Salma Semmar, actumaroc, 28/5/2025
Malgré des décennies de discours officiels, des lois renforcées et des campagnes de sensibilisation récurrentes, la corruption reste solidement enracinée dans le paysage institutionnel et économique marocain. Pis encore, selon plusieurs indicateurs nationaux et internationaux, elle tend à se développer sous des formes toujours plus sophistiquées et nuisibles. La promesse d’un Maroc sans corruption, souvent évoquée, semble encore lointaine.
Des lois… mais peu de résultats
Le Royaume s’est doté, depuis les années 2000, d’un arsenal juridique important pour lutter contre ce fléau : peines alourdies, amendes sévères, création de l’Instance nationale de la probité (INPPLC), mécanismes de contrôle administratif renforcés. Pourtant, les résultats ne suivent pas. La législation actuelle souffre de deux failles majeures : le refus d’instituer un véritable cadre légal contre l’enrichissement illicite, et l’impossibilité pour les associations et ONG d’ester en justice dans les affaires de corruption. Un verrou judiciaire dénoncé par de nombreux acteurs de la société civile.
Procès à rallonge, jugements biaisés et impunité perçue
Les affaires judiciaires se multiplient, parfois avec des noms retentissants : ministres, présidents de communes, responsables d’entreprises publiques. Les scandales éclaboussent tant le secteur public que le privé, mais les verdicts mettent des années à tomber, nourrissant un sentiment d’impunité.
Pire encore, la corruption infiltre parfois les tribunaux eux-mêmes, pervertissant le sens même de la justice. Des témoignages crédibles rapportent des décisions rendues sous influence, des classements injustifiés ou des peines minimisées en échange de pots-de-vin. Lorsque l’arbitre devient corrompu, c’est tout l’édifice institutionnel qui vacille. Cette forme de corruption, plus sournoise et plus destructrice encore, mine la confiance des citoyens dans l’État de droit.
Une corruption du quotidien, banalisée
Au-delà des grands scandales, la corruption ordinaire est devenue un réflexe routinier dans plusieurs administrations : un billet glissé pour une autorisation de construire, une attestation de résidence, une licence d’exploitation, un procès verbal, … Les délits les plus fréquents sont aussi les plus invisibles, échappant à la traçabilité. Et malgré des campagnes de sensibilisation fréquentes, les comportements ne changent pas.
Un impact économique paralysant
Selon les estimations de plusieurs rapports, la corruption coûte au Maroc entre 2 et 3 points de croissance par an, freine les investissements étrangers, alourdit les charges des PME, et creuse les inégalités sociales. Elle est un obstacle direct à la modernisation de l’État et à l’émergence d’un modèle de développement réellement équitable.
Et maintenant ? Une année « zéro corruption » ?
La question mérite d’être posée : à quand une année sans corruption ? Cette formule, à la fois utopique et provocante, pourrait être le point de départ symbolique d’un véritable changement, si elle s’accompagne d’une volonté politique ferme, de réformes structurelles et d’une implication réelle de la société civile et des citoyens.
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