Blog du Réseau de solidarité avec les peuples du Maroc, du Sahara occidental et d'ailleurs(RSPMSOA), créé en février 2009 à l'initiative de Solidarité Maroc 05, AZLS et Tlaxcala
C'était un lundi, jour de marché. Il y avait beaucoup de monde dans les rues de la petite ville de Guernica, qui comptait sept mille habitants. À 16 h 30, les cloches de l'église ont commencé à sonner, et cinq minutes plus tard, le premier avion est apparu, et a lâché six bombes explosives de 450 kilos, suivies d'un chapelet de grenades.
Quelques minutes plus tard, un deuxième avion est apparu. L'enfer a duré trois heures. En tout, ce sont 42 avions qui ont bombardé et mitraillé la ville, ses habitants et les environs où ils s'étaient réfugiés. Toute la ville a brûlé. L'incendie a duré longtemps. Bilan : 70% des édifices brûlés et un nombre de morts indéterminé, situé entre 800 et 1600. 70 ans plus tard, les historiens ne sont toujours pas d'accord sur le nombre de victimes de ce lundi noir qui fit de Guernica une ville-martyre et une ville-symbole, entrée définitivement dans notre mémoire collective. Les avions appartenaient à la Légion Condor allemande et à l'Aviation légionnaire italienne. Nom de l'opération : Operation Rügen.
Deux hommes ont contribué de manière décisive à faire de Guernica ce symbole : George Steer et Pablo Picasso.
Le premier était un jeune journaliste de 27 ans, né en Afrique du Sud, correspondant de guerre du quotidien londonien The Times et partisan déclaré de la cause républicaine et basque. L'Espagne n'était pas son premier théâtre de guerre. En 1935,il avait été envoyé spécial en Éthiopie, qu'on appelait alors l'Abyssinie, soumise à une féroce agression italienne, ordonnée par Mussolini -le dictateur qui avait les yeux plus gros que le ventre- qui accomplissait là son rêve d'Empire à coups de crimes de guerre. Déjà en Éthiopie, on avait vu des bombardements frapper une population civile désarmée. Déjà en Éthiopie, l'Occident démocratique avait trahi un peuple agressé par le fascisme.
George Steer arriva à Guernica quelques heures après le bombardement et câbla dans la nuit même son reportage de la ville martyre, qui parut le lendemain dans The Times et The New York Times, avant d'être repris par de nombreux journaux dans divers pays. C'est cet article qui a alerté le monde, suscitant des manifestations de protestation dans les rues de Londres et New York et déclenchant une contre-offensive médiatique des franquistes et de leurs alliés, l'Allemagne nazie et l'Italie fasciste. Dans ces deux pays, les médias se déchaînèrent contre les « hordes bolcheviques », qui, à les en croire, avaient mis elles-mêmes le feu à Guernica avant de la quitter. Leurs mensonges ont été rapidement démentis. Le récit que l'histoire a retenu est celui de George Steer, dont une rue porte le nom à Bilbao, tandis qu'à Gernika même, se dresse un buste de lui, inauguré en avril 2006.
Le second, à 56 ans, est un peintre célèbre, installé en France. Il soutient la cause républicaine face à la rébellion franquiste. Celui que les Renseignements généraux (la police politique française) décriront comme un« un anarchiste considéré comme suspect au point de vue national » et comme « un peintre soi-disant moderne » -raison pour laquelle lui sera refusée la naturalisation française en avril 1940 - se met immédiatement au travail. Le résultat sera une toile monumentale de 8 mètres de long et de 3 m. 50 de haut, en noir et blanc, qui sera exposée au pavillon espagnol de l'Exposition universelle. Comme l'a dit Picasso, « La peinture n'est pas faite pour décorer les appartements. C'est un instrument de guerre offensive et défensive contre l'ennemi ».
Guernica est une leçon qui reste encore à apprendre. Les auteurs de ce crime de guerre, à commencer par le chef de la Légion Condor, le lieutenant-colonel Wolfram von Richthofen (1895-1945), furent fêtés comme des héros dans l'Allemagne nazie, et ceux d'entre eux qui vivent encore, coulent une paisible retraite, donnant des interviews avec une incroyable décontraction. Le bombardement de la ville sainte des Basques était une expérience grandeur nature, destinée à évaluer les capacités de l'aviation allemande à détruire une ville de manière efficace. Comme l'a dit Hermann Göring au procès de Nuremberg : « La guerre civile espagnole m'a donné l'occasion de tester ma jeune aviation et a été un moyen pour mes hommes d'acquérir de l'expérience. »
Ce crime de guerre ne fut ni le premier ni le dernier du XXème siècle. Les premiers bombardements de populations civiles avec des armes chimiques furent ordonnés par Winston Churchill sur l'Irak en 1915. Après Guernica, il y aura d'autres villes-martyres, comme Coventry, Hambourg, Dresden, Hiroshima, Nagasaki. Après l'Espagne, toute l'Europe. Après l'Europe, l'Asie, de la Palestine à la Corée, au Vietnam et au Cambodge.
Les Guernica d'aujourd'hui s'appellent Gaza, Tal Afar, Falloujah, Samarra, Najaf, mais aussi Grozny ou Kandahar. Les avions qui lâchent leurs bombes meurtrières ne portent plus la croix de fer mais les couleurs de pays « démocratiques ». Les « Rouges ennemis de Dieu » que Franco, Hitler et Mussolini prétendaient combattre pour sauver l'Occident chrétien on été remplacés par les « islamistes » et « l'Axe du Mal », qui, selon Bush, véritable Hitler de notre temps, va de La Havane à Pyongyang en passant par Caracas, Beyrouth, Damas, Khartoum et Téhéran. Et la « communauté internationale », comme elle avait été paralysée devant le martyre de l'Éthiopie puis celui de l'Espagne, est aujourd'hui pire que paralysée devant le martyre de la Palestine, de l'Irak, de l'Afghanistan, elle est complice des centaines de Guernica qui se répètent sous nos yeux fatigués, jour après jour.
