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Télégrammes

 Archives Télégrammes

5/2/2025

Aujourd’hui et demain, le Maroc connaît une immense grève nationale. Les ministères, les institutions publiques… tout y passe. Pour cause ? Le projet de loi sur la grève et la cherté de la vie à la veille du mois de Ramadan ! Les Marocains sont pris à la gorge et veulent le faire entendre. Tous ne peuvent toutefois se permettre la grève. Détails

vendredi 31 janvier 2025

La coopération sécuritaire des USA avec le Maroc, vue depuis Washington

 Fiche d’information, Bureau des affaires politico-militaires, Département d’État, Washington, 20/1/2025
Traduit par Tafsut Aït Baâmrane

Le Maroc est un partenaire essentiel des USA sur un large éventail de questions de sécurité régionale, avec l’objectif commun d’un Moyen-Orient et d’une Afrique du Nord stables, sûrs et prospères. Les USA travaillent en étroite collaboration avec le Maroc pour promouvoir la stabilité régionale, lutter contre le terrorisme, renforcer les liens commerciaux et d’investissement, et soutenir les efforts de développement et de réforme du Maroc.

La participation US au Marrakech Airshow, octobre 2024

Les USA ont fourni au Maroc une coopération en matière de sécurité depuis la fin des années 1950, ce qui reflète la nature durable des relations bilatérales. Cet engagement a été acté par de nombreux protocoles d’accord, dont les plus récents datent de 2007 et 2015, qui définissent les domaines cruciaux de la sécurité et de la coopération économique, aidant le Maroc à relever les défis régionaux et à faire face à l’impact des crises dans les régions avoisinantes.

Le Maroc est un partenaire solide en matière de défense multilatérale. Il a rejoint le Dialogue méditerranéen de l’OTAN en 1995, une initiative visant à promouvoir la sécurité et la stabilité régionales en coordination avec les principaux alliés de l’OTAN autour de la Méditerranée, et les USA ont désigné le Maroc comme un allié majeur non membre de l’OTAN en 2004. Grâce à cette désignation, le Maroc est en mesure de participer à la recherche et au développement coopératifs, de bénéficier d’une livraison prioritaire pour les articles de défense excédentaires (EDA) et de bénéficier d’une formation en coopération financée réciproquement.

Le Maroc est le plus grand acheteur d’équipements militaires US en Afrique. Les USA ont 8,545 milliards de dollars de contrats de vente de gouvernement à gouvernement avec le Maroc dans le cadre du système de ventes militaires à l’étranger (FMS). Les ventes FMS notifiées au Congrès sont listées ici. Les ventes antérieures récentes et significatives comprennent 18 lanceurs M142 High Mobility Artillery Rocket System (HIMARS) ; 40 AGM-154C Joint Stand Off Weapons (JSOW) ; six Multifunctional Information Distribution System Joint Tactical Radio Systems (MIDS-JTRS) ; dix missiles GM-84L Harpoon Block II Air; 25 avions F-16C/D Block 72 ; 5 810 bombes MK82-1 ; 36 hélicoptères d’attaque AH-64E Apache ; huit radars AN/MPQ-64F1 SENTINEL ; 20 missiles AIM-9X-2 SIDEWINDER ; trois hélicoptères CH-47D CHINOOK ; 40 lanceurs LAU-129A avec 20 missiles AGM-65D MAVERICK ; et un avion Gulfstream G- 550.

Depuis 2013, le Maroc a reçu des équipements d’une valeur de 478 millions de dollars dans le cadre du programme EDA du Département de la Défense. Cela comprend 222 chars M1A1 Abrams, deux avions C-130H et 600 véhicules blindés de transport de troupes M113A3.

Au cours de l’exercice 2018-22, les USA ont également autorisé l’exportation permanente de plus de 167 millions de dollars d’articles de défense vers le Maroc via le processus de vente commerciale directe. Les trois principales catégories d’exportations de défense vers le Maroc étaient l’électronique militaire, les moteurs à turbine à gaz et les équipements associés, et les équipements de contrôle des tirs, de laser, d’imagerie et de guidage.

Depuis 2012, les USA ont fourni au Maroc 135 millions de dollars en financement militaire étranger (FMF). Notre assistance a été essentielle pour maintenir les articles de défense d’origine US, renforcer la surveillance maritime pour lutter contre l’immigration illégale, la contrebande, le trafic de drogue et la pêche illicite, fournir des équipements de transport et de logistique et améliorer la surveillance aérienne.

En outre, depuis 2006, les USA ont fourni au Maroc 32 millions de dollars pour l’éducation et la formation militaire internationale (IMET). Dans le cadre de ce programme, des étudiants marocains sont envoyés chaque année suivre des cours de formation militaire professionnelle dans les écoles militaires US. Les cours IMET font progresser la professionnalisation militaire, renforcent les capacités dans des domaines clés, améliorent l’interopérabilité avec les forces US et permettent de mieux comprendre les USA. Ces avantages sont essentiels pour établir des relations durables avec les futurs dirigeants.

Le Maroc figure parmi les dix premiers contributeurs aux opérations de maintien de la paix des Nations unies dans le monde. Il déploie actuellement 1 718 soldats de la paix en République centrafricaine, en République démocratique du Congo, au Soudan et au Sud-Soudan. Le Maroc dispose d’un centre de formation pré-déploiement à Tifnit, qui dispense des formations dans les domaines de la protection des civils, de la lutte contre la désinformation, de la numérisation, de la télémédecine, de la santé mentale et de la protection de l’environnement.

Le Maroc continue de s’occuper des mines terrestres et des munitions non explosées résultant de l’engagement entre le Maroc et les forces du Front Polisario au sujet du Sahara occidental. Depuis 1993, les USA ont fourni au Maroc une aide de 1,996 million de dollars au titre du programme de destruction des armes conventionnelles, dont 1,154 million de dollars pour l’exercice 2022.

Le Maroc joue un rôle de premier plan dans les efforts de lutte contre le terrorisme déployés par les USA. Depuis 2005, le Maroc est membre du Partenariat transsaharien de lutte contre le terrorisme, un effort financé et mis en œuvre par le gouvernement US pour lutter contre l’extrémisme violent dans la région du Sahara et du Sahel. En 2011, le Maroc et les USA ont rejoint 28 autres pays en tant que membres fondateurs du Forum mondial de lutte contre le terrorisme, une initiative visant à « réduire la vulnérabilité des populations du monde entier face au terrorisme en prévenant, combattant et poursuivant efficacement les attaques terroristes et en luttant contre l’incitation au terrorisme et le recrutement de terroristes ». En outre, le Maroc a été le premier pays du Maghreb à rejoindre la Coalition mondiale anti-ISIS en 2014 et assure actuellement la coprésidence du Groupe de réflexion sur l’Afrique de la Coalition.

Les USA et le Maroc entretiennent également une forte coopération militaire par le biais d’opérations de sécurité conjointes. Depuis la fin des années 1990, le Maroc accueille l’exercice d’entraînement AFRICAN LION, qui réunit les forces US et marocaines avec des participants de plus de vingt pays et de l’OTAN. Sous l’égide du Commandement des USA pour l’Afrique depuis 2008, African Lion est devenu le plus grand exercice militaire conjoint sur le continent, avec des milliers de soldats qui y participent chaque année. En outre, depuis 2003, le Maroc a établi un partenariat de formation avec la Garde nationale de l’Utah dans le cadre du programme de partenariat d’État de la Garde nationale US, qui offre des possibilités de formation spécialisée et d’échange avec les forces armées marocaines.

Le Maroc devient un gros client pour l’industrie de défense israélienne

Dean Shmuel Elmas, Globes  10/7/2024
 Traduit par SOLIDMAR

« Globes » se penche sur les principaux systèmes de défense israéliens achetés par le Maroc, avec en point d’orgue un accord d’un milliard de dollars avec IAI, dont les médias étrangers rapportent qu’il concerne les satellites espions Ofek.


Illustration : Tali Bogdanovsky

Hier 9 juillet 2024, Israel Aerospace Industries (IAI) a annoncé un accord d’une valeur d’un milliard de dollars sur cinq ans avec une tierce partie dont le nom n’a pas été révélé. Les médias étrangers ont déclaré que l’accord portait sur des satellites, dont les premières informations ont été publiées l’année dernière. La présence du président de l’IAI, Amir Peretz*, au Maroc lors de l’annonce de l’accord a alimenté ces informations.

Le Maroc est l’un des pays arabes qui ont normalisé leurs relations avec Israël dans le cadre des accords d’Abraham en 2020. Son influence sur l’industrie de la défense israélienne a été des plus significatives. Selon l’Institut international de recherche sur la paix de Stockholm (SIPRI), entre 2019 et 2023, Israël était le neuvième exportateur mondial d’équipements de défense. Le SIPRI a constaté que même si le Maroc et Israël n’ont normalisé leurs relations qu’en décembre 2020, Israël occupait déjà la troisième place en termes d’importations de défense du Maroc, fournissant 11 % de ses besoins.


Les défis du Maroc

Depuis que Peretz a été nommé président de l’IAI, l’entreprise est devenue un acteur très important de l’industrie de la défense au Maroc. Le SIPRI a rapporté il y a six mois que le Maroc voulait acheter à Israël deux satellites d’espionnage Ofek 13. Ces satellites d’observation sont considérés comme l’un des meilleurs au monde et sont utilisés par l’unité de renseignement 9900 de Tsahal, qui est responsable de la collecte et de l’extraction de renseignements visuels et géographiques.

Cette transaction est intéressante dans le contexte de la concurrence commerciale entre les grandes entreprises de défense israéliennes et françaises. Le Maroc a préféré le satellite Ofek 13 à ceux d’Airbus et de Thales, ses précédents fournisseurs dans ce domaine. Quelques mois plus tard, le président français Emmanuel Macron a décidé de tenir les entreprises israéliennes à l’écart du prestigieux salon de la défense et de l’aérospatiale Eurosatory à Paris.

Bien que la France ait attribué cette décision à la guerre à Gaza, on peut supposer que des considérations politico-économiques étaient également à l’origine de cette décision. Le président français a probablement été influencé par la vente historique du système de défense aérienne à longue portée Arrow 3 à l’Allemagne pour 3,5 milliards de dollars, et du système de défense aérienne à moyenne portée David’s Sling de Rafael à la Finlande pour 316 millions d’euros. Ces contrats ont permis aux technologies israéliennes de faire la une des journaux et, contrairement à la plupart des systèmes français, elles ont fait leurs preuves sur le champ de bataille.

Ce dernier contrat vient s’ajouter aux nombreux contrats signés par Israël avec le Maroc. IAI a vendu le système de défense aérienne Barak MX au Maroc en 2022 pour 540 millions de dollars. Le système comprend trois intercepteurs : le Barak MRAD d’une portée de 35 kilomètres, le Barak LRAD d’une portée de 70 kilomètres et le Barak ER d’une portée de 150 kilomètres. Le site web « Intelligence Online » a également rapporté l’année dernière qu’IAI avait achevé la livraison de trois drones Heron 1 au Maroc. Ce contrat de 48 millions de dollars est inhabituel car il a été signé en 2014, par le biais d’une coentreprise entre IAI et Airbus.

Un autre acteur important dans le domaine des achats de défense au Maroc est BlueBird Aero Systems, dans lequel IAI détient une participation de 50 % depuis 2020. Ces dernières années, BlueBird a fourni divers produits au Maroc, tels que la munition rôdeuse [téléopérée] SpyX, ainsi que WonderB et ThunderB - des systèmes sans pilote qui décollent et atterrissent verticalement. Ronen Nadir, PDG de BlueBird, a déclaré au site web « ZM » en avril que la société avait même mis en place une usine de production au Maroc, qui devrait commencer à fonctionner bientôt.

Sur le plan de la géopolitique régionale, les nombreux achats de défense du Maroc auprès d’Israël ont plus que jamais constitué un défi pour Rabat au cours des derniers mois. Cependant, le Maroc doit faire face à d’importants défis sécuritaires, notamment en ce qui concerne le Sahara occidental et son voisin oriental, l’Algérie, qui est un ami proche et de longue date des organisations terroristes palestiniennes.

En juillet 2023, lors de l’opération de Tsahal dans le camp de réfugiés de Jénine, un haut responsable du Hamas, Khaled Mechal, s’est exprimé à la Grande Mosquée d’Alger et a félicité l’Algérie pour sa « position héroïque dans la lutte palestinienne » à Jénine. Dans le même temps, le président algérien Abdelmajid Tebboune a annoncé l’octroi de 30 millions de dollars pour la reconstruction après les dégâts à Jénine.

L’Algérie est également l’un des principaux soutiens du Front Polisario, qui lutte pour l’indépendance du Sahara occidental vis-à-vis du Maroc. Israël, quant à lui, a officiellement annoncé l’année dernière qu’il reconnaissait la souveraineté marocaine au Sahara occidental.

Les détracteurs du Maroc sur la question du Sahara occidental se sont récemment efforcés de mettre en évidence l’utilisation de missiles israéliens pendant la guerre à Gaza. Le journal français de gauche « L’Humanité » a rapporté il y a quatre mois que l’armée marocaine opère à partir d’une base à l’aéroport de Smara au Sahara occidental en utilisant des drones Hermes 900 et Hermes 450 d’Elbit Systems. Ces mêmes drones sont également utilisés par Israël aujourd’hui à Gaza.

L’année dernière, le site web « Intercept » a publié une information émanant de de Federico Borsari, chercheur spécialisé dans les technologies sans pilote au Center for European Policy Analysis (CEPA). Selon Borsari, le Maroc possède environ 150 avions à décollage vertical (WonderB, ThunderB et SpyX de Blue Bird), trois drones Heron d’IAI et des munitions rôdeuses Harop d’IAI, ainsi que quatre drones Hermes d’Elbit Systems.


Pas seulement des armes

La coopération israélo-marocaine en matière de sécurité ne se limite pas à l’armement. Comme l’a révélé « Globes », la nouvelle péniche de débarquement de Tsahal, l’INS Komemiyut, est arrivée en Israël il y a environ un mois en provenance des USA - après une escale au Maroc pour le ravitaillement en carburant pendant le long voyage du navire de Pascagoula, dans le Mississippi, à la base navale de Haïfa. À Tanger, l’équipage a fait le plein de carburant et de nourriture afin de poursuivre sa route vers Israël.

Un autre domaine dans lequel les deux pays et les entreprises de défense sont impliqués est celui de la recherche. L’année dernière, IAI a signé un protocole d’accord avec l’Université Internationale de Rabat (UIR) pour établir un centre d’excellence dans les domaines de l’aéronautique, de l’intelligence artificielle et de l’innovation.

