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mercredi 5 septembre 2018

L'avocat Emmanuel Daoud alerte sur le respect des droits des mineurs marocains isolés à Paris


L'avocat Emmanuel Daoud alerte sur le respect des droits des mineurs marocains isolés à Paris

En juin, un accord entre Paris et Rabat a été signé pour envoyer dans la capitale française une équipe de policiers marocains. Le but de cette intervention sécuritaire : identifier et éventuellement expulser les mineurs marocains non accompagnés qui errent depuis plus d'un an dans le 18e arrondissement.

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Emmanuel Daoud au Palais de Justice de Lyon en novembre 2012. Crédit: AFP PHOTO / JEFF PACHOUD
Le phénomène des jeunes migrants marocains isolés rôdant dans le quartier parisien de la Goutte d’Or, ne se tasse pas. Âgés de 9 et 17 ans, drogués et livrés à eux-mêmes, ces enfants marocains passés par l’Espagne pour atteindre l’Europe, inquiètent les ministères français et marocains de l’Intérieur. Malgré les 700.000 € débloqués par la municipalité parisienne, les efforts des associations et du Parquet, le phénomène continue de s’aggraver.
Alors débordée, la France a fait, cet été, appel au Maroc. Selon les informations du Desk.ma et de l’Obs, révélées en juillet dernier, entre quatre et six agents de la DGSN ont été dépêchés à Paris en vertu d’un « arrangement administratif relatif au renforcement de la coopération policière opérationnelle ». En « procédant à des identifications » en vue de « leur retour au Maroc », cet accord sécuritaire entend bien endiguer la situation.
Maître Daoud, avocat pénaliste spécialisé dans les droits des enfants migrants,membre du conseil de l’Ordre de Paris ainsi que du groupe d’action judiciaire de la Fédération internationale des droits de l’Homme (FIDH), nous éclaire sur les tenants et les aboutissants de cette entente franco-marocaine. Interview.
TelQuel : En tant qu’avocat pénaliste de formation et spécialiste des droits des enfants mineurs, quel est votre avis sur cet accord sécuritaire ?
Emmanuel Daoud : L’entente entre Rabat et Paris peut se justifier au sens d’un renforcement de la coopération entre les polices françaises et marocaines à ce sujet. De ce point de vue là, je n’y vois pas de problèmes. En revanche, ce sont les modalités de mise en œuvre de cette intervention de policiers marocains sur le territoire français qui ne vont pas. Cet accord a été formalisé pour permettre aux agents marocains d’exercer leurs fonctions sporadiquement sur le territoire français. En l’occurrence d’essayer de retracer le parcours familial et individuel de ces jeunes mineurs marocains faisant l’objet d’interpellations dans le quartier de la Goutte d’Or. Le vrai problème, c’est que ces auditions, qui ont pour objectif de vérifier si ces mineurs marocains sont désireux de rentrer au Maroc, se sont réalisées – ou se réaliseraient – hors de la présence d’avocats.

En quoi, légalement notamment, cette procédure pose-t-elle problème ?
On n’auditionne pas des enfants sans la présence d’avocats. Dans ce sens, on peut s’interroger sur la garantie lors de ces interrogatoires du respect de « l’intérêt supérieur de l’enfant » – introduite par la Convention des Nations unies relative aux droits de l’enfant de 1989.
Aussi, leur demander s’ils seraient prêts à rentrer au Maroc est un non-sens, puisqu’on sait bien que la majorité d’entre eux ont fui le Maroc en raison de violences interfamiliales, et ont quitté délibérément leur pays pour essayer de trouver des jours meilleurs.



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