Lisez le reportage de George Steer. Il dit, en peu de mots, l'essentiel.-Fausto Giudice, Tlaxcala, 27/4/2017
Une ville détruite par une attaque aérienne
Un témoin oculaire raconte
De notre envoyé spécial, Bilbao, le 27 avril 1937
Guernica, la plus ancienne ville des Basques et le centre de leur tradition culturelle, a été complètement détruite hier après-midi par des raids aériens des insurgés. Le bombardement de cette ville ouverte située loin derrière les lignes a pris exactement trios heures et quart, durant lesquelles une puissante flotte aérienne consistant en trois types d'avions allemands, des bombardiers Junkers et Heinkel et des chasseurs Heinkel, n'a pas cessé de déverser sur la ville des bombes pesant 1000 livres [453 kg.] et moins et, selon les calculs, plus de trois mille projectiles incendiaires de deux livres [907 gr.] chacun. Les chasseurs, pendant ce temps, opéraient des piqués sur la ville et ses alentours pour mitrailler la population civile qui s'était réfugiée dans les champs.
La vieille souche de l'Arbre de Gernika
Tout Guernica s'est rapidement retrouvée en flammes, à l'exception de la Casa de Juntas historique, qui contient les riches archives de la race basque, et où l'ancien Parlement basque siégeait. Le fameux chêne de Guernica, aussi bien la vieille souche desséchée de 600 ans que les nouvelles pousses, a été aussi épargné. C'est là que les rois d'Espagne faisaient le serment de respecter les droits démocratiques (fueros) de Biscaye et en retour recevaient la promesse d'allégeance en tant que suzerains, avec le titre démocratique de Señor et non de Roi de Biscaye. La majestueuse église Santa Maria a été aussi épargnée, à l'exception de son beau chapitre, qui a été frappé par une bombe incendiaire.
À 2 h ce matin, quand j'ai visité la ville, le spectacle était terrifiant. Guernica brûlait d'un bout à l'autre. Les reflets de l'incendie pouvaient être vus sur les nuages de fumée au-dessus des montagnes à 16 km à la ronde. Pendant toute la nuit, des maisons s'écroulèrent au point que les rues étaient encombrées d'importants débris rougeoyants et infranchissables. Beaucoup de survivants civils ont pris le long chemin de Guernica à Bilbao dans d'antiques chars à bœufs basques aux roues solides. Des chars sur lesquels s'empilaient tout ce qui avait pu être sauvé des maisons après la conflagration ont encombré les routes toute la nuit.
D'autres survivants ont été évacués dans des camions du gouvernement, mais beaucoup ont été forcés de rester aux alentours de la ville en feu, couchés sur des matelas ou à la recherché de parents et d'enfants égarés, tandis que des unités de pompiers et de la police motorisée basque, sous la direction personnelle du ministre de l'Intérieur, Señor Monzon, et de sa femme, continuaient les opérations de secours jusqu'à l'aube.
La cloche de l'église sonne l'alerte
Le raid sur Guernica n'a pas de précédent dans l'histoire militaire, aussi bien par la forme de son exécution que par les dimensions des destructions perpétrées, sans parler de l'objectif choisi. Guernica n'était pas un objectif militaire. Une usine de matériel d e guerre à l'extérieur de la ville n'a pas été touchée. Ce fut aussi le cas des deux casernes qui se trouvaient à quelque distance de Guernica. Celles-ci étaient loin derrière les lignes de combat. La ville est loin derrière les lignes. L'objectif du bombardement était apparemment de démoraliser la population civile et de détruire le berceau de la race basque. Tous les éléments militent en faveur de cette interprétation, à commencer par le jour choisi pour ce forfait.
Lundi était le jour traditionnel de marché à Guernica pour toute la région. À 16 h 30, quand le marché était plein et que des paysans continuaient d'y arriver, la cloche de l'église a commencé à sonner l'alerte : des avions approchaient. La population a cherché refuge dans des caves et dans des tranchées-abris qui avaient été creusées suite au bombardement de la population civile de Durango le 31 mars, qui a ouvert l'offensive du Général Mola dans le Nord. On dit que les gens ont montré un grand courage. Un prêtre catholique a pris les choses en main et un ordre parfait a été maintenu.
Cinq minutes plus tard, un bombardier allemand isolé est apparu, faisant des cercles à basse altitude au-dessus de la ville, puis a lâché six bombes lourdes, visant de toute apparence la gare. Les bombes, suivies d'une pluie de grenades, sont tombées sur un ancien institut et sur les maisons et les rues l'entourant. Puis l'avion est reparti. Cinq minutes plus tard, est arrivé un second bombardier, qui a lâché le même nombre de bombes sur le centre de la ville. Environ un quart d'heure plus tard, trois Junker sont arrivés pour continuer le travail de démolition, et dès lors, le bombardement a gagné en intensité et a continué sans répit, ne cessant qu'à l'approche de la nuit à 19 h 45. Toute cette ville, qui comptait 7000 habitants plus 3,000 réfugiés, a été lentement mais sûrement réduite en pièces. Sur un rayon de 8 km, un détail de la technique des attaquants a consisté à bombarder des fermes isolées. Dans la nuit, celles-ci brûlaient comme des chandelles sur les collines. Tous les villages alentour ont été bombardés avec la même intensité que la ville elle-même et à Mugica, un petit hameau à l'entrée de Guernica, la population a été mitraillée pendant quinze minutes.
GUERRIKA, par Juan Kalvellido, 2017
Rythme de mort
Il est pour le moment impossible de dire le nombre de victimes. Dans la presse Bilbao ce matin, on peut lire qu'il est "heureusement faible” mais il est à craindre que cela ne soit une litote destinée à ne pas alarmer le grand nombre de réfugiés à Bilbao. À l'hôpital Josefinas, qui a été l'un des premiers endroits bombardés, tous les 42 miliciens qu'il hébergeait ont été purement et simplement tués. Dans une rue descendant la colline depuis la Casa de Juntas j'ai vu un endroit où l'on m'a dit que 50 personnes, presque toutes des femmes et des enfants, ont été piégées dans un abri antiaérien sous une masse de décombres en flammes. Beaucoup de gens ont été tués dans les champs et en tout, les morts pourraient être plusieurs centaines. Un prêtre âgé nommé Aronategui a été tué par une bombe alors qu'il portait secours à des enfants dans une maison en flammes.
