Comment le roi
allait-il réagir aux événements du Rif ? Au Maroc, toute la population
retenait son souffle samedi soir. Mohamed VI allait parler ! Enfin !
Depuis des mois, le nord du pays – le Rif berbère notoirement
sous-développé - est en proie à des convulsions socio-économiques avec
ascendance politique, et la réponse du pouvoir, dépassé par la vigueur
et la ténacité d’une contestation peu ou pas anticipée, s’était surtout
manifestée par une répression bête et méchante. On attendait donc l’avis
de « M6 », comme on surnomme le roi, celui qui dispose de l’essentiel
des pouvoirs en son royaume. Hélas ! pour ceux, nombreux au Maroc, qui
voient toujours en lui un homme providentiel, le souverain s’en est lavé
les mains.
Un parfum d’amertume
Certes, Mohamed VI a consacré la majeure partie de
son discours du trône aux événements dans le nord, mais ce fut pour
fustiger les politiques et les fonctionnaires qu’il estime
irresponsables, incompétents et/ou sans motivations liées à leur
mission. Et de réaffirmer la « responsabilité collective (qui) concerne tous les acteurs, chacun selon son domaine de compétence : gouvernement, parlement, partis et institutions ».
Sauf que les forces de l’ordre, celles-là mêmes qui ont mis en œuvre la
répression dûment orchestrée depuis… son propre palais, ont été lavées
de toute accusation : « Elles assurent la sécurité et la stabilité du pays » et seuls « certains nihilistes » ne veulent pas admettre cette « vérité ».
Bon prince, le roi a gracié, comme chaque année à
pareille époque. C’était attendu. Très attendu. Plus de mille personnes.
Mais seulement une quarantaine de Rifains incarcérés et poursuivis pour
avoir contesté ces derniers mois. Quarante sur environ 180 personnes
arrêtées. Et les grâces n’ont pas concerné les fortes têtes, dont,
surtout, Nasser Zefzafi, devenu en quelques semaines le héros de toute
une population de laissés-pour-compte dans la région septentrionale
d’Al-Hoceima. Le parfum d’amertume qui plane sur le Rif n’a pas atteint
le palais royal.
Alors, « certains nihilistes », comme dit M6 sans
rire, ont marqué le coup. Pour dire son fait au roi sans détour, ce qui
ne manque pas de courage. Fouad Abdelmoumni est de ces rares-là. Ancien
prisonnier politique et directeur de la section marocaine de
Transparency International, il s’est fendu d’une réaction sur Facebook :
« Le seul temps qui reste à cette monarchie est d’annoncer qu’elle
admet enfin la démocratie (…). Autrement, nous continuerons de régénérer
ce système pétri dans la corruption, la veulerie, le népotisme et
l’impunité ».
www.lesoir.be/107378/article/2017-08-01/mohamed-vi-ou-lart-de-se-defausser
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