Vendredi, 1 Mars, 2019
Les
Algériens sont à nouveau en masse dans la rue. Ils s’opposent encore
plus fermement à une nouvelle candidature d’Abdelaziz Bouteflika. La
jeunesse est en première ligne. Elle dit son amertume et sa colère.
Reportage dans les rues d’Alger.
Combien
sont-ils dans la rue lors de la deuxième grande journée de contestation
pour dire « non ! » à un cinquième mandat d’Abdelaziz Bouteflika,
président en exercice depuis avril 1999 ? Sans doute des centaines de
milliers à Alger, Oran, Constantine, Annaba, des dizaines de milliers
dans les villes de moindre importance et, vraisemblablement, des
millions à travers tout le pays. Ces chiffres-là prennent de court des
dirigeants jusque-là convaincus de leur superpuissance, de la peur
qu’ils peuvent inspirer. « L’État a prouvé par le passé qu’il peut
maîtriser la rue », clamait, le 2 février dernier, lors d’une conférence
de presse, le premier ministre, Ahmed Ouyahia. Il avait tout faux. Sa
menace, à peine voilée, ne les a pas dissuadés : les Algériens sont
sortis en masse le 22 février, ils déferlent à nouveau aujourd’hui.
C’est la rue, et elle seule, qui prend à présent la
parole. Les partis politiques se sont mis en veilleuse, les médias
publics ronronnent autour du bilan du gouvernement, les TV privées,
grassement nourries par le pouvoir, continuent à servir sa propagande
sans rien dire des rassemblements qui s’enchaînent depuis plus d’une
dizaine de jours. Les faits sont inédits : trois générations se donnent
la main dans un élan historique. Celle des années post-indépendance,
amèrement déçue devant ce « fleuve détourné », comme le disait
l’écrivain Rachid Mimouni, dans l’intérêt exclusif de clans de
ploutocrates ; celle d’octobre 1988 qui a arraché le pluralisme et la
liberté d’expression avant de les voir étouffés ; celle enfin des années
1980-1990, qui n’a rien connu d’autre que la violence meurtrière de
l’intégrisme islamiste et le règne d’Abdelaziz Bouteflika. Et c’est
surtout cette dernière qui est désormais à l’avant-garde du mouvement
populaire.
« Je suis avec les manifestants. Je serais demain en première ligne »
« Ce pays ne m’a rien donné… je partage mes journées entre
la zatla (fumer du cannabis), quand je trouve les moyens, et les
discussions sans fin avec les copains. Que veux-tu que je fasse de mes
20 ans ? » soupire Hamid, rencontré à la veille de la « grande marche
pacifique » de ce vendredi dans le quartier algérois de Bab El Oued,
jadis fief du Front islamique du salut (FIS).
https://www.humanite.fr/algerie-il-faut-quils-sen-aillent...
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