Criminalisation.
Il . Domenico Lucano, ancien maire du village italien de
Riace, en Calabre, a comparu ce mardi pour le premier jour de son
procès. Il est soupçonné d’« aide à l’immigration clandestine »,
d’irrégularités dans l'attribution de financements pour le ramassage des
ordures, et d'organisation de mariages blancs.
Cet
homme, dont l’engagement en faveur de l’accueil des migrants remonte à
la fin des années 1990, lorsqu’une embarcation de Kurdes a échoué sur
une plage à 7 km du village, était dans le viseur des autorités italiennes
depuis l’arrivée au ministère de l’intérieur de Matteo Salvini, le
tonitruant patron de la Ligue, parti nationaliste et xénophobe. En
octobre, il avait été arrêté, suspendu de sa fonction à la tête de la
municipalité, puis interdit de résider sur place.
En
exil, Domenico Lucano a bénéficié d’un impressionnant mouvement de
soutien à travers l’Italie. Manifestations, pétitions, invitations à des
conférences… Avec lui, une figure de ralliement de l’opposition à
Salvini était en train d’émerger, racontait à l'automne notre correspondante en Italie.
Mais aux élections locales qui se sont tenues le même jour que les européennes, sa liste a échoué. Suivant la tendance générale dans le pays, c’est un candidat soutenu par la Ligue qui lui a ravi la place, mettant un point final à trois mandats à la tête de Riace.
Une
page se tourne pour le modèle d’intégration qu’incarnait ce village de
2000 habitants, déserté par ses forces vives parties travailler dans le
nord du pays : Lucano avait réussi, au fil des années, à accueillir et à
loger dignement de nombreuses personnes originaires d’Afrique noire,
qui s’étaient insérées dans le tissu économique local et avaient
contribué à la résurgences de savoir-faire artisanaux.
Une
page se tourne aussi pour l’engagement auprès des réfugiés. Après la
criminalisation des ONG et des citoyens ici et là en Europe, les
poursuites judiciaires pesant sur Lucano pourraient bien ouvrir le
triste chapitre de la criminalisation des élus.
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