Le rapport annuel du Cairo
Institute for Human Rights Studies (Institut du Caire pour les études
sur les droits humains) analyse la nouvelle vague de mouvements
contestataires dans le monde arabe, et le défi permanent que constituent
les pratiques répressives qui font obstacle à l’avancée des droits
humains.
Malgré la répression et les frappes
préventives contre les soulèvements et les forces démocratiques au cours
des dernières années, le monde arabe vit à nouveau un moment d’espoir.
Les valeurs des printemps arabes ont été invoquées par les mouvements de
contestations aux quatre coins de la région, dans des pays comme l’Irak
et le Liban, l’Algérie et le Soudan, où les Présidents Abdelaziz
Bouteflika et Omar al-Bashir ont été renversés après un déferlement de
manifestations populaires.
Le neuvième Rapport annuel de
l’institution du Caire pour les études sur les droits humains,
“Evocations of the Arab Spring Amid Newly Drawn Armed Conflicts,” («
Évocations des printemps arabes au sein des nouveaux conflits armés »)
analyse les implications et les perspectives de la nouvelle vague de
printemps arabes en Algérie, au Soudan, au Liban et en Irak. Ce rapport
évalue également les conflits armés en cours en Libye, au Yémen et en
Syrie, ainsi que les efforts renouvelés des forces autoritaires en
Égypte, en Arabie Saoudite et dans les Émirats Arabes Unis pour bloquer
les efforts populaires de transformation sociale et de participation à
la vie publique et politique. Paru le 2 janvier 2020, le rapport propose
une brève analyse du statut des droits humains dans le monde arabe au
cours de la période janvier 2018-janvier 2019.
Le rapport annuel offre une lecture
détaillée des types de violations des droits les plus flagrants dans les
contextes locaux, régionaux et à l’international, et soutient que le
renouveau des conflits est profondément et principalement lié aux
interventions régionales et internationales. Les pouvoirs régionaux
provoquent des crises et alimentent, directement ou indirectement, les
conflits, comme on a pu le constater au Yémen ou en Libye. L’influence
des pouvoirs internationaux est particulièrement frappante dans les
Territoires occupés, où le soutien états-unien du gouvernement Trump a
permis à Israël d’étendre son projet d’occupation coloniale, d’entraver
le droit des Palestinien·nes à l’autodétermination, et de mettre en
place des politiques de punition collective et un recours
disproportionné à la force meurtrière contre les civil·es
palestinien·nes.
Le rapport passe ensuite à l’analyse des
pratiques répressives et des graves violations de droits en Afrique du
Nord. En Tunisie, aucune vraie réforme institutionnelle de l’appareil
judiciaire et sécuritaire de l’État n’a été mise en place, malgré les
avancées significatives en matière de droits des femmes, de droits
individuels, et d’autres droits fondamentaux comme la liberté
d’expression et d’association. Dans un contexte d’impunité globale, la
torture et la violence continuent d’être utilisées dans les centres de
détention, ainsi que le recours à la force meurtrière, en particulier en
lien avec les opérations antiterroristes. Le président renouvelle
régulièrement l’État d’Urgence.
Au Maroc, les autorités gouvernementales
continuent de réprimer les manifestations pacifiques – leur refusant le
droit d’association et le droit à former des associations
indépendantes, en particulier au Sahara Occidental. Les employé·es des
médias sont harcelé·es, et l’appareil de sécurité de l’État a reçu
l’ordre d’arrêter toute personne qui filmerait le personnel policier.
Mi-2018, des rapports ont fait état de la torture et des violences
subies par les prisonnier·es dans des centres de détention. Des
activistes ont été condamné·es à des peines de prison
disproportionnément dures dans un contexte de répression constante
contre la société civile.
« Le retour des manifestations
populaires dans de nombreux pays arabes témoigne de la colère et de la
frustration populaire généralisées et grandissantes, en particulier dans
les régions historiquement marginalisées, là où l’État est incapable
d’intervenir ou de répondre aux besoins des gens, ou encore face au
gaspillage des ressources publiques et à la corruption endémique dans
les institutions étatiques », affirme le Dr. Moataz El Fegiery, membre
du bureau du CIHRS et auteur du rapport. « Les manifestations au Maroc,
au Soudan, en Algérie, en Jordanie, en Irak, au Liban et en Palestine se
sont d’abord centrées sur la dégradation des conditions de vie, mais
exprimaient également le mécontentement face au manque de transparence
du gouvernement et de l’administration politique. Les jeunes –le groupe
le plus marginalisé et aliéné des institutions politiques de ces pays –
ont été les plus actif·ves au sein de ces manifestations ».
RITIMO, 30 jan 2020Lire l’article en anglais
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