La tactique des bombardiers, qui pourrait intéresser des étudiants en nouvelle science militaire, était la suivante : premièrement, des petits groupes d'avions lancent des bombes lourdes et des grenades à main sur toute la ville, choisissant zone après zone de manière ordonnée. Puis arrivent des chasseurs volant en rase-mottes pour mitrailler les gens qui courent paniqués hors des tranchées-abris, dont certaines avaient été pénétrées par des bombes de 1000 livres, qui font des trous de 25 pieds (7,62 m.). Beaucoup de ces gens ont été tués alors qu'ils couraient. Un grand troupeau de moutons qui avaient été amenés au marché ont aussi été tués. L'objectif de cette manœuvre était apparemment de pousser la population à aller sous terre de nouveau, car aussitôt après pas moins de 12 bombardiers sont apparus en même temps pour lâcher des bombes lourdes et incendiaires sur les ruines. Le rythme de ce bombardement d'une ville ouverte était, donc, logique : d'abord des grenades à main des bombes lourdes pour déclencher la panique puis les mitraillages pour les forcer à se cacher sous terre, et enfin des bombes lourdes et incendiaires pour détruire les maisons et les brûler au-dessus de la tête des victimes.
Les seules contre-mesures que les Basques pouvaient prendre, car ils ne possèdent pas suffisamment d'avions pour faire face à la flotte insurgée, étaient celles fournies par l'héroïsme du clergé basque. Ils bénissaient et priaient pour la foule agenouillée - socialistes, anarchistes, communistes aussi bien que croyants déclarés - dans les tranchées-abris qui s'effondraient.
Quand je suis entré dans Guernica après minuit, les maisons s'effondraient de toutes parts, et il était absolument impossible même pour les pompiers d'entrer dans le centre de la ville. L'hôpital Josefinas et le Couvent Santa Clara étaient des tas de braises rougeoyantes, et les quelques maisons encore debout étaient condamnées. Quand j'ai visité à nouveau Guernica cet après-midi, la plus grande partie de la ville brûlait encore et de nouveaux incendies avaient éclaté. Environ 30 morts étaient allongés dans un hôpital en ruines.
Un appel aux Basques
L'effet du bombardement de Guernica, la ville sainte basque, a été profond et a conduit le Président Aguirre à publier la déclaration suivante dans la presse basque de ce matin : « Les aviateurs allemands au service des rebelles espagnols ont bombardé Guernica, brûlant la ville historique vénérée par les Basques. Ils ont voulu nous blesser dans le plus sensible de nos sentiments patriotiques, donnant clairement à voir ce à quoi Euzkadi peut s'attendre de la part de ceux qui n'hésitent pas à nous détruire dans le sanctuaire même qui nous rappelle les siècles de note liberté et de note démocratie.
Face à cet attentat, nous tous Basques devons réagir avec violence, jurant du fond de notre coeur de défendre les principes de notre peuple avec tout l'entêtement et l'héroïsme requis. Nous ne pouvons cacher la gravité de ce moment, mais l'envahisseur ne pourra jamais emporter la victoire si, élevant nos esprits à des sommets de force et de détermination, nous nous armons pour sa défaite.
L'ennemi a avancé en beaucoup d'endroits pour ensuite être repoussé. Je n'hésite pas à affirmer que la même chose va se passer ici. Puisse l'attentat d'aujourd'hui nous stimuler à le faire de toute urgence. »
Israël ne
commet pas un holocauste contre le peuple palestinien. Cependant, au cours des
19 derniers mois, il s’en est rapproché à une vitesse effrayante. Cela doit
être dit, et avec encore plus d’insistance aujourd’hui.
Des
personnes en deuil lors des funérailles de Palestiniens tués dans des frappes
israéliennes, à l’hôpital Al-Ahli Arabi, dans la ville de Gaza,
mercredi. Photo Dawoud Abu Alkas/Reuters
Comme chaque
année, je me tiendrai au garde-à-vous lorsque la sirène retentira, et mes
pensées vagabonderont. Elles passeront du souvenir de ma grand-mère et de mon
grand-père, Sophie et Hugo Löwy, dont j’ai vu les
noms gravés sur le mur commémoratif du vieux cimetière juif de Prague, aux
images de Gaza, qui ne me quittent pas.
Depuis mon
enfance, pendant que retentissaient les sirènes, j’ai toujours imaginé un grand
incendie consumant tout. Avant la guerre de Gaza, j’imaginais des Juifs brûler
dans les flammes ; cette année, je verrai aussi les bébés brûlés vifs la
semaine dernière dans leur tente à Khan Younès, et avec eux des milliers d’enfants,de femmes et d’hommes qu’Israël a tués sans pitié.
Comment
est-il possible de se tenir au garde-à-vous aujourd’hui sans penser à l’enquête
effrayante de Yaniv Kubovich sur l’exécution de 15 secouristes palestiniens par des soldats israéliens, qui
les ont abattus de sang-froid, puis ont écrasé leurs ambulances et enterré les
corps dans le sable ? Sans penser au résident de Sinjil, en Cisjordanie, dont
la maison a été incendiée par des colons, après quoi des soldats sont venus lui
lancer des gaz lacrymogènes jusqu’à ce qu’il ait une crise cardiaque et meure,
comme l’a rapporté Hagar Shezaf mercredi ? Sans
penser à la communauté pastorale d’Umm al-Khair, dans les collines du sud d’Hébron,
et aux pogroms incessants que ces gens pacifiques subissent de la part de l’armée
et des colons, qui ont uni leurs forces pour les expulser de leurs terres ?
Comment ne pas penser à l’article courageux et choquant d’Orit Kamir (Haaretz
hébreu, 22 avril) sur les Israéliens qui se taisent sur cette guerre, ce qui,
selon elle, leur enlève le droit de se plaindre des Allemands qui ont fait de
même, et être d’accord avec chaque mot ? Ou à l’article tout aussi choquant de
Daniel Blatman sur les enfants de Gaza et les enfants de l’Holocauste (Haaretz
hébreu, 23 avril) ? Il écrit que le jour où les combats ont repris à Gaza
restera gravé dans l’histoire juive comme un jour d’infamie. On ne peut qu’espérer
que ce sera le cas.
« J’étudie l’Holocauste
depuis 40 ans », écrit Blatman. « J’ai lu d’innombrables témoignages sur le
génocide le plus horrible qui ait jamais existé, celui du peuple juif et d’autres
victimes. Cependant, je n’aurais jamais pu imaginer, même dans mes pires
cauchemars, que je lirais un jour des récits sur des massacres commis par l’État
juif qui me rappellent de manière effrayante les témoignages des archives de
Yad Vashem. »
Il ne s’agit
pas d’une comparaison avec l’Holocauste, mais d’un terrible avertissement sur
la direction que prennent les choses. Ne pas y penser aujourd’hui, c’est trahir
la mémoire de l’Holocauste et de ses victimes. Ne pas penser à Gaza aujourd’hui,
c’est renoncer à son humanité et profaner la mémoire de l’Holocauste. C’est un
signe avant-coureur de ce qui nous attend.
Le frère de
Zain Hijazi, un enfant de quatre ans tué lundi lors du bombardement israélien d’un
campement de tentes pour Palestiniens déplacés par le conflit, au Jazira Club
de Gaza. Photo AFP/Omar Al-Qattaa
En Israël,
les gens ont tendance à affirmer que le 7 octobre est la pire catastrophe qui
ait frappé le peuple juif depuis l’Holocauste. Il s’agit bien sûr d’une
comparaison perverse qui dévalorise la mémoire de l’Holocauste. Il n’y a aucune
similitude entre l’attaque meurtrière et ponctuelle du 7 octobre et l’Holocauste.
Mais ce qui a suivi évoque bel et bien ce souvenir.
Il n’y a pas
d’Auschwitz ou de Treblinka à Gaza, mais il y a des camps de concentration. Il
y a aussi la famine, la soif, le transfert de personnes d’un endroit à l’autre
comme du bétail et le blocus des médicaments.
Ce n’est pas
encore l’Holocauste, mais l’un de ses éléments fondamentaux est en place depuis
longtemps : la déshumanisation des victimes qui s’est installée chez les nazis
souffle désormais avec force en Israël. Depuis la reprise de la guerre, quelque
1 600 Palestiniens ont été tués à Gaza. Il s’agit d’un bain de sang, pas d’un
combat. Cela se passe non loin de chez nous, perpétré par les meilleurs de nos
fils et filles. Cela se passe dans le silence et l’indifférence écœurante de la
plupart des Israéliens.
Ariel
Rubinstein, lauréat du prix Israël, a publié un article profond et inspirant
(Haaretz hébreu, 22 avril), dans lequel il explique pourquoi il ne se mettra
pas au garde-à-vous cette année lorsque retentira la sirène. Je me tiendrai
debout et je penserai à ma grand-mère et à mon grand-père, mais surtout à Gaza.
“Mort
des innocents” : peinture murale de l’artiste norvégien Töddel à Bergen,
Norvège, juillet 2004. Les établissements d’enseignement
supérieur de cette ville ont coupé leurs relations avec leurs homologues
israéliens. L’œuvre a été évidemment attaquée comme “antisémite” par les
organisations sionistes. « Représenter une victime de l’Holocauste avec un
keffieh est une grave déformation de l’histoire », a déclaré le Congrès juif
européen dans un communiqué. « De tels actes ne constituent pas une critique
sincère, mais des représentations profondément antisémites et offensantes qui
portent atteinte à la mémoire de l’Holocauste ».
Mais l’auteur de la fresque, l’artiste de rue norvégien anonyme Töddel, défend
son œuvre, expliquant à l’Agence télégraphique juive qu’il a choisi Anne Frank
précisément en raison de son respect pour l’histoire de l’Holocauste.
Töddel a déclaré ne pas être juif, mais avoir lu plusieurs fois le journal d’Anne
Frank et visité les camps d’extermination d’Auschwitz-Birkenau avec ses
enfants.
« Anne Frank est un symbole d’innocence », a déclaré l’artiste. « Comme les
enfants et les femmes de Gaza, elle a souffert et est morte à cause de son
origine ethnique et de sa religion, et parce qu’elle se trouvait au mauvais
endroit au mauvais moment. » [NdT]
Cette
autre œuvre murale, de l’artiste de rue aleXsandro Palombo* à Milan, Piazza
Castello (novembre 2023) reflète bien la confusion mentale « intersectionnelle »
régnant en Europe. « La fureur antisémite déclenchée par le Hamas submerge les
Juifs partout dans le monde. Cette horreur qui resurgit du passé doit nous
faire réfléchir tous, car elle menace la liberté, la sécurité et l'avenir de
chacun d'entre nous. Le terrorisme est la négation même de l'humanité et n'a
rien à voir avec la résistance. Il nous utilise pour nous diviser et nous
entraîner dans l'abîme de son mal, dans un tourbillon infernal sans fin. Il ne
pourra y avoir de paix tant que le terrorisme ne sera pas éradiqué. Le
légitimer, c'est condamner à mort l'humanité tout entière » : dixit l’artiste,
dont le travail de commande s’inscrivait dans une série intitulée « Innocence,
haine et espérance ». L’Ann Frank de droite est devenue israélienne, celle
de gauche palestinienne, brûlant un drapeau du Hamas. Les intervenants anonymes
qui ont recouvert l’Ann Frank israélisée ont respecté celle de gauche, ne
comprenant sans doute pas le message qu’elle véhiculait : que les
résistants de Gaza sont les nouveaux nazis. [NdT] *Né en
1973 dans Pouilles, milanais depuis 1992, l'artiste anonyme se présente comme
un “travailleur humanitaire” ayant œuvré entre autres à la Croix Rouge, à
l'aide aux réfugiés albanais et à la « lutte contre le trafic de drogue
dans le détroit de Gibraltar » menée par...la marine militaire italienne.
À Casablanca, le « marché informel » de Derb
Ghallef, emblématique depuis plus d'un siècle, pourrait bientôt changer
de visage. La mairie de Casablanca, en collaboration avec
l'arrondissement de Maârif, envisage de réhabiliter complètement ce
vaste espace en un centre commercial moderne, mieux équipé et conforme
aux normes de sécurité actuelles. Un projet ambitieux, qui suscite
autant d'espoirs que d'inquiétudes parmi les 20 000 commerçants du site.
Des Marocains achètent des
olives et d'autres produits dans un marché souk à Casablanca alors
qu'ils se préparent à rompre le jeûne pendant le premier jour du mois
sacré du Ramadan à Casablanca, au Maroc, dimanche 3 avril 2021. (Image
d'illustration)AP - Abdeljalil Bounhar
RFI Avec notre correspondant à Casablanca, François Hume-Ferkatadji, 24/4/2025
C'est
un dédale d'allées minuscules où l'on trouve de tout : du portable de
la fin des années 1990 jusqu'à l'iPhone dernier cri. Les artisans de ce
marché sont reconnus dans tout le pays pour leur capacité à réparer
ordinateurs, tablettes ou téléphones, quel que soit le problème.
Un lieu à préserver
« Sur Derb Ghallef, tu vas réparer toutes les choses que tu ne peux pas réparer ailleurs »,
résume Zakaria sous son microscope, affairé sur un téléphone dernier
cri. Fer à souder à la main, il tente de résoudre un problème de
reconnaissance faciale. « C'est une passion, réparer quelque chose. C'est à chaque fois un nouveau défi, c'est une passion, c'est comme l'amour. »
Ce
matin-là, il tente régler un problème de reconnaissance faciale sur un
téléphone de « la marque à la pomme », mais dans l'obscurité, car les
générateurs qui fournissent l'électricité aux commerçants n'ont pas
encore été mis en route. « Nous avons besoin d'électricité, car nous n'en avons pas ici, et on n'aime pas aussi les gens qui harcèlent les clients », peste-t-il.
Si Zakaria est sensible à l'idée de réhabiliter Derb Ghallef, il redoute une transformation trop brutale. « Si le gouvernement veut en faire un centre commercial, le problème, c'est qu'ils voudront tout savoir sur ce marché », craint celui qui souhaite préserver l'atmosphère unique du lieu, entre entraide et mise en commun des compétences de chacun.
A Derb Ghallef, les clients aiment les prix. Souvent peu ou pas
taxés, les produits sont abordables et négociables. Amin a par exemple
parcouru 40 km aujourd'hui pour trouver un nouvel objectif pour son
appareil photo. « Le marché de Derb Ghallef, c'est une référence
pour nous, même un réflexe ! Tout ce qui est électronique, achat
d'ordinateur, réparation... Tant qu'il est à Casablanca, on souhaite
tout le bien pour ce marché-là. »
Une étape clé du projet a
déjà été lancée : l'expropriation d'une parcelle de 55 000 m², sur
l'emplacement actuel du marché. Mais d'après certains commerçants, cette
réhabilitation, complexe à mettre en œuvre, pourraient être retardée
par les échéances électorales à venir au Maroc, à savoir les élections législatives de 2026 et les élections communales de 2027.
Un enjeu environnemental majeur
Selon un rapport des Nations Unies, le Maroc a produit 177 000 tonnes de déchets électroniques en 2022, un chiffre qui a quasiment doublé depuis 2010. Chaque Marocain en génère près de cinq kilos par an.
Pour
Anaïs Audrey Kouassi, doctorante ivoirienne en droit de l'environnement
et développement durable à la faculté des sciences juridiques de Salé
au Maroc, Derb Ghallef doit être intégré dans les politiques publiques
de gestion des déchets.
«
Le marché de Derb Ghallef est un lieu très emblématique qui concentre
de nombreuses activités liées aux équipements électriques et
électroniques usagers, donc on va parler de revente, de réparation, de
démontage... Ce sont des pratiques qui restent largement informelles,
donc il faudrait mettre en place un cadre légal, c'est-à-dire développer
un cadre juridique assez souple mais structurant qui va reconnaitre
l'existence de ces marchés informels et proposer des mécanismes
d'intégration. Dans un second temps, il faudrait créer des centres
agréés de collecte et de pré-traitement à proximité de ces marchés-là.
»
À Marrakech comme à Rabat, les mobilisations du 45e Printemps amazigh
ont réaffirmé des revendications identitaires fortes, entre luttes
locales et mémoire collective qui va au-delà des frontières du royaume.
Deux marches distinctes ont été organisées le dimanche 20
avril, l’une à Marrakech, l’autre à Rabat, à l’occasion du 45e
anniversaire de Tafsut Imazighen, le « Printemps amazigh ». Si la première a pu se dérouler dans un cadre paisible, la seconde a été interrompue par les forces de l’ordre.
Dans la cité ocre, vers 11 heures, entre 3 000 et 3 500 personnes
se sont rassemblées aux pieds des remparts de Bab Doukkala, en dépit
d’un dispositif sécuritaire visible et d’un message initial des
autorités interdisant la manifestation. Deux camions à jet d’eau, une
dizaine de
véhicules des forces auxiliaires et sept ambulances étaient mobilisés.
« On a senti qu’il y avait volonté de nous empêcher de marcher »,
témoigne une source présente sur place. Ce n’est qu’à 11 h 45 que les
autorités ont autorisé le départ du cortège, qui a parcouru environ 4,5
kilomètres jusqu’à la mosquée Koutoubia, sous encadrement policier.
Soixante ONG se sont jointes à l’événement, choisissant Marrakech pour sa proximité avec la région d’Al Haouz, touchée par un violent séisme le 8 septembre 2023. Outre la commémoration de Tafsut, la marche visait à exprimer la solidarité avec les
sinistrés et à appeler l’État à accélérer le processus de
reconstruction. Selon les chiffres officiels, environ 3 200 familles
vivent encore sous des tentes, malgré la mobilisation d’un fonds de
16 milliards de dirhams (plus de 1,5 milliard d’euros).
À Marrakech, les manifestants ont également plaidé pour la
libération de Saïd Aït Mehdi, coordinateur de la Coalition des victimes
du séisme, condamné début mars à un an de prison ferme, ainsi que pour
celle de trois autres activistes d’Al Haouz condamnés à trois mois de
détention. Des slogans ont également visé la libération des détenus du Hirak du Rif.
Dans la foule, plusieurs banderoles ont souligné les inégalités d’accès
aux infrastructures et aux services publics, ainsi que les spoliations
foncières, notamment dans l’Anti-Atlas. À cet effet, plusieurs
collectifs venus de la région Souss-Massa ont pris part à la marche sous
la bannière de la Coordination Akal.
À Rabat, la marche prévue le même jour n’a pas pu se tenir comme
espéré. Environ 200 manifestants avaient prévu de défiler de la place
Bab El Had au Parlement, mais ont été bloqués par un important
dispositif sécuritaire.
Des échauffourées mineures ont été signalées. « Deux manifestants venus
de Nador ont été blessés et évacués à l’hôpital », note un activiste
présent, leurs blessures n’étant pas jugées graves.
Une synergie nord-africaine
Sous le mot d’ordre « Pour
une identité amazighe de l’État », les participants ont insisté sur la
mise en œuvre du caractère officiel de la langue amazighe, notamment
dans l’enseignement et les médias. Selon les ONG participantes, bien que
le tamazight ait été officialisé en 2011, les institutions publiques
peinent encore à traduire cette avancée dans les faits.
Des critiques ont également été adressées au gouvernement d’Aziz Akhannouch,
accusé de ne pas avoir honoré ses engagements électoraux en matière
d’intégration de la langue et de la culture amazighes. En ce sens, des
voix se sont élevées contre ce qu’elles ont qualifié de régression dans
la représentation médiatique et académique de l’amazighité. En guise
d’exemple, le Conseil de la communauté marocaine à l’étranger (CCME) et
le ministère de la Culture ont récemment lancé un programme de
traduction des œuvres des Marocains du monde vers l’arabe… sans y
inclure le tamazight.
Si, à
Marrakech, la manifestation s’est articulée autour de revendications
ancrées dans les réalités locales, à Rabat, les slogans ont
principalement porté sur des dossiers institutionnels. Mais au-delà de
ces spécificités, une convergence entre les deux mobilisations reste
notable. Qu’il s’agisse de Marrakech ou de Rabat, toutes deux ont
réaffirmé un appel désormais récurrent dans la mouvance amazighe : la
libération des détenus du Hirak du Rif.
Autre similarité : dans les deux villes, des étendards de la
Kabylie et de l’Azawad (nord du Mali) ont été brandis aux côtés des
fameux drapeaux tricolores amazighs.
Un geste lourd de symbolique, synonyme d’un sentiment d’appartenance à
un bassin culturel commun. Car au-delà des doléances, « Tafsut, c’est
une date phare célébrée un peu partout, dans les villages, les villes,
les campus universitaires, sans lieu central », résume un des leaders de
la marche avortée à Rabat.
Le Printemps amazigh de 1980
Tafsut, commémorée chaque
année en avril, trouve ses racines non pas au Maroc mais dans les
événements de 1980 en Kabylie, lorsqu’une conférence sur la poésie
amazighe préislamique fut interdite à Tizi Ouzou. Depuis, la date est devenue un moment symbolique pour les militants amazighs à travers l’Afrique du Nord et la diaspora.
Dans un article paru en avril 2023 sur le site amadalamazigh,
le chercheur marocain Mounir Kejji rend compte de l’« Impact du
Printemps amazigh d’avril 1980 sur le Maroc ». Le 19 avril 1981, le
linguiste Boujemâa Habbaz fut enlevé à Rabat. Il ne sera jamais
retrouvé. Dans la revue Amazigh, lancée par Ouzzine Aherdan et
censurée à l’époque, un article intitulé « Pour une vraie définition de
notre culture nationale » signé Ali Sadki Azaykou a valu
à son auteur, historien, une condamnation à une année de prison en
1982. L’avocat Hassan Id Balkassm, lui, a été arrêté pendant une semaine
la même année pour avoir écrit son nom en tifinagh sur la plaque de son
cabinet.
Du côté d’Agadir, « quatre hôtels ont été fermés pour avoir
accroché des plaques en tifinagh sur leur devanture », tandis que « la
seule association amazighe active dans le Souss pendant cette période, à
savoir l’université d’été d’Agadir, s’est vue interdire sa session
annuelle », rappelle Mounir Kejji dans son article.
Le cabinet Sunergia spécialisé en sondages et en
études de marché a réalisé une enquête sur les langues les plus parlées
au Maroc en 2025.
Une récente étude du groupe Sunergia s’est penchée sur les pratiques
linguistiques des Marocains, qui sont en constante évolution. Si la
Darija demeure prédominante dans la vie quotidienne, d’autres langues
gagnent du terrain. Ce sondage
avait pour principal objectif d’explorer les langues les plus parlées
au Maroc et leurs contextes d’utilisation, ainsi que leur usage selon
les générations et le statut socio-économique.
La darija, omniprésente
Selon les données de l’enquête, 100% des Marocains parlent couramment
la darija, l’étude révèle également que la darija est la langue parlée
par tous les Marocains: 94% l’ont comme langue maternelle. « Au
Maroc, la darija n’a pas de statut officiel mais elle est souvent
utilisée dans plusieurs contextes grâce à ses nouvelles utilisations
dans le monde des réseaux sociaux, la publicité et autres domaines » précise le cabinet.
L’arabe classique: un usage lié à l’enseignement
L’étude indique que 29 % des Marocains parlent couramment l’arabe
classique. Ce taux est plus élevé chez les moins de 34 ans (34 %), ce
qui pourrait s’expliquer par un niveau d’alphabétisation historiquement
plus bas parmi les générations précédentes. L’usage de l’arabe classique
est également plus fréquent en milieu urbain (37 %) et au sein des
catégories socio-professionnelles (CSP) A/B (44 %).
L’amazighe: ancrage et stabilité
Les résultats démontrent que la langue amazighe est parlée par 25 %
des Marocains, dont 21 % l’ont comme langue maternelle. Sa pratique est
particulièrement concentrée dans le Sud du pays (39 % des locuteurs
d’amazighe y résident). Selon Sunergia, l’usage de cette langue semble
stable à travers les générations.
Le français: une place clé, mais des disparités générationnelles
Le français maintient une place importante dans les pratiques
linguistiques des Marocains, avec 19 % d’entre eux le parlant
couramment. Son usage est particulièrement marqué dans l’administration,
l’éducation et le monde de l’entreprise.
Le sondage révèle des disparités générationnelles dans la maîtrise du
français. Un taux de 24 % est enregistré chez les jeunes de moins de 35
ans, ce qui constitue un « pic » par rapport à la moyenne. À l’inverse, une proportion plus faible (14 %) est observée chez les 35-54 ans, « probablement liée aux politiques d’arabisation mises en œuvre au Maroc dans les années 80 », estime Sunergia. Les 55-64 ans affichent un taux de 18 %.
L’étude souligne également un écart important selon le statut
socio-économique: les catégories aisées A/B atteignent un taux élevé (43
%), soit 7 fois supérieur à celui des classes populaires D/E (6 %).
L’anglais: l’ascension auprès des jeunes et des élites
Malgré les nouvelles tendances anglophones et l’intérêt croissant de
la jeune génération, l’étude rapporte que seulement 9 % des Marocains
parlent couramment l’anglais. Cette pratique est davantage le fait des
moins de 34 ans (17 %), des urbains (12 %) et des CSP A/B (22 %). Selon
Sunergia, cette présence s’explique par son intégration renforcée dans
l’éducation, son importance sur le marché du travail et sa forte
présence dans les médias de divertissement et sur les réseaux sociaux.
Espagnol et allemand: une présence marginale
L’étude conclut à une présence très faible de l’espagnol et de
l’allemand. Seulement 1 % des Marocains parlent couramment l’espagnol ou
l’allemand.
Le sondage de Sunergia révèle que 45 % des Marocains sont monolingues, et tous parlent la darija (100 %).
Un total de 34 % des Marocains sont bilingues, répartis comme suit: darija + amazigh (48 %): une combinaison plus fréquente chez les 35-54
ans (61 %), les populations rurales (72 %), les habitants du sud (71 %)
et les personnes appartenant à la CSP D/E (61 %).
Pour darija + arabe classique (37 %): plus courante chez les seniors
de 65 ans et plus (53 %), les urbains (44 %), tandis que darija + français (12 %) est davantage présente chez les 55-64 ans (22 %), dans
la région centre (24 %), en milieu urbain (15 %) et au sein de la CSP
A/B (25 %).
En ce qui concerne le trilinguisme, 14 % des Marocains sont
trilingues, avec les profils suivants: darija + arabe classique + français (42 %): une combinaison prédominante chez les personnes âgées
de plus de 55 ans (74 %), les urbains (48 %) et les catégories sociales
A/B (62 %). La même source explique que la combinaison darija + amazigh + arabe classique (27 %) est plus fréquente en milieu rural (55 %) et
auprès de la CSP D/E (57 %). Cependant, darija + français + anglais (21
%): largement répandue chez les jeunes de 18-24 ans (47 %) et la CSP C
(30 %).
En matière de polyglottisme (quatre langues ou plus), l’enquête
indique une présence plus marquée parmi les jeunes de 25-34 ans (11 %),
les populations urbaines (9 %) et la CSP A/B (20 %).
L’ « information » circule en boucle sur les sites ouèbe makhzéniens : l’Iran appuie militairement le Front POLISARIO, il faut donc ranger le Front parmi les organisations terroristes au niveau international. « On » invente un « axe Téhéran-Alger-Tindouf ». Bref, du grand n’importe quoi. Mais d’où provient donc cette « information » ?
De la Foundation for Defense of Democracies (FDD), fondée à Washington peu après le 11 septembre 2001. Un ramassis de retraités des armées israélienne et usaméricaine, de monarchistes iraniens et de cyberguerriers de tous poils.
Leur rapport est arrivé à l’agence MAP (Makhzen Arab Press) via Genève, où deux obscures ONG n’existant que sur le papier l’ont fait connaître par une conférence de presse qui n’a ému que les médias makhzéniens, aucun média digne de ce nom en dehors du Maroc n’a osé diffuser ces racontars débiles.
Plus encore, le Front POLISARIO, non content d’être équipé en missiles et drones tueurs par les ayatollahs, produit des leaders de DAECH. Faudrait savoir : l’Iran ou Daech ? Daech, comme son prédécesseur Al Qaïda, qualifie la République islamique d’Iran et les Chiites en général de « Juifs ». On imagine mal une quelconque collaboration entre eux. Sauf dans l’imagination débordante des adorateurs de Reza II, alias Reza Pahlavi, fils du Shah d’Iran et candidat au trône dans le royaume que la FDD rêve de réinstaller à Téhéran.
Un ami iranien m’a raconté que si vous voulez faire rire un Iranien, quelles que soient ses opinions, il vous suffit de dire « Reza Pahlavi ». Pour ma part, après avoir vu le candidat à la shahitude pleurer au Mur des Lamentations d’Al Qods, je n’ai aucune envie de rire. Les allumés de la FDD sont bien foutus de convaincre le clown de la Maison Blanche qu’il faut installer un Shahinshah à Téhéran, puisqu’il a obtenu son certificat d’israélocompatibilité. Après tout, le papa Pahlavi avait été installé sur le trône en 1953 par un coup d’État organisé par la CIA et le MI6. Et alors là, bingo ! On aurait un axe Rabat-Tel Aviv-Ryad-Damas-Téhéran ! Dès lors, il n’y aurait plus qu’à faire de Tindouf un nouveau Gaza.
Bon bon, calmez-vous, on n’en est pas encore là, mais les cauchemars d’hier deviennent parfois les réalités de demain. Alors, ouvrez l’œil, et le bon.
Reza Pahlavi au Mur des Lamentations en avril 2023
La
délégation française, composée de députés et de maires, devait
se rendre en Israël et en Cisjordanie pendant quatre jours.
Leur
entrée a été refusée sur la base d’un projet de loi récemment
adopté permettant d’interdire aux personnes qui appellent au
boycott d’Israël
Israël
a annulé 27 visas pour des députés et des élus français
de
gauche, qui avaient été invités par le consulat de France à
Jérusalem, deux jours avant leur arrivée, ont déclaré les
responsables.
Dans
une déclaration commune, les membres de la
délégation du Parti
écologiste français et du Parti communiste français
ont qualifié
cette décision de « punition collective » de la part
d’Israël
et ont appelé le président français Emmanuel Macron
à
intervenir. Plus
tôt en avril, deux
députés britanniques se sont également vu
refuser l’entrée
dans le pays.
La
délégation devait atterrir en Israël dimanche, mais
les membres de
la délégation ont été informés jeudi que leur visa
électronique
avait été annulé, a déclaré à Haaretz Camille Naget,
conseillère municipale écologiste de Paris. Ils devaient visiter des camps de réfugiés palestiniens et
Standing
Together, un mouvement populaire juif-arabe de
gauche israélien.
L’Autorité
de la population et de l’immigration du ministère israélien
de
l’Intérieur a déclaré que les visas de la délégation avaient
été révoqués conformément au 40e amendement de la loi sur
l’entrée en Israël, qui a été ratifié par le gouvernement du
Premier ministre Benjamin Netanyahu en février.
L’amendement
stipule que tout non-citoyen d’Israël se verra refuser
l’entrée
dans le pays s’il a publiquement appelé ou participé à un
boycott d’Israël.
L’autorité
a déclaré que l’annulation avait été approuvée par le
ministre
israélien de l’Intérieur, Moshe Arbel, et recommandée par
des
professionnels du ministère. Il a ajouté que l’objectif de
la
délégation française était de « montrer son soutien aux
Palestiniens et à une organisation qui promeut un boycott
d’Israël
et travaille à retirer le Hamas de la liste des
organisations
terroristes ».
L’autorité
a déclaré que les membres de la délégation sont membres
d’une
organisation appelée AJPF*. La délégation l’a confirmé et a
déclaré que l’organisation visait à promouvoir des relations
de
« jumelage » entre les municipalités françaises et les camps
de
réfugiés palestiniens, tout en appelant à une solution à
deux
États et à la reconnaissance du droit au retour des
Palestiniens.
Naget
a déclaré qu’elle n’était au courant d’aucun appel au
boycott lancé par l’organisation. Elle a également nié avec
véhémence que l’organisation ait jamais exigé que le Hamas
soit
retiré de la liste des organisations terroristes.
Uri
Weltmann de Standing Together a déclaré : « Le mois
dernier, le
ministre Amichai Chikli a
tenu une conférence à Jérusalem avec
des politiciens de partis politiques européens
antisémites. C’est
à ce peuple qu’Israël réserve un accueil royal. Mais
à qui
Israël a-t-il interdit l’entrée ? Les maires et les
parlementaires français se sont engagés dans l’idée
d’une paix
israélo-palestinienne, qui croient que les deux
peuples ont le droit
de vivre en sécurité.
Weltmann
a ajouté que certains membres de la délégation se
sont même
retirés du parti LFI dirigé par Jean-Luc Mélenchon, à
la suite de critiques sur ses positions sur
le Hamas et
leur attaque du 7 octobre 2023. « Les membres de la
délégation ont
demandé à rencontrer les familles des otages, et ils
soutiennent le
dialogue avec la société israélienne, pas son
boycott. C’est
probablement exactement ce qui dérange le
gouvernement.
La
délégation française, composée de députés, de maires
et
d’autres élus, devait se rendre en Israël
et en Cisjordanie pendant
quatre jours. Leurs visas d’entrée originaux ont été
approuvés
il y a environ un mois, ont-ils déclaré.
«
La révocation de nos permis d’entrée en Israël 48 heures
avant
notre départ est une violation majeure des relations
diplomatiques
avec l’État français et de nos mandats en tant qu’élus de la
république », peut-on lire dans leur communiqué. « Cela
nécessite
une position sans équivoque de la part des plus hautes
autorités de
notre État. »
La
déclaration a été publiée dans un contexte de tensions
croissantes entre
Israël et la France. Plus
tôt en
avril, le président Macron a annoncé que son pays pourrait
reconnaître un État palestinien dans les mois à venir,
déclenchant
une réaction israélienne.
Le
groupe de politiciens à qui l’entrée a été refusée a
fait
référence aux récents
développements français au Moyen-Orient dans
leur déclaration. « Depuis des décennies, nous
appelons la France
à reconnaître l’État palestinien. La France se
prépare enfin à
franchir le pas de la reconnaître", peut-on lire
dans le
communiqué.
« Nous
demandons que cette situation soit clarifiée », a déclaré la
délégation. « Empêcher délibérément les représentants élus
et les membres du parlement [d’entrer en Israël] ne peut
rester
sans conséquences. »
Résistance au féminin
-
Les éditions iXe publient une nouvelle traduction par la poétesse Souad
Labbize du témoignage de Fatna El Bouih sur son incarcération et sur ses
engagement...