Par Ali Amar 02.12.2017 le Desk n°244.
El Mortada Lamrachen, figure du Hirak rifain, a été condamné à cinq ans
de prison ferme sur des accusations kafkaïennes. Le Desk avait démontré
les tenants de cette vengeance d’Etat. Il faut aujourd’hui nous
interroger sur cette justice d’abattage et exiger des comptes à nos
gouvernants, pour notre bien commun
Je peux valablement dire que
je connais l’homme, ses principes, son engagement, ses idées et ses
valeurs pour l’avoir côtoyé des mois durant.
Oui, il a été
salafiste par le passé, comme d’autres ont été gauchistes
révolutionnaires et antimonarchistes, so what ? C’est leur passé, voire
leur présent de militants pour des causes que la société marocaine et
les événements du monde ont forgées dans l’esprit de nos concitoyens. Je
ne partage pas certaines de leurs idées, l’islamisme en particulier,
mais je salue pour beaucoup leur prise de conscience politique, alors
que la majorité d’entre nous se complait dans sa zone de confort, aussi
ténue soit-elle. Rasons les murs, abreuvons-nous du conservatisme
ambiant, c’est là où réside toute notre défaite d’hommes vertébrés et
supposément libres.
El Mortada n’a pas trente ans. Il a grandi à
Al Hoceima, dans ce Rif martyrisé, dans un environnement où l’accès à
une vie décente et au savoir est un combat de tous les jours, souvent
perdu d’avance. Le roi en a constaté les plaies béantes avec le rapport
Jettou, mais aussi des années auparavant, ayant pris pleine conscience
de ce gâchis à son accession au trône lorsqu’il a entrepris à sa manière
de briser l’enfermement de cette région, maudite par son père pour les
raisons historiques que l’on sait. Il a cependant donné blanc-seing aux
sécuritaires à l’aune de la crise sociale d’Al Hoceima, alors que tout
démontre que leur gestion a été aussi pathétique, catastrophique que
dangereuse.
J’ai, aux prémisses de la mise au pilori d’El
Mortada, démontré que les accusations qui l’accablaient étaient
fallacieuses, montées de toutes pièces par les tenants de la vengeance
d’Etat et de leurs suppôts médiatiques. Ceux qui malmènent les figures
du Hirak, ceux qui se jouent de leur vie, de leur engagement, ceux aussi
et surtout qui en font un commerce détestable ont été épargnés, et même
plus, ont gagné en galon en fustigeant la contestation.
La
veille de son audience et de sa condamnation aussi choquante
qu’inattendue pour terrorisme, El Mortada était mon hôte à domicile,
affable et courtois comme à son habitude. Moi, le « moderne », mon verre
de whisky à la main, lui « le barbu » sirotant son thé, nous avons,
cette soirée, brièvement parlé du fracas du monde. Je parle de cette
scène, non pas pour débattre de nos choix de vie en particulier, mais
pour vous questionner justement sur ce que vous pensez de la modernité.
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