mercredi 25 octobre 2017

À lire : Passionnants, les deux derniers livres de Nadir Dendoune



Par M-J F, Solidmar, 25/10/2017

La bibliothécaire de mon village  m’a dit : « Prends celui-là, tu aimes la montagne, il te plaira » et me tend « Un tocard sur le toit du monde ». J’ai d’abord cherché la signification exacte du mot tocard : « Cheval de course médiocre. Personne incapable. »



Bildergebnis für nadir dendouneIncapable, Nadir ? On ne retient pas longtemps cette définition lorsqu’on se plonge dans ce récit passionnant de l’incroyable ascension d’un banlieusard qui ne connaît rien à l’alpinisme et qui pourtant réalise l’exploit d’aller au sommet de l’Everest. Il s’acharne, apprend, et finalement il sera un des seuls de l’expédition à atteindre le toit du monde où il est pris en photo exhibant un cœur découpé dans du carton, où est écrit 93, le numéro du département de sa banlieue.


L’autre richesse de ce livre est le côté humain de Nadir, son amour débordant pour sa famille, en particulier pour sa mère, à qui il dédie cet exploit ; sa manière d’encaisser le mépris, voire le racisme des membres  de l’expédition,  des pros équipés dernier cri, alors que lui n’a pu se  procurer que le minimum d’équipement.

Un beau film a été tourné à partir de ce livre : « L’ascension».




« Je suis attaché à ma culture de pauvre. J’aime les gens modestes, les miens » écrit Nadir sur la 4ème de couverture de son dernier livre : « Nos rêves de pauvres ».

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Il y raconte son enfance avec ses sept sœurs et son frère, une adolescence remuante, mais un amour indéfectible pour ses  parents, présent tout le long des deux récits, la maladie de son père qui s’éloigne progressivement de la réalité.  Nadir décrit son attachement à sa cité Maurice Thorez, ses rencontres qui le transforment, son séjour en Australie qui l’émerveille. Il se mobilise pour la Palestine et ne peut admettre qu’un mur stupide sépare ceux qui s’aiment. Nejma son premier amour lui ouvre un monde passionnant à travers la lecture. « Le jour où j’ai commencé à lire, c’était à presque trente-trois ans. » Elle lui établit une longue liste de livres à lire. « Et en refermant le dernier livre de la liste, « La Vie devant soi »,  je réalisai soudain que, moi aussi, j’avais le droit d’écrire. ». Ce droit d’écrire le conduira dans une école de journalistes.

Il écrit alors plusieurs livres : Lettre ouverte à un fils d’immigré, Journal de guerre d’un pacifiste : Bouclier humain à Bagdad (préfacé par Stéphane Hessel), ses « chroniques du tocard » paraissent dans Le Courrier de l’Atlas.


Une amie psychologue lui propose de rencontrer des prisonniers aux Baumettes. Beau chapitre où il raconte cette rencontre : « Au fil des mots, la confiance s’est installée entre nous, les langues se sont déliées. Je pouvais sentir chez eux une sincérité débordante. Leurs paroles manifestaient des enfances douloureuses et leurs regards étaient la preuve qu’ils continuaient à souffrir des blessures de leur passé.

La prison est remplie d’accidentés de la vie. On les enferme au lieu de les soigner, et on les brise davantage. Ils ressortent encore plus en colère. »



Nadir a tourné récemment un film sur sa mère  "Des figues en avril". Un témoignage rare et poignant sur la condition des femmes immigrées.

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