analyse
Ce vendredi après-midi, à Bruxelles, un rassemblement fera écho à la
manifestation de Washington pour exiger la fermeture de Guantanamo, 17
ans après sa création. Alors que Donald Trump a finalement décidé de
garder la prison ouverte, rompant ainsi totalement avec la volonté de
son prédécesseur Obama de la fermer, quel avenir peuvent véritablement
espérer les détenus?
Guantanamo, kézako?
Il y a 17 ans, le 11 janvier 2002, une base militaire américaine située à Cuba fut transformée en centre de détention: la tristement célèbre et très controversée prison de Guantanamo. Au total, près de 779 hommes en provenance d'une quarantaine de pays différents y ont été enfermés. À l'époque, les détenus étaient présentés comme de dangereux terroristes suspectés d'appartenir à Al-Qaida ou aux Talibans. L'administration américaine venait tout juste d'entamer sa "guerre contre la terreur" ("Global War on Terror"), en réplique aux attentats du 11 septembre 2001, et affirmait que ces hommes étaient susceptibles de détenir des informations capitales pour la sécurité du pays.De nombreux captifs furent arrêtés, tandis que d'autres furent achetés à un prix de 5.000 dollars par tête ou encore kidnappés à l'arrivée des troupes américaines en Afghanistan. Vêtus de combinaisons orange, enchaînés, mis en cage et entourés de soldats, ces hommes devinrent la démonstration de force de l'Occident. Le fait de les enfermer en dehors du territoire des États-Unis envoya un signal fort au monde entier: ce lieu de détention échapperait à tout cadre juridique.
Qu'est-ce qu'il s'y passe?
Des détenus de la CIA ont été soumis à une "réhydratation" ou à une alimentation rectale sans nécessité médicale. Le plateau repas du Pakistanais Mahjid Khan, incarcéré en 2006, composé de houmous, de pâtes en sauce, de noix et de raisins fut un jour "réduit à l'état de purée" et introduit par voie rectale.
Toujours selon le rapport, les officiers de la CIA ont également menacé au des détenus de maltraiter leurs enfants, d'abuser sexuel de la mère de l'un d'entre eux ou encore de lui "couper la gorge".
Si par la suite, les sévices corporels furent abandonnés au profit de pressions psychologiques, l'image des États-Unis en matière de droit humain fut définitivement ternie par la prison de Guantanamo. "Et tant qu'elle restera ouverte, des violations de ces droits continueront d'être commises", a déclaré Amnesty International États-Unis.
Pourquoi est-il si difficile de fermer la prison?
L'ancien président, qui avait "hérité" de 242 détenus à son arrivée au pouvoir, a finalement dû se contenter de tenter de vider la prison au compte-gouttes avec des transferts vers des pays alliés de quelques dizaines d'individus jugés libérables.
Selon Luk Vervaet, le fait que l'opinion publique ne s'offusque pas davantage des pratiques en vigueur au sein de la prison pourrait également expliquer pourquoi elle n'est toujours pas fermée.
"L'un des grands problèmes de Guantánamo, c'est l'indifférence par rapport à ce qu'on a d'abord appelé une 'exception américaine'. Mais selon moi, ce n'est plus une exception, ça fait aujourd'hui partie de notre culture. On s'est habitué à avoir ce genre de prison sans droit, dans lesquelles on peut être enfermé sans accusation précise, sans procès, et de manière illimitée. Je trouve cela très grave. C'est une sorte d'indifférence et de routinisation de ce qui était auparavant l'exception. On vit avec et il y a encore très peu de gens qui s'en soucient. On ne voit pas de grandes vagues de protestation".
"Deuxièmement, tant que la 'guerre contre la terreur' se poursuivra, je pense que l'on continuera à voir de telles situations au niveau des pratiques carcérales", ajoute-t-il.
Peut-on encore espérer sa fermeture?
