Protection sociale: Toujours pas de régime dédié pour l’enfance
Le CESE assimile les programmes existants à des «compléments de revenu».2,4 millions d’actifs exclus des allocations familiales
Moins
de 5% du PIB. Voilà ce que dépense le Maroc chaque année pour la
protection sociale. Il fait ainsi partie des pays qui y consacrent le
moins de ressources. La moyenne des pays émergents est de 15%. Le Maroc
est même classé par l’OIT (Organisation internationale du travail) parmi
les Etats présentant «un faible niveau de volonté politique pour
investir dans le social».
En matière de
protection sociale de l’enfance, le pays ne fait pas mieux. Selon le
rapport de la Commission des affaires sociales et de la solidarité du
Conseil économique, social et environnemental (CESE), qui vient d’être
livré, le Maroc ne dispose pas encore d’un régime dédié.
Le
Royaume a bien ratifié la Convention des droits de l’enfant en 1993, et
adopté la Politique publique intégrée de protection de l’enfance en
2015. Mais il tarde à implémenter des dispositifs adaptés. Les
programmes lancés, pour leur part, ne sont pas exempts de défauts. Le
rapport les assimile plus à des «compléments de revenus». Assortis de
conditions, ils ne sont pas accessibles à toutes les familles en
situation de précarité.
Parmi eux, les
allocations familiales accordées aux salariés, et prises en charge par
les employeurs (200 DH pour les 3 premiers enfants, et 36 DH pour les
trois suivants). Les allocations ne profitent, cependant, qu’aux parents
travaillant dans le secteur formel.
Cela
exclut quelque 2,4 millions d’actifs informels, représentant plus du
tiers (36,3%) de l’emploi non agricole. Le CESE recommande de faire
évoluer les allocations familiales vers une conception fondée sur l’aide
directe et ciblée des enfants de 0 à 15 ans.
A
côté de ces prestations, des programmes de transferts monétaires
coexistent. Il s’agit notamment de celui d’aide directe aux femmes
veuves en situation de précarité et ayant des orphelins à charge (350 DH
par enfant), ou encore des prestations dédiées aux femmes divorcées
avec enfants à charge, dont le père est absent ou insolvable.
L’on
peut également citer le programme Tayssir de lutte contre l’abandon
scolaire. Sauf qu’il est gelé depuis 2015-2016, faute de financement. Il
est complété par l’opération «Un million de cartables», offrant des
fournitures scolaires à plus de 4,2 millions d’élèves chaque année.
Les
transferts des femmes veuves, Tayssir et Un million de cartables sont
financés par le Fonds de cohésion sociale, actuellement en difficulté
financière, et dont la pérennité même est menacée. Le CESE recommande
d’activer la mise en œuvre de la Politique intégrée de protection de
l’enfance, et de développer des aides aux enfants, indépendamment de
leur nationalité, sous forme de transferts monétaires conditionnés et
non conditionnés.
Ce que coûterait un transfert universelL’OIT a récemment modélisé le coût des prestations non contributives pour enfants et orphelins, de 0 à 14 ans, dans 57 pays dont le Maroc. Le niveau de la prestation a été fixé à 25% du seuil national de pauvreté, et à 100% pour les orphelins. Des transferts monétaires universels pour enfants de 0 à 5 ans coûteraient ainsi, en moyenne, 1,4% du PIB. Une prestation pour les orphelins de moins de 15 ans n’augmenterait ce coût que de 0,04 point.
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