Par Marie-Jo Fressard, solidmar.blogspot.com
Vivre une épidémie en prion est une très difficile épreuve, vivre le coronavirus dans une prison marocaine est une véritable calamité.
Devant
l’incroyable vitesse de propagation de la pandémie et les dizaines, voire centaine de milliers de morts dans le monde depuis le début de l'année, des
appels urgents ont été lancés par
d'importants organismes comme celui de Michelle Bachelet, la Haut-Commissaire aux droits de l'Homme
de l'ONU
qui
demande la libération urgente de certaines catégories de détenus pour
éviter que la pandémie de Covid-19 ne fasse des "ravages"
dans les prisons et
au de- là ;
par la Croix Rouge, et par de nombreuses ONG nationales et
internationales.
Des
États ont déjà décidé de libérer des détenus , en
particulier des
prisonniers d'opinion et des prisonniers
politiques, considérés comme moins dangereux pour la société,
alors qu’en engorgeant les lieux de détention, ils participent à
la propagation du virus, mettant en péril la santé et la vie des
prisonniers de droit commun, et celle du personnel
pénitentiaire qui pourraient à leur tour, propager le virus en ou hors de
prison.
Luk
Vervaet, ancien enseignant dans les prisons en Belgique, a lancé dès
le 13 mars un appel urgent : « Les
mesures prises contre le coronavirus au niveau de toute la société
nous rapprochent tous du vécu des personnes détenues dans les lieux
fermés : les prisons, les centres de détention pour réfugiés ou
les hôpitaux psychiatriques. Cette crise nous apprend en même temps
que nous avons créé des formes et des conditions de détention pour
les exclus de notre société, qui sont déjà inacceptables en temps
normal, mais qui, lors d’une crise comme on la connaît
aujourd’hui, ne permettent pas d’assurer la santé des personnes
détenues. Ce qui menace à son tour la santé publique au sein de la
société dans son ensemble.
Nous
savons tous que des milliers de personnes détenues sont aujourd’hui
obligées de vivre les unes sur les autres et qu’ils n’ont qu’un
accès limité aux soins et aux produits d’hygiène. Aujourd’hui,
pour faire face à la crise corona, les autorités prennent des
mesures supplémentaires d’isolement, dont l’interdiction des
visites des familles ou l’annulation des cours et d’autres
activités, déjà extrêmement rares en temps normal. La réaction
de désespoir et de révolte contre cet isolement renforcé ne s’est
pas fait attendre. »
Les prisons du Maroc
Le régime marocain bat des records en nombre de prisonniers
par rapport à ses voisins. Par exemple en
Espagne, où avec une population de 46,8 millions d'habitants, soit 10
millions de plus qu'au Maroc, il y a 27 250 prisonniers de moins
qu'au Maroc.
Les
conditions de vie des détenus y sont déplorables. Des
ONG marocaines et d'autres pays ont demandé depuis des années la libération de prisonniers politiques et d'opinions, qui sont plus d'un millier dans des prisons surpeuplées du Maroc.
Première ONG à réagir, l’ASDHOM titre son article : « Libérez tous les prisonniers politiques et d’opinion au Maroc», dont font partie ceux du Hirak du Rif (et de Jerada). L'AMDH considère que «le moment difficile que traverse aujourd’hui l’humanité toute entière et le Maroc en particulier, peut être celui d'une détente démocratique qui met fin aux violations des droits humains et ouvre la voie vers un État démocratique et respectueux des libertés, et que les autorités marocaines fassent preuve d'intelligence et de sérieux dans le traitement de ce dossier.» Nous l'espérons tous !
Première ONG à réagir, l’ASDHOM titre son article : « Libérez tous les prisonniers politiques et d’opinion au Maroc», dont font partie ceux du Hirak du Rif (et de Jerada). L'AMDH considère que «le moment difficile que traverse aujourd’hui l’humanité toute entière et le Maroc en particulier, peut être celui d'une détente démocratique qui met fin aux violations des droits humains et ouvre la voie vers un État démocratique et respectueux des libertés, et que les autorités marocaines fassent preuve d'intelligence et de sérieux dans le traitement de ce dossier.» Nous l'espérons tous !
Plus récemment, selon le journaliste d'investigation Hicham Mansouri, dans l’espoir de lancer une nouvelle trajectoire pour «la réconciliation nationale » et d’alléger la surpopulation des prisons, une pétition lancée par des militants des droits humains a appelé à « libérer
tous les prisonniers politiques et les prisonniers d’opinion, ainsi que
les prisonniers des mouvements sociaux, y compris ceux du mouvement du
Rif ». La libération des
mères, des personnes âgées et des malades est également demandée. Seul progrès notable jusque-là est la suspension de la tradition du baisemain à Sa
Majesté, un protocole jugé par nombre d’activistes « révolu » et « humiliant »... et risqué pour sa majesté. Cette crise a également
montré la fragilité des services publics et
l’erreur qu’a été la marginalisation de secteurs vitaux jugés non
rentables, comme la santé ou l’enseignement. « Le
régime a continué à miser sur la sécurité, à tel point que c’est
aujourd’hui le ministère de l’intérieur qui contrôle les autres
ministères. », a commenté son ami Maâti Monjib.(...) Le haut-commissaire à la planification Ahmed Halimi estime que la crise a
prouvé l’échec cuisant du néolibéralisme sauvage, qui a tenté de faire
croire que le marché et le secteur privé pouvaient tout assurer. L’année 2020 sera la pire pour l’économie marocaine depuis 1999 » « Le retour à l’État social s’impose.
Que
fait le Maroc pour lutter contre l’engorgement de ses prisons
surpeuplées ?
Alors
que l'Egypte, l'Algérie, la Birmanie, les USA, le
Nicaragua, la Colombie, le Burundi, la RDC, et d'autres pays
désengorgent
leurs prisons, le Maroc a pris comme mesure pour aérer les
geôles ...d'alterner
les
ateliers par demi-journées, pour
les prisons qui en sont pourvues.
Les
conditions d'emprisonnement et
de travail des médecins et du personnel y sont
déplorables. Ayour
Anoual,
médecin marocain, publie sur Internet son cri de désespoir (extraits) :
« Ce
matin je me prépare à assurer une garde, avec mon avant dernier
masque...A
ce jour , le
27 mars, 11
médecins sont
atteints
au Maroc, sans compter ceux qui ne sont pas testés ! Contrairement
aux policiers, nous n’avons pas de masques mis à notre
disposition. Nous sommes peut- être infectés et l’examen clinique
nous oblige à être tout près
du malade. Pourquoi n’avons nous pas droit à des tests lorsque
nous avons des symptômes ??? Certains médecins et paramédicaux ont
demandé des hôtels, pas pour le luxe mais pour que le personnel
soignant ne contamine pas leurs familles. Plusieurs médecins
présentant des symptômes inquiétants se sont vus refuser le test
alors qu’un ministre a été testé et mis sous tous les
traitements sans signe de gravité!!! Pas le médecin qui s’est
occupé de lui !
Dans l’intérêt de tous, demandons à avoir de quoi nous protéger et à être dépistés et isolés si nous sommes positifs !
Dans l’intérêt de tous, demandons à avoir de quoi nous protéger et à être dépistés et isolés si nous sommes positifs !
Trop
c’est trop!!! »
***
Le
31 mars, Reda Mouhsine journaliste de www.h24info pose enfin la
question : Coronavirus:
qu’attend le Maroc pour désengorger les prisons?
On sait que la situation carcérale dans le royaume est pourtant alarmante. Le taux
d’occupation des prisons dépasse les 300% et le pays ne compte que
82 établissements pénitentiaires pour plus de 80.000 détenus. Les
appels à libérer certaines catégories de prisonniers se sont
pourtant multipliés ces derniers jours, à l’instar de celui
publié par l’Observatoire
marocain des prisons (OMP)
qui
estime qu’il
est urgent
de libérer plusieurs détenus, compte tenu de la «vulnérabilité
des populations carcérales de par leur confinement et leur
promiscuité, aggravée par la carence criante d’infrastructures et
de personnels soignants dans les établissements pénitentiaires».
L’OMP
recommande notamment de libérer immédiatement les détenus devant
sortir en mars 2020, de libérer les mineurs en attente de procès,
de libérer les personnes âgées de plus de 65 ans ou encore de
libérer
les prisonniers d’opinion et les militants pacifiques.
Cet appel a été partagé par plusieurs acteurs de la société
civile marocaine.
L’ancienne
présidente de l’AMDH, Khadija Riyadi ne cache pas son inquiétude.
«Les conditions d’incarcération sont très mauvaises. Nos prisons
sont surpeuplées. Nous soutenons à 100% les recommandations émises
par l’OMP et nous estimons qu’il faut absolument donner la
priorité aux prisonniers politiques et aux prisonniers d’opinion».
Ce
sont des milliers de détenus que le Maroc devrait libérer, d’autant
que «la moitié des prisonniers sont des détenus en attente de
jugement.»
Le Maroc va s'inspirer des autres pays pour imposer à la société certaines règles pour faire respecter le confinement. Il va même jusqu'à envoyer dans les rues les forces de l'ordre et des blindés «pour rassurer et dissuader les désobéissances». Mais il n'est toujours pas question de désengorger les prisons.
