Maroc : pour qui sonne le glas ? – Le blog de Salah Elayoubi
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Mohammed VI fait aujourd’hui les frais de la vanité dont il a fait preuve depuis son accession au trône. Tous les traitements apportés par le Palais et son cabinet de l’ombre, aux affaires du pays se sont révélés calamiteux. Ainsi se paie la confiscation des pouvoirs et leur accaparement par une poignée d’individus avec l’assistance et le secours de services de renseignements étrangers hostiles aux intérêts du peuple. Tous les ingrédients qui font les grandes mafias, entre despotisme, confiscation des pouvoirs, enrichissement illégal, captation des richesses, blanchissement de biens mal acquis, enlèvements, séquestrations, bastonnades, assassinats se trouvent ainsi réunis. Le traitement qui a été fait de la pandémie du Coronavirus constitue le plus grand révélateur de cette nature profonde du pouvoir marocain.
Aux premières heures du déclenchement de la pandémie, le palais s’était accaparé l’initiative, au détriment d’un gouvernement visiblement ignorant des effets mortifères du virus. On se souvient des interventions du Chef du gouvernement, pourtant médecin, et dont les déclarations faisaient état de l’inoffensivité du virus, le comparant à une simple grippe ou encore de l’inefficacité des masques. Alors que El Othmani, flanqué de « son » ministre de la santé publique se fendait de déclarations qui allaient secouer de rires la toile et lui attirer une pluie de quolibets des internautes, le roi, assisté d’un cabinet restreint, faisait donner les blindés, la force publique et ses supplétifs. Ainsi, en même temps qu’on frappait les esprits et qu’on battait parfois, face caméra, les récalcitrants au confinement, le régime faisait son battage publicitaire histoire de vendre au reste du monde, le modèle marocain du traitement de la pandémie: tout sécuritaire, en oubliant le sanitaire. Les chaînes de télévision passaient soigneusement au crible leurs propres images, n’en diffusant que les plus aseptisées d’entre elles, celles de rues propres, vidées de leurs citoyens, d’escouades disciplinées des forces de l’ordre et celles de transports de troupes flambant neufs d’où les soldats avaient mystérieusement disparu. Les producteurs avaient, en effet, veillé à escamoter les images de soldats en battle-dress, armés de pied en cap qui auraient pu réveiller de douloureux souvenirs dans l’inconscient collectif des marocains et plus particulièrement des casablancais qui souffrirent en 1965 du quadrillage militaire de leurs quartiers et les tueries qui s’y déroulèrent.
Francis
Bacon philosophe disait du mensonge: « Calomniez, calomniez, il en
restera toujours quelque chose ». D’avoir si bien travesti la réalité
marocaine, il semble en être resté ce quelque chose que des médias
internationaux instrumentés ou pas et certains politiciens étrangers,
s’emparèrent pour tresser des lauriers au Maroc.
Mais tout comme le diable, la vérité est ailleurs. Elle ne se trouve ni dans les images du cabinet resserré autour du roi, distillées par les médias aux ordres, ni dans les déclarations saugrenues du Chef du gouvernement, ni dans les satisfecit assumés par les chaines nationales d’information ni dans les promesses, à grand renfort de publicité mensongère, des aides spéciales Covid et encore moins dans tout ce qui a été entrepris aux premières heures.
La réalité se cache dans les détails des lois de finances successives confectionnées par des fonctionnaires dociles puis votées par des parlementaires domestiquées. Un processus qui perpétue d’année en année, la prédominance de l’administration du Palais et le bien-être du roi, de sa famille et sa cour, sur toute autre considération, si bien que tout se fait au détriment de secteurs clés comme l’éducation et la santé et, in fine, du bien-être du peuple marocain.
Trois chiffres illustrent ce sinistre tableau : en 2019, le budget de la santé publique était de un milliard six cent millions (1.600.000.000) d’Euros. Celui du ministère de l'intérieur de deux milliards six cent millions (2.600.000.000) d'Euros, pour une population de quarante millions (40.000.000) d'habitants. Celui du Palais royal, dépassait les deux cent trente millions (230.000.000), pour une poignée d'individus.
La vérité se cache ailleurs disais-je. Elle n’est ni dans le décorum architecturé par les médias officiels, ni sous les lambris des ministères, ni dans la rhétorique éculée du plus beau pays du monde. Elle est dans ces innombrables vidéos dans lesquels s’expriment médecins, soignants, aides-soignants, rescapés de la tragédie ou simples citoyens qui sentirent le vent du boulet les frôler. Tous racontent la même histoire d’hôpital dont les urgences prévues pour une dizaine de lits accueillent une quarantaine de patients, abandonnés à leur sort, dans la crasse, sans prise en charge, sans soins, sans nourriture, dormant à même le sol sur une couche improvisée. D’autres que l’administration a refusé d’accueillir, préfèrent camper comme dans les jardins de l’hôpital Ibn Zohr, dans l’espoir fou qu’on viendrait, un jour, les y chercher pour leur sauver la vie. Un hôpital surnommé par dérision « Mamounia », du nom de ce palace de Marrakech, dans lequel le régime a pris le pli de loger ses laudateurs cosmopolites, en récompense de leurs bons et loyaux services envers son image à l’étranger.
Il y a quelques mois, Mohammed VI reconnaissait clairement l’échec du modèle de développement dont il est le porteur et le principal responsable. Pourtant les militants du Hirak qui en firent état avant lui furent crucifiés. Le roi vient d’en faire de même, dans son dernier discours, à propos de son traitement de la pandémie. L’homme ne peut s’en prendre qu’à lui-même. Mais loin de battre sa coulpe, comme de coutume, et comme il sied aux locataires du Méchouar, il s’est montré menaçant, se défaussant de toute responsabilité et semblant chercher des coupables ailleurs que dans son giron.
On dit des régimes indignes qu’ils génèrent une courtisanerie opportuniste et sans conscience. Donnant, donnant. Mais lorsqu’ils s’en prennent à leurs contradicteurs, journalistes, activistes, lanceurs d’alertes ou simples citoyens, ils préparent la ruine de la société et leur prochaine disparition. Le Maroc n’a jamais autant semblé aux portes de cet abîme-là.
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