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vendredi 31 janvier 2020

Au Maroc, l’étouffement des dernières voix dissidentes

Le rappeur L’Gnawi, co-auteur de la chanson « 3acha cha3b » (vive le peuple) condamné le 24 novembre 2019 à un an de prison ferme
Ils ne sont ni opposants ni journalistes engagés ni militants professionnels, mais pour la plupart des Marocains lambda : jeunes lycéens, chanteurs en herbe, petits commerçants ou encore chômeurs. Tous des jeunes, voire pour certains des adolescents. Leur point commun : ils ont exprimé, via YouTube, le désespoir de la jeunesse marocaine et le fossé qui ne cesse de se creuser entre riches et pauvres, ce qui est assez courant ; mais ils ont également critiqué le roi Mohamed VI et raillé ses discours « qui ne servent plus à rien et qui n’emballent plus », ce qui est inédit.

 Jusqu’à présent en effet, ceux qui s’en prenaient au roi étaient souvent des « MRE », des Marocains résidant à l’étranger s’exprimant à l’abri d’une loi qui punit de prison toute critique de la monarchie. Il s’agit donc d’un véritable point de basculement dans les formes de contestation politique.

« Ma vie n’a pas de but »

Tout a commencé le 29 octobre 2019 par une chanson postée sur YouTube. On y voit trois jeunes rappeurs dénoncer avec des mots crus la corruption, les inégalités sociales, tout en désignant ouvertement le roi Mohamed VI :
Qui a broyé le pays et qui continue à chercher la richesse ? […] Qui nous a mis dans ce pétrin ? Vous avez violé notre dignité […]. Si on est 40 millions dans ce pays, 30 millions restent avec toi parce qu’ils y sont forcés […]. Ma vie n’a pas de but […]. Je suis celui qui t’a fait confiance et qui a été trahi […]. Je suis le Rifain qui rêve d’un Rif meilleur…
Weld l'Griya 09 ft. LZ3ER , GNAWI - عاش الشعب — YouTube
À l’heure où ces lignes sont écrites, la chanson a recueilli près de 22 millions de vues sur YouTube (les Marocains qui ont voté lors des dernières législatives sont 13 millions seulement...). Ses auteurs ? Trois jeunes rappeurs issus des quartiers populaires de Casablanca surnommés L’Zaar, Weld Legriya et L’Gnawi (Gnawi, Simo Gnawi). Le titre de la chanson est un slogan très en vogue parmi la jeunesse contestataire : Aacha chaab (vive le peuple), une paraphrase subversive de « vive le roi ».
La machine judiciaire se met aussitôt en branle. L’Gnawi, de son vrai nom Mohamed Mounir est arrêté puis condamné le 24 novembre 2019 à un an de prison ferme. L’accusation ne mentionne aucun motif politique : le rappeur est condamné pour « outrage à la police ».
Quelques jours plus tard, c’est une véritable avalanche d’arrestations et de condamnations qui se déclenche contre de jeunes Marocains, pour la plupart inconnus.
Le 15 décembre, un adolescent de 18 ans, Ayoub Mahfoud, écope de trois ans de prison ferme après avoir partagé la chanson Aacha chaab sur sa page Facebook. Cette fois l’accusation est ouvertement politique : le jeune lycéen est condamné pour « atteinte au roi ». Devant l’émoi que cette affaire suscite, le tribunal décide, le 16 janvier, de le remettre en liberté provisoire, mais les poursuites sont maintenues et son procès devrait avoir lieu fin mars.
Le 26 décembre, Mohamed Sekkaki, surnommé « Moul Kaskita » (l’homme à la casquette), un chômeur de Settat, ville pauvre entre Casablanca et Marrakech est arrêté et accusé d’« outrage à corps constitués ». Le motif politique est là aussi occulté ; en réalité, il a posté une vidéo dans laquelle il se moque copieusement du roi :
Ces discours que tu lis en tremblant ne nous emballent plus […]. Quand tu tombes malade, tu ne te soignes pas ici, dans ton pays, dans nos hôpitaux, tu vas à l’étranger pour te soigner. Tu dis ‘’mon cher peuple’’ alors que ton peuple souffre le martyre à cause des inégalités et des injustices…
Il est condamné à quatre ans de prison ferme.
Le 26 décembre, pour un tweet publié en avril 20191 dans lequel il s’en est pris au juge qui a dirigé les procès du Hirak du Rif, le journaliste Omar Radi est incarcéré à la prison de Casablanca pour « outrage à magistrat ». Là aussi, devant la mobilisation de la société civile, le juge a décidé de le remettre en liberté provisoire le 31 décembre, tout en maintenant les poursuites.

« On n’a jamais compris »

Le 1er janvier, un adolescent de 17 ans, Hamza Asbaar, est condamné à quatre ans de prison après avoir posté sur YouTube sa chanson On a compris dans laquelle il attaque ouvertement le roi et ses discours « qu’on n’a jamais compris », chante-t-il :
On n’arrête pas d’écouter ses discours, qu’on n’a jamais compris […]. La Constitution est taillée sur mesure pour lui […]. Tu as compris, on a compris...
STALiN - FHemna/فهمنا - YouTube
Le 16 janvier, le tribunal de Lâayoun, au Sahara occidental, a réduit sa peine de quatre ans à huit mois. Il reste donc en prison.
Cette vague de répression — la liste est longue — contre de jeunes youtubeurs vivant au Maroc et ayant, de manière tout à fait assumée, critiqué le monarque et sa politique s’explique sans doute par la volonté de tordre le cou à toute forme de libération de la parole, et, selon un proche du palais, de « rétablir l’hiba2 de la monarchie et de l’État », incarné par un monarque de plus en plus impopulaire.
Pendant des années Mohamed VI a construit sa communication politique sur l’image et le mouvement : celle d’un jeune roi populaire qui va à la rencontre de ses sujets. Des images où on le voit inaugurer des projets locaux ou distribuer des dons en nature (parfois des cartables ou des paniers contenant de l’huile et de farine) à des personnes choisies par les agents du ministère de l’intérieur dans certaines villes ou villages, généralement à la veille du ramadan.
Il est également présenté par les chaînes officielles (Al-Oula, 2M, Medi1TV… dont les journalistes ressemblent davantage à de petits fonctionnaires de l’état civil qu’à des reporters) comme la seule institution « qui marche, qui bouge », la seule qui vaille. Face au monarque décrit aussi comme « le seul acteur fiable », le gouvernement, les partis politiques ou encore le Parlement incarneraient quant à eux la médiocrité, l’opportunisme et l’inefficacité — ce qui n’est pas tout à fait faux. Dans une rengaine proprement orientale, il est souvent présenté comme le bon calife entouré de mauvais vizirs : Lmalik zouine, lidayrine bih li khaybine (le roi est bon, les méchants, ce sont ceux qui l’entourent).

Des discours royaux qui « n’emballent » plus

Aujourd’hui, ces stratégies se sont essoufflées et la popularité de M6 bat de l’aile. Après plus de vingt ans d’un pouvoir absolu, l’image du roi Mohamed VI est abîmée par l’ampleur des problèmes sociaux auxquels fait face une large partie de la population marocaine. Les « projets » de développement maintes fois promis par le souverain dans ses discours, les chantiers dits « structurants » et les promesses de réforme semblent n’avoir profité qu’à une minorité de chanceux, selon les propres aveux du monarque. Sans parler de la réforme de l’enseignement, de la lutte contre la corruption, de la pauvreté et des injustices sociales qui atteignent des proportions dangereuses, y compris pour la stabilité du régime.
Outre ses discours qui n’« emballent » plus, les décisions du roi manquent de plus en plus de cohérence et de rigueur, ce qui n’arrange pas les choses en termes de popularité. L’arrestation d’Omar Radi a eu lieu quelques jours seulement après la nomination par le roi d’une « commission pour le développement » présidée par l’ambassadeur du Maroc à Paris, Chakib Benmoussa. Indigné, l’un de ses membres, Rachid Benzine, un universitaire pourtant proche du palais écrit dans un tweet : « La mise en détention d’Omar Radi nous interpelle et nous rappelle qu’aucun modèle de développement ne saurait être défendable ni viable sans la garantie de la liberté d’expression et d’information. Le développement implique la critique et le débat d’idées, ou il n’est pas. »
Même si elle reste relative en l’absence de sondages sur la monarchie (interdits au Maroc), l’impopularité croissante de Mohamed VI se mesure surtout via les réseaux sociaux où des milliers de Marocains peuvent s’exprimer avec une relative liberté. Le fait, par exemple, qu’Aacha chaab ait été entendue par près de 22 millions de Marocains, et commentée positivement par des milliers d’internautes en dit long sur la popularité abîmée du « roi des pauvres ».

Une police qui rappelle celle de Ben Ali

Par ailleurs, si les critiques et les moqueries des jeunes youtubeurs n’épargnent pas la personne du roi, ses discours sont particulièrement visés, et pour cause : il est le maître absolu des horloges et les Marocains le savent. C’est ce qui explique qu’au début de son règne, ses paroles généraient de grandes attentes, mais aussi qu’ils suscitent désormais autant de déception.
Pour faire taire ces voix qui émergent spontanément, critiquent le roi sans le diffamer via les réseaux sociaux, la monarchie s’appuie sur une police qui rappelle l’ancien régime tunisien de Zine El-Abidine Ben Ali et des juges peu respectueux de leur indépendance.
Depuis la fermeture du Journal hebdomadaire (fleuron de la presse indépendante au Maroc entre 1997 et 2010) il y a juste dix ans, les pressions économiques et la menace judiciaire continuent de peser sur ce qui reste de la presse privée. À ce niveau aussi, le rôle de la justice, inféodée au palais et à l’entourage royal, est crucial.
Au fur et à mesure que la répression prend de l’ampleur, la justice marocaine est mise à l’index par les ONG (marocaines et internationales) et présentée comme le bras séculier du roi et de son entourage. Non seulement le monarque nomme les magistrats, mais les verdicts sont prononcés en son nom et il est le président du Conseil supérieur de la magistrature. Dans les procès politiques qui continuent de se dérouler à Meknès, Lâayoun ou Casablanca, il est implicitement à la fois juge et partie, constatent avec amertume les défenseurs des droits humains, qui ne cessent d’appeler à une véritable séparation des pouvoirs.

Violence dans les manifestations en France : le cinglant coup de gueule de Robert Badinter


Violence dans les manifestations : le cinglant coup de gueule de Robert Badinter




Robert Badinter sort littéralement de ses gonds. Invité spécial de "C à vous" sur France 5 ce lundi 27 janvier, à l'occasion des 75 ans de la libération du camp d'Auschwitz, l'ancien ministre de la Justice s'en est pris aux démonstrations de violence lors des manifestations sociales des derniers mois.

Invité à réagir sur le plateau de l'émission "C à vous", aux images de manifestants, tenant notamment la tête d'Emmanuel Macron au bout d'une pique, Robert Badinter a laissé éclater sa colère : "Rien n'excuse ce degré de violence (...). La représentation d'une tête au bout d'une pique, qui n'est rien d'autre que la continuité de la guillotine, est à mes yeux absolument et totalement condamnable".

Pour l'ancien ministre de la Justice, "on ne pas admettre dans la République française, que quelque homme ou femme politique que ce soit, on promène sa tête au bout d'une pique avec ce que cela signifie, ce n'est pas admissible, je le dis du fond du coeur".

Remonté, l'ancien garde des Sceaux a ensuite expliqué : "Derrière le symbole il y a la pulsion, et s'il y a la pulsion il y a la haine, et la volonté de détruire physiquement l'adversaire". Pour Robert Badinter, rien de justifie la violence. Comment manifester son mécontentement ? "Vous avez tous les moyens, toutes les libertés, l'expression, le défilé, la manifestation, le slogan, ce que vous voulez, mais pas la violence physique, pas l'agression des êtres humains, pas non plus la symbolique de la mort, parce que la mort n'est pas compatible avec nos idéaux".

jeudi 30 janvier 2020

Le « Samudaripen » ou génocide des Tsiganes, une histoire occultée

Les articles de la rubrique Idées n’expriment pas nécessairement le point de vue de l’organisation mais de camarades qui interviennent dans les débats du mouvement ouvrier. Certains sont publiés par notre presse, d’autres sont issus de nos débats internes, d’autres encore sont des points de vue extérieurs

Le 27 janvier 2015 marquait le 70e anniversaire de la libération par l’armée soviétique du camp d’Auschwitz, devenu le symbole du génocide des Juifs par les Nazis. Mais en cette journée internationale de mémoire de l’Holocauste, peu de place a été accordée sur les tribunes et dans les médias aux survivants tsiganes et à la question du « Samudaripen » ou « Porajmos », en langue romani : l’extermination des Tsiganes pendant la Seconde guerre mondiale.
Ce drame peine à intégrer les mémoires malgré les nombreuses publications et les multiples témoignages de familles tsiganes ayant survécu. En France, pendant des décennies cette histoire a été plus ou moins ignorée. Le 2 février 2011, pour la première fois, le Parlement européen  a commémoré le « génocide des Roms par les nazis ». Il s’agit de faire prendre conscience du mécanisme qui a mené  aux persécutions dont ont été victimes les Tsiganes, et comment les discriminations perdurent.

La « fabrication » du peuple tsigane
Les discriminations à l’égard des Tsiganes sont anciennes. Or, pour l’historienne Henriette Asseo par exemple, ce qui est désigné par le terme de « Tsiganes » est largement une construction politique, et la mise en place de « la politique tsigane » a été fabriquée de toutes pièces par des bureaucraties dans tous les pays européens entre 1900 et 1910.
« Les politiques fabriquent les peuples qu’elles veulent détruire. » il s’agissait de constituer une minorité « raciale » avec des résidents de différents pays, dans le but de les dénationaliser, les présenter comme des intrus,  pour lesquels il y aurait un « problème » à résoudre.
Or qui sont-ils ? Tsiganes, Roms, Manouches, Sinti, Gitans, Bohémiens, Romanichels… sont les multiples appellations de ces populations réunies sous l’appellation de « Tsiganes », constituées de groupes qui se sont dispersés sur le continent européen à partir du XIVe siècle. On en retrouve aussi au Moyen Orient. La mythologie prétend que les Tsiganes ont une origine indienne. Les linguistes ont fait le lien entre le romani, langue pratiquée par certaines de ces populations et le sanskrit, une langue indienne. Si la lointaine origine indienne de certains Tsiganes n’est pas contestée, ils n’ont pas tous la même origine. Les différents dialectes tsiganes ont des emprunts  persans, grecs, arméniens, roumains… Ainsi, pour ceux qui vivent en France : les Roms viennent des Balkans et des pays slaves, la langue et la culture des Manouches sont d’origine germanique, Les Gitans ou Kalé (« noirs ») ont des origines ibériques, les Yéniches, blancs et souvent blonds, sont d’origine alémanique.
A la fin du Moyen-âge, quand les premiers groupes circulent en Europe, l’important n’est pas de savoir d’où ils viennent mais s’ils sont chrétiens. En revanche, au XIXe siècle, pour ceux qui veulent les exclure il s’agit de les faire rentrer à tout prix dans le moule d’un peuple unique, venu de l’Inde, et qui par conséquent pourrait… y retourner ! 
Lire : https://www.anti-k.org/.../le-samudaripen-ou-genocide-des-tsiganes-une-histoire-occultee
« Notre première et plus indispensable recherche doit donc avoir pour but de trouver la partie du globe où le langage des Bohémiens est celui des indigènes ; et ce pays ne peut être que l’Hindoustan » (Grellman, Histoire des Bohémiens, Paris, 1810). Par ailleurs, l’idée selon laquelle les Tsiganes sont tous des nomades est fausse mais permet de les considérer dans leur propre pays comme des « étrangers », des « vagabonds », ce qui revient à les disqualifier socialement et politiquement.

Une persécution dans toute l’Europe
 Partout en Europe les mêmes mesures répressives furent plus ou moins reprises de la fin du XIXe siècle à l’entre-deux-guerres : recensement et fichage, durcissement des contrôles aux frontières, instauration de carnets anthropométriques, restriction de circulation. Ces régimes administratifs visaient la même chose : exclure les Tsiganes, accusés de changer sans cesse d’identité et de n’avoir aucun pays d’attache, de la nation ou les rendre invisibles par leur assimilation, de gré ou de force. En France comme ailleurs les stéréotypes accolés aux Tsiganes (« nomades, espions, voleurs, vagabonds ») font qu’ils sont victimes de la méfiance qu’inspirent les populations nomades, qui ne respecteraient ni les frontières ni la propriété privée.
Exemple parmi d’autres de ce qu’on pouvait lire dans la presse, cet article du Petit Journal de 1895 : «  On tient, n’est-ce pas à connaître les gens que l’on reçoit ? Or, de toute éternité nous avons en France des hôtes sur le compte desquels on savait très peu de choses, si ce n’est rien. Appelez-les Gypsies, Tziganes, Bohémiens, Romanichels, Gitanes ; tous, issus de la même race, ne se soumettaient qu’à de bizarres lois qui leur étaient propres (…) Le ministre de l’intérieur a voulu régulariser, autant que possible, la situation de ces errants au milieu desquels peuvent se cacher nos pires ennemis ; il a ordonné leur recensement général. » La loi du 20 mars 1895 décrète le dénombrement de tous les « nomades, bohémiens et vagabonds ». Une commission distinguera, parmi 400 000 personnes recensées, 25 000 nomades à « caractères ethniques » qu’elle considère comme « dangereux ». « Ces nomades, qu’ils soient des Romanichels, des Zingari, des Tsiganes ou même des Français sont particulièrement redoutés car leur passage est toujours accompagné de déprédations de toutes sortes ». A la veille de la Seconde guerre mondiale, 30 000 nomades figuraient dans les fichiers de la police française.

De l’Empire allemand au nazisme
Dès sa constitution en 1871, l’Empire allemand afficha la volonté de faire disparaître les Roms en tant que tels par assimilation et sédentarisation. Les services de police les recensent, les fichent systématiquement, et les mettent sous étroite surveillance. Les  « Sinti » furent plus ou moins sédentarisés mais continuaient cependant à être victimes de discriminations. Même la République de Weimar (1918-1933) amplifia la persécution avec l’adoption en 1926 de lois pour contrôler la « plaie tsigane ».
 Quand Hitler arriva au pouvoir en 1933, les nazis purent largement utiliser tous les renseignements qui existaient déjà, mais ils introduisirent une nuance déterminante. L’ancienne surveillance ciblait le mode de vie itinérant et était dirigée contre les « Tsiganes » et « personnes qui voyagent à la manière des Tsiganes ». Or les nazis, affirmant l’existence d’une  race supérieure aryenne qui ne devait pas être polluée par les « races inférieures » (particulièrement les Juifs), prétendirent différencier les « vrais » et « faux » Tsiganes. Mülhlmann (1904-1988), un nazi qui resta en poste jusque dans les années 1960, et d’autres chercheurs mirent en place de pseudosciences comme la « raciologie » et, pour les Tsiganes,  la « tsiganologie ».  On traqua alors les Sinti, même si nombre d’entre eux étaient « intégrés » à la société allemande depuis des générations.
En 1934, la loi contre les « criminels irrécupérables et dangereux » ordonne le fichage policier de type anthropométrique de nombreux Tsiganes. En septembre 1935 sont votées les lois « de Nuremberg » destinées essentiellement à la persécution et l’exclusion des Juifs : seuls ceux qui peuvent prouver, par leur généalogie, qu’ils appartiennent à la « lignée aryenne » sont citoyens du Reich. Ces lois pour « la sauvegarde du sang et de l’honneur allemand » visent à protéger le « sang » allemand de toutes souillures par des alliances inadaptées.
La population fut également mise en garde contre tout métissage avec les Tsiganes. « Le peuple des Tsiganes, étranger au peuple et aux traditions allemandes », fut décrété « non  intégrable » et subit l’exclusion civique puis sociale : exclusion de l’école, interdiction de circuler. Le régime leur interdit tout travail indépendant et les obligea à occuper des emplois non qualifiés (on leur interdit bien entendu, comme aux Juifs, l’exercice de professions culturelles, le théâtre, la musique…). Dès l’été 1935, des municipalités commencèrent obliger tous les Tsiganes recensés à quitter leur logement (et leur emploi !) pour les concentrer à la périphérie des villes dans des camps de regroupement clôturés. Puis des familles tsiganes nomades ou celles qui « vivaient comme des Tsiganes », enfermées dans ces camps, subirent une « stérilisation eugénique » dans le cadre de la loi contre les « asociaux ».
En 1939, déchus comme les Juifs de la citoyenneté allemande, les « Tsiganes ethniquement purs » reçurent des papiers d’identité de différentes couleurs en fonction de leur prétendu degré de « mixité raciale ». Ils furent classés en tant que « criminels professionnels », « criminels habituels », « menace habituelle », « fléau commun », et mis en « détention préventive ». Les hommes furent envoyés dans des camps de concentration et soumis au travail forcé, la stérilisation des femmes fut généralisée. L’extermination systématique allait bientôt suivre.

