Société, 13/10/2018
Lire l'article : https://www.yabiladi.com/articles/details/69829/maroc-face-faillite-politique-reste.html
Face à un
champ politique sclérosé et à un espace public contrôlé, les Marocains
expriment leur insatisfaction sur les réseaux sociaux. Est-ce à dire que la
colère est simplement «virtuelle» ? Rien n'est moins sûr, car
plusieurs basculements se sont produits.
L’histoire
du taureau blanc est ancestrale. Trois taureaux – blanc, rouge et noir – ont pu
mettre en fuite un lion aussi longtemps qu’ils ont coalisé leurs forces. N’ayant
réussi à les attaquer de front, le lion a approché les taureaux rouge et noir,
et les a persuadés qu’il n’en avait que contre le taureau blanc. «Si vous me
laissez le manger, nous vivrons en paix», a promis le lion. Son vœu lui a été
accordé par les taureaux rouge et noir. Quelques jours plus tard, c’est au tour
du taureau rouge, puis noir, qui s’est écrié avant de tomber sous les griffes
du lion : «J’ai été mangé le jour où le taureau blanc a été mangé.»
«Je dis aux
Marocains […] que vous avez laissé tomber le Rif. Aujourd’hui, nous vous
appelons à nous soutenir. L’histoire jugera ceux qui ont déserté [les luttes]»,
a martelé le coordinateur des habitants des bidonvilles face à une caméra. La
vidéo a été visionnée plus de 400 000 fois.
L'intérêt de
plus en plus soutenu des Marocains pour les mobilisations, même très
locales, ainsi que leur changement de ton vis-à-vis du roi, dit toute
une mutation de l’attitude de la société marocaine. Chaque système politique
comporte des seuils et des niveaux de violence. Une fois que cette violence
dépasse son seuil routinier, elle peut produire une rupture. De toute évidence,
le décès de Hayat en a été une. L’usage des armes à feu par la police est très
régulé, et il est rare que l’armée marocaine se confronte à des ressortissants
de son pays. Ce drame a provoqué des réactions vives. A cette rupture, a
répondu en miroir une autre, qui s'est exprimée du côté des Marocains, de sorte
qu'on assiste, depuis quelques semaines, à un déferlement de critiques
vis-à-vis de l’institution monarchique. Au royaume, plus que des lignes rouges
qui, une fois dépassées, font s’abattre une coercition cinglante – les
arrestations liées à la critique du roi ont baissé ces dernières années –,
c’est bien plutôt un impératif de la modération intériorisé par les
Marocains qui conduit à l’autolimitation des discours et des revendications.
Mais le décès de Hayat Belkacem semble avoir fait voler en éclats cette
barrière.Lire l'article : https://www.yabiladi.com/articles/details/69829/maroc-face-faillite-politique-reste.html
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