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jeudi 8 avril 2021

Vaccins : le Maroc, Petit Poucet sanitaire




 
La situation est inquiétante, mais pas encore alarmante. Côté face : une campagne de vaccination qui, une fois lancée, s’est déroulée sans accrocs, à mesure que les lots de vaccins arrivaient. Côté pile, les vaccins anti-Covid-19, très demandés, se font de plus en plus rares. Le Maroc ne dispose quasiment plus de premières doses et se retrouve à la merci de ses fournisseurs, qu’ils soient russes, indiens, chinois ou autres. La campagne débutée sous de bons auspices, il y a deux mois, pourrait bien connaître un coup d’arrêt.
 
L’inquiétude monte d’un cran lorsque l’on sait que le variant anglais du Covid-19 se répand doucement chez nous. Dakhla a été mise sous cloche avec 49 cas à son actif. Les promesses de Khalid Aït Taleb quant à un ramadan paisible ont pris l’air d’un vœu pieux, alors que le mois sacré approche à grands pas, avec sa panoplie annoncée de mesures restrictives.
 
L’état n’est cependant pas entièrement fautif. Dans ce domaine, le Maroc n’est pas maître de son destin. Pour cela, il aurait fallu disposer d’une souveraineté sanitaire, et éviter ainsi d’être tributaire d’autres pays qui, eux, l’ont acquise. Nous ne sommes pas l’Inde qui, confrontée à une nouvelle déferlante épidémique, n’a pas tergiversé longtemps avant de décider la nationalisation des prochaines productions de doses. “Ses” doses.
 
 
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Un choix pragmatique de Narendra Modi, le très nationaliste Premier ministre indien, qui a donné la priorité à ses concitoyens. Et tant pis si les autres pays dépendants des doses indiennes, comme le Maroc, l’Arabie Saoudite ou le Brésil, se retrouvent sur le carreau.
 
Ni la puissance économique de Riyad ni la situation sanitaire critique du géant sud-américain n’ont eu d’influence sur la volonté des dirigeants indiens de donner l’absolue priorité à leurs citoyens. Le Maroc fait donc partie de ces nombreux pays dans la file d’attente. Il attend son tour sans broncher, et ce en dépit des accords passés avec les laboratoires.
 
Pour l’heure, plus de 90 % des personnes ayant bénéficié de vaccins vivent dans les pays développés. À l’OMC, ces pays rejettent constamment une proposition des pays en voie de développement visant à démocratiser la production de vaccins. Proposition rejetée au nom de la protection de l’innovation, affirment-ils. Au nom du profit, leur répondons-nous.
 
 
Mais quand bien même les licences seraient accordées au Maroc, combien de temps pour mettre sur pied un site de production à même de fournir assez de doses pour nos besoins ? L’industrie pharmaceutique marocaine, vieille de plusieurs décennies et que l’on dit une des plus performantes du continent, est-elle capable de franchir le pas ?

De guerre lasse, on est tenté, une nouvelle fois, de brandir l’exemple sud-coréen. Le dragon asiatique, largement rural et paysan dans les années 1960, avait un PIB par habitant légèrement inférieur à celui du Maroc. Il a opéré sa mue grâce à la révolution éducative et industrielle décidée et mise en œuvre par ses dirigeants. Nos dirigeants à nous, dans les années 1960, avaient d’autres priorités et ont fait d’autres choix.

Aujourd’hui géant industriel, la Corée du Sud est en mesure de produire le vaccin et devrait en expédier environ deux millions de doses au Maroc par l’intermédiaire du mécanisme Covax destiné aux pays les moins développés. La Corée est souveraine. Nous ne le sommes pas. La roue de l’histoire a tourné, sans répit.
 

 

 
 
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