Par : Hans Corl, ancien sous-secrétaire général adjoint aux affaires juridiques et Conseiller juridique des Nations Unies,
21/4/2017,
21/4/2017,
À la demande du Conseil de sécurité des Nations Unies, j’ai produit le 29 janvier 2002 un avis juridique au Conseil relatif au Sahara Occidental. Je l’ai fait en ma qualité de Conseiller juridique de l’ONU de l’époque. L’avis concerne la légalité dans le contexte du droit international des mesures prises par les autorités marocaines concernant l’offre et la signature de contrats avec des sociétés étrangères pour l’exploration des ressources minérales au Sahara Occidental. Ma conclusion était que, si des activités d’exploration et d’exploitation devaient être entreprises au mépris des intérêts et des souhaits du peuple du Sahara Occidental, elles le seraient en violation des principes du droit international applicables aux activités sur les ressources minérales dans les Territoires non autonomes.
C’était il y a 13 ans. Depuis, j’ai suivi à distance l’évolution au Sahara Occidental, notamment en raison de l’accord de pêche conclu entre l’Union européenne (UE) et le Maroc en 2007 et des protocoles de cet accord. À mon avis cet accord n’est pas conforme au droit international dans la mesure où il concerne le Sahara Occidental.
Début décembre 2014, j’ai été invité à participer à un atelier international sur « L’approche de l’Union européenne envers le Sahara Occidental », organisé par l’Université de Bologne dans le cadre de la présidence italienne de l’Union Européenne. Cela m’a fait à nouveau me pencher de plus près sur la situation dans la région. Je me suis concentré en particulier sur la question de savoir si la Mission des Nations Unies pour le Référendum au Sahara Occidental (MINURSO), le Secrétaire général et son Envoyé personnel, l’ambassadeur Christopher Ross, avait fait un quelconque progrès vers une solution à la situation au Sahara Occidental. Dans ce contexte j’ai noté le conflit évident entre la dernière résolution du Conseil de Sécurité sur le Sahara Occidental et l’attitude affichée dans un discours à la nation prononcé le 6 novembre 2014 par le roi Mohammed VI du Maroc. Cela m’a fait réaliser que la situation était très préoccupante.
Dans cette résolution (S/RES/2152/2014 du 29 avril 2014) le Conseil de sécurité « demande aux parties de poursuivre les négociations sous les auspices du Secrétaire général, sans conditions préalables et de bonne foi, – – – en vue de parvenir à une solution politique juste, durable et mutuellement acceptable qui pourvoie à l’autodétermination du peuple du Sahara occidental dans le contexte d’arrangements conformes aux buts et principes énoncés dans la Charte des Nations Unies, et prend note du rôle et des responsabilités des parties à cet égard ».
Dans son discours, le roi dit que la nation «célèbre fièrement le trente-neuvième anniversaire de la Marche verte ».[Note de la rédaction: La Marche verte a été « en novembre 1975, une manifestation stratégique de masse coordonnée par le gouvernement marocain, pour forcer l’Espagne à remettre au Maroc la Province contestée du Sahara, province espagnole autonome et semi métropolitaine. »]. Le problème est que cet événement était probablement une violation de l’article 49 de la Quatrième Convention de Genève, qui interdit à une puissance occupante de déporter ou transférer des parties de sa propre population civile dans le territoire qu’elle occupe. La citation suivante du discours doit être soulignée en particulier :
« Je dis Non à la tentative visant à modifier la nature de ce conflit régional en le présentant comme une affaire de décolonisation. En effet, le Maroc dans son Sahara, n’a jamais été une puissance d’occupation ou une puissance administrante. Il exerce plutôt les attributs de sa souveraineté sur sa terre »
Il est évident que ce discours est totalement incompatible avec la résolution du Conseil. Il contredit clairement l’avis consultatif de 1975 de la Cour internationale de Justice dans l’affaire du Sahara Occidental (Sahara Occidental, avis consultatif, rapport CIJ 1975, p. 12) dans laquelle la Cour n’a pas constaté l’existence de liens juridiques de nature à modifier l’application de la résolution 1514 (XV) de l’Assemblée générale de Nations Unies quant à la décolonisation du Sahara Occidental et en particulier l’application du principe d’autodétermination grâce à l’expression libre et authentique de la volonté des populations du territoire.
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