"Atteinte
à la souveraineté nationale"; "facilitation d'entrée de réfugiés sur le
territoire"... Beaucoup de choses fausses sont prononcées ces jours-ci
au sujet du "Pacte de Marrakech, autrement appelé "Pacte mondial de
l'ONU sur les migrations" et qui sera signé les 10 et 11 décembre lors
d'un sommet des Nations Unies à Marrakech.
Ces fake news et inquiétudes sont relayées par certains "gilets jaunes", jusque
dans les rangs de la droite parlementaire, et suscitent de vifs débats
chez nos voisins. Mais contrairement à ce qui est dit, ce "Pacte de
Marrakech" n'aura aucune portée contraignante.
Adopté en juillet par tous les pays membres de l'ONU - excepté les Etats-Unis -, ce texte consultable ici en français recense
des principes (défense des droits de l'Homme, des enfants,
reconnaissance de la souveraineté nationale) et une vingtaine de
propositions pour aider les pays à faire face aux migrations, en
facilitant l'information, l'intégration des migrants, l'échange
d'expertises. L'enjeu est de taille, puisque selon le dernier décompte
de l'Organisation internationale pour les migrations (OIM), il existe en
2018, 258 millions de migrants dans le monde. Pour mieux comprendre
l'essence de ce texte, retour sur son contenu et sur les principales
fake news véhiculées à son sujet.
# Non, ce pacte ne menace pas la souveraineté des Etats
Certains, comme Lydia Guirous porte-parole du parti Les Républicains,
estiment que le "Pacte de Marrakech" menacera la souveraineté de la
France.
Pourtant, le point 7 du texte stipule que
"Le Pacte de Marrakech est non contraignant juridiquement" et "réaffirme le droit souverain des Etats de définir leurs politiques migratoires nationales et leur droit de gérer les migrations".
Chargée de plaidoyer au Secours catholique-Caritas, Solène Bedaux juge ces critiques infondées. "Signer
ce texte n'implique pas un transfert de souveraineté vers les Nations
unies. Et chaque pays peut décider qui entre sur le territoire, cela ne
change pas", souligne-t-elle auprès de l'AFP.
# Non, ce pacte n'invente pas un droit à l'immigration
"Ce Pacte instaure un véritable droit à la migration", a fustigé ce mercredi matin Annie Genevard, secrétaire générale du parti Les Républicains. Elle estime aussi que ce pacte va contribuer "à alimenter des vagues migratoires propres à déstabiliser de nombreux Etats".
En réalité, les 23 objectifs non-contraignant qui apparaissent dans
le "Pacte de Marrakech" rappelle "des droits fondamentaux qui existent
déjà", tempère Solène Bedaux du Secours catholique-Caritas. "Au Secours
catholique, nous avons cherché dans les conventions et textes existants,
et la conclusion est claire : non, il n'y a pas d'invention de nouveaux
droits".
# Non, ce pacte ne conduira pas à la "submersion" du pays
La semaine dernière, Marine Le Pen était montée au créneau
également. Y voyant un "acte de trahison", elle avait fustigé
des "dirigeants franchissant une nouvelle étape dans la submersion
organisée de notre pays".
La vingtaine de points contenus dans le pacte vise à aider les
pays à faire face aux migrations, en facilitant l'information,
l'intégration des migrants, l'échange d'expertises. Il interdit les
détentions arbitraires, n'autorisant les arrestations qu'en dernier
recours. Voici, dans le détail, les 23 objectifs, détaillés dans le
pacte :
- Collecter et utiliser des données précises et ventilées qui serviront à l'élaboration de politiques fondées sur la connaissance des faits
- Lutter contre les facteurs négatifs et les problèmes structurels
qui poussent des personnes à quitter leur pays d’origine - Fournir dans les meilleurs délais des informations exactes à toutes
les étapes de la migration - Munir tous les migrants d’une preuve d’identité légale et de papiers adéquats
- Faire en sorte que les filières de migration régulière soient
accessibles et plus souples - Favoriser des pratiques de recrutement justes et éthiques et assurer les conditions d’un travail décent
- S’attaquer aux facteurs de vulnérabilité liés aux migrations
et les réduire - Sauver des vies et mettre en place une action internationale
coordonnée pour retrouver les migrants disparus - Renforcer l’action transnationale face au trafic de migrants
- Prévenir, combattre et éliminer la traite de personnes dans le cadre des migrations internationales
- Gérer les frontières de manière intégrée, sûre et coordonnée
- Veiller à l’invariabilité et à la prévisibilité des procédures
migratoires pour assurer des contrôles, des évaluations
et une orientation appropriés - Ne recourir au placement en rétention administrative des migrants qu’en dernier ressort et chercher des solutions de rechange
- Renforcer la protection, l’assistance et la coopération consulaires
tout au long du cycle migratoire - Assurer l’accès des migrants aux services de base
- Donner aux migrants et aux sociétés des moyens en faveur
de la pleine intégration et de la cohésion sociale - Eliminer toutes les formes de discrimination et encourager un débat public fondé sur l’analyse des faits afin de faire évoluer la manière dont les migrations sont perçues
- Investir dans le perfectionnement des compétences et faciliter
la reconnaissance mutuelle des aptitudes, qualifications et
compétences - Créer les conditions permettant aux migrants et aux diasporas
de contribuer pleinement au développement durable dans tous les
pays - Rendre les envois de fonds plus rapides, plus sûrs et moins coûteux et favoriser l’inclusion financière des migrants
- Coopérer en vue de faciliter le retour et la réadmission des migrants en toute sécurité et dignité, ainsi que leur réintégration durable
- Mettre en place des mécanismes de portabilité des droits de sécurité sociale et des avantages acquis
- Renforcer la coopération internationale et les partenariats mondiaux pour des migrations sûres, ordonnées et régulières
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire