La France n’a jamais réagi publiquement à l’utilisation, par le royaume du Maroc, du logiciel d’espionnage israélien Pegasus.
Nonobstant quelques querelles diplomatiques passagères, Paris entretient historiquement des relations de complaisance avec Rabat. Compromis et proximité institutionnelle au mépris des droits de l'homme. De petits arrangements entre amis, que dénonce le député havrais, Jean-Paul Lecoq, qui a accusé le gouvernement français d'être à la solde du Makhzen et des puissants lobbys internationaux.
Le député communiste français n'y est, franchement, pas allé avec le dos de la cuillère, dans la question posée au Premier ministre, Jean Castex, sur les plaintes en diffamation déposées par le roi du Maroc contre Mediapart, Le Monde, Radio France et L'Humanité, pour avoir révélé ou dénoncé l'affaire Pegasus. Le tribunal de Paris examinera, le 6 décembre la recevabilité des poursuites engagées par le royaume du Maroc. Anticipant la réponse du Premier ministre - le gouvernement ne commente pas les actions en justice- Jean-Paul Lecoq a qualifié l'affaire de «sujet totalement politique». Politique, car estime le député havrais, à juste raison, qu'au regard de son importance et des terribles répercussions qu'elle pourrait induire sur la liberté de la presse, «depuis la Révolution française, il est rarissime qu'un État étranger dépose plainte contre des médias français, pour les faire taire». Et de rappeler que «six plaintes, sur les sept qui ont été déposées depuis la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, dont l'article 11 garantit la liberté de la presse, l'ont été par le royaume du Maroc». Sic!
Sur sa lancée, Jean-Paul Lecoq dénonce le «silence politique» de Paris qui «n'a jamais réagi publiquement à l'utilisation, par le royaume du Maroc, du logiciel d'espionnage israélien Pegasus, contre des journalistes et des élus, au plus haut niveau de la République française». Normal, Paris sait mettre les petits plats dans les grands. Et s'asseoir sur les droits de l'homme. La passion française pour le Maroc ne date pas d'aujourd'hui, malgré quelques brouilles diplomatiques passagères. Très remonté contre le Premier ministre, Jean-Paul Lecoq assène que la majorité au gouvernement semble plus prompte à protéger le secret des affaires que la liberté de la presse.
D'ailleurs, il note que «rares sont les députés, notamment ceux de la majorité, qui se sont, eux aussi, indignés de ces scandales», avant de s'interroger: «D'où vient cette absence de réaction? D'où vient ce silence complice, qui laisse les coudées franches à ces États qui peuvent faire ce qu'ils veulent de la Palestine et du Sahara occidental, au mépris total du droit international? Est-ce à cause des voyages de complaisance proposés par le Maroc ou par l'entreprise Elnet, en Israël, que les ministres et les parlementaires n'osent même plus - ou ne peuvent même plus - s'indigner face aux actions insupportables de ces États?». Une manière de souligner que la France s'est toujours pliée aux injonctions de Rabat. En effet, pour faire briller les yeux des dirigeants marocains, Paris a toujours fermé les yeux sur les violences commises au Sahara occidental, y compris celles subies par les Français. L'intérêt prime. «Pourquoi êtes-vous restés muets face aux attaques de Pegasus, puis face aux attaques du Maroc contre nos médias?», interpelle le député français, qui qualifie ces plaintes de «procédures-bâillons contre la liberté de la presse». Mais qu'attendre du ministre de la Justice, Éric Dupond-Moretti, connu pour être l'avocat-conseil du roi Mohammed VI et pour avoir défendu, avec ferveur, les intérêts du monarque, lors de son divorce? Qu'importe, finalement, les plaintes déposées, les arrangements sont toujours possibles.
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