« Nous, prisonniers, condamnés ou prévenus, enfermés à la maison d’arrêt de Fleury Mérogis, lançons un appel contre la conquête sécuritaire qui se joue en ce moment à travers les mobilisations des surveillants de prison dans toute la France. »
paru dans lundimatin#131, le 29 janvier 2018
Alors que tous les
média couvrent le mouvement des surveillants, pas un mot ni une image
sur les conséquences sur la vie des détenus. Un collectif de prisonniers
vient de diffuser cette excellente analyse de la situation qui est
aussi un récit des tentatives de s’organiser à l’intérieur et de la
répression qui s’ensuit.
Nous, prisonniers, condamnés ou prévenus, enfermés à la
maison d’arrêt de Fleury Mérogis, lançons un appel contre la conquête
sécuritaire qui se joue en ce moment à travers les mobilisations des
surveillants de prison dans toute la France. Cet appel vise également à
construire une force collective entre les détenus en lutte et à
l’extérieur. Depuis plusieurs jours, des surveillants de prisons
bloquent les entrées des maisons d’arrêt, centrales et centres de
détention du territoire français. Ici, à Fleury Mérogis, l’établissement
est régulièrement paralysé depuis le début de semaine par plusieurs
dizaines de surveillants, empêchant les parloirs avec nos familles,
parfois venus de loin, empêchant les extractions dans le cadre des
procédures judiciaires (bloquant les aménagements de peine), l’entrée
des avocats, les cantines, les cuisines, le nettoyage et toutes les
activités dédiées à la prétendue « réinsertion » Leurs revendications
sont simples, ils réclament plus de moyens et plus de sécurité pour le
personnel pénitencier, ce qui se traduit concrètement par un armement
généralisé des surveillants, l’imposition de menottes aux détenus lors
de leurs déplacements hors des cellules, et des restrictions
conséquentes de nos libertés et de nos droits, pour le peu qu’il en
reste. Leur mouvement fait suite à diverses manifestations supposées de
violence depuis quelques temps, qui, si elles existent, ne sont que des
actes isolés, bien souvent en réponse à une violence bien plus
importante de l’institution carcérale et de l’État en général. Depuis
une semaine, nous assistons à une surmédiatisation d’événements
sporadiques et minimes sur toutes les chaînes de télévision, sur fonds
d’antiterrorisme. Une insulte devient une agression, une bousculade un
passage à tabac et un retard en cellule une mutinerie. Et nous voyons
ainsi défiler ces mensonges sur BFM depuis le
week-end dernier. Les surveillants et leur syndicat, interviewés par les
médias, ont présenté la prison comme un« sanctuaire de criminels » où
les détenus avaient« pris le pouvoir » dans des zones totalement
abandonnées par les pouvoirs publics. Mais cette stratégie de
désinformation ne s’arrête pas là et se couple à des actions bien
réelles à l’encontre des détenus.