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jeudi 22 février 2018

Mohamed El Ayoubi, l'un des condamnés sahraouis de Gdeim Izik, est mort

Le Sahraoui Mohamed El Ayoubi,  l'un des 24 prisonniers de Gdeim Izik, est décédé cet après-midi à El Ayoune.
Il avait été condamné à 20 ans dans un procès militaire si absurde que la justice marocaine elle-même l'avait annulé, exigeant la tenue d'un nouveau procès. Il a été libéré pour éviter qu’il meure en prison :  ses maladies graves - diabète et hépatite B - n'avaient pas été soignées par ses geôliers et la torture avait aggravé son état de santé. Dès la sortie de prison d’El Ayoubi, un riche Sahraoui a financé le traitement de dialyse dont il avait besoin.
El Ayoubi avait déjà été emprisonné à trois autres occasions.
Malgré son état de santé, il avait dû assister au deuxième procès - une nouvelle farce - qui s'est déroulé en 2017 dans la ville de Salé (Maroc), loin du Sahara Occidental où avaient eu lieu les événements dont il était accusé : constitution de bande criminelle, violence contre des  agents de l'ordre public dans l'exercice de leurs fonctions ayant entraîné leur mort.
Il a témoigné au procès qu'il avait acheté une petite tente et qu'il l'avait installée dans le camp de Gdeim Izik. "Je suis un homme simple. Je ne suis pas allé à Gdeim Izik pour commettre des actes de violence, mais j'ai été l’objet de violences".  Il a calmement répondu  à l'ensemble des questions de l'accusation, s'il avait vu des armes à lame, avec qui il avait frayé, s'il avait conduit un bus pour attaquer l'armée ...  "Mais SI je ne sais même pas conduire. Dans le procès-verbal, ils ont écrit ce qu'ils voulaient. Ils m'ont attrapé la main et m’ont forcé à signer de mon empreinte. "
Il a déclaré qu'ils l'ont violé durant le démantèlement du camp, qu'ils l'ont frappé si fort dans les parties génitales qu'elles ont été brisées. Il saignait de l'entrejambe. "J'ai perdu ma virilité." "Ils m'ont menotté, ils ont couvert mon visage de crachats, ils ont uriné sur moi. Ils m'ont jeté dessus un seau d’ordures et d'eau sale. Ils m'ont humilié. Ils m'ont cassé l'épaule. " C'est ainsi qu’il relata sa détention. Au procès, le tribunal n'a pas consenti à une inspection de traces de torture parce qu'il n'était pas détenu. Bien que cet examen supposé n’ait servi à rien dans les autres cas. Aucune torture n'a été détectée.
El Ayoubi a été amené à témoigner dans ce deuxième procès, mais il n'a pas été jugé avec les autres. Ils l'ont fait plusieurs mois plus tard, sans observateurs, le 21 décembre 2017. Personne n’était au courant de  cette audience, pas même El Ayoubi. Il a écopé de nouveau de 20 ans, condamnation qui  n'a pas été exécutée vu son état de santé fragile.
Le 22 janvier, il a été amputé de deux orteils. Il a été dans le coma pendant un moment. A l'hôpital "Ils l'avaient abandonné, sans aucun intérêt".
Les prisonniers continuent d'être torturés et la communauté internationale ne réagit toujours pas. Depuis novembre 2010, les prisonniers de Gdeim Izik souffrent de conditions épouvantables, à la merci de leurs tortionnaires. Et ils sont séparés les uns des autres, loin de leurs familles, loin de leurs avocats et ont des problèmes de visites. Ils sont isolés pour cacher leur situation difficile. Ce n'est pas le premier prisonnier sahraoui à mourir de la torture au Maroc, mais il est le premier à tomber du groupe de Gdeim Izik, un groupe compact avec une intégrité et un courage admirables. Il faut que quelque chose change: qu'au moins la mort d'El Ayoubi soit un déclencheur pour exiger le respect des  droits humains par le Maroc, en tant que premier pas vers l'autodétermination.
Il a beaucoup souffert. On ne peut qu’éprouver rage et tristesse pour la perte de cet homme dont le crime était d’être Sahraoui.
Je reproduis ici un texte reçu d'une militante sahraouie :
"Gloire et honneur au camarade Aayubi. Condamné après les événements de Gdeim Izik, il vient de mourir en raison de son état de santé détérioré. Après des détentions, des mauvais traitements, des tortures de toutes sortes et des violations commises par les forces coloniales de Mohamed VI, il était dans un état physique mortel et purgeait sa condamnation hors de la prison. "
 
Source : Tlaxcala

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