À quelle vitesse une société dite développée peut-elle perdre son humanité?
Société 18/01/2019
«Recours
excessif à la force», restrictions des activités d’ONG ou encore absence
d’enquête sur les allégations de violations des droits de l’homme… Human Rights
Watch a rendu public jeudi son rapport sur la situation des droits de l’homme
au Maroc et au Sahara durant l’année dernière.
L’ONG
internationale Human Rights Watch (HRW) a rendu public jeudi son rapport mondial 2019 sur la situation des
droits de l’Homme dans le monde. Un document qui consacre une partie au Maroc et au Sahara.
Pour HRW, le
Maroc fait «preuve de plus en plus d’intolérance à l’égard de la contestation
publique». Elle rappelle, au tout début de son chapitre consacré au royaume, la
réaction des autorités marocaines, en mars 2018, lors de la manifestation dans
la ville minière de Jerada, qui s’est soldée «par des semaines de répression».
Les autorités ont «fait usage d’une force excessive contre les manifestants et
[ont arrêté] des responsables de la manifestation, qui ont ensuite été
condamnés à des mois de prison», poursuit le rapport.
Passant en
revue le verdict, rendu en juin dernier par la Chambre criminelle près la cour
d’appel de Casablanca à l’encontre des leaders du Hirak du Rif, l’ONG fait
également état de restrictions quant aux activités d’autres associations,
notamment «la plus grande organisation indépendante de défense des droits
humains au Maroc», en l’occurrence l’Association marocaine des droits de
l’homme (AMDH).
«Recours
excessif à la force» et «lois discriminatoires»
Sur la
partie relative à la liberté de réunion, aux violences policière et au système
pénal, Human Rights Watch rappelle avoir «documenté plusieurs cas de recours
excessif à la force pour disperser des manifestations, ainsi que des
arrestations de manifestants pacifiques pour des motifs tels que manifestation
sans autorisation et agression de policiers». L’occasion de rappeler deux
affaires marquantes : celle des tirs des garde-côtes marocains, le 25
septembre, ayant causé la mort à l’étudiante Hayat Belkacem, 20 ans, et le
verdict du 17 octobre du tribunal de première instance de Tétouan, condamnant
Soufian al-Nguad, 28 ans, à deux ans de prison pour incitation à
l’insurrection, propagation de la haine et insulte au drapeau et aux symboles
du Maroc. Un jugement qui intervient après que ce Marocain a «critiqué les
circonstances du décès de Belkacem sur Facebook et encouragé à manifester en
protestation».
L’occasion
aussi de citer, pour le cas de la liberté d’expression, le cas d’Elmortada Lamrachen, 32 ans, l’un des principaux porte-parole du mouvement de protestation
«Hirak» du Rif, dont la peine en première instance a été confirmée le 14
novembre par la cour d’appel de Salé. L’ONG internationale rappelle aussi le
cas du journaliste Hamid El Mahdaoui, condamné le 28 juin, à une peine de
trois ans d’emprisonnement «pour avoir omis de signaler une menace
sécuritaire».
HRW aborde
aussi la «répression à grande échelle de milliers de migrants, demandeurs
d’asile et réfugiés subsahariens sans procédure régulière», signalée en
septembre par Amnesty International, fustigeant les «raids» effectués dans
plusieurs villes des provinces de Tanger, Nador et Tétouan, dans le nord du
pays contre des migrants, «rassemblés [puis] emmenés dans des villes de
l’intérieur».
Human Rights
Watch critique au passage les «dispositions discriminatoires pour les femmes»
dans le Code de la famille de 2004, l’impact «discriminatoire» de
la pénalisation de l’adultère et des relations sexuelles entre personnes
non mariées, ou encore l’article 489 du Code pénal condamnant les personnes
LGBT.
«Rassemblements
empêchés» et «répressions» au Sahara
Le rapport
consacre également une partie au Sahara occidental, dans laquelle HRW rappelle
que le processus de négociation sous l’égide de l’ONU est «resté bloqué malgré
les visites dans la région de Horst Kohler, envoyé du secrétaire général des
Nations unies».
L’ONG aborde
plus loin la grève de la faim menée, «pendant plusieurs semaines en mars et en
avril, puis de nouveau entre septembre et novembre», par quatre prisonniers du
groupe de «Gdeim Izik». «Leur demande n'était pas encore satisfaite au moment
de la rédaction du présent document», constate-t-elle avant de rappeler que les
accusés de ce procès avaient «désavoué [leurs] aveux et affirmé les avoir
signés sous la torture sans avoir été autorisés à les lire».
«Au Sahara
occidental, les autorités marocaines ont systématiquement empêché les
rassemblements en faveur de l’autodétermination, et ont fait obstruction au
travail de certaines ONG locales des droits humains, notamment en bloquant leur
enregistrement légal. Elles ont aussi parfois battu des activistes et des
journalistes, en détention ou dans les rues.»
Rapport de
HRW
Le rapport
passe en revue plusieurs dates, comme la manifestation du 28 juin, qui aurait
été «réprimée» par la police à Laâyoune sans qu’une enquête ne soit ouverte
malgré la plainte déposée par l’Association sahraouie des victimes de graves
violations des droits de l’homme (ASVDH), ou encore l’arrestation de deux
journalistes travaillant pour le compte d’une chaîne du Polisario.
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