NDLT

*Amir Peretz est né en 1952 à Boujaâd au Maroc, dont il a gardé la nationalité. Lire Des avocats marocains attaquent Peretz (2006)

jeudi 30 janvier 2025

Le Révérend chanoine J Peter Pham,
le Mister Africa “réaliste” de Donald Trump II

 Ayman El Hakim, 29/1/2025

Cette fois-ci sera la bonne : en 2017, la nomination par Mike Pompeo de J Peter Pham comme Secrétaire d'État assistant aux Affaires africaines de Trump I avait été bloquée au Sénat par James Inhofe (Oklahoma), un défenseur acharné des droits du peuple sahraoui, qui avait invoqué la proximité du candidat avec le Makhzen marocain. Depuis, Inhofe a quitté le Sénat en 2023 et notre bas monde en juillet 2004. Il ne devrait donc plus y avoir d’obstacle à la nomination du Révérend chanoine Pham, 55 ans. Ci-dessous son curriculum, qui a de quoi donner le vertige.

J Peter Pham, célèbre pour les nœuds papillon qu’il arbore en toutes occasions, est arrivé à l’âge de 5 ans aux USA, où sa famille, liée au régime sud-vietnamien, avait fui après la chute de Saïgon. Il a effectué un double cursus d’études.

Après avoir obtenu une licence en économie à l'université de Chicago, Pham s'est orienté vers la prêtrise et a finalement obtenu un doctorat, rédigeant sa thèse de doctorat en théologie systématique à l'université pontificale grégorienne de Rome (université jésuite fondée en 1551 par Ignace de Loyola), sur la théologie de Hans Urs von Balthasar. Chercheur postdoctoral à l'Académie pontificale ecclésiastique, il a été diplomate au Vatican et assistant du Vicaire général de Sa Sainteté au Vatican et du président du Conseil pontifical pour la justice et la paix. Il a ensuite rejoint la faculté du Centre des sciences sociales libérales et appliquées de la JMU, l'université James Madison à Harrisburg (Virginie).

En 1995, Pham est ordonné prêtre de l’église épiscopalienne (catholiques anglicans) et exercera son ministère à l’église Saint-Paul de Washington, située dans la K Street, qui est au lobbying ce que Wall Street est à la finance, vu qu’elle est le siège de nombreuses firmes de lobbying, cabinets d’avocats et think tanks.

Nommé en août 2004 professeur associé en études de justice (sic) à la JMU, il y devient ensuite professeur de sciences politiques et d’« Africana Studies » et directeur du  Nelson Institute for International and Public Affairs, dissertant sur le Libéria, les relations entre Taiwan et la Chine et la terreur islamiste au Moyen-Orient, bien qu'il n'ait aucune qualification reconnue dans ces domaines.

Il se retrouve progressivement dans des postes de responsable dans une série d’organismes, tous liés au Parti républicain, notamment l’Acton Institute for the Study of Religion and Liberty, qui regroupe des catholiques libertariens, l’Atlantic Council, la Fondation pour la défense des démocraties et quelques autres.

En 2018, après son rejet comme secrétaire d’État assistant aux Affaires africaines, Pompeo le nomme Envoyé Spécial US pour la Région des Grands Lacs, avec rang d’ambassadeur, jusqu’en 2020, puis Envoyé Spécial pour la Région du Sahel africain jusqu’en 2021. En 2022, il a été élu membre de l’Académie diplomatique américaine.

Peter Pham a fait partie du groupe consultatif supérieur du Commandement militaire US pour l'Afrique (USAFRICOM) de 2008 à 2013 et est conseiller principal du Krach Institute for Tech Diplomacy à l'Université de Purdue. Depuis 2015, il est membre du conseil d'administration du Smithsonian National Museum of African Art à Washington, DC, dont il a été le vice-président (2016-2021) et dont il préside le comité des finances depuis 2022.

Le Révérend Pham a publié un nombre invraisemblable d’articles, d’essais et de livres sur tous les sujets possibles, de la doctrine sociale de l’Église au Liberia, la Sierra Leone, la Somalie et, last but not least, le Sahara occidental. Nous avons choisi de traduire son essai sur ce sujet [cliquer sur l'image en fin d'article], datant de 2010, qui donne une très bonne idée de ce à quoi les Sahraouis, les Marocains, les Mauritaniens et les Algériens peuvent s’attendre de la part de l’administration Trump II. Plus makhzénien que Pham, tu meurs !

Pour conclure ce portrait, nous présentons le quatrième volet du personnage, le volet business. En effet, notre bon chanoine n’est pas seulement prêtre, universitaire et diplomate. Il est aussi businessman, comme tout bon politicien usaméricain.

Business

J Peter Pham est actuellement directeur non exécutif d'Africell Global Holdings et de Rainbow Rare Earths, président non exécutif de HPX et conseiller stratégique de dClimate, bitt et de quelques autres entreprises.

Africell Global Holdings

La compagnie, fondée en 2000 et dirigée par le Libano-Américain Ziad Dalloul, est comme il se doit domiciliée sur l’île britannique de Jersey, petit paradis fiscal dans le Channel. C’est une des entreprises de téléphonie mobile à la croissance la plus rapide, avec plus de 11 millions d’abonnés en Gambie, Sierra Leone, RDC, Angola et Ouganda.

Rainbow Rare Earths

Le phosphogypse (parfois abrégé en PG) est un gypse non naturel, déchet industriel, issu du traitement industriel des minerais calciques fluorophosphatés utilisés pour la fabrication de l'acide phosphorique et des engrais phosphatés. De Salonique au Guadalquivir en passant par la Tunisie, l’Afrique de Sud et le Brésil, des centaines de millions de tonnes de ce résidu radioactif s’entassent, constituant une menace grave pour l’environnement. L’entreprise Rainbow Rare Earths, cotée à la Bourse de Londres, est engagée dans deux sites, Phalaborwa en Afrique du Sud et Uberaba au Brésil, où elle expérimente  un procédé -qu’elle présente comme « écologique » - consistant à extraire des oxydes de terres rares de ce phosphogypse. Selon Rainbow, « ce devrait permettre de produire des oxydes de terres rares séparés par le biais d'une seule usine hydrométallurgique sur le site, en se concentrant sur la récupération du néodyme, du praséodyme, du dysprosium et du terbium. Il s'agit de composants essentiels des aimants permanents à haute performance utilisés dans les véhicules électriques, les turbines éoliennes, la défense et de nouveaux marchés passionnants tels que la robotique et la mobilité aérienne avancée ».

dCLIMATE

C’est une entreprise de collecte et d’exploitation de données climatiques permettant de naviguer sur le marché des émissions de carbones et fournissant ce qui s’appelle « climate intelligence » (renseignement climatique), permettant entre autres d’évaluer les risques. dClimate se présente ainsi : « dClimate est un réseau décentralisé d'infrastructures de données climatiques qui transforme la façon dont les applications technologiques climatiques sont mises en œuvre pour favoriser un avenir résilient. » Son slogan publicitaire : « Libérer la puissance des données climatiques pour un avenir durable ». Pham siège au conseil consultatif de l’entreprise aux côtés de Mark Cuban, « investisseur, entrepreneur, star de l'émission Shark Tank sur ABC, propriétaire de l’équipe des Dallas Mavericks de la NBA (National Basketball Association) », de « SergeyNazarov, cofondateur de Chainlink » et de « D.J. Mbenga, 2 fois champion NBA de la RDC et éminent philanthrope congolais ». Du basket à la déforestation, il n’y a qu’un pas.

