Depuis novembre 2015 et les terribles attentats qui ont touché la France,
l’état d’urgence a été instauré et renouvelé à cinq reprises. Alors que
son objet est de prévenir de nouvelles attaques, les mesures de l’état
d’urgence ont été utilisées pour interdire 155 manifestations. Tous les 3
jours environ, une manifestation est interdite en France sous ce
prétexte. Par ailleurs, 595 interdictions individuelles de manifester
ont été ordonnées par les préfectures en France, sous l’argument de
prévenir les violences lors des manifestations, alors que le plus
souvent il n’existait que peu ou pas d’éléments démontrant que ces
personnes auraient participé à des violences.
L’Etat
n’a pas été en mesure de prouver pour chacune de ces interdictions
qu’elles visaient à prévenir une menace spécifique, qui ne pouvait être
évitée qu’en limitant un droit pourtant fondamental. De telles mesures,
sans lien démontré avec la lutte contre la menace terroriste, ont un
impact démesuré sur le droit des personnes à exercer leur liberté
d’expression pacifique.
Ainsi, de nombreuses
personnes interdites de manifester avaient simplement été présentes lors
de manifestations ayant donné lieu à des actes de violences par des
manifestants, mais rien ne permettait de leur reprocher la participation
aux dites violences.
639
mesures d’interdictions individuelles de manifester ont été prises
contre des personnes dont 21 dans le cadre des manifestations liées à la
COP21, et 574 dans le cadre des manifestations contre la loi travail
Des pratiques policières contestables
Nous
avons aussi pu constater un usage récurrent de certaines pratiques de
maintien de l’ordre contraires au droit international.
Par
exemple, la fouille systématique et la confiscation d’outils de
premiers secours, tels que les sérums physiologiques, les lunettes qui
ne peuvent pas être considérées comme des armes par destination,
empêchent les personnes de se soigner. Le fait que du matériel de
premier secours ait été confisqué aux street medics est aussi choquant,
car ce matériel peut être indispensable pour prodiguer des soins de
première urgence. :
"À
chaque fois on leur expliquait qu’on avait besoin de ce matériel pour
prodiguer les premiers secours aux manifestants qui, par exemple, se
sentaient mal à cause des lacrymogènes. Ils nous répondaient qu’on ne
devait pas venir en manifestation si on avait peur que les lacrymogènes
puissent être utilisés".
Annaliese, une Street-Medic (secouriste) à Nantes
Des
stratégies de maintien de l’ordre peuvent aussi mener à une hausse des
tensions et limiter de manière disproportionnée le droit de manifester.
Par exemple, l’usage fréquent et prolongé des nasses, cette pratique qui
vise à confiner des manifestants pour les empêcher de manifester ou de
rejoindre une manifestation, est une atteinte disproportionnée au droit
de manifester, en particulier lorsque les personnes « nassées » sont des
manifestants pacifiques. Pourtant, il existe des stratégies de maintien
de l’ordre qui visent à diminuer les tensions plutôt qu’à les attiser.
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