Un génocide dans toute l’Europe
La traque des Tsiganes se généralisa dans toute l’Europe occupée. Et il faut bien avouer que le racisme des populations locales (et les pratiques préexistantes des Etats) facilita largement l’action des nazis et leurs complices. Celle-ci ne fut cependant pas complètement homogène d’un pays à l’autre.
Dans son livre Samudaripen : Le Génocide des Tsiganes, l’historienne Claire Auzias différencie trois types de pays : « Soit ils furent d’abord exclus juridiquement puis arrêtés, parqués dans des camps de transit et enfin déportés puis gazés (Grand Reich). Soit ils furent massacrés par l’armée occupante et par les civils, enfermés dans les ghettos avec les Juifs, comme en Pologne, et exterminés. Soit ils furent internés dans des camps locaux comme en France et en Italie, voués à périr, et sporadiquement déportés vers les camps de la mort. »
A l’automne 1942, les nazis décident « la solution biologique finale » de la « question tsigane » (la conférence de Wannsee planifiant le génocide des Juifs s’était tenue en janvier 1942). Le 16 décembre 1942, Himmler prend la décision de les déporter dans des camps de concentration et d’extermination. Tous ceux qui vivaient en Autriche furent envoyés  dans les camps de Dachau et Ravensbrück. La plus grande partie de ceux vivant en Allemagne, et ceux de Pologne et de Tchécoslovaquie, furent regroupés dans un prétendu « camp familial tsigane » au camp de Auschwitz-Birkenau, où ils moururent par dizaines de milliers. Quand, le 16 mai 1944, les Tsiganes apprennent qu’ils vont être gazés, ils tentent une révolte collective qui échoue. La répression est violente. Ainsi, le 2 août 1944, 2998 personnes, essentiellement des femmes et des enfants, sont gazés.
Sur les 30 000 Roms internés à Auschwitz, il n’y eut que 3000 survivants. Dans les autres camps, des dizaines de milliers moururent de faim, de maladie, d’épuisement par les travaux forcés. Aux victimes des camps de concentration, il faut ajouter les massacres perpétrés par  l’armée allemande et les unités de la SS et de la police au cours de leurs conquêtes. Ainsi, dans les Pays baltes et en Union soviétique, les « Einsatzgruppen » et d’autres unités mobiles d’extermination exécutèrent au moins 30 000 Tsiganes en même temps qu’ils exterminaient les Juifs et les communistes. Dans leur travail de répression et d’extermination, les nazis furent aidés dans les pays occupés par les autorités locales.

La France de la collaboration
En France, la persécution des Tsiganes fut dans un premier temps le fait des autorités locales… puisqu’elle commença avant l’invasion du pays ! Par le décret-loi du 6 avril 1940, les « nomades » furent qualifiés « « d’individus errants, généralement sans domicile, ni patrie, ni profession effective… ». Leur circulation « constitue pour la défense nationale et la sauvegarde du secret, un danger qui doit être écarté ». L’assignation à résidence leur est imposée à proximité des brigades de gendarmerie.
Après la défaite de juin 1940, dans la zone occupée, les nazis exigent l’éloignement  des côtes de l’Atlantique des
« éléments douteux » comme les Tsiganes, les Juifs et les ressortissants de nations « ennemies ». Ceux qui présentent les « caractères ethniques particuliers  des Romanichels » doivent être transférés dans des camps d’internement surveillés par des policiers français. Le 22 novembre 1940, une ordonnance allemande interdit l’exercice des « professions ambulantes » dans 21 départements du grand ouest – ce qui du coup touche aussi les forains, les commerçants et industriels ambulants…
En « zone libre », Vichy s’attaque aux forces « anti-françaises », « responsables de la débâcle ». Des mesures sont prises immédiatement et sans pression des occupants contre les juifs, les communistes, les étrangers et les francs-maçons. Quant aux nomades, il y a déjà contre eux la loi d’avril 1940 visant leur sédentarisation forcée. Mais l’hostilité des populations à proximité desquelles les Tsiganes étaient assignés à résidence est telle que dans de nombreux cas ils seront envoyés dans des camps d’internement.
Globalement, il semble que l’État français n’a pas conçu l’internement des nomades comme la solution d’un problème brûlant, contrairement aux Juifs et aux communistes. Il n’empêche qu’environ 6000 personnes ont transité dans les camps répartis sur le territoire. A part ceux directement sous administration allemande, les Tsiganes français n’ont pas été systématiquement déportés dans des camps de concentration. Mais ceux envoyés en Allemagne au titre du STO furent raflés et exterminés.

Après la guerre : une reconnaissance tardive et  parcimonieuse
Sur les 750 000 à 800 000 Tsiganes vivant en Europe, entre 250 000 et 500 000 moururent ou de mauvais traitements dans les différents camps ou exterminés comme à Auschwitz. Parmi tous ceux qui furent envoyés dans des camps, seuls 4 ou 5000 survécurent.  Pourtant, il y eut un refus presque général après la guerre de reconnaître le génocide des Tsiganes.
Dans l’Allemagne vaincue de 1945, il s’agissait pour les survivants d’obtenir des réparations et de retrouver leur citoyenneté. A l’ouest, les gouvernements militaires mirent en place des bureaux sociaux spécialisés chargés de verser des réparations aux victimes du nazisme, tenus par des fonctionnaires allemands souvent déjà en place sous le nazisme. Pouvaient en bénéficier les personnes qui  avaient été persécutées pour des motifs racistes, religieux ou politiques. Mais pas les personnes internées en tant qu’« asociaux » ou pour des « actes criminels ». Par ailleurs, pour leur réinstallation nationale, les rescapés devaient prouver qu’ils étaient citoyens allemands.
D’où l’incroyable injustice subie par les Sinti allemands après-guerre. Avant même les nazis, les pouvoirs en place tendaient à contester leur citoyenneté aux Sinti, même s’ils étaient  installés dans le pays depuis des siècles. Dès 1937, des milliers subirent un internement préventif en tant qu’asociaux et criminels « congénitaux ». De 1933 à 1945, c’est la police criminelle (et non la Gestapo comme pour les Juifs) qui eut la charge de persécuter les Tsiganes. Or la Gestapo fut reconnue comme une organisation criminelle, mais pas la police du Reich dont 80 % du personnel resta en place.
Pour éviter que les rescapés ne fassent «frauduleusement » des demandes de reconnaissance du statut de persécuté du nazisme, l’administration alliée puis celle de la RFA demanda à cette même police,  c’est-à-dire aux anciens policiers des « bureaux pour les questions tsiganes », de vérifier les dossiers de ceux qui voulaient être reconnus comme victimes des nazis et comme citoyens allemands. Les persécuteurs et les dresseurs de « généalogie raciale » devinrent les experts de leurs propres mesures de persécution ! De façon particulièrement perverse, les Sinti se voyaient mis en demeure de se construire une « identité raciale », fantasme nazi, pour être reconnus comme victimes.
Bien souvent, la police déclara que c’était en tant que délinquants que les Tsiganes avaient été internés, pour ne pas verser de réparations et se prémunir contre des poursuites pénales. En 1950, un décret du Land du Bas-Wurtemberg évoqua les lois en vigueur contre les Tsiganes depuis 1871 et ensuite celles de la République de Weimar, pour affirmer que les Tsiganes n’avaient pas été arrêtés pour des raisons racistes mais pour des comportements asociaux et criminels… Ce qui les privait de toute réparation. C’est seulement après 1979, quand le parlement allemand admit enfin le caractère raciste de la persécution des Tsiganes par les nazis, que la plupart d’entre eux purent vraiment demander réparation pour les souffrances subies. Mais à cette date, beaucoup étaient déjà décédés. La reconnaissance officielle du génocide tsigane interviendra en 1982.

En France... les persécutions se poursuivirent après 1945 !
Pendant le conflit, pour les  6500 Tsiganes placés dans des camps d’internement, les libérations se généralisèrent en 1944 et 1945. Cependant, certains ne furent libérés qu’à la fermeture du camp d’Angoulême, lorsque le décret du 6 avril 1940 assignant les Tsiganes à résidence fut aboli. C’est-à-dire en mai 1946 ! De plus, à leur libération, les Tsiganes furent la proie d’un véritable harcèlement. Complètement démunis, lâchés sur les routes, obligés de rentrer à pied dans leurs villes ou villages, perçus par la population avec méfiance et hostilité, ils ne reçurent aucune aide.
En mai 1945, les Tsiganes (y compris les rescapés des camps nazis) sont encore assignés à résidence dans leur canton ; seulement, les maires des communes concernées ne veulent pas les accueillir. Le ministère de l’intérieur envoie alors une circulaire aux préfets, le 24 juillet 1946, qui distingue les « bons » Tsiganes acceptant la sédentarisation totale, et les « mauvais » qui veulent continuer à nomadiser et auxquels on applique les mesures de contrôle prévues par la loi de 1912 sur la circulation des nomades. Toute sorte de tracasseries leur sont infligées : contrôles et parfois prison pour défaut de carnet ou de vaccination, recensement et fichage, problème du stationnement, autorisé la plupart du temps pour 24 heures maximum, dans des zones de relégation spatiale.
Certes la loi du 9 juillet 1948  qui définit le statut et les droits des internés et déportés politiques, s’applique aux nomades, mais les cartes de déporté, d’interné politique ou de combattant volontaire de la Résistance leur sont attribuées tardivement, pour certains seulement… en 1964. De même, ils ne furent jamais indemnisés de la perte de leurs biens : caravanes, roulotes, instruments de musique, camions, chevaux, terrains... Le carnet anthropométrique ne fut supprimé qu’en 1960, remplacé en 1969 par un livret et un carnet  de circulation toujours en usage aujourd’hui pour les « gens du voyage ».

Aujourd’hui
Le génocide tsigane reste peu connu. Dans toute l’Europe, il est très peu enseigné ou même mentionné dans les programmes scolaires. Surtout, un climat de persécution se développe à nouveau. Pas seulement en Hongrie ou dans les Balkans : en France, les destructions violentes des campements, les propos racistes de responsables politiques comme Sarkozy et Valls, se multiplient. C’est ce qui rend d’autant plus nécessaire de raconter l’histoire du génocide tsigane, et comment on en arriva là.
Par Renée Ravoteur
Bibliographie
Roms, Tsiganes, Voyageurs : l'éternité et après ?  Claire Auzias, 3,10 euros.
Roms et Tsiganes, Liégeois Jean-Pierre, 10 euros.
- « Les Tsiganes en France (1939-1946) », Denis Peschanski, CNRS, 2010, 176 pages, 10 euros.
- « Atlas des Tsiganes, les dessous de la question rom », Samuel Delépine, éditions Autrement, 2012, 96 pages, 19,90 euros.
- « Samudaripen, le génocide des Tsiganes », Claire Auzias, L’Esprit frappeur, 2000, 205 pages, 3,25 euros.
- « Gitans, Tsiganes, Roms… Idées reçues sur le gens du voyage », Marc Bordigoni, Le Cavalier Bleu, 2013, 183 pages, 20 euros.
- « Tsiganes, nomades, un malentendu européen »

mercredi 29 janvier 2020

Plan Trump : un plan de liquidation de la cause palestinienne, un alignement indigne de la France


