Tribune. Depuis l’adoption de la loi asile et immigration du 10 septembre 2018, les mesures de répression se sont renforcées pour tenter d’éloigner toujours plus les personnes étrangères de notre pays. Parmi les dispositions les plus choquantes : le doublement de la durée maximale de rétention, passant de 45 à 90 jours. Aucun gouvernement français n’avait jusque-là proposé une telle durée de privation de liberté pour décourager les demandeurs d’asiles.
Plus grave encore, cette politique répressive continue de s’appliquer aux mineurs. En 2018, 208 enfants étrangers ont été enfermés dans des centres de rétention administrative en France métropolitaine. En zone d’attente en 2018, uniquement pour l’aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle, 513 mineurs ont été enfermés, dont 134 mineurs isolés.
La situation est si alarmante, que le 25 avril dernier, l’Unicef et 17 organisations lançaient un appel pour dénoncer les conséquences dramatiques de l’enfermement sur les mineurs. En effet, dans les centres de rétention et dans les zones d’attente, ces enfants par essence vulnérables sont délibérément privés de leurs droits et exposés à des formes de violence qui les marquent durablement. Enfermer ces enfants, même sur une courte durée, c’est les exposer à de graves traumatismes physiques et psychologiques.
Dans cette folie sécuritaire, le gouvernement a oublié un principe fondamental : avant d’être des étrangers, ce sont des enfants que notre pays se doit de protéger. Au-delà de l’humanisme le plus évident, dont la France entend être le phare mondial, il en va également du respect du droit international.
La France, signataire de la Convention internationale des droits de l’enfant, s’est engagée à faire primer l’intérêt supérieur de l’enfant sur toute autre considération. La République se rend ici coupable d’une violation caractérisée des droits de l’enfant comme en attestent les six condamnations, prononcées par la Cour européenne des droits de l’homme depuis 2012 à l’endroit de la France pour des mesures d’enfermement de mineurs.
Pourtant, nous pourrions faire le choix d’un accueil digne, en apportant à ces enfants un accès rapide et effectif à leurs droits, en faisant de la protection de l’enfance une priorité et en aidant les départements à renforcer les moyens dédiés à l’aide sociale à l’enfance actuellement à bout de souffle.
Mais il n’en est rien… La seule réponse apportée aujourd’hui par l’Etat est une fermeté aveugle destinée à durcir de manière abusive la procédure d’évaluation des personnes se déclarant mineures et privées de la protection de leur famille. Des procédures à plusieurs reprises invalidées par les tribunaux mettant en évidence le caractère douteux des méthodes utilisées comme les tests osseux.
Le quotidien des mineurs étrangers – toujours suspectés plutôt que d’être protégés – dans notre pays est révoltant. La violence institutionnelle subie pour obtenir la reconnaissance de leur minorité combinée aux difficultés d’accès à leurs droits (hébergement, formation, conditions d’accueil dignes…) ne font que nourrir un sentiment d’injustice et d’abandon.
Les auteurs de cette tribune demandent au gouvernement de se conformer sans délai aux engagements de la Convention internationale des droits de l’enfant, en interdisant l’enfermement des mineurs et en garantissant un accès effectif à leurs droits.