On trouvera ci-dessous un résumé en français du débat (original anglais ici).
Parlement européen – 6 octobre 2025
Audition de la Commission
européenne – Comité du commerce international (INTA)
Objet :
Échange de vues avec la
Commission européenne sur la conclusion, au nom de l’Union européenne, de
l’accord sous forme d’échange de lettres concernant la modification des
protocoles 1 et 4 de l’accord d’association euro-méditerranéen entre les
Communautés européennes et le Royaume du Maroc.
Intervenants :
Bernd Lange, Lynn Boylan,
Kathleen Van Brempt, Juan Ignacio Zoido Álvarez, Thierry Mariani, Nicholas Bay,
Marie-Pierre Vedrenne, Vicent Marzà Ibáñez, Carmen Crespo Díaz, Céline Imart,
Javier Moreno Sánchez, Lukas Sieper, Saskia Bricmont, Udo Bullmann, Mireia
Borrás Pabón, Ana Miranda.
Pour la Commission européenne :
Valeria Miceli (DG TAXUD, cheffe de l’unité Commerce international),
Isabel García Catalán (DG TAXUD, cheffe de l’unité Règles d’origine),
Florian Ermacora (DG MENA, chef d’unité Maroc-Algérie-Tunisie-Libye).
Ouverture de la séance
Bernd Lange,
président de la commission INTA (S&D, Allemagne) :
« Le dernier point de notre
ordre du jour concerne l’échange de vues avec la Commission sur sa proposition
de décision du Conseil relative à la conclusion de l’accord avec le Maroc sous
forme d’échange de lettres modifiant les protocoles 1 et 4.
Nous en avions déjà discuté le 2 décembre dernier, après l’arrêt de la Cour de
justice de l’Union européenne du 4 octobre 2024 sur l’application de l’accord
au Sahara occidental.
La Cour a répété qu’il fallait le consentement du peuple sahraoui et que
les produits originaires du Sahara occidental devaient être clairement
étiquetés.
Or, la Commission n’a pas respecté cet arrêt.
J’ai appris il y a dix jours qu’un nouvel accord avait été signé sans
explication claire et, pire encore, appliqué provisoirement sans le
consentement du Parlement européen.
C’est contraire à tous les engagements pris par les précédents commissaires au
commerce et au cadre interinstitutionnel récemment adopté. »
Présentation de la Commission
européenne
Valeria Miceli (DG TAXUD)
Elle décrit le processus :
- L’arrêt du 4 octobre 2024 a annulé la
décision du Conseil de 2018 tout en maintenant ses effets pendant un an.
- Durant cette période, la Commission a
analysé les implications juridiques et, en juillet 2025, reçu un signal
politique du Maroc ouvrant la voie à de nouvelles négociations.
- Le 22 juillet 2025, la Commission a
recommandé au Conseil d’ouvrir des négociations.
- Le 10 septembre, le Conseil a
autorisé l’ouverture des négociations, qui ont immédiatement débuté.
- Le 18 septembre, la Commission a
adopté la proposition d’accord, suivie de la signature et de
l’application provisoire le 3 octobre 2025.
Isabel García Catalán (DG TAXUD
– Règles d’origine)
Elle précise le contenu
juridique :
- Les produits originaires du Sahara
occidental bénéficient désormais des mêmes préférences tarifaires
que ceux du Maroc.
- Le texte introduit l’identification
obligatoire de la région de production (Dakhla, Laâyoune) sur
les certificats d’origine, les déclarations de factures et les étiquettes.
- Les autorités marocaines pourront
délivrer les certificats de conformité pour ces produits.
- Un mécanisme d’évaluation et
d’échanges d’informations est prévu par le Comité d’association UE-Maroc.
- Une modification du règlement délégué
sur l’étiquetage des fruits et légumes est envisagée.
Florian Ermacora (DG MENA)
Il aborde la question du consentement
du peuple sahraoui :
- Le consentement peut être explicite ou
implicite, selon la CJUE.
- Le consentement implicite peut être présumé
si l’accord ne crée pas d’obligation pour le peuple du Sahara et
s’il leur procure des avantages concrets, substantiels, proportionnels
et vérifiables, dans le respect du développement durable.
- L’Union européenne s’engage, par une déclaration,
à financer :
- des projets dans les secteurs de l’eau
et de l’énergie au Sahara occidental,
- une aide humanitaire aux Sahraouis
des camps de Tindouf,
- des programmes éducatifs et culturels
pour les Sahraouis vivant ailleurs.
- Un mécanisme de contrôle régulier
vérifiera que les bénéfices atteignent effectivement les Sahraouis.
Débat parlementaire
Lynn Boylan (La Gauche, Irlande)
- Dénonce le manque de transparence et
l’exclusion du Parlement.
- S’interroge sur la vitesse des
négociations (8 jours entre mandat et conclusion).
