Dean Shmuel Elmas, Globes
10/7/2024
Traduit par SOLIDMAR
« Globes » se penche sur les principaux systèmes de défense israéliens achetés par le Maroc, avec en point d’orgue un accord d’un milliard de dollars avec IAI, dont les médias étrangers rapportent qu’il concerne les satellites espions Ofek.
Hier 9 juillet 2024, Israel Aerospace Industries (IAI) a
annoncé un accord d’une valeur d’un milliard de dollars sur cinq ans avec une
tierce partie dont le nom n’a pas été révélé. Les médias étrangers ont déclaré
que l’accord portait sur des satellites, dont les premières informations ont
été publiées l’année dernière. La présence du président de l’IAI, Amir Peretz*,
au Maroc lors de l’annonce de l’accord a alimenté ces informations.
Le Maroc est l’un des pays arabes
qui ont normalisé leurs relations avec Israël dans le cadre des accords d’Abraham
en 2020. Son influence sur l’industrie de la défense israélienne a été des plus
significatives. Selon l’Institut international de recherche sur la paix de
Stockholm (SIPRI), entre 2019 et 2023, Israël était le neuvième exportateur
mondial d’équipements de défense. Le SIPRI a constaté que même si le Maroc et
Israël n’ont normalisé leurs relations qu’en décembre 2020, Israël occupait
déjà la troisième place en termes d’importations de défense du Maroc,
fournissant 11 % de ses besoins.
Les défis du Maroc
Depuis que Peretz a été nommé
président de l’IAI, l’entreprise est devenue un acteur très important de l’industrie
de la défense au Maroc. Le SIPRI a rapporté il y a six mois que le Maroc
voulait acheter à Israël deux satellites d’espionnage Ofek 13. Ces satellites d’observation
sont considérés comme l’un des meilleurs au monde et sont utilisés par l’unité
de renseignement 9900 de Tsahal, qui est responsable de la collecte et de l’extraction
de renseignements visuels et géographiques.
Cette transaction est
intéressante dans le contexte de la concurrence commerciale entre les grandes
entreprises de défense israéliennes et françaises. Le Maroc a préféré le
satellite Ofek 13 à ceux d’Airbus et de Thales, ses précédents fournisseurs
dans ce domaine. Quelques mois plus tard, le président français Emmanuel Macron
a décidé de tenir les entreprises israéliennes à l’écart du prestigieux salon
de la défense et de l’aérospatiale Eurosatory à Paris.
Bien que la France ait attribué
cette décision à la guerre à Gaza, on peut supposer que des considérations
politico-économiques étaient également à l’origine de cette décision. Le
président français a probablement été influencé par la vente historique du
système de défense aérienne à longue portée Arrow 3 à l’Allemagne pour 3,5
milliards de dollars, et du système de défense aérienne à moyenne portée David’s
Sling de Rafael à la Finlande pour 316 millions d’euros. Ces contrats ont
permis aux technologies israéliennes de faire la une des journaux et,
contrairement à la plupart des systèmes français, elles ont fait leurs preuves
sur le champ de bataille.
Ce dernier contrat vient s’ajouter
aux nombreux contrats signés par Israël avec le Maroc. IAI a vendu le système
de défense aérienne Barak MX au Maroc en 2022 pour 540 millions de dollars. Le
système comprend trois intercepteurs : le Barak MRAD d’une portée de 35
kilomètres, le Barak LRAD d’une portée de 70 kilomètres et le Barak ER d’une
portée de 150 kilomètres. Le site web « Intelligence Online » a également
rapporté l’année dernière qu’IAI avait achevé la livraison de trois drones
Heron 1 au Maroc. Ce contrat de 48 millions de dollars est inhabituel car il a
été signé en 2014, par le biais d’une coentreprise entre IAI et Airbus.
Un autre acteur important dans le
domaine des achats de défense au Maroc est BlueBird Aero Systems, dans lequel
IAI détient une participation de 50 % depuis 2020. Ces dernières années,
BlueBird a fourni divers produits au Maroc, tels que la munition rôdeuse [téléopérée]
SpyX, ainsi que WonderB et ThunderB - des systèmes sans pilote qui décollent et
atterrissent verticalement. Ronen Nadir, PDG de BlueBird, a déclaré au site web
« ZM » en avril que la société avait même mis en place une usine de production
au Maroc, qui devrait commencer à fonctionner bientôt.
Sur le plan de la géopolitique
régionale, les nombreux achats de défense du Maroc auprès d’Israël ont plus que
jamais constitué un défi pour Rabat au cours des derniers mois. Cependant, le
Maroc doit faire face à d’importants défis sécuritaires, notamment en ce qui
concerne le Sahara occidental et son voisin oriental, l’Algérie, qui est un ami
proche et de longue date des organisations terroristes palestiniennes.
En juillet 2023, lors de l’opération
de Tsahal dans le camp de réfugiés de Jénine, un haut responsable du Hamas,
Khaled Mechal, s’est exprimé à la Grande Mosquée d’Alger et a félicité l’Algérie
pour sa « position héroïque dans la lutte palestinienne » à Jénine. Dans le
même temps, le président algérien Abdelmajid Tebboune a annoncé l’octroi de 30
millions de dollars pour la reconstruction après les dégâts à Jénine.
L’Algérie est également l’un des
principaux soutiens du Front Polisario, qui lutte pour l’indépendance du Sahara
occidental vis-à-vis du Maroc. Israël, quant à lui, a officiellement annoncé l’année
dernière qu’il reconnaissait la souveraineté marocaine au Sahara occidental.
Les détracteurs du Maroc sur la
question du Sahara occidental se sont récemment efforcés de mettre en évidence
l’utilisation de missiles israéliens pendant la guerre à Gaza. Le journal
français de gauche « L’Humanité » a rapporté il y a quatre mois que l’armée
marocaine opère à partir d’une base à l’aéroport de Smara au Sahara occidental
en utilisant des drones Hermes 900 et Hermes 450 d’Elbit Systems. Ces mêmes
drones sont également utilisés par Israël aujourd’hui à Gaza.
L’année dernière, le site web «
Intercept » a publié une
information émanant de de Federico Borsari, chercheur spécialisé dans les
technologies sans pilote au Center for European Policy Analysis (CEPA). Selon
Borsari, le Maroc possède environ 150 avions à décollage vertical (WonderB,
ThunderB et SpyX de Blue Bird), trois drones Heron d’IAI et des munitions rôdeuses
Harop d’IAI, ainsi que quatre drones Hermes d’Elbit Systems.
Pas seulement des armes
La coopération israélo-marocaine
en matière de sécurité ne se limite pas à l’armement. Comme l’a révélé « Globes
», la nouvelle péniche de débarquement de Tsahal, l’INS Komemiyut, est arrivée
en Israël il y a environ un mois en provenance des USA - après une escale au
Maroc pour le ravitaillement en carburant pendant le long voyage du navire de
Pascagoula, dans le Mississippi, à la base navale de Haïfa. À Tanger, l’équipage
a fait le plein de carburant et de nourriture afin de poursuivre sa route vers
Israël.
Un autre domaine dans lequel les
deux pays et les entreprises de défense sont impliqués est celui de la
recherche. L’année dernière, IAI a signé un protocole d’accord avec l’Université
Internationale de Rabat (UIR) pour établir un centre d’excellence dans les
domaines de l’aéronautique, de l’intelligence artificielle et de l’innovation.
NDLT
*Amir Peretz est né en 1952 à Boujaâd au Maroc, dont il a gardé la nationalité. Lire Des avocats marocains attaquent Peretz (2006)
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