HPX
High Power Exploration Inc. (HPX) est une des entreprises du groupe minier dirigé par Robert Friedland, chargée de l'exploitation du gisement de minerai de fer du Mont Nimba, en Guinée.
Robert Friedland, fils d’un rescapé d’Auschwitz, a tout pour être le héros d’une série Netflix. À 19 ans – on est en 1970 – il est arrêté à Portland en possession de LSD pour une valeur de 100 000 $ qu'il avait vendu à...un agent du FBI. Il sera rapidement libéré et bénéficiera d’un non-lieu. Copain de Steve Jobs, dont il partage l’intérêt pour les philosophies orientales, il l’invite dans un verger de pommes appartenant à son oncle millionnaire en Oregon, où il créera une communauté. C’est là que Steve Jobs a trouvé le nom de son invention, Apple. Mais rapidement, Robert passe aux choses sérieuses et se lance dans les activités minières. De l'Oregon, il passe au Colorado, où il gagne le surnom de "Toxic Bob", après la catastrophe de pollution que provoque la mine qu'il a acquis à Summitville avant de se déclarer en faillite, de payer une petite amende de 20 millions de $ et de partir à la conquête de mines en Alaska, en Australie, au Myanmar, en Mongolie et en Afrique. [Lire TOXIC BOB, l’homme qui a trouvé mieux que le LSD : l’or, le cuivre et le fer. Un dossier Tlaxcala sur Robert Friedland, l’Elon Musk du sous-sol]
Frère Pham, comme président non exécutif de HPX, livre depuis quelques mois une bataille contre le monopole d’Arcelor Mittal sur les transports de minerai de fer provenant des mines du Mont Nimba sur la ligne de chemin de fer de Yekepa au port de Buchanan (360 km)  au Liberia, faisant pression sur le président Boakai pour qu’il fasse jouer la concurrence et brise le monopole du géant indien. Ce dernier a restauré et remis en route cette ligne de chemin de fer - construite par le consortium yankee/suédois LAMCO et mise en ruine par la guerre civile -, qu’il a pu refaire tourner grâce aux commandes de minerai de fer chinoises. HPX, argumente l’oncle Pham dans la presse libérienne, entend exporter 30 millions de minerai par an dans les 25 prochaines années, ce qui pourrait rapporter à l’État libérien, au tarif de 2,10 $ par tonne, la coquette somme d’ 1,6 milliard de dollars. Pourquoi laisser ce pactole entre les griffes de Tonton Lakhsmi (Narayan Mittal) ?  Bref, notre théologien sait aussi compter.

bitt

Et last but not least, en 2022, Brian Popelka, un p’tit gars du Nebraska qui vit à Salt Lake City, la capitale des Mormons (Utah),  PDG de l’entreprise bitt (Banking Innovation Through Technology) a recruté le Révérend chanoine Pham comme conseiller. Bitt propose aux banques centrales d’installer des système de monnaie numérique de banque centrale (CBDC en anglais), ce dont elle a déjà convaincu l’ Union monétaire des Caraïbes orientales et la Banque centrale des Caraïbes orientales, qui regroupent 6 États insulaires indépendants (Antigua-et-Barbuda, Dominique, Grenade, Saint-Christophe-et-Niévès, Saint-Vincent-et-les-Grenadines et Sainte-Lucie) et 2 territoires d’outre-mer britanniques (Anguilla et Montserrat). Pham a ainsi commenté sa nomination comme conseiller : « « Je suis ravi de rejoindre le conseil consultatif de bitt.  Je suis impatient de mettre à profit mon expérience en Afrique et ma connaissance des défis et des opportunités présents sur le continent pour renforcer la relation existante de bitt avec la Banque centrale du Nigeria, et aussi pour aider à forger des partenariats similaires avec d'autres institutions africaines ; contribuant ainsi au développement de la région en faisant progresser l'inclusion financière et en facilitant les échanges panafricains. »  Ite, missa est.




Conférence Internationale sur l’innovation technologique et l’Investissement touristique

Cinq start-ups de jeunes lauréates du concours national de l’innovation lancé par le ministère du Tourisme en partenariat avec ONU Tourisme et la SMIT (Société Marocaine d'Ingénierie Touristique) ont été distinguées lors de la Conférence Internationale sur l’Innovation Technologique et l’Investissement Touristique le mardi 28 janvier à Marrakech  :

• « Attar », basée à Casablanca, révolutionne l’expérience olfactive touristique en proposant des parfums inspirés des régions marocaines, créant ainsi une nouvelle forme de souvenir sensoriel.

• « Eco Dôme », originaire de Tata, promeut un tourisme durable dans le sud marocain avec ses hébergements écologiques uniques, alliant tradition et modernité.

• « Mouja », start-up d’Agadir, se distingue dans le tourisme sportif en offrant des expériences de surf écoresponsables et en assurant la formation de jeunes instructeurs locaux.

• « Pikala Bikes », implantée à Marrakech, allie mobilité douce et découverte culturelle à travers ses tours guidés à vélo, et propose également des formations au profit des jeunes guides locaux.

• « Wanaut » une plateforme innovante qui transforme la façon dont les gens s’engagent avec la culture et le sport, tout en soutenant la professionnalisation des créateurs d’expériences issues du secteur informel.



mercredi 29 janvier 2025

“Les melons et tomates cerises du Sahara occidental doivent comporter la bonne mention du territoire d’origine mais ne peuvent être interdits par la France” (Conseil d'État)

Conseil d'État, Paris, 28/1/2025


Saisi par la Confédération paysanne, le Conseil d’État n’ordonne pas au Gouvernement d’interdire l’importation en France des tomates cerises et des melons charentais récoltés sur le territoire du Sahara occidental et étiquetés comme originaires du Maroc. La Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a précisé qu’un État membre de l’Union européenne ne peut pas interdire, seul, l’importation de produits agricoles dont l’étiquetage serait non conforme à la législation de l’Union concernant l’indication du territoire d’origine. La CJUE a toutefois jugé que ces produits devaient être étiquetés « Sahara occidental ».

Interrogée par le Conseil d'État, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a jugé (C-399/22) qu’un État membre ne peut, unilatéralement, interdire l’importation de produits agricoles récoltés sur le territoire du Sahara occidental au motif que l’étiquetage de ces produits indique à tort le Maroc comme étant leur pays d’origine, car une telle décision relève de la politique commerciale commune et de l’Union européenne. 

La Confédération paysanne a demandé au Gouvernement d’interdire l’importation en France des tomates cerises et de melons charentais récoltés au Sahara occidental et étiquetés comme originaires du Maroc, estimant que cela était contraire au droit de l’Union européenne sur l’information des consommateurs. N’ayant pas eu de réponse, l’association a saisi Conseil d’État.

La CJUE a toutefois indiqué que l’étiquetage des produits originaires du Sahara occidental pour l’importation et la vente en Europe devait mentionner comme pays d’origine le seul Sahara occidental, et non le Maroc, pour ne pas induire en erreur le consommateur. 

Le Conseil d’État juge ainsi que la mesure d’interdiction demandée par l’association est du ressort des autorités européennes et que les ministres chargés de l’économie et de l’agriculture ne pouvaient légalement interdire l’importation en France des tomates cerises et melons charentais récoltés sur le territoire du Sahara occidental. Pour cette raison, le Conseil d’État rejette le recours de la Confédération paysanne.

Télécharger la décision n°455088

« Submersion » migratoire : le naufrage de François Bayrou

Le premier ministre français a dénoncé, lundi sur LCI, le « sentiment de submersion » généré par l’immigration. Le propos, qu’il a assumé mardi, raconte la dérive morale d’un pouvoir à la roue de l’extrême droite. Et pose la question de la censure par la gauche socialiste.


Insubmersible, par TRUANT 

Ilyes Ramdani, Mediapart, 28/1/2025

Au déshonneur, François Bayrou a ajouté le mensonge. Interpellé par le député socialiste Boris Vallaud, mardi 28 janvier à l’Assemblée nationale, le premier ministre a tenté d’éteindre la polémique née de ses propos sur l’immigration, tenus la veille sur LCI et dont il n’a pas retiré un mot. « Cette émission et le passage que vous indiquez étaient fondés sur la situation à Mayotte », a-t-il simplement assuré. C’est faux.

La question du journaliste Darius Rochebin est claire, tirée de l’exemple d’une photo de classe du jeune François Bayrou à Nay (Pyrénées-Atlantiques). « Il n’y a que des blancs », note le présentateur, qui enchaîne : « Une foule française aujourd’hui est différente d’une foule de votre enfance. Certains Français sont gênés de cela […], d’autres s’en réjouissent. Comment définissez-vous cela ? Est-ce qu’il y a une logique, souhaitable ou non, à ce que la France soit métissée ? »

Il s’agit donc, dans la question comme dans la réponse, d’un diagnostic sur le pays, bien au-delà de l’exemple mahorais. « Je ne crois pas que ça soit mieux d’être métissé que de ne pas l’être, répond François Bayrou. Les apports étrangers sont positifs pour un peuple à condition qu’ils ne dépassent pas une proportion. Dès l’instant où vous avez le sentiment d’une submersion, de ne plus reconnaître votre pays, de ne plus reconnaître les modes de vie ou la culture, dès cet instant, il y a rejet. […] Un certain nombre de villes ou de régions sont dans ce sentiment-là. »

François Bayrou arrive à l’hôtel Matignon à Paris, le 22 janvier 2025.  Photo Dimitar Dilkoff / AFP

Mardi, le Rassemblement national (RN) a applaudi avec le sourire la réponse du premier ministre. Comment aurait-il pu en être autrement, au moment où le chef du gouvernement reprend les mots et les accents de l’extrême droite ? Dénonçant les « querelles sur les mots », il a accusé la gauche de « refuser de voir le sentiment d’un très grand nombre de nos compatriotes ». Comme Jean-Marie Le Pen qui, au début des années 1990, disait : « Il faudrait être aveugle pour ne pas s’apercevoir que, dans les plus humbles villages, ce phénomène de marée humaine a commencé à se faire sentir. »

La submersion migratoire, pourtant, n’existe nulle part ailleurs dans le pays que dans les cerveaux étriqués. Au classement des pays d’accueil dans l’Union européenne (UE), la France se classe à la 21e position. En tout, selon l’Insee, les personnes immigrées sont 7 millions si on y inclut celles qui ont acquis la nationalité française. Enfin, il entre chaque année sur le territoire environ 180 000 personnes de plus qu’il n’en sort, un chiffre stable sur les dernières années.

Rapportées aux 68 millions d’habitant·es du pays, ces statistiques montrent l’inexactitude du raisonnement de François Bayrou. Mais voulait-il seulement l’être ? « Les préjugés sont nourris par le réel », a-t-il lancé à l’Assemblée, dans une formule hallucinante. L’objectif du premier ministre est politique, au sens le plus bas du terme : éviter la censure et la crise politique, durer à Matignon et préparer la campagne présidentielle de 2027, à laquelle il rêve d’être candidat.  

La course aux bas instincts 

Alors, malgré ses 73 ans, François Bayrou est un homme politique qui surfe sur l’air du temps, souffle sur les braises d’une société fracturée, flatte les bas instincts. Vétéran de la scène politique nationale, le Palois n’est pas tombé dans un piège sur le plateau de Darius Rochebin. Il a validé l’immigration comme un des sujets principaux de l’émission ; il a répondu – longuement – aux questions du journaliste sur le sujet ; il a insisté, martelé son idée, comme pour être sûr qu’elle arriverait bien aux oreilles de celles et ceux à qui elle était destinée.

Rien ne salit plus les mains, désormais, aux yeux du centre et de la droite qui jadis s’offusquaient du racisme du Front national (FN). Ni l’évocation d’une « submersion » ni l’association de l’immigration et de la délinquance ne sont des terrains trop boueux pour un camp politique en mal d’électeurs et électrices. « Il suffit de voir les faits divers pour mesurer que les manquements et les délits se concentrent et on ne voit plus que ça ! », s’est insurgé François Bayrou, lundi sur LCI.

Dans une autre réponse, le chef du gouvernement a parlé des jeunes délinquants dans les quartiers populaires comme étant « souvent culturellement en situation de rupture ». Empruntant, là encore à l’extrême droite, l’idée selon laquelle l’origine des jeunes adolescent·es ou adultes concerné·es jouerait un rôle dans leur glissement vers la délinquance. Une « régression vers les origines ethniques », disait à l’été 2023 Bruno Retailleau, au moment des révoltes urbaines qui avaient suivi la mort de Nahel Merzouk.

Devenu ministre de l’intérieur, l’ancien sénateur a applaudi les propos de François Bayrou, y voyant une façon de « justifier la politique qu’[il] souhaite mener ». Son collègue de la justice, Gérald Darmanin, y a vu une « avancée ». L’Élysée, en revanche, n’a pas réagi. Qu’aurait bien pu dire la présidence, moins d’un an après la dénonciation par Emmanuel Macron du programme « immigrationniste » de la gauche, là encore un mot-clé de l’extrême droite ? Mardi matin, dans un train entre sa circonscription et Paris, un ancien ministre se lamente : « Putain mais je n’ai pas signé pour ça en 2017 ! »

En privé, lorsqu’ils glosent sur leur stratégie à l’abri du « off », les stratèges du camp présidentiel jurent ne pas avoir de problème personnel avec l’immigration. « Mais vous comprenez, entend-on souvent, sur le terrain, c’est un vrai sujet pour les gens. » Branchés sur CNews pour tenter de saisir les angoisses du pays, ministres et conseillers se persuadent mutuellement que ramer à contre-courant scellerait leur naufrage politique. « On doit montrer aux Français qu’on a compris leurs problèmes », s’excusait presque un ministre au moment de la loi immigration de 2023.

Pire qu’une diversion

Alors, ils suivent, embraient, surenchérissent, pointent du doigt. Contribuant eux-mêmes à la panique morale qui s’empare du pays, légitimant les pires obsessions. C’est un cercle vicieux qui mène inlassablement au renforcement du RN, déjà aux portes du pouvoir. Mardi matin, l’animateur Pascal Praud saisissait la balle au bond : « Submersion et grand remplacement : n’est-ce pas finalement un synonyme ? Ceux qui disaient ça depuis des années étaient taxés de racistes. » La fenêtre d’Overton est plus grande ouverte que jamais.

Il serait tentant d’y voir, de la part de François Bayrou, le énième écran de fumée d’un pouvoir en difficulté. Une tentative de diversion, à l’heure où le gouvernement fait passer l’un des budgets les plus austéritaires des dernières décennies. Cela ferait sens : au moment où les collectivités et les services publics se voient mis à mal, parler de délinquance juvénile, de narcotrafic et d’immigration permet d’occuper la bande passante.

L’analyse est plaisante mais partielle. La sortie du premier ministre n’est ni un dérapage ni une diversion. C’est la suite d’un long chemin, sur lequel il marche depuis longtemps, et le président de la République avec lui. Un chemin facile, qui offre un accès rapide aux antennes, l’assentiment des éditorialistes et une illusoire popularité sondagière. Peut-être même le maintien au pouvoir, avec la complicité d’un RN qui n’en demandait pas tant.

À moyen terme, toutefois, en dérivant si loin de la rive républicaine, François Bayrou prend un double risque. Pour lui-même, celui d’échouer comme Michel Barnier dans les clins d’œil à l’extrême droite xénophobe ; celui d’être supplanté, comme tant d’autres avant lui, par « l’original » qu’il essaie de copier ; celui de ne laisser à la postérité rien d’autre que sa dérive morale.

Alors que sa posture de négociation semblait convaincre une partie de la gauche, le maire de Pau (Pyrénées-Atlantiques) met désormais l’avenir de son gouvernement en péril. Car, pour le Parti socialiste (PS), la question de la censure se pose désormais en des termes bien différents. Il ne s’agit plus de renverser un gouvernement pour son budget austéritaire, mais parce qu’il stigmatise les personnes étrangères et met à mal le droit du sol sous les applaudissements du RN.

Le deuxième danger, autrement plus décisif, touche directement à la cohésion nationale. Les propos de ce type ont beau s’accumuler dans la bouche des personnalités politiques, ils n’en restent pas moins marquants quand ils émanent du premier ministre. Dans un pays où la haine de l’autre se fait entendre si bruyamment, souffler sur ce type de braises n’est jamais sans conséquences. François Bayrou, qui disait un jour des discriminations qu’elles étaient un « fer rouge sur notre société », devrait le savoir.

***

Le PS suspend les négociations sur le budget

Il y a des mots que les socialistes auraient aimé entendre dans la bouche de François Bayrou – celui de « suspension » de la réforme des retraites. Et des mots qu’ils auraient voulu ne jamais voir prononcer, comme celui de « submersion », lâché lundi soir sur LCI.

Signe que l’heure est grave, le patron du groupe socialiste, Boris Vallaud, s’est directement adressé au premier ministre, mardi, à l’Assemblée nationale : « Maintenez-vous ce mot de submersion ? » Après une justification confuse de l’intéressé, le PS, en pleine négociation sur le budget avec le gouvernement, a annoncé suspendre les pourparlers et annuler la réunion prévue le soir même à Matignon.

« On n’est pas sur une chose anecdotique, [Bayrou] ouvre la porte aux analyses du RN et à leur prise de pouvoir, c’est un clin d’œil à l’extrême droite », décrypte le député socialiste Laurent Baumel, qui estime que ces mots ne seront pas sans conséquences sur le choix du PS de censurer ou non le gouvernement la semaine prochaine. « Après, la décision, elle tient aussi à d’autres facteurs, et notamment les concessions sur le budget », tempête-t-il.

Les autres groupes de gauche à l’Assemblée ont eux aussi fait part de leur émotion à la suite aux propos du premier ministre, à l’instar de la cheffe de file des écologistes, Cyrielle Chatelain, qui a jugé que François Bayrou avait « craché à la figure de ces millions de Français qui ont dans leur chair l’histoire de l’immigration ». Son intervention a déclenché une standing ovation de l’ensemble des député·es de gauche dans l’hémicycle.

Pauline Graulle

mardi 28 janvier 2025

Faire du tourisme dans un pays occupé : Dakhla, une ville de vacances sous la répression marocaine
Un vol Madrid-Dakhla à 16 Euros, c'est vraiment donné

La ville, qui fait partie du Sahara occidental mais est militairement occupée par la dictature marocaine, aspire à devenir une destination touristique pour les Européens malgré la répression contre les citoyens sahraouis.

 José Carmona, Público  , 24/1/2025
Traduit par Tafsut Aït BaâmraneTlaxcala


Un avion Ryanair rempli de touristes atterrit sur une minuscule péninsule à quelques kilomètres du continent africain. L’avion doit faire un virage à 180 degrés pour se mettre dans l’axe de l’aéroport, construit au milieu de la ville. C’est là que descendent les étudiants en vacances et une poignée de couples qui avouent qu’ils ignoraient l’existence de l’endroit il y a quinze jours. Mais à 16 euros le vol, la précarité de la jeunesse transforme l’ignorance en opportunité.

Cette péninsule s’appelle aujourd’hui Dakhla, mais elle a été baptisée Villa Cisneros pendant les décennies de la colonisation espagnole. C’est un lieu de villégiature, de poulpes, de fruits de mer et de surf ; c’est aussi un lieu de répression des Sahraouis et de disparition d’activistes. Sa position géographique ne permet qu’une seule sortie du territoire et elle est contrôlée par l’armée marocaine, qui occupe le Sahara occidental et surveille tous les mouvements dans la ville.

Pendant des années, Dakhla a été un lieu paradisiaque pour les touristes français, et le Maroc veut répéter la formule avec l’Espagne. La dictature veut utiliser le territoire occupé pour construire une station balnéaire comme Benidorm, avec une touche d’exotisme à la jordanienne. Les brochures des hôtels proposent des spectacles dans les dunes du désert, du surf dans les vagues produites par les marées dans la baie, des promenades à dos de dromadaire, et les réceptionnistes négocient des réductions pour les touristes. Les coups de la police, les enlèvements, la surveillance, les disparitions d’activistes et la ségrégation de la population sahraouie sont passés sous silence.


Photo d’un hôtel à Dakhla depuis sa plage privée. Photo Público

Les Sahraouis disparus

Mais c’est dans les profondeurs de Dakhla qu’apparaissent les témoignages les plus fous : « Mon frère a disparu depuis deux ans, il doit être mort », raconte à Público un jeune Sahraoui devant une mosquée construite par Franco pour soulager la foi des musulmans qui étaient espagnols jusqu’à ce que le gouvernement de Madrid se désengage du territoire.

Une fois dans une maison, le jeune homme sort le drapeau de la République arabe sahraouie démocratique (RASD) comme quelqu’un qui montre une bombe à deux doigts d’exploser. Brandir un drapeau sahraoui est interdit par le Maroc et constitue le plus grand geste de rébellion contre l’oppression. Le triangle rouge et le drapeau tricolore noir, blanc et vert sont accrochés dans le secret des maisons. Les graffitis sur les murs des villes sont passibles de prison, officiellement, et de coups, officieusement.

Au Maroc, comme dans l’Argentine de Videla ou le Chili de Pinochet, on ne tue pas, on disparaît. « La dictature l’a accusé d’avoir participé à un cambriolage dans la résidence du roi Mohammed VI parce qu’elle avait trouvé sur lui un billet de banque marqué, une absurdité. Ici, on ne vous arrête jamais parce que vous êtes un militant sahraoui, on cherche une autre excuse », résume-t-il dans l’un des témoignages obtenus par Público lors de son voyage dans le territoire occupé. Son père était chauffeur routier, avait la nationalité espagnole et voyageait librement en Europe, mais au cours de ces 50 années, il a perdu ses droits.


Image de la péninsule de Dakhla vue de Google Maps

Sergio García Torres, membre du CEAS, est arrivé dans la ville par le premier vol entre Madrid et Dakhla pour une expédition qui s’est terminée par son expulsion avec Público: « Le régime marocain a l’intention de transformer le territoire occupé en un apartheid touristique. Cette situation, que nous avons observée de nos propres yeux, viole non seulement les droits humains du peuple sahraoui, mais aussi les décisions des Nations unies », déclare-t-il.

L’ONU a statué que l’exploitation économique d’un territoire en attente de décolonisation doit impliquer la participation de la population autochtone et de son représentant légitime, qui dans ce cas est le Front POLISARIO. Mais le Maroc a ses propres projets. Il construit des ports sur la côte de Dakhla pour accueillir les bateaux de pêche qui exploitent des eaux qui ne leur appartiennent pas.


