Paris, le 4 mai 2020
Communiqué commun et lettre ouverte commune
à l’attention du ministre de l’Education nationale et de la jeunesse
pour demander à ce que les mesures de renforcement de la continuité
éducative soient étayées et élargies à tous les enfants en situation de
précarité
A
partir du 11 mai prochain, certains élèves reprendront le chemin de
l’école. Pour ceux qui ont été privés de continuité scolaire durant le
confinement, faute d’accès au numérique ou d’accompagnement suffisant,
les problématiques sont multiples. A l’urgence sanitaire est venue
s’ajouter, pour de nombreuses familles, une urgence éducative.
La
récente volonté exprimée par le gouvernement de concentrer les efforts
pour lutter contre les inégalités et favoriser la continuité éducative
des enfants les plus vulnérables constitue un premier pas salué par nos
organisations. Cependant, alors que ces mesures sont destinées aux
élèves des quartiers prioritaires de la politique de la ville et des
« cités éducatives », nos organisations constatent qu’au-delà des
territoires ciblés, les enfants et les jeunes en situation de grande
précarité vivant en bidonvilles, squats, hôtels sociaux, hébergement
d’urgence et d’insertion, aires d’accueil de gens du voyage, structures
de la protection de l’enfance, sont exposés à des difficultés et des
risques accrus de décrochage alors même que leur relation à l’école est
essentielle.
Dans
leur lettre adressée au gouvernement, nos associations dressent un état
des lieux des principaux obstacles rencontrés par les enfants et les
familles qu’elles accompagnent : entre 70 % et 80 % d’entre elles ne
disposent ni d’un ordinateur, ni d’une tablette, ce qui rend quasiment
impossible l’accès à l’enseignement à distance mis en place
actuellement, qui repose entièrement sur la communication numérique.
L’accès à l’électricité, à une connexion internet ou à un espace
personnel est lui aussi compromis. Les adultes, souvent allophones et
dépassés par les programmes scolaires qu’ils maîtrisent mal, sont
souvent désarmés et peinent à accompagner et aider efficacement leurs
enfants dans leur scolarité et l’appui aux devoirs. De nombreux parents
rencontrent également des difficultés dans l’utilisation du numérique.
Malheureusement pour beaucoup de ces familles, et ce malgré l’engagement
des professeurs et associations, le maintien du lien se révèle très
difficile, voire impossible.
Fortes
de ces constats, nos associations demandent des mesures concrètes pour
une meilleure prise en compte de tous les enfants et jeunes et de leurs
besoins afin que le droit à l’éducation soit effectif pour toutes et
tous. Parmi elles :
-s’assurer
que les mesures, destinées aux quartiers prioritaires, à la protection
de l’enfance et à certains centres d’hébergement, bénéficient
effectivement à l’ensemble des enfants et jeunes en grande précarité
(bidonvilles, aires d’accueil de gens du voyage, squats, accueils
sociaux, foyers, etc.), afin que tous puissent accéder aux outils
informatiques ;
-ils
doivent aussi bénéficier de l’accompagnement scolaire prévu pendant
l’été 2020 et pendant l’année 2020-2021 pour rattraper le retard, tout
en s’assurant que ces mesures ne soient vécues ni comme une punition, ni
comme un facteur de stigmatisation ;
-au
vu de l’impact différentiel du confinement sur la scolarité des enfants
en fonction de leur milieu social et de leurs conditions de vie, il est
impératif que la période actuelle soit uniquement considérée comme une
période de consolidation des acquis, et que celle-ci ne soit pas
considérée comme ayant été « suivie » par les enfants et les jeunes ;
-l’investissement
de l’Etat dans l’égalité numérique doit permettre à tous les enfants et
jeunes d’être équipés et avoir accès à une connexion, et à tous les
enseignants d’être formés à l’accompagnement des élèves à distance ;
-développée
cette année par le gouvernement dans les squats et bidonvilles, la
médiation scolaire doit être renforcée dans la durée et élargie à tous
les enfants et jeunes qui en ont besoin, quel que soit leur lieu de vie.
En effet, l’attention portée aux élèves les plus fragiles à l’occasion
de cette période de crise ne doit pas faire oublier les enfants et
jeunes en situation de précarité les plus éloignés de l’école, qui ne
sont pas encore élèves.
Aujourd’hui
plus que jamais, le défi du respect du droit à l’éducation pour chaque
enfant et chaque jeune revêt une importance considérable pour tous les
acteurs de l’éducation et du secteur social. Ensemble, nous appelons le
gouvernement à s’engager pour que le droit à l’éducation soit effectif
pour tous les enfants en métropole et en Outre-mer et pour faire de la
devise républicaine une réalité pour tous et toutes.
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