Selon Maâti Monjib « Sur le plan théologique, pour le Marocain, Dieu ne saurait se mettre en colère contre un peuple croyant, mais uniquement contre les tyrans qui ne respectent pas la religion, la justice et la volonté divine. Et dans un pays où la majorité écrasante croit profondément que la volonté divine est au-dessus de celle du roi et des autorités, « cela ne peut qu’affaiblir la légitimité religieuse du régime ». Car « selon la mentalité dominante, si l’autorité est bonne et qu’elle suit le chemin de Dieu, de telles choses qui menaceraient l’existence des musulmans ne sauraient advenir ».
Devant la précarité des infrastructures et des services sanitaires, se tourner vers Dieu reste pour beaucoup le seul refuge. À Tanger, à Tétouan (nord du pays) et à Fès, des habitants ont ainsi scandé : « Dieu est grand, et Il est le seul capable de nous aider ! »
Hicham Mansouri Orient xxi : «Le roi, le coronavirus et "la volonté divine»
Le Maroc va s'inspirer des autres pays pour imposer à la société certaines règles pour faire respecter le confinement. Il va même jusqu'à envoyer dans les rues les forces de l'ordre et des blindés «pour rassurer et dissuader les désobéissances». Mais il n'est toujours pas question de désengorger les prisons.
Selon Maâti Monjib « Sur le plan théologique, pour le Marocain, Dieu ne saurait se mettre en colère contre un peuple croyant, mais uniquement contre les tyrans qui ne respectent pas la religion, la justice et la volonté divine. Et dans un pays où la majorité écrasante croit profondément que la volonté divine est au-dessus de celle du roi et des autorités, « cela ne peut qu’affaiblir la légitimité religieuse du régime ». Car « selon la mentalité dominante, si l’autorité est bonne et qu’elle suit le chemin de Dieu, de telles choses qui menaceraient l’existence des musulmans ne sauraient advenir ».
Devant la précarité des infrastructures et des services sanitaires, se tourner vers Dieu reste pour beaucoup le seul refuge. À Tanger, à Tétouan (nord du pays) et à Fès, des habitants ont ainsi scandé : « Dieu est grand, et Il est le seul capable de nous aider ! »
Hicham Mansouri Orient xxi : «Le roi, le coronavirus et "la volonté divine»
******
Être
Sahraoui en prison marocaine, à l’est ou à l’ouest du mur
Depuis
1975, année
de l’annexion du Sahara Occidental
par le Maroc,
les familles sahraouies sont séparées. Une
partie de la population a fui les chars et les bombardements au
napalm pour se réfugier en Algérie, dans la région proche de Tindouf. Les autres sont restés dans leur pays. Après
cette occupation illégale, le Maroc, aidé par la France et Israël, a érigé un
mur de 2700 km destiné à protéger ses précieux bien pillés sur terre et en mer sahraouies.
À
l’ouest du
mur,
dans “les
territoires occupés ”
par le Maroc, les emprisonnements sont presque journaliers, basés
sur des
“ aveux”
arrachés sous la torture .
À
l’est
du
mur,
dans
les “ territoires libérés” par le Polisario, et en Algérie dans la région
désertique de Tindouf, les
réfugiés
se sont installés “provisoirement”,
pour déjà 45 ans de vie précaire, mais de jouir de la liberté.
Toujours
séparés par le mur, les
Sahraouis vont
vivre le coronavirus de manière très
différente.
Le
22 mars 2020 Brahim
Ghali,
le
président de la République du
Sahara Occidental a
attiré l'attention du secrétaire général des Nations Unies,
Antonio Guterres, sur la situation dangereuse dans laquelle se
trouvent les prisonniers civils sahraouis en prisons
marocaines, appelant l'ONU à intervenir d'urgence pour
les libérer immédiatement afin
d'éviter une tragédie humanitaire dans les prisons, compte
tenu de
la propagation du nouveau coronavirus.
L'absence
de conditions sanitaires dans
ces
prisons marocaines
surpeuplées
avait
déjà
entraîné de nombreux désagrément pour la santé de ces détenus sahraouis, ce qui laisse présager « des
conséquences désastreuses imminentes » avec les risques d'infections par le coronavirus.
Ces
prisonniers civils sahraouis sont emprisonnés pour avoir réclamé leur droit à
l'autodétermination et à l'indépendance, un droit garanti par la Charte et
les résolutions des Nations Unies, mais
non accepté par l’occupant :
procès militaires, répression violente,
tortures, pillages des biens et expulsions loin de leurs familles. « Au fur et à
mesure que l'épidémie de Corona se propage, les
maintenir dans ces conditions est carrément du terrorisme et une action irresponsable ; la
communauté internationale ne peut rester indifférente à un tel
mépris de la vie humaine ».
