par Rosa Moussaoui, L'Humanité, 22/6/2017
L’incarcération de dizaines de militants du Hirak, le mouvement populaire
qui secoue depuis huit mois cette région frondeuse, ne décourage pas les
protestataires. La stratégie de répression et d’isolement du Palais est un
échec.
Dans la ville d’Al Hoceïma quadrillée par la police, toute
tentative de rassemblement est désormais violemment dispersée et ses
instigateurs embarqués. Lundi, c’est une adolescente de 14 ans, Houda
Jelloul, qui a été arrêtée et conduite au commissariat central avant d’être
relâchée. Elle entendait manifester pour la libération des porte-voix du Hirak,
le mouvement social qui embrase la région du Rif depuis huit mois. Parmi ces
détenus politiques, son père, Mohamed Jelloul, un syndicaliste incarcéré à la
prison d’Oukacha, à Casablanca. Comme ses 47 compagnons, il est accusé de
« complot » et d’« atteinte à la sûreté de l’État ». Pour tenter de décapiter
le mouvement de protestation, le pouvoir a fait procéder ces dernières semaines
à des centaines d’arrestations.
Sans réussir à éteindre la révolte allumée le 19 octobre 2016 par la mort de Mouhcine Fikri, ce jeune poissonnier broyé par une benne à ordures alors qu’il tentait de récupérer sa marchandise confisquée par les autorités.
Sans réussir à éteindre la révolte allumée le 19 octobre 2016 par la mort de Mouhcine Fikri, ce jeune poissonnier broyé par une benne à ordures alors qu’il tentait de récupérer sa marchandise confisquée par les autorités.
La place Mohammed-VI, qu’ils ont rebaptisée place des Martyrs, leur
est interdite. Ils ont été chassés des faubourgs par la police. Alors les
jeunes d’Al Hoceïma ont trouvé refuge dans les collines, où leurs lanternes
s’allument, à la tombée du jour, comme des lucioles. De là-haut, ils chantent,
scandent des slogans qui se répondent, comme un écho, d’une butte à l’autre, invectivent,
dans l’obscurité, les policiers restés en bas. En jetant en prison les
principales figures de la contestation, le pouvoir pensait en finir avec ce
mouvement populaire qui défie le Palais. Peine perdue. L’acharnement répressif
décuple la colère des Rifains. Au risque de donner aux événements un tour
violent. Ces derniers jours, à Al Hoceïma, à Imzouren, lors des affrontements
avec la police, de jeunes protestataires répondaient aux tirs de grenades
lacrymogènes par ce cri : « Silmya, c’est fini ! » (« Le pacifisme, c’est
fini ! »)
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