J’ai vu pleurer les enfants du Rif. Je les ai vus pleurer un des leurs. Cueilli dans la fleur de l’âge, pour avoir défendu le droit des rifains à la dignité.
J’ai vu pleurer les enfants du Rif. Et nul ne pourra taxer ces enfants-là, de simuler chagrin et peine. Nul ne pourra non plus crier à la manipulation.
J’ai vu pleurer les enfants du Rif. Les enfants ont une intuition innée de ce qui est juste et de ce qui ne l’est pas. Ils pleuraient ce jour-là, de voir autant d’injustice s’en prendre à leur région, au point de tuer impunément ce grand frère qui défendait leurs droits légitimes à l’instruction, aux soins médicaux, à l’emploi, à la bonne gouvernance, au désenclavement et à tout le reste ………
J’ai vu pleurer les enfants du Rif et leurs larmes rejoindre les rivières de larmes et de sang rifain, soumis aux ignominies du despotisme depuis si longtemps.
J’ai vu pleurer les enfants du Rif et j’ai pleuré avec eux d’impuissance, face à la monstruosité du régime et au lourd tribut payé par les marocains pour que persistent injustice, népotisme, corruption, féodalisme et répression, ces infamies consubstantielles de la « Hogra ».
J’ai vu pleurer les enfants du Rif et ces larmes-là me hanteront jusqu’à mon dernier souffle. Si le despote avait ce soupçon d’humanité que le marketing lui prête indument, il en aurait immanquablement pleuré y voyant l’image de ses propres enfants, accablés de désespoir et de compassion, pour les parents d’Imad.
J’ai vu pleurer les enfants du Rif, parce qu’on leur renvoyait leur frère, dans une boîte, scellée comme fut scellé, un jour, le destin de leurs grands-parents, condamnés à errer tels des vagabonds, se terrer comme des animaux, fuir le pays ou se laisser mourir de froid, de faim et de maladie dans les montagnes.
J’ai vu pleurer les enfants du Rif et sangloter à grand cris. Et ces sanglots-là ont submergé les incantations impuissantes, d’un Imam qui en appelait au ciel pour qu’il ait pitié de notre pays.
J’ai vu pleurer les enfants du Rif. Mais ils ne pleuraient pas seulement Imad El Attabi, perdu à tout jamais pour notre pays. Ils pleuraient aussi leurs propres martyrs, chacun d’entre eux en comptant au moins un dans sa famille.
J’ai vu pleurer les enfants du Rif. Ils pleuraient aussi leur propre sort, leur existence et leur avenir perdus à tout jamais.
Je n’ai pas vu tuer Imad, mais j’ai vu assassiner notre jeunesse dans le Rif et ailleurs. Un assassinat prémédité de longue date et qui a mué, pour mieux se fondre dans le décor, passant de la liquidation physique au meurtre par l’enclavement, l’ostracisme, l’ignorance, le chômage, l’injustice et le désespoir.
Je ne connaissais pas Imad El Attabi. Pas plus que je n’ai assisté à cette tragédie, dans la tragédie, son assassinat, son transfert subreptice en hélicoptère et enfin son retour au pays, dans une boîte, au mépris des règles les plus élémentaires de l’Islam, après l’avoir maintenu en vie artificiellement histoire de tromper l’opinion.
Mais j’ai vu pleurer les enfants du Rif !
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