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afps@france-palestine.org

10:59 (il y a 31 minutes)


À Association



http://www.france-palestine.org/Plan-Trump-un-plan-de-liquidation-de-la-cause-palestinienne-un-alignement
Quel spectacle révoltant nous ont offert ce 28 janvier Trump et Nétanyahou, qui prétendaient présenter ensemble un «plan de paix» concernant au premier chef les Palestiniens …sans la moindre présence palestinienne. Ces deux individus, tous deux sous le coup de poursuites pour des actes commis dans le cadre de leur activité politique, tous deux obnubilés par l’échéance électorale à venir, unis par leurs conceptions racistes et suprémacistes.
Une seule réalité : Trump fait un cadeau électoral à Nétanyahou en lui donnant sa bénédiction à l’annexion de toutes les colonies et de la Vallée du Jourdain. Cynique jusqu’au bout, il l’adosse à la promesse d’un supposé État palestinien fractionné et dépouillé de sa capitale Jérusalem et de toutes ses ressources…
L’annexion ? C’est dès que vous voulez, dit-il aux Israéliens.
Le supposé État de Palestine, même dépouillé de tout pouvoir et de toute ressource ? C’est pour dans 4 ans si vous êtes sages.
Pas besoin d’en dire plus, on avait compris depuis longtemps : il s’agit d’aller toujours plus loin dans la dépossession des Palestiniens de leurs terres, de leurs ressources et de leurs lieux emblématiques, de perpétrer le régime d’apartheid, de maintenir les Palestiniens sous occupation.
En entendant liquider la cause palestinienne, ce n’est pas seulement toute perspective de paix que Trump enterre, c’est une conception des relations internationales fondée sur le droit. Ce n’est pas seulement en Israël et Palestine que la paix est menacée : le suprémacisme est à l’œuvre, il mine nos démocraties, il menace la paix dans le monde entier.
La voie de la paix est toute autre : elle passe d’abord par la reconnaissance de l’Autre, de l’injustice et des torts qui lui ont été faits, elle passe par le respect du droit à l’autodétermination du peuple palestinien et du droit au retour des réfugiés palestiniens, elle passe par la fin de l’occupation, de la colonisation, du blocus de Gaza. Ce n’est que sur cette base-là, celle du Droit que Palestiniens et Israéliens pourront inventer leur avenir commun.
La première réaction de la France est de « saluer les efforts du président Trump » ! C’est indigne ! La seule réaction possible au « plan Trump » de la France, de l’Europe, de tous les États qui affirment refuser la loi de la jungle et la loi du plus fort, est un rejet clair et net, sans détour, assorti de menaces de sanctions si l’État d’Israël s’avisait de le mettre en œuvre.
 Il est inconcevable que la France se rende ainsi complice d’un tel plan. C’est une solution basée sur le droit qui doit s’imposer.
Le Bureau national, 29 janvier 2020

Julian Assange, Chelsea Manning, Edward Snowden, nous vous sommes tous redevables !


mardi 28 janvier 2020

Le Maroc peut-il intègrer les eaux du Sahara occidental à son espace maritime ?

Le Maroc intègre les eaux du Sahara occidental à son espace maritime

Les lois établissant la compétence juridique du royaume sur les eaux allant jusqu’à Lagouira, à la frontière mauritanienne, ont été votées à l’unanimité par les députés.
Le Monde avec AFP Publié le 23 janvier 2020 à 11h22
Le port de pêche de Laayoune, au Sahara occidental, en novembre 2018.
Le port de pêche de Laayoune, au Sahara occidental, en novembre 2018. FADEL SENNA / AFP
Le Maroc a intégré mercredi 22 janvier les eaux du Sahara occidental à son espace maritime, en votant deux lois qui renforcent sa tutelle sur cette ancienne colonie espagnole au statut toujours indéfini.  

« Ces lois visent à réactualiser l’arsenal juridique national », en phase avec « la souveraineté totale du royaume sur ses frontières effectives, terrestres et maritimes », a déclaré le ministre des affaires étrangères, Nasser Bourita, avant l’adoption du texte par le Parlement à Rabat. Les lois établissant la compétence juridique du Maroc sur l’espace maritime allant de Tanger (nord) à Lagouira, à la frontière mauritanienne, ont été votées à l’unanimité par les députés et saluées par des applaudissements.
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Dans une déclaration écrite à l’AFP, reçue à Alger, le Front Polisario, qui réclame l’indépendance du Sahara occidental, a estimé que la décision du Maroc n’aurait « aucun effet légal » et a menacé de saisir le Tribunal international du droit de la mer. « Il ne s’agit que de propagande, dénuée de toute valeur juridique internationale », a réagi Mhamed Khadad, un membre de la direction de ce mouvement. La question du statut du Sahara occidental, toujours classé « territoire non autonome » par l’ONU en l’absence d’un règlement définitif, oppose depuis des décennies le Maroc aux indépendantistes du Polisario, soutenus par l’Algérie.

Des tensions entre le Maroc et l’Espagne

Cette vaste étendue désertique bordée sur quelque 1 000 kilomètres par l’océan Atlantique est en grande partie contrôlée par le Maroc, qui veut une « autonomie sous contrôle » pour la zone qu’il considère comme sienne. Le Front Polisario réclame un référendum d’autodétermination. Ce mouvement a introduit des recours contre deux récents accords entre l’Union européenne et le Maroc, élargissant les échanges commerciaux agricoles et halieutiques aux produits du Sahara occidental. La procédure est en cours, selon Me Gilles Devers, l’avocat du Front Polisario joint par l’AFP.
En gestation depuis des années, la délimitation des eaux a aussi, par le passé, suscité des tensions entre le Maroc et l’Espagne, notamment après des explorations pétrolières dans la zone. La question sera abordée vendredi au cours de la première visite à Rabat de la nouvelle ministre espagnole des affaires étrangères, Arancha Gonzalez, a souligné M. Bourita après le vote. « Nous ne voulons pas imposer un fait accompli, mais nous sommes prêts au dialogue avec l’Espagne dans le cadre de nos droits essentiels et souverains », a-t-il précisé devant le Parlement.
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Mi-décembre, le gouvernement espagnol avait rappelé au Maroc que la délimitation des frontières maritimes avec des pays voisins était régie par « un accord mutuel ». Moins de 100 kilomètres séparent l’archipel espagnol des Canaries des côtes marocaines et chaque État est en droit de revendiquer un plateau continental allant de 200 à 350 milles marins.
Les nationalistes de la Coalition Canaries ont récemment exigé du gouvernement espagnol qu’il se plaigne auprès des Nations unies de « la décision du Maroc de poursuivre la nouvelle délimitation de ses frontières ». « Cette décision unilatérale concerne directement les Canaries », a protesté cette formation avant le vote, sur son compte Twitter. Le Maroc avait ratifié la convention des Nations unies sur le droit de la mer en 2007, disposant alors d’un délai de dix ans maximum pour définir son plateau continental et ses frontières maritimes.

« Un acte provocateur » du droit international

Parallèlement à la ratification de ces lois et à sa politique de grands chantiers, le royaume table sur la diplomatie et le sport pour asseoir sa légitimité, depuis le cessez-le-feu signé sous la houlette des Nations unies avec le Front Polisario en 1991, après seize ans de guerre. La récente ouverture de quatre consulats étrangers dans la zone sous contrôle marocain a marqué « le début d’une consécration diplomatique », selon M. Bourita.
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Après les Comores, la Gambie, la Guinée et le Gabon, « plusieurs pays ont fait part de leur volonté d’ouvrir à leur tour des représentations diplomatiques pour exprimer leur soutien (…) à la marocanité du Sahara », a-t-il assuré la semaine dernière. L’Algérie voit ce ballet consulaire comme « un acte provocateur » en « violation flagrante » du droit international. Pour le Front Polisario, « cela ne changera pas le statut juridique du Sahara occidental. La seule partie qui puisse changer ce statut est le peuple sahraoui quand il décidera de son destin ».
Sur le plan sportif, le Maroc a choisi d’accueillir à Laayoune (Sahara occidental) la CAN 2020 de futsal (sorte de football en salle), prévue pour durer du 28 janvier au 7 février, après avoir été désigné par la Confédération africaine de football (CAF). Cette décision a soulevé une tempête de protestations en Algérie, le Comité olympique algérien (COA) demandant notamment à la CAF d’éviter toutes « manœuvres d’essence politique » contraires à la charte olympique. Le Front Polisario a, quant à lui, fustigé une « atteinte aux réglementations internationales ».

lundi 27 janvier 2020

Appel de la famille Manouzi

Equateur : soutien au droit du peuple sahraoui

Equateur: plusieurs organisations réitèrent le soutien au droit du peuple sahraoui à l'autodétermination

QUITO, 24 JAN 2020 (SPS) - Plusieurs organisations équatoriennes ont réitéré leur soutien ferme au droit du peuple sahraoui à l'autodétermination, dénonçant le pillage des ressources naturelles sahraouies par le Maroc en complicité avec quelques pays notamment européens.
Les dirigeants de la Confédération des nationalités autochtones de l'Equateur (CONAIE) et de l'Union générale des travailleurs (UGTE), ont exprimé leur intérêt et leur soutien à la légitime lutte du peuple sahraoui pour son droit à l'autodétermination, lors de deux réunions tenues jeudi avec le conseiller de l'ambassadeur de la République arabe sahraouie démocratique (RASD), M.Hafdala Chadad Brahim, et le coordinateur de l'Association équatorienne de l'amitié avec le peuple sahraoui (AEAPS), Pablo de la Vega.
Le président de CONAIE a affirmé, lors de la réunion, qu'il soutenait "fermement le droit à l'autodétermination des peuples, principe reconnu dans les résolutions pertinentes des Nations Unies".
A cette occasion, le diplomate sahraoui a abordé le pillage des ressources naturelles sahraouies dans les territoires sahraouis occupés, par la monarchie marocaine et les multiples sociétés, notamment espagnoles et françaises, qui pillent les mines de phosphate, la richesse marine dans la mer territoriale sahraouie et même le sable du Sahara occidental qui se termine sur les plages européennes, malgré les arrêts de la Cour de justice de l'Union européenne.
Pour sa part, le président de l'UGTE, José Villavicencio, a procédé à une analyse détaillée de la situation actuelle de la cause sahraouie et de ses fronts de lutte, y compris politique et juridique.
Le dirigeant syndical a lancé "une invitation à promouvoir des actions conjointes en faveur des droits de l'Homme du peuple sahraoui et de son droit à l'autodétermination, ainsi qu'à générer ensemble les conditions de la constitution d'une plateforme intersyndicale de solidarité avec le peuple Sahraoui".(SPS) .
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