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jeudi 26 mai 2022

Maroc: Soulaimane Raissouni est en prison depuis 2 ans


Maroc:  2 ans ...

Tawfiq Bouachrine,            Soulaïmane Raïssouni,             Omar Radi


C’est un bien triste anniversaire que l’on a fêté hier. Cela fait maintenant deux années que Soulaimane Raissouni est en prison. Une opportunité pour revenir sur les circonstances qui m’ont amené à le connaitre, le respecter et l’admirer.

“Je souhaiterais réaliser un entretien sur l’histoire du Journal Hebdomadaire” C’est par cette requête que j’ai connu Soulaimane Raissouni. Il était encore à Al Massae. J’ai commencé par refuser. Je ne le connaissais pas vraiment, mais son journal, oui. J’avais du mal avec cette presse qui usait de pugnacité avec tout le monde sauf avec ceux qui la méritaient le plus -le complexe de rentiers et de sécuritaires qui tient le pays. Je doutais de sa promesse de publier mes réponses fidèlement. Pour me convaincre de son intérêt, il offrait de se déplacer en Tunisie où je me trouvais pour une conférence.

Comme souvent dans ces circonstances, je recours à mon père. Son nez pour le makhzénisé ou, plus utile encore, le makzanizable, lui faisait rarement défaut. Je n’ai pas pu finir ma question qu’il me disait d’y aller les yeux fermés. Selon Si Khalid, Soulaimane était un “vrai”.

Mon admiration pour sa probité et son courage n’ont cessé de grandir depuis. J’en suis venu à le considérer comme le meilleur éditorialiste marocain de ces dernières années. Son travail de militant des droits de l’homme et son expérience de journaliste lui ont forgé la capacité d’analyse et l’intelligence nécessaire pour écrire comme les marocains ont besoin qu’on leur écrive. Avec une plume courageuse et respectueuse de leur intelligence. C’est, je crois, la raison de ses malheurs.

Contre vents et marées, il a cru qu’une presse indépendante était possible au Maroc. Quand on lance un nouveau média, comme il l’a fait à un moment, et qu’on a les engagements éditoriaux sans compromis comme les siens, c’est qu’on a la foi. Il a été jusqu’au bout de ses convictions. Certains diraient son engagement déraisonnable. Critiquer les puissants lorsque ceux-ci ne rechignent devant rien ou presque pour vous faire taire, n’est ce pas là le signe de l’inconscience ? Peut être. Mais rien n’a jamais changé sans cette inconscience là.

Soulaimane est-il innocent des crimes dont l’accuse l’Etat? J’en suis persuadé. Mais ma conviction n’a aucune importance. Ce qui en a, c’est le comportement du complexe Judiciaro-Policier à son égard. En l’occurrence, La vindicte de l’Etat n’est pas seulement évidente, elle est ostentatoire.

Les tenants de notre ordre policier et judiciaire veulent que vous le sachiez : Les principes élémentaires du droit ne vous protégent pas lorsque vous les fâchez. L’injustice décomplexée de L’État n’est pas seulement un moyen pour condamner les critiques du régime. Elle en est aussi une fin.

Le traitement inique des affaires Soulaimane Raissouni, Omar Radi, Nacer Zefzafi est un message en soi.

S’élever contre le sort fait à ces éclaireurs de la liberté signifie notre rejet de ce message. Notre refus que la Loi soit un outil de répression aux bénéfices des puissants plutôt qu’un instrument de Justice équitable.

Aboubakr Jamaï

 

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