Fin janvier 2017, Donald Trump a décidé de garder la prison de Guantánamo ouverte, rompant totalement avec les tentatives finalement vaines de son prédécesseur Barack Obama de la fermer. Partant du principe que les détenus ne partiront plus, les États-Unis ont donc décidé de pérenniser la prison, et le Pentagone a ordonné au commandant de la force opérationnelle qui la dirige, l'amiral John Ring, de s'assurer qu'elle puisse rester ouverte pendant encore 25 ans.Pour Luk Vervaet, cela semble donc "très mal parti". "Il n'y a rien de décidé. L'administration Trump doit encore soumettre le projet de construction de trois nouvelles ailes à la prison pour soigner les détenus malades et vieillissants. L'idée est sur la table. Ils envisagent également d’accueillir de nouveaux détenus. Certaines rumeurs disent que des membres de l'État islamique y seront enfermés".
Un avis que partage Simon Petermann: "Donald Trump s'était engagé durant sa campagne à ne jamais fermer la prison de Guantánamo et au besoin de la remplir à nouveau de 'mauvais gars', pour reprendre son expression. La quarantaine de détenus risquent de croupir encore longtemps dans cette prison de haute sécurité, d'autant que ce n'est certainement pas une priorité. Trump a d'ailleurs accusé Obama d'avoir libéré 122 détenus qui seraient retournés selon lui sur le champ de bataille. Une accusation qui n'était que partiellement vraie. En réalité, selon les services de renseignements, 35% des prisonniers transférés par George W. Bush ont rejoint ou sont soupçonnés d'avoir rejoint les rangs terroristes. Sous Barack Obama, le chiffre était tombé à 11,5%".
Quelle solution?
Les associations et des milliers de personnes se battent encore pour la
fermeture de Guantánamo. Ce vendredi 11 janvier, une manifestation aura
ainsi lieu à Washington, mais aussi à Bruxelles et
d'autres villes du monde entier. Pour Luk Vervaet, c'est une
mobilisation internationale qui finira peut-être par faire bouger les
choses... mais elle semble loin d'arriver. "On n'entend pas de grande
condamnation, même si tout le monde sait que ce qu'ils font là est
illégal et en dehors de toutes les conventions sur les droits de l'homme
signées après la Deuxième Guerre mondiale. C'est dramatique",
regrette-t-il.
Reste également à savoir ce qu'il se passerait pour les détenus toujours enfermés souvent sans aucune preuve. "La décision revient aux autorités américaines. Il y a au moins 5 détenus qui ont été déclarés libérables mais rien ne bouge depuis que Trump est au pouvoir. D'autres sont là sans procès, sans chef d'accusation, alors qu'ils y ont droit sans quoi ils doivent être libérés", explique encore Luk Vervaet.
"Ceux dont le transfert a été approuvé doivent être transférés immédiatement, et tous les autres prisonniers doivent être inculpés et jugés de manière équitable ou libérés, afin que cette institution honteuse puisse fermer ses portes définitivement", réclame de son côté Amnesty International.
Il reste aujourd'hui 40 détenus à Guantánamo, âgés de 37 à 71 ans. Le Yéménite Ali Hamza Ahmad al-Bahlul, un lieutenant d'Oussama ben Laden, a été condamné à perpétuité. Un autre attend sa sentence, qui doit être prononcée à l'été 2019. Quant aux 26 autres, ils sont considérés comme trop dangereux pour être libérés et attendent sans jugement depuis 2002.
Reste également à savoir ce qu'il se passerait pour les détenus toujours enfermés souvent sans aucune preuve. "La décision revient aux autorités américaines. Il y a au moins 5 détenus qui ont été déclarés libérables mais rien ne bouge depuis que Trump est au pouvoir. D'autres sont là sans procès, sans chef d'accusation, alors qu'ils y ont droit sans quoi ils doivent être libérés", explique encore Luk Vervaet.
"Ceux dont le transfert a été approuvé doivent être transférés immédiatement, et tous les autres prisonniers doivent être inculpés et jugés de manière équitable ou libérés, afin que cette institution honteuse puisse fermer ses portes définitivement", réclame de son côté Amnesty International.
Il reste aujourd'hui 40 détenus à Guantánamo, âgés de 37 à 71 ans. Le Yéménite Ali Hamza Ahmad al-Bahlul, un lieutenant d'Oussama ben Laden, a été condamné à perpétuité. Un autre attend sa sentence, qui doit être prononcée à l'été 2019. Quant aux 26 autres, ils sont considérés comme trop dangereux pour être libérés et attendent sans jugement depuis 2002.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire