vendredi 19 janvier 2018

Une jeune domestique torturée par ses employeurs provoque la colère des Marocains

Par Narjis Rerhaye (A Rabat)17/1/2018



Latefa, 22 ans, est originaire de Zagora, cette ville du Sud marocain, réputée pour ses kasbahs anciennes. Il y a un peu moins de deux ans, elle a été « placée » par son père chez une famille, à Casablanca. Latefa est domestique comme des milliers de très jeunes filles qui quittent leurs lointains villages ou villes pour travailler chez des familles marocaines. Cette très jeune fille est tombée sur la mauvaise famille. Le couple qui l’employait la torturait, lui infligeant les pires sévices. Ils avaient, entre autres, l’habitude de la brûler avec des fourchettes rougies sur le feu

Depuis samedi 13 janvier, Latefa est en réanimation, dans une clinique casablancaise. Dans un état grave, elle a été hospitalisée par ses employeurs qui sont également ses bourreaux. A la clinique, c’est la consternation. Le directeur de l’établissement s’empresse d’alerter la police. INSAF, une association qui « contribue à l’avènement d’une société qui garantit à chaque femme et à chaque enfant le respect de leurs droits dans un environnement digne et responsable », est également appelée.

« Nous avons découvert une jeune fille entre la vie et la mort. Complètement terrorisée. Nous n’avons jamais vu de tels sévices. Ce que Latefa a enduré est absolument inimaginable. Et d’après les éléments que nous avons pu recueillir, ce n’est pas la première fois qu’elle est torturée. Elle aurait même été hospitalisée une première fois », a déclaré à « Atlasinfo » Amina Khalid, membre d’INSAF.

Des brûlures sur le corps, des fractures, une anémie sévère : la jeune domestique est actuellement en soins intensifs. Son hospitalisation pourrait durer plus d’un mois. Depuis son admission à la clinique, ses employeurs sont passés la voir. Lundi, ils ont même déposé un chèque de caution de 20 000 dhs auprès de l’administration de la clinique. 

Le procureur général s’est saisi du dossier. Une enquête est ouverte. Dans la journée de mardi 16 janvier, Le secrétaire général du Conseil national des droits de l’Homme lance à son tour l’alerte et informe 2M. Quelques heures plus, au JT de 20h15, la chaîne de télévision casablancaise en fait l’ouverture. Les réseaux sociaux s’enflamment. L’associatif Ahmed Ghayet publie sur son mur les photos du corps torturé, brûlé de la jeune Latefa. « Pardonnez-moi pour la cruauté de ces photos », s’excusera-t-il auprès des internautes

Toute la nuit, la Toile oscille entre indignation et colère. Une pétition est mise en ligne sur Avaaz, le site mondial des pétitions en ligne. « À nous tous Marocain(e)s de nous mobiliser pour que ces actes de barbarie soient punis à la hauteur de leur inhumanité, de leur horreur. Notre silence ferait de nous des complices, les ‘’sans-voix’’ doivent pouvoir compter sur notre indignation, notre solidarité, notre mobilisation à nous qui avons ce ‘’pouvoir’’ de nous exprimer. Les générations actuelles et futures ne comprendraient pas notre inertie et elles auraient raison, nos consciences non plus ne nous pardonneraient pas notre indifférence, qu’attendons nous ? Nous sommes en droit, nous avons le devoir d’exiger un procès exemplaire et une condamnation qui rende justice à cette jeune fille, qui doit devenir notre cause commune ! », écrivent les auteurs de la pétition publiée sous le titre de « Ni notre silence, ni notre complicité…la barbarie est en nos murs ».

Quant à INSAF, elle ne lâche pas l’affaire. Amina Khalid, l’assistante sociale de l’association, se rend tous les jours à la clinique. Un suivi juridique sera assuré et INSAF entend se porter partie civile. « Nous allons également assurer une prise en charge de Latefa après sa sortie de clinique.et œuvrer pour sa réintégration sociale » a affirmé A. Khalid à Atlasinfo.

Mercredi 17 Janvier 2018 - 14:43


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