par Caroline Christinaz, Le Temps, 17/11/2017
La vallée de la Clarée, dans les
Hautes-Alpes, est le théâtre d’un concentré de crise migratoire. Les
migrants qui franchissent le col de l’Echelle sont majoritairement
mineurs - un statut qui n’est, selon le milieu associatif, pas pris en
compte par les autorités
Les premières neiges étaient tombées en début de
semaine. Samedi soir dernier, sur la route du col de l’Echelle, à
1762 mètres d’altitude, non loin de la frontière franco-italienne, Alain
est inquiet. Il fait froid et le vent souffle à travers les mélèzes. La
lune n’est pas encore sortie mais malgré l’obscurité, il voit clair.
ll
est 23 heures et il n’est pas seul. Grands phares allumés, plusieurs
véhicules de la gendarmerie arpentent la même route que lui. Alain,
accompagnateur en montagne à la retraite, sait que ces cimes, aussi
belles soient-elles, cachent des pièges. Mais eux l’ignorent.
Un
bruit. Le Briançonnais allume sa lampe torche. Derrière un tronc, un
sac rouge, puis un visage. La silhouette ne bouge pas. «N’ayez pas
peur», lance Alain. Ils s’étaient assis dos à la route, derrière un
tronc. L’un après l’autre, ils sortent de l’obscurité. Ils sont quatre.
Ils se taisent. L’un d’eux porte une doudoune, les autres se contentent
d’une veste qu’ils ont boutonnée jusqu’au cou. A leurs pieds, des
baskets. «Avez-vous froid?» Oui. «Soif? Faim?» Oui. «Quel âge
avez-vous?» Le garçon en doudoune répond: «16 ans, Monsieur. Je suis né
le 10 octobre 2001.» Ses trois compagnons font de même. Tous affirment
avoir moins de 18 ans et acceptent le thé chaud et les galettes de
chocolat que leur tend le retraité.
Une nouvelle route
C’est
un phénomène qui secoue la vallée de la Clarée depuis une année. En
2017, environ 1600 migrants ont franchi le col de l’Echelle. Parmi eux,
900 étaient mineurs. Majoritairement originaires d’Afrique de l’Ouest,
ces personnes suivent une route transmise par le bouche-à-oreille. La
perméabilité des passages par le sud de la France étant de plus en plus
réduite, leur itinéraire s’est déplacé vers le nord. De Turin, un train
les dépose à la gare de Bardonecchia. A pied ensuite, ils traversent la
frontière italo-française et partent à l’assaut du col. De jour comme de
nuit.
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