Le temps est lourd. La température politique
est exténuante cet été au Maroc. Pas de soleil à l’horizon, qu’un ciel
plombé et des arrestations et de la répression. La mobilisation au Rif
est partiellement étouffée, pourtant le régime est déboussolé. La
« société » se dit « inquiète », mais reste neutralisée. A ce point du
Hirak, il faut être malhonnête pour ne voir dans ce mouvement qu’une
simple liste de revendications pour un hôpital, une université... Cette
mobilisation de neuf mois est une mise en échec en règle du régime
politique, de ses appareils sécuritaires, économiques et sociaux, ainsi
(et surtout) de ses intermédiaires. C’est tout l’édifice idéologique
bâti depuis au moins 18 ans qui s’effrite.
Le point de départ du Hirak a d’abord été une
réaction spontanée à un événement indigne, la mort du poissonnier
Mohcine Fikri ; puis il s’est organisé et a établi un cahier
revendicatif avec des points précis. Cependant, depuis l’arrestation de
ses leaders fin mai 2017, ce mouvement est entré dans une nouvelle
phase. Désormais, le Hirak ne revendique rien ! « Revendiquer, c’est
déjà être soumis », disait l’économiste français Frédiric Lordon.
La population du Rif est déjà dans cette dynamique d’insoumission, de dissidence non violente, de libération de la parole et d’humanité. Même les plus tenaces chaines se brisent actuellement dans cette région, comme en témoigne cette participation des femmes rifaines dans la lutte et dans les rues. Tous les verrous éclatent ou presque. Le Rif sort du « cadre ». C’est ce dépassement de frontière qui inquiète le plus le régime et se traduit par la répression systématique de ce mouvement.
D’ailleurs, il se peut que nous vivions un de ces moments fort de l’Histoire d’un peuple, où des groupes ordinairement séparés redécouvrent ce qu’ils ont de profondément en commun. Ce moment révolutionnaire – appelons les choses par leur nom - qui conduit le commerçant, le salarié, le fonctionnaire, l’étudiant, le chômeur à faire barrage au système pour appeler à la Grève générale, une, deux, trois fois depuis des mois, avec d’immenses succès à chaque reprise. Cette convergence est une hantise de tout pouvoir.
Durant les manifestations de juin et juillet, le Hirak a abandonné le registre de la revendication. L’exigence de la libération des 130 prisonniers du Hirak n’est pas une revendication, c’est un signe supplémentaire de désobéissance contre le pouvoir. Les habitants d’Al Hoceima à Talourakt en passant par Imzouren sont en résistance affirmative. Ils continuent à soutenir leurs jeunes en prison, que le pouvoir traite en criminels.
Chaque annonce de manifestation est une affirmation d’exister face à un État aux abois. Chaque manifestant sortant dans les rues affirme son existence face à la volonté du régime qui le veut soumis et humilié. En soi, c’est une nouvelle affirmation du Politique.
En somme, ce Hirak sonne le tocsin d’une période finissante. Les seigneurs du moment, corrompus et sans projet, accélèrent eux-mêmes le processus de décomposition de leur système. Même s’il y a de fortes chances qu’ils se maintiennent, moins légitimes que jamais, grâce à l’usage d’une répression de plus en plus brutale, la dissidence rifaine longue et coûteuse laissera des traces sur le corps malmené du Makhzen. A nous de faire que ces sacrifices et cette résistance ne soient pas vains.
La population du Rif est déjà dans cette dynamique d’insoumission, de dissidence non violente, de libération de la parole et d’humanité. Même les plus tenaces chaines se brisent actuellement dans cette région, comme en témoigne cette participation des femmes rifaines dans la lutte et dans les rues. Tous les verrous éclatent ou presque. Le Rif sort du « cadre ». C’est ce dépassement de frontière qui inquiète le plus le régime et se traduit par la répression systématique de ce mouvement.
« Revendiquer, c’est déjà être soumis »,
Frédéric Lordon
D’ailleurs, il se peut que nous vivions un de ces moments fort de l’Histoire d’un peuple, où des groupes ordinairement séparés redécouvrent ce qu’ils ont de profondément en commun. Ce moment révolutionnaire – appelons les choses par leur nom - qui conduit le commerçant, le salarié, le fonctionnaire, l’étudiant, le chômeur à faire barrage au système pour appeler à la Grève générale, une, deux, trois fois depuis des mois, avec d’immenses succès à chaque reprise. Cette convergence est une hantise de tout pouvoir.
Durant les manifestations de juin et juillet, le Hirak a abandonné le registre de la revendication. L’exigence de la libération des 130 prisonniers du Hirak n’est pas une revendication, c’est un signe supplémentaire de désobéissance contre le pouvoir. Les habitants d’Al Hoceima à Talourakt en passant par Imzouren sont en résistance affirmative. Ils continuent à soutenir leurs jeunes en prison, que le pouvoir traite en criminels.
Chaque annonce de manifestation est une affirmation d’exister face à un État aux abois. Chaque manifestant sortant dans les rues affirme son existence face à la volonté du régime qui le veut soumis et humilié. En soi, c’est une nouvelle affirmation du Politique.
En somme, ce Hirak sonne le tocsin d’une période finissante. Les seigneurs du moment, corrompus et sans projet, accélèrent eux-mêmes le processus de décomposition de leur système. Même s’il y a de fortes chances qu’ils se maintiennent, moins légitimes que jamais, grâce à l’usage d’une répression de plus en plus brutale, la dissidence rifaine longue et coûteuse laissera des traces sur le corps malmené du Makhzen. A nous de faire que ces sacrifices et cette résistance ne soient pas vains.
Secrétaire général d’ATTAC CADTM Maroc et Comité des études et de plaidoyer du CADTM Afrique.
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