- Estime que le financement de la région
pourrait renforcer l’occupation marocaine.
- Demande si une évaluation d’impact a
été réalisée sur le processus de référendum de l’ONU.
Juan Ignacio Zoido Álvarez (PPE, Espagne)
- Salue la nécessité de combler un vide
juridique, mais demande une surveillance rigoureuse des produits
sensibles (tomates).
- Souligne que la transparence est
indispensable pour la confiance mutuelle.
Kathleen Van Brempt (S&D, Belgique)
- Accuse la Commission d’avoir agi sans
plan B et ignoré le Parlement.
- Remet en cause la méthodologie du
prétendu consentement sahraoui.
- Juge le mécanisme de mise en œuvre
insuffisant et proche de l’accord de 2018.
Thierry Mariani (Patriotes pour
l’Europe, France)
- Défend la position marocaine et qualifie le Front
Polisario d’organisation illégitime soutenue par l’Algérie.
- Salue l’accord comme garant de stabilité
et de coopération antiterroriste.
Nicholas Bay (ECR, France)
- Dénonce la CJUE pour avoir « cédé à
la gauche et au Polisario ».
- Vante la fiabilité du Maroc et ses standards
d’étiquetage.
- Condamne les attaques contre la souveraineté
marocaine.
Marie-Pierre Vedrenne (Renew,
France)
- Soutient que l’accord permet aux Sahraouis
de bénéficier des ressources locales.
- Rappelle néanmoins que la Commission ne doit
pas marginaliser le Parlement.
Vicent Marzà Ibáñez (Verts/ALE,
Espagne)
- Dénonce un accord contraire à la décision
de justice et appliqué sans débat.
- Exige que les étiquettes mentionnent
explicitement “Sahara occidental”.
- Condamne la procédure d’application
provisoire.
Carmen Crespo Díaz (PPE,
Espagne)
- Rappelle la fin de l’accord de pêche en 2023
et critique la perte des quotas agricoles.
- Demande des clauses de sauvegarde
automatiques et le respect de l’article 218 du TFUE.
Céline Imart (PPE, France)
- Met en garde contre une invasion de
tomates marocaines (+55 % en dix ans).
- Exige des quotas, tarifs et clauses de
protection pour les producteurs européens.
Javier Moreno Sánchez (S&D,
Espagne)
- Demande des chiffres précis sur les fonds
destinés aux Sahraouis et sur les aides humanitaires.
- Insiste sur la nécessité de respecter le droit international.
Lukas Sieper (Indépendant,
Allemagne)
- Fustige le déficit démocratique de la
Commission.
- Appelle à une coopération
institutionnelle transparente pour restaurer la confiance citoyenne.
Saskia Bricmont (Verts/ALE,
Belgique)
- Accuse la Commission d’être hors la loi
internationale en ignorant le consentement sahraoui.
- Met en garde contre le financement
d’entreprises colonisatrices.
- Exige la mention « Sahara occidental »
sur les étiquettes et une place pour les Sahraouis dans les groupes
consultatifs.
Udo Bullmann (S&D,
Allemagne)
- Dénonce une violation flagrante des
droits du Parlement et exige que cela ne se reproduise plus.
Mireia Borrás Pabón (PfE,
Espagne)
- Juge l’accord contraire à l’arrêt de la
CJUE et dommageable pour les agriculteurs européens.
- Réitère : les étiquettes doivent
mentionner “Sahara occidental”.
Ana Miranda (La Gauche, Espagne)
- Condamne un accord négocié secrètement
sans consultation du Parlement ni du Front Polisario, représentant
légitime des Sahraouis selon le droit international.
Réponses de la Commission
Isabel García Catalán
- Explique la brièveté des négociations par la
pression politique et les délais.
- Précise que la région d’origine sera
identifiée “en expédition par expédition”, permettant des
statistiques séparées pour le Maroc et le Sahara occidental.
- Les exportations concernent environ 600
millions d’euros, dont 500 millions pour le poisson et le
reste pour tomates et melons.
Florian Ermacora
- Justifie la notion de consentement
implicite, conforme à la jurisprudence.
- Détaille un mécanisme de suivi :
- évaluation des ressources naturelles
exploitées,
- suivi des financements et de leur distribution,
- contrôle de l’arrivée effective des bénéfices
aux Sahraouis.
- L’aide humanitaire aux camps de Tindouf est
d’environ 9 millions d’euros par an.
Valeria Miceli (conclusion)
« La Commission européenne
respecte le rôle du Parlement et transmettra prochainement la proposition de
conclusion de l’accord pour examen. »
Bernd Lange (clôture)
« Merci pour vos explications,
mais vous transmettrez à vos supérieurs que le président, tout comme nombre de
mes collègues, est profondément insatisfait de la procédure. »


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