Morad Diani
Au Maroc, l’esprit toujours remuant du 20 février 2011
Le Maroc a toujours joui d’une image gratifiante à l’échelle
internationale. Aujourd’hui encore, il est souvent dépeint comme un
havre de paix et de stabilité dans un monde arabe plongé dans
l’incertitude et le chaos. Un pays dirigé par un roi libéral et
délibérément ouvert sur l’Occident qui aurait réussi une transition
douce dans la continuité et qui se positionne comme un rempart contre
l’extrémisme, le terrorisme et les migrations. C’est d’ailleurs une
image que la monarchie chérifienne n’a pas lésiné à promouvoir sous
l’épithète « l’exception marocaine », que d’aucuns qualifient de simple euphémisme pour une ouverture politique en trompe-l’œil sans véritable démocratisation.
Au-delà du Mouvement du 20 février lui-même, le « 20 février » est entendu ici davantage sous le prisme d’un esprit de changement transcendant le mouvement social qui a émergé en janvier 2011 après les révolutions tunisienne et égyptienne et officiellement descendu dans la rue le 20 février 2011. Dit autrement, si le Mouvement du 20 février s’est tari au fil de mois de mobilisation de la rue jusqu’à se dissiper, notamment depuis le retrait en décembre 2011 de l’organisation islamiste Al-Adl wal-Ihssane qui en constituait la principale ossature, l’esprit en est resté vivant dans le corps marocain et ne cesse d’alimenter la dynamique de contestation, comme en atteste le mouvement social Hirak al-Rif dans le nord du Maroc (2016-2017), ou plus récemment (2018 jusqu’à aujourd’hui) le vaste mouvement de boycott de trois des plus grandes firmes marocaines symbolisant la ploutocratie dominante.
Connivence généralisée
Si cette image enchanteresse a la peau dure malgré les défaillances multiples et à tous les niveaux que cumule le royaume, c’est en partie en raison d’une connivence généralisée des discours et des analyses sur ce qui se passe réellement dans le pays, mêlant aliénation et collusion des élites. L’ouvrage collectif récemment paru et intitulé 20 février. Issues de la transition démocratique au Maroc1 (c’est nous qui traduisons) propose à cet effet un éventail d’analyses critiques à contre-courant de la doxa dominante, à même de jeter une lumière nouvelle sur les nombreuses zones d’ombre qui persistent dans le pays. Cet ouvrage qui rassemble 24 éminentes contributions d’auteurs marocains d’origines et de sensibilités diverses propose des lectures croisées de l’expérience marocaine à la suite de l’éclosion en 2011, dans la lignée de la première vague du printemps arabe, du mouvement contestataire du 20 février et de la réforme constitutionnelle qui en a résulté.Au-delà du Mouvement du 20 février lui-même, le « 20 février » est entendu ici davantage sous le prisme d’un esprit de changement transcendant le mouvement social qui a émergé en janvier 2011 après les révolutions tunisienne et égyptienne et officiellement descendu dans la rue le 20 février 2011. Dit autrement, si le Mouvement du 20 février s’est tari au fil de mois de mobilisation de la rue jusqu’à se dissiper, notamment depuis le retrait en décembre 2011 de l’organisation islamiste Al-Adl wal-Ihssane qui en constituait la principale ossature, l’esprit en est resté vivant dans le corps marocain et ne cesse d’alimenter la dynamique de contestation, comme en atteste le mouvement social Hirak al-Rif dans le nord du Maroc (2016-2017), ou plus récemment (2018 jusqu’à aujourd’hui) le vaste mouvement de boycott de trois des plus grandes firmes marocaines symbolisant la ploutocratie dominante.