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dimanche 1 novembre 2020

Les nomades du sud du Maroc revendiquent leur droit naturel et historique au pâturage


Lettre ouverte à messieurs les ministres de l'Intérieur et de l'Agriculture du Maroc

Au Maroc, les nomades vivent dans des conditions critiques à cause de la sécheresse, la pandémie et la répression systématique pratiquée par les autorités. Ils sont empêchés de se déplacer à la recherche de pâturages et d'eau. Du fait de ces conditions difficiles qu'ils ont vécues tout au long des années 2019 et 2020, leurs souffrances se sont multipliées.

Lors de leur rencontre nationale organisée le 21 septembre 2019 à Tinghir, les nomades  ont étudié la loi 113.13 concernant le pâturage. Ce document était jugé incompatible avec tous les pactes internationaux, y compris les recommandations de la FAO des Nations Unies, concernant le droit à l'environnement et au développement rural. Ce droit des populations d'acquérir des terres est la  base de tout programme de développement que l'État doit mettre en œuvre au monde rural.

La répression quotidiennes qui les a touchés pendant deux années consécutives au nom de l'application illégale et inconstitutionnelle de la loi 113.13, a eu un impact sur la vie matérielle et morale de leurs familles, les plongeant dans des situations psychologiques profondément troublées, en particulier concernant les femmes et les enfants, touchés par les pratiques répressives des autorités et de la gendarmerie dans des zones montagneuses désertes isolées du monde, en l'absence de pères nomades errant sur les marchés à la recherche d'acheteurs de leur bétail à bas prix.

Ils sont privés de leurs droits fondamentaux : le droit à la santé, à l'éducation et au logement, à la sécurité, à la liberté, et à la vie au moment des accouchements. Les femmes et les enfants, victimes de la violence des autorités, voient leurs troupeaux exposés aux vols et à la destruction, causant d'énormes pertes matérielles en raison de l'attaque mortelle de leur bétail par  des chiens errants dans les montagnes.

Ils ne bénéficient pas du soutien de l'État, malgré la spectaculaire distribution de millions de tonnes d'orge subventionnée, annoncée à travers les médias. En réalité, les nomades privés de ce soutien l'achètent avec  leur argent à des prix élevés sur les marchés à des négociants spéculateurs, dépensant l'argent qu'ils ont obtenu en vendant leur bétail à bas prix aux commerçants sur les marchés hebdomadaires.

Tout cela, sans oublier l’exploitation de leur sueur et leur sang par ces riches grands propriétaires qui bénéficient des  générosités de l'État. Un “soutien” destiné à leurs stations d’emballages qui atteint de 120 à 170 millions de dirhams chacun (12 à 17 millions de dollars), sur le compte des biens publics. Cette exploitation bénéficie aux  riches propriétaires : membres de la famille royale,  officiers supérieurs de la gendarmerie, des militaires et de la police, ministres, députés, maires des villes, PGD des grandes sociétés, les survivances de la  féodalité,  investisseurs capitalistes de la bourgeoisie française, espagnole, saoudiens, émiratis, qataris  et autres profiteurs. C'est l'exploitation des terres des paysans pauvres sur lequelles ils ont implanté leurs domaines agricoles, profitant d’énormes soutiens financiers  à travers le dit « Planning Maroc Vert ». Ils sont même exonérés de charges financières pour l'électricité et l'eau d'irrigation, pour pouvoir fournir les oranges et les tomates à la bourgeoisie européenne !

Pendant deux ans, en manipulant la loi 113.13, le ministère de l’agriculture a occupé les terres pastorales dans le sud et au Sahara. Les regroupements des paysans dans les montagnes de l’Anti-Atlas et les plaines de Souss-Massa sont pillés ainsi que leurs pâturages. Les nomades sans cesse réprimés par les autorités sont obligés de traverser les terres des paysans, ce qui provoque des conflits entre eux, parfois sanglants. Ces conflits sont enflammés par les représentants des partis politiques de la majorité et leurs membres dans les communes rurales. Voilà une autre façon de chasser les nomades et les priver de leur droit au pâturage !

Un an après la mise en place du comité national des nomades qui n'a connu que des souffrances, deux manifestations ont été organisées par les représentants de toutes les régions du Maroc, le mercredi 28 octobre 2020, devant la wilaya de Souss-Massa et le Bureau régional d’investissements agricoles à Agadir . Leur rencontre destinée à discuter leur situation critique, a été organisée le même jour au siège de l’Union Marocain du Travail (UMT) à Agadir, pour mettre en place un programme de lutte pour leurs droits légitimes, après la reconstruction de leur comité national pqui s'articule autour des revendications suivantes :

1- Mettre en place un recensement  des pertes matérielles des nomades par les Ministères de l'Intérieur et de l'Agriculture, du 20 mars 2020 à aujourd'hui, et indemniser les personnes touchées dans les plus brefs délais, sachant que leur Comité National a constitué un dossier de ces pertes pour les défendre par toutes les formes de lutte légitimes.

2- Exiger la levée du siège des nomades dans toutes les zones assiégées, les deux ministères supportant toutes les pertes qui résulteront de l' empêchement de se déplacer vers les zones de Dakhla et Laayoune où le pâturage est disponible.

3- Exiger l'arrêt des autorisations de déplacement  depuis les  autres régions vers les régions de Dakhla, Laayoune et d'autres zones où des pâturages sont disponibles, afin d'éviter la mort des troupeaux du fait de manque de nourriture et d' eau, et d'autres régions où la saison de culture a commencé.

4- Exiger le soutien de l'Etat, la fourniture d'orge, de médicaments et d'eau, et la surveillance du marché pour les protéger des commerçants spéculateurs.

5- Exiger l’arrêt de la manipulation de la loi 113.13 qui viole leurs droits naturels et historiques, en particulier leur droit d'acquérir des terres en tant que  petits investisseurs. Et la protection de leur droit à l’accès à leurs terres pastorales que les grands propriétaires immobiliers leur ont soutirées

Il est à noter que ces cinq points sont urgents et indispensables pour lever le siège sur eux avant fin octobre 2020, et ainsi ouvrir le dialogue avec leur comité national sur le dossier de revendications globales.

Pour défendre leurs revendications urgentes, leur Comité national a mis en place un programme de lutte qui commence le 1er novembre 2020, comme dernière date limite pour protéger leur bétail de la mort. Cela peut  prendre des formes de lutte dont ces deux ministères en portent les possibles conséquences désastreuses.

Notre force réside dans notre unité au sein de notre organisation syndicale paysanne pour l’accès à nos droits

Vive l’Union Marocaine du Travail

Vive l'Union Nationale des Petits Paysans et professionnels forestiers

Vive les nomades

Comité national des nomades



 

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