Image de la côte de Dakhla (Sahara occidental). En projet, la construction d'hôtels de luxe pour les touristes européens. Photo Público

Les projets du Maroc

Toute la ville est un projet d’avenir. Les chauffeurs de taxi évitent les cônes et les ronds-points en construction car, disent-ils, la route principale qui traverse la péninsule doit être transformée en autoroute à quatre voies. La journée, la ville s’endort, attendant que la chaleur lui donne un peu de répit. En plein mois de janvier, les touristes se promènent en manches courtes et les manteaux restent dans les hôtels. Les quelques restaurants ouverts proposent des tables avec vue sur la mer, tournant le dos à la ville et aux détentions illégales de Sahraouis. Le soir, la ville est la plus authentique et la plus musulmane : les magasins ouvrent, les marchés d’occasion à perte de vue inondent les rues, et l’obscurité couvre les dommages. À la périphérie de la ville, la route reliant les stations balnéaires au centre-ville traverse un éternel terrain vague, interrompu uniquement par une forteresse militaire. Le mur d’enceinte s’étend de manière imposante en un vaste campement disproportionné.

« Nous mettons en garde depuis plusieurs années contre l’utilisation par le Maroc du tourisme comme outil pour consolider et légitimer son occupation du Sahara occidental. C’est une stratégie qui est en place depuis une dizaine d’années, mais dont la mise en œuvre est devenue plus évidente ces dernières années. Ce n’est pas la seule, car elle implique également l’écoblanchiment, la promotion de l’investissement dans les territoires occupés du Sahara occidental et l’appropriation culturelle. Tout cela fait partie d’une stratégie globale qui consiste à essayer d’obtenir par les actes ce que la loi leur refuse », affirme Abdullah Arabi, représentant du Front POLISARIO en Espagne, l’organe habilité à parler au nom du peuple sahraoui dans le conflit qui l’oppose au Maroc.

Le diable est dans les détails, et dans les chambres d’hôtel de Dakhla traînent des livres d’histoire marocaine. Les melhfas sahraouies et la langue hassaniya y sont présentées comme des variantes de la culture marocaine. Tout curieux bien intentionné en sortira avec le sentiment que tout ce qui sonne saharien est marocain. La République arabe sahraouie démocratique (RASD) ou Sahara occidental est encore plus occultée que les tortures policières infligées à ses militants.

Photos de pubs touristiques pour le Samarkand

En pleine zone touristique, près du bar à touristes par excellence, le Samarkand, un Espagnol installé temporairement à Dakhla commente la vie dans la péninsule et adopte une voix d’outre-tombe pour prononcer les mots interdits : « Il y a encore des Sahraouis par ici, je les vois manifester devant le port que mon entreprise construit et ils disent que cette terre leur appartient », dit-il brièvement, pour ne pas s’attirer d’ennuis. L’homme, un Canarien qui a une fille à Tenerife, travaille dans la construction et passe de longues périodes à Dakhla sur les chantiers des ports que le Maroc construit tout au long de la côte. Peu importe ce que disent les Nations unies, peu importe ce que dit l’Union européenne, peu importe ce que dit l’Espagne, qui ne dit rien.

lundi 27 janvier 2025

Marrakech, 9 février 2025 : marche nationale contre le projet de code de procédure pénale et la corruption

Sara Ibriz, médias24, 23/1/2025

L’Association marocaine pour la protection des deniers publics organise, le 9 février à Marrakech, une marche nationale pour dénoncer la corruption et l’absence d’incrimination de l’enrichissement illicite. L’association s’oppose également à certaines dispositions du projet de code de procédure pénale, qu’elle juge susceptibles d’entraver la lutte contre les crimes financiers.


Mohamed El Ghalloussi, président de l’Association marocaine de protection des deniers publics

Le 9 février à partir de 11 heures, une “marche populaire nationale” aura lieu à Marrakech, au départ de Bab Doukkala. Le but est de protester contre la corruption de manière générale et particulièrement contre des dispositions du projet de code de procédure pénale, mais aussi contre l’absence d’incrimination de l’enrichissement illicite.

À l’initiative de cet événement, l’Association marocaine pour la protection des derniers publics qui a publié l’annonce le 18 janvier dernier.

À travers un communiqué, l’association indique qu’elle considère comme une “démarche dangereuse” la tendance actuelle à “fermer les dossiers liés à la corruption et à l’enrichissement illicite sous prétexte de préserver la stabilité économique et sociale, ce qui ne fait qu’encourager l’impunité et compromettre les engagements internationaux du Maroc en matière de lutte contre la corruption”.

L’association exprime également son “inquiétude” face au projet de code de procédure pénale, qui, selon elle, “risque d’affaiblir la poursuite des crimes liés aux deniers publics et de limiter le rôle du parquet en matière de lutte contre la corruption”.

Pour rappel, le texte a été présenté par le ministre de la Justice à la commission de justice de la Chambre des représentants, mercredi 22 janvier. Il contient des dispositions qui limitent le droit d’ester en justice des associations de protection des derniers publics.

La colère des associations concernées a conduit à un premier sit-in en septembre 2024. La marche prévue le 9 février prochain vient consolider cette position de rejet vis-à-vis des dispositions du projet de loi.


dimanche 26 janvier 2025

La guerre de la tomate : dossier SOLIDMAR

Ci-dessous un dossier sur la nouvelle phase de la guerre de la tomate entre le Maroc et les agriculteurs de l’Union européenne, en premier lieu espagnols. Traduit et assemblé par SOLIDMAR


"Ceux d’ici qui produisent là-bas sont nos ennemis"

La COAG va engager une action en justice pour fraude fiscale à l’encontre d’importateurs de tomates marocaines

COAG17/1/2025

Au cours des dernières années, la COAG* [Coordinadora de Organizaciones de Agricultores y Ganaderos, Coordination des organisations d’agriculteurs et d’éleveurs] a demandé à plusieurs reprises à la Commission européenne et aux ministères de l’Agriculture, de l’Économie et des Finances les montants réglés pour les importations agricoles en provenance du Maroc en termes de droits de douane et n’a reçu aucune réponse clarifiante à cet égard. Depuis 2019, le Maroc a dépassé d’environ 230 000 tonnes par an la limite de franchise de droits prévue par l’accord de libre-échange avec l’UE. Le montant fraudé pourrait dépasser 71 millions d’euros à partir de la saison 2019-2020, soit environ 14 millions d’euros par an. 

Madrid, 17 janvier 2025 -  La Coordination des organisations d’agriculteurs et d’éleveurs (COAG) intentera une action en justice pour fraude fiscale à l’encontre des importateurs de tomates marocaines. C’est ce qu’a déclaré le responsable du secteur des fruits et légumes de la COAG, Andrés Góngora, lors du webinaire d’information sur les implications de l’arrêt de la Cour de justice de l’UE qui déclare l’accord de libre-échange entre l’UE et le Maroc illégal parce qu’il inclut les territoires du Sahara occidental. 

L’analyse effectuée par les services techniques de la COAG montre clairement que les importations marocaines ont largement dépassé le quota de 285 000 tonnes par an de tomates en franchise de droits, à un prix minimum de 0,46 euros par kilo, qui est inclus dans l’accord susmentionné. Depuis 2019, le Maroc a dépassé la limite des droits de douane d’environ 230 000 tonnes par an.



Source : Élaboration propre à partir des données d’Eurostat, valeurs en tonnes

« Les calculs de notre recherche montrent que les entreprises qui importent des tomates du Maroc devraient payer 71,7 millions d’euros à l’Espagne au cours des cinq dernières années pour le surplus de tomates qu’elles ont introduit sur le marché européen, soit environ 14 millions d’euros par an (1) », a précisé Góngora, ajoutant que “les comptes sont aussi bienveillants que possible envers le Maroc, car les quantités qui proviennent du Sahara occidental devraient entrer dans l’UE sans les conditions préférentielles établies pour le Maroc, ce qui augmenterait les chiffres estimés”.

