisation du pouvoir législatif n’est pas d’aujourd’hui, il s’agit même de l’esprit de la Constitution du 4 octobre 1958 qui a réduit les pouvoirs du législateur en la faveur de l’exécutif, manoeuvre de Charles de Gaulle à laquelle les forces de l’opposition politique et sociale de l’époque ont été farouchement opposé (voir les débats parlementaires précédant l’adoption de la Constitution du 4 octobre 1958). Les études universitaires concernant les institutions en France concluent que la tradition et l’héritage monarchiques en France sont très forts et présents même actuellement. La forme républicaine de l’Etat français est le fruit des luttes ouvrières de longue date même si la classe ouvrière en France n’a jamais disposé des pouvoirs. 
Le Président de la République, pratiquement seul à la tête de l’exécutif, a livré son concept et les orientations de sa politique générale. Il a privé, par le jeu constitutionnel, les députés de toute discussion, parce qu’il est irresponsable devant le Parlement et ne peut pas répondre aux questions  des députés et en même temps c’est bien le Président qui définit les orientations de la politique générale de son gouvernement et le Premier ministre est ainsi réduit à un agent de l’Etat dont la tache est d’appliquer ce que le Président souhaite au pays et au peuple.


Le Président de la République a pratiqué la rationalisation du pouvoir législatif que ses prédécesseurs ont approuvé, autrement dit l’équilibre voulu par la Constitution de 58 entre le pouvoir règlementaire et le pouvoir législatif conduit à réduire le législateur à une chambre d’enregistrement des décisions et normes réglementaires et législatives dont le Président maitrise l’élaboration, la présentation, la promulgation et l’application. De bout en bout les pouvoirs sont concentrés à l’Elysée. Ainsi le rôle et le pouvoir du Premier ministre sont vidés de toute substance et il est réduit à un exécutant des choix présidentiels. 
Le pouvoir exécutif de la République n’est plus dichotomique. Ce pouvoir dorénavant prend le dessus sur le législateur par voie d’ordonnances comme le veut la volonté de la Constitution mise en place en premier lieu par Charles de Gaulle. En second lieu par jeu de conséquences, l’exécutif totalement présidentiel concentre les deux pouvoirs en sa main jupitérienne.
Le Président de la République est contre la protection qu’il qualifie d’assistanat et de charité, il est contre le service public, il aspire à « l’esprit des lumières », à la « liberté forte », à « l’efficacité », au «  droit de faire » et à la « possibilité de faire ».  
La liberté dans l’esprit et la politique du Président, seul chef de l’exécutif, est celle de la liberté comme c’est défini dans les lois décrets d’Allard et Le Chapelier de 1791. 

La liberté au sens du chef de l’exécutif, le Président de la République, est le synonyme de «  laisser faire laisser passer ». c’est aussi le synonyme au gout du chef de l’Etat d’exploiter les salariés sans protection aucune. La liberté au sens du Président est l’équité et non l’égalité des citoyens car cette dernière nuit aux règles du marché et au libre échange. La solidarité et l’égalité ne vont pas de pair avec la liberté des patrons que le Président s’est chargé de défendre en « un taliban de l’économie du marché ». 

La liberté dans le langage du Président est celle de l’Ecole de Chicago née à Paris à laquelle intellectuellement et politiquement adhère le chef de l’Etat. Von Hayek et d’autres théoriciens du libéralisme sont contre l’autre courant libéral interventionniste, c’est ce « chemin de l’efficacité » que Le Président de la République veut faire emprunter au peuple français au nom de la liberté. 

Dans ce contexte, l’Etat aux yeux du Président doit continuer à se réduire à arbitrer entre les salariés, le peuple d’un côté et les patrons d’un autre côté et toujours en la faveur de ces derniers. L’Etat doit continuer, aux yeux de l’exécutif, à abandonner d’être règlementaire mais juste régulateur des enjeux politiques sociaux et économiques en la faveur du marché et de la liberté du commerce et de l’industrie. L’Etat doit continuer à être géré administré comme toute autre personne de droit privé, comme toute entreprise, d’où la budgétisation des besoins collectifs et les biens communs de la collectivité nationale. 

Bref, l’Etat, toujours aux yeux de Jupiter qui s’inspire des obscurités de «l’esprit des lumières» doit se maintenir à ses seules fonctions régaliennes, c’est à dire à ses pouvoirs de contraindre le peuple et de ne pas entraver la liberté du commerce et de l’industrie comme c’était le cas au temps des «lumières». Le Président dans son discours à Versailles croit avoir «la possibilité de faire » et réclame même « le droit de faire » sans être interrogé comme c’était le cas à Versailles d’hier et d’aujourd’hui. Et le Président ne manque pas de force et annonce sa «liberté forte» au poignet serré d’achever toute protection sociale, tout droit et liberté individuelle mais aussi toutes les libertés publiques, acquises par des luttes ouvrières et faites de leurs sacrifices. 

Le Premier ministre, pardon le collaborateur du Président, observe que «  nous dansons sur un volcan ». Ici le « Nous » désigne le gouvernement, le Président et les classes dominantes. Le volcan ne s’est jamais éteint,  certes, espérons et œuvrons pour que les danses et des ballets des patrons et de leur exécutif prennent fin. 

Il reste à signaler que les deux forces d’opposition, PCF et FI, ne prétendent pas organiser le rapport de force nécessaire à la lumière des luttes ouvrières et à la hauteur de cet instant historique, de structurer les masses des salariés en force politique solide non pas pas seulement mettre fin aux «danses» des dominants mais d’œuvrer à l’accomplissement d’une autre société et l’aiguiller vers l’abolition de l’exploitation des salariés. 

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