L’actualité atteste puissamment que la révolution, les soulèvements,
depuis le Printemps des peuples (et même avant), sont inscrits dans la
durée. Aucun autoritarisme, aucune dictature ne peuvent les endiguer.
C’est une vérité historique. Et nous ne nous mélangeons pas les pinceaux
en évoquant les rouages géopolitiques (un facteur certainement utile à
l’analyse), pour externaliser les causes des aspirations du peuple. Le
peuple marocain souffre le martyre, durant plusieurs décennies, sous un État-voyou qui n’a de programme que les scandaleux enrichissements
personnels, qu’il a lié à la sacralité religieuse et au culte de la
personnalité du roi. Cela aboutit aisément à une société sans repères,
ni projets ; une société primitive dirigée par une élite prédatrice qui
insulte ouvertement l’intérêt collectif. A tel point que la majorité des
Marocains, depuis la naissance, sur leur propre territoire, ne se
sentent pas appartenir à ce pays…
On a beau manipuler, se jouer
de l’imaginaire des citoyens en le formatant avec malice, la ruse ne
pourra tenir sempiternellement. A l’instar de la fabrication du mythe de
la lune où l’on voyait le portrait de Mohammed V, pour sensibiliser ‘la
populace’ à la lutte pour l’Indépendance (fausse indépendance au
demeurant !), on observe aujourd’hui la même turpitude des intellos de
service et des laudateurs ingénieux qui crétinisent les citoyens autour
du culte ravageur de la personnalité, en plein vingt-et-unième siècle,
fondant la légitimité du pouvoir monarchique sur des siècles d’exercice,
au nom du vocable tout aussi dévastateur de « l’immobile ; durable ;
stable ; fixe… ثوابت»!
On ne peut contredire les sciences sociales,
l’Histoire et l’empirique condition humaine. Dans son œuvre « Le Fixe et
le Mouvant », Adonis l’a si bien démontré : le ‘fixe’ condamne à la
mort, et le ‘mouvant’ célèbre la vie, l’adaptation et l’enchantement.
Miné de l’intérieur, l’État-voyou ne peut ni innover ni s’adapter. Il
recèle en son sein «le problème».
Maintenant, si l’on convoque
l’analyse géopolitique (solidarité intéressée, soutien impérialiste,
colonialiste ou néocolonialiste…), ou le renvoi à l’historique, on se
trouvera devant des paramètres nouveaux n’obéissant aucunement à un
monde « fixe » mais à un monde « mouvant » sur le plan des idées. La
situation d’hier n’est plus celle d’aujourd’hui. La mentalité d’hier
n’est plus celle d’aujourd’hui. Le monde a bien changé. Les peuples ont
pu faire tomber l’Apartheid, ont su se solidariser avec le peuple
chilien... Les peuples pèsent sur leurs gouvernants et l’opinion
internationale a un rôle prépondérant dans la marche de la civilisation.
Même Michèle Alliot-Marie, anciennement ministre (Défense ; Intérieur…)
qui projetait d’expédier son « savoir faire » à Ben Ali pour mater le
peuple tunisien dans le sang, n’a pu débarquer sa quincaillerie
impérialiste. Qui ne voit que l’État-voyou marocain constitue un danger
même pour l’Europe ? On a vu des milliers de marocains se faire passer
pour réfugiés syriens, et tant de ‘harraga’ (les barques de la mort) en
Méditerranée, des islamistes en clandestinité avec leur cortège de plans
terroristes contre l’Europe… Même avec son « Statut Avancé » conféré
par les instances européennes, l’État-voyou marocain ne peut assurer sa
pérennité. Sa réputation au sein des instances de l’Europe est telle
qu’il est mentionné comme un pays instable et son comportement arrogant
dans ses négociations peuplées de chantages et de menaces (éducation
makhzanienne !), reste proverbial… Par ailleurs, ni l’Espagne ni la
France ne seront prêtes à soutenir à tout prix un régime déliquescent,
au bord du gouffre et dont l’enrichissement et la cupidité du roi
exaspère l’opinion.
Deux options sont offertes à la réflexion. Ou
l’Europe ira dans le sens de soutenir la société civile, véritable
force de proposition et miser sur la stabilité. Ou, fermant les yeux sur
les exactions et la tyrannie de l’État-voyou, elle se retrouvera dans
une situation insoluble, menaçant la civilisation même… et là, personne
n’en sortira indemne !
4/07/2017
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