L’importance géostratégique
de l’Algérie et du Maroc en tant qu’États-pivots6 de la région est telle
que lorsque leurs relations s’enrhument, c’est tout le Maghreb qui est
atteint de pneumonie, pour reprendre une métaphore assez galvaudée. Dans
le cas opposé, à chaque fois qu’il y a un rapprochement entre Alger et
Rabat, l’action commune retrouve un certain dynamisme auquel les autres
capitales maghrébines s’associent par effet d’entraînement. Mais
l’histoire de ces relations, depuis le début des années 1960, est faite
de malentendus, de brouilles plus ou moins longues, de ruptures, et de
réconciliations souvent conjoncturelles.
La tension qui a constamment caractérisé
les rapports entre les « frères-ennemis » a même débouché sur des
confrontations armées (guerre des sables en 1963, bataille d’Amgala en
1976). À l’origine de ces relations tumultueuses, il y a bien sûr les
contentieux frontaliers, le Royaume estimant qu’il a été spolié au
moment de la décolonisation7. Il y a aussi le profond désaccord autour
du conflit du Sahara occidental qui a éclaté en 1975. Depuis lors, une «
guerre froide » multiforme oppose les deux pays voisins malgré quelques
velléités, de temps à autre, de reprendre le dialogue et la voie de la
sagesse. Entre la lutte pour le leadership régional et la guerre d’usure
autour de la question du Sahara occidental, tout semble être permis
entre les protagonistes : refoulements de délégations, campagnes
médiatiques virulentes contre le voisin, guerre des communiqués et des
déclarations officielles, instrumentalisation de la question des
migrations clandestines subsahariennes, le tout couronné par une
bataille diplomatique croisée dépassant parfois toute bienséance.
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