Dans
son rapport annuel de 2019 sur les droits de l'Homme, l’ONG
américaine HRW a rappelé
« la détention continue de 23 Sahraouis par le Maroc après
avoir été condamnés à la suite de procès inéquitables en 2013 et
2017 sur la base d'aveux forcés, sans enquête sérieuse sur leur
torture physique dans les postes de police et de la gendarmerie,
après les affrontements qui ont éclaté suite au démantèlement
violent et sanglant par les autorités marocaines du camp de
protestation Gdeim Izik près d'El-Ayoun occupée, en 2010 ».
***
Ensemble,
nous résisterons
Le
31 mars, des Sahraouis lancent une campagne de solidarité avec
l'Espagne, l'Italie et l'Algérie : « Ensemble, nous
résisterons » en solidarité avec ses voisins espagnol, italien et
algérien, touchés par la pandémie de coronavirus, pour remercier
du soutien reçu durant les quatre dernières décennies
d'occupation.
-
« Nous parlons d'expérience, nous avons pratiquement vécu dans une sorte de quarantaine depuis 45 ans et ça continue à ce jour », déclare à Efe son co-fondateur, Mohamedsalem Werad, du camp de réfugiés de Smara, dans la région désertique algérienne de Tindouf.Il rappelle comment les peuples d'Espagne et d'Italie ont apporté leur aide depuis l'occupation marocaine en 1975, en accueillant des centaines d'enfants chaque été et en envoyant des caravanes médicales et de l'aide humanitaire. En outre, ils n'oublient pas le rôle de l'Algérie, qui a accueilli la moitié de la population sahraouie, à laquelle elle a offert une protection internationale.Jusqu'à présent, les autorités sahraouies affirment qu'il n'y a pas eu de cas positifs ni même de soupçons de contagion dans les camps, bien que 21 personnes soient en quarantaine préventive après être rentrées d'autres pays.Préoccupé par les effets de l'épidémie, le Front Polisario a ordonné le bouclage du périmètre avec l'Algérie le 19 mars, la fermeture de toutes les communications terrestres et aériennes, la fermeture des espaces publics, la suspension de toutes les manifestations sociales, culturelles et sportives ; il a limité les déplacements entre les camps et a renforcé les mesures de surveillance sanitaire et de prévention.Le conflit dans l'ancienne colonie espagnole du Sahara occidental a commencé à l'automne 1975 lorsque les troupes marocaines ont profité de la faiblesse de la fin de la dictature franquiste pour prendre le contrôle du territoire. L'occupation a déclenché une guerre avec le Maroc impliquant la Mauritanie, qui a été suspendue en 1991, lorsqu'un cessez-le-feu a été déclaré et qu'un référendum sur l'autodétermination supervisé par l'ONU a été convenu.Depuis lors, Rabat et la République arabe sahraouie démocratique (RASD), reconnue par l'Union africaine, se battent pour la mise en œuvre du référendum, s’affrontant sur la questions des listes électorales.
******Dans l'intérêt de tous, militants des droits de l'Homme ou non, pour tenter d'étouffer le virus, les prisons devraient être vidées au maximum.----
Les militants du Hirak du Rif purgent des peines de de 2 à 20 ans pour avoir exprimé leur besoin urgent d'hôpital, d'université, ou tout simplement d'emploi, ce qui bien sûr, ne représente aucun danger pour leurs compatriotes, qui ont les mêmes revendications depuis des années. Et il faudrait libérer en priorité les nombreux enfants prisonniers rifains, parfois âgés à peine de plus de 10 ans, pour avoir suivi les manifestations des ainés, internés pendant plusieurs jours, plusieurs semaines, plusieurs mois ou même plusieurs années pour des adolescents, humiliés, torturés.
Il faut aussi libérer d'urgence les prisonniers politiques sahraouis, en prisons marocaines dans des conditions effroyables pour avoir demandé que soit organisé le référendum d'autodétermination que le Maroc leur refuse. Des peines de prison allant de deux ans à la perpétuité.
De nombreux militants marocains, eux aussi arrêtés et torturés pour avouer des crimes et être désignés comme "droits communs" : des jeunes du Mouvement du 20 février 2011, réclamant la démocratie et la justice sociale, qui côtoient tant de compatriotes qui, eux aussi réclament la justice sociale, la grande absente du "plus beau pays du monde " !
Dernière minute : les médias marocains annoncent une grâce royale pour 5654 prisonniers(sur plus de 80 000). Aucun prisonnier politique n'a été libéré.
https://www.blogger.com/blogger.g?blogID= 1907825507204402500#editor/ target=post;postID= 8846962933786974983; onPublishedMenu=allposts; onClosedMenu=allposts;postNum= 0;src=postname
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire