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lundi 15 octobre 2018

Maroc : Face à la faillite politique, ne reste que la protestation


Société, 13/10/2018


Face à un champ politique sclérosé et à un espace public contrôlé, les Marocains expriment leur insatisfaction sur les réseaux sociaux. Est-ce à dire que la colère est simplement «virtuelle» ? Rien n'est moins sûr, car plusieurs basculements se sont produits.

L’histoire du taureau blanc est ancestrale. Trois taureaux – blanc, rouge et noir – ont pu mettre en fuite un lion aussi longtemps qu’ils ont coalisé leurs forces. N’ayant réussi à les attaquer de front, le lion a approché les taureaux rouge et noir, et les a persuadés qu’il n’en avait que contre le taureau blanc. «Si vous me laissez le manger, nous vivrons en paix», a promis le lion. Son vœu lui a été accordé par les taureaux rouge et noir. Quelques jours plus tard, c’est au tour du taureau rouge, puis noir, qui s’est écrié avant de tomber sous les griffes du lion : «J’ai été mangé le jour où le taureau blanc a été mangé.»
«Je dis aux Marocains […] que vous avez laissé tomber le Rif. Aujourd’hui, nous vous appelons à nous soutenir. L’histoire jugera ceux qui ont déserté [les luttes]», a martelé le coordinateur des habitants des bidonvilles face à une caméra. La vidéo a été visionnée plus de 400 000 fois.
L'intérêt de plus en plus soutenu des Marocains pour les mobilisations, même très locales, ainsi que leur changement de ton vis-à-vis du roi, dit toute une mutation de l’attitude de la société marocaine. Chaque système politique comporte des seuils et des niveaux de violence. Une fois que cette violence dépasse son seuil routinier, elle peut produire une rupture. De toute évidence, le décès de Hayat en a été une. L’usage des armes à feu par la police est très régulé, et il est rare que l’armée marocaine se confronte à des ressortissants de son pays. Ce drame a provoqué des réactions vives. A cette rupture, a répondu en miroir une autre, qui s'est exprimée du côté des Marocains, de sorte qu'on assiste, depuis quelques semaines, à un déferlement de critiques vis-à-vis de l’institution monarchique. Au royaume, plus que des lignes rouges qui, une fois dépassées, font s’abattre une coercition cinglante – les arrestations liées à la critique du roi ont baissé ces dernières années –, c’est bien plutôt un impératif de la modération intériorisé par les Marocains qui conduit à l’autolimitation des discours et des revendications. Mais le décès de Hayat Belkacem semble avoir fait voler en éclats cette barrière.
 
Lire l'article : https://www.yabiladi.com/articles/details/69829/maroc-face-faillite-politique-reste.html



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