Dans ce sens, le responsable de la COAG a souligné la complicité de l’UE et des gouvernements espagnol et français. « Depuis 10 ans, la COAG a demandé à plusieurs reprises à la Commission européenne et aux ministères de l’Agriculture, de l’Economie et des Finances les montants payés pour les importations agricoles en provenance du Maroc en termes de droits de douane et n’a pas reçu de réponses clarifiantes.  Nous avons interrogé la Commission européenne à ce sujet, mais l’institution nous renvoie au fait qu’il est de la compétence de chaque Etat membre de contrôler les droits de douane. Le ministère de l’agriculture, de la pêche et de l’alimentation, quant à lui, nous a redirigés vers les ministères de l’économie et des finances, qui n’ont répondu que par le silence », a-t-il déclaré.

En ce qui concerne l’arrêt de la Cour de justice de l’UE qui déclare l’accord de libre-échange avec le Maroc illégal, le responsable des fruits et légumes de la COAG a demandé qu’il soit appliqué immédiatement, sans période de grâce. « Les agriculteurs européens n’ont pas bénéficié de cette période de grâce et nous souffrons jour après jour de la concurrence déloyale des importations dans les conditions pernicieuses de l’accord ». Góngora a ajouté que « si le jugement a établi que l’accord n’est pas légal, l’UE ne peut pas fermer les yeux et maintenir un accord illégal en vigueur pendant 12 mois supplémentaires, juste pour favoriser certaines entreprises transnationales, alors que nous, les producteurs, continuons à perdre en rentabilité et à disparaître ».

Dans ce sens, la COAG a également demandé au gouvernement espagnol de prendre position en faveur des producteurs agricoles, étant donné qu’ils sont les plus lésés par l’accord de libéralisation commerciale entre l’UE et le Maroc, et de faire pression sur l’UE pour qu’elle annule l’accord et élimine les graves effets qu’il a sur notre production.

Notes techniques sur le calcul

Si l’on considère les quantités exportées en dehors du contingent établi entre octobre et mai, ajoutées aux volumes entrés pendant les mois d’été, et en tenant compte des prix unitaires moyens déterminés par les autorités de l’UE pour les deux périodes, les expéditions de cette origine devraient payer 14 340 500 euros de taxes à la douane de l’UE.

Ces calculs sont basés sur les statistiques de l’UE fournies par Eurostat pour les campagnes de commercialisation de 2019/20 à 2023/24. Cela signifie qu’au cours de la période de calcul, les entreprises exportant vers le marché de l’UE auraient dû verser 71 702 500 euros dans les caisses de l’UE.

Cette quantification suppose que les quantités que le Maroc introduit dans le cadre du contingent préférentiel de 285 000 tonnes entre octobre et mai sont exemptes de taxes à la frontière et sans tenir compte du fait que les quantités provenant du Sahara occidental devraient entrer dans l’UE sans les conditions préférentielles établies pour le Maroc, ce qui augmenterait les chiffres estimés.

Les organisations marocaines menacent de poursuivre la COAG si elle dénonce ses exportateurs de tomates pour fraude 

Pedro Torres, La Bandera  23/1/2025

Elles préviennent qu’elles engageront une action en justice « si la colère passe d’une menace de poursuites judiciaires à une vague de sabotage des importations de tomates marocaines ».

Les organisations marocaines du secteur agricole menacent la Coordinadora de Organizaciones de Agricultores y Ganaderos (COAG) suite à son annonce d’engager des poursuites judiciaires pour fraude fiscale contre les importateurs de tomates marocaines qui ont dépassé, depuis 2019, la limite exonérée de 230 000 tonnes par an.

C’est ce qu’a annoncé le responsable du secteur des fruits et légumes de la COAG, Andrés Góngora, lors du webinaire informatif sur les implications de l’arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) qui déclare illégal l’accord de libre-échange entre l’UE et le Maroc pour avoir inclus les territoires du Sahara occidental.

Les Marocains ont engagé des poursuites contre les « saboteurs »

Rachid Benali, président de la Confédération marocaine de l’agriculture et du développement rural (Comader), a déclaré à « HessPress » que « l’appel de la COAG à traîner les importateurs espagnols de tomates marocaines devant les tribunaux, s’il se produit, créera un précédent. Il n’y a jamais eu de menace de la part de ce syndicat dans ce sens ».

M. Benali a ajouté que « le procès que notre Confédération a intenté contre les saboteurs (sic) en mars dernier est toujours en cours et aucune décision n’a été prise à ce sujet ».

« Si la colère passe d’une menace de poursuite à une deuxième vague de sabotage des importations de tomates marocaines, la Confédération n’hésitera pas à déposer une nouvelle plainte contre les personnes concernées », a-t-il menacé.

Évoquant le fait que « les importateurs espagnols seront mis à l’amende pour le départ des excédents de tomates marocaines », M. Benali a averti que « les professionnels sont toujours occupés à chercher de nouveaux marchés, y compris les marchés américains et brésiliens ».

Les « escarmouches des agriculteurs du voisin du nord » pour « faire pression sur leur État afin qu’il leur apporte un soutien financier »

Le président de la Fédération Interprofessionnelle des Producteurs et Exportateurs de Légumes et Fruits du Maroc, Al-Hussein Adardour, a considéré « la menace de poursuivre les importateurs espagnols comme la dernière escarmouche par laquelle les agriculteurs du voisin du nord tentent de faire pression sur leur État pour qu’il leur apporte un soutien financier ».

Adardour a affirmé dans des déclarations rapportées par « La Razón » que « ces agriculteurs tentent, depuis de nombreuses années, d’exploiter la question des importations marocaines pour réaliser des profits auto-productifs ».

« La démarche que les organisations d’agriculteurs et d’éleveurs espagnols entendent entreprendre implique une sorte de politisation habituelle. Elles ont toujours protesté contre les exportations marocaines de légumes, en particulier de tomates, et n’ont pas réussi à réduire leur nombre et leur attrait pour les importateurs espagnols », a déclaré M. Adardour.

NDLR SOLIDMAR

Les 3 organisations espagnoles d’agriculteurs :

- La Coordinadora de Organizaciones de Agricultores y Ganaderos (COAG) est la première organisation professionnelle agricole d’envergure nationale créée en Espagne (1977). La COAG trouve sa référence historique la plus lointaine dans les mobilisations paysannes qui ont eu lieu à la fin des années 1960 et au début des années 1970. Dans ces années-là, les revendications étaient fondamentalement liées aux prix agricoles. C’était l’époque des « guerres » : la guerre du piment, la guerre du maïs, la guerre du lait, la guerre de la pomme de terre, etc. La COAG est liée à Izquierda Unida, la Gauche Unie.

- L’Asociación Agraria - Jóvenes Agricultores (ASAJA), fondée en 1989 sur le modèle de la FNSEA française, liée aux partis « post-franquistes » UCD et AP (droite conservatrice).

- L’Unión de Pequeños Agricultores y Ganaderos (UPA), fondée en 1982, intégrée à l’UGT Unión General de Trabajadores (UGT), syndicat historiquement lié au PSOE.

Sur les épisodes précédents de la guerre de la tomate, lire Tomates marocaines attaquées : La COMADER satisfaite de l’action en justice en Espagne 

Exportations marocaines vers l’UE : comment la tomate résiste

Les tomates marocaines rencontrent un grand succès sur les marchés européens

Walid Ayadi, le360, 12/1/2025 

Revue de presse

Le Maroc s’impose comme un acteur clé avec une progression impressionnante de 72,71% de ses ventes au cours de la dernière décennie, tandis que les Pays-Bas et l’Espagne, historiquement dominants, voient leurs exportations diminuer. Cet article est une revue de presse tirée